Contenu du sommaire : Le travail et l'emploi au cœur des transformations sociales
Revue | Entreprendre & Innover |
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Numéro | no 37, 2018/2 |
Titre du numéro | Le travail et l'emploi au cœur des transformations sociales |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Éditorial
- Métamorphoses de l'emploi et innovation sociale - Nathalie Bourotte, Isabelle Eynaud-Chevalier, Jacques-Henri Coste, Dominique Frugier, Dominique-Anne Michel p. 5-7
Dossier
- Les transformations du travail dans l'économie numérique - Pierre-Yves Gomez p. 8-17 L'économie numérique suscite les spéculations les plus diverses. Parmi celles-ci, on prédit la fin du travail et le dépassement de l'être humain par la robotisation et l'intelligence artificielle ; on annonce de même la fin du salariat, l'ubérisation de l'économie généralisant le travail indépendant pour tous. À l'opposé de ces fantasmes, cet article décrit les métamorphoses réelles du travail tel qu'on les perçoit déjà dans une économie numérisée. Il montre comment la numérisation transforme la manière de travailler à la fois vers davantage d'autonomie mais aussi de contraintes et de contrôles technologiques. Il fait le point des connaissances sur l'évolution de l'emploi et des revenus tirés de nouvelles formes de travail. Il montre en particulier que les principales recompositions sociales tiendront à l'affaiblissement des revenus salariaux de la classe moyenne. Il invite à réfléchir sur les conséquences sociétales de ces transformations de notre façon de travailler.
- Le statut de l'intérimaire, une « innovation sociale » co-construite - Nathalie Bourotte, Isabelle Eynaud-Chevalier p. 18-30 De nouvelles formes d'emploi apparaissent depuis les années 2000, sous l'impulsion créative des technologies, qui poussent individus et entreprises à développer des façons inédites d'exercer une activité professionnelle. Ces modalités de mise au travail posent de nombreux défis, brouillent les repères et obligent à réinventer des équilibres justes entre autonomie et sécurité, entre efficacité économique et protection sociale, entre individualisation et maintien d'un cadre collectif. Dans ce contexte, il peut être utile de revisiter l'histoire de l'intérim en France, pour évaluer le caractère innovant de cette co-construction, tant sur le plan économique que juridique et social au sens large, et comprendre à quels besoins et défis elle a su répondre. L'exemple français est particulièrement riche d'enseignement car il est considéré comme le plus abouti, particulièrement en matière de construction du statut social de l'intérimaire.
- Le Contrat à Durée Indéterminée Intérimaire, un OVNI du droit social ? - Nathalie Bourotte, Isabelle Eynaud-Chevalier p. 31-35 Le CDI intérimaire est un contrat à durée indéterminée conclu entre un intérimaire et une entreprise de travail temporaire. Il permet d'alterner des missions dans les entreprises utilisatrices et des périodes sans exécution de mission, durant lesquelles le salarié reste employé et rémunéré par l'entreprise de travail temporaire. Cette innovation rassure et sécurise l'entreprise cliente, qui peut utiliser le CDII pour tester un collaborateur ou pour temporiser dans une période d'incertitude sur la possibilité de recruter. Les premières études de satisfaction menées auprès des salariés recrutés en CDII sont positives. Ce dispositif peut être interprété comme un outil supplémentaire dans la stabilisation dans l'emploi d'actifs à faible niveau de qualification.
- À la lisière de deux mondes : l'entrepreneur « hybride » - Jacques-Henri Coste p. 36-54 La « zone grise » qui se développe à la frontière du travail salarié et de l'activité entrepreneuriale dans tous les pays développés est plutôt mal connue et peu appréhendée des deux côtés de l'Atlantique. C'est dans cette zone qu'émergent de nouvelles formes d'activités et de relations d'emploi, comme l'entrepreneuriat dit « hybride », formes qui remettent en cause le périmètre de ce qu'il était convenu d'appeler l'entrepreneuriat et qui en brouillent les frontières. L'article contextualise les pratiques qui ont produit des formes mixtes de travail indépendant/salarié, en lien avec la culture et les pratiques entrepreneuriales observées de part et d'autre de l'Atlantique. Ces nouvelles pratiques semblent converger vers un modèle transatlantique qui, avec des nuances, s'étend, mais dont le développement questionne la définition même de l'entrepreneuriat dans sa relation au travail.
- Les Coopératives d'Activités et d'Emploi, laboratoires de l'avenir du travail ? - Dominique-Anne Michel, Noreen O'Shea p. 55-67 Certains travailleurs « indépendants » se regroupent pour tester ensemble les voies et moyens d'une conciliation pérenne et soutenable entre deux aspirations réputées contradictoires : l'autonomie et la sécurité. Au sein des Coopératives d'Activités et d'Emploi (CAE), ils tentent de surmonter l'opposition entre droit à la protection sociale liée au salariat, au prix de la subordination, et droit à l'autonomie liée au statut d'indépendant, au prix de l'insécurité et de la dépendance économique. Ils partagent un projet dont la visée est de nature politique, qualifiée par certains auteurs de véritable « fabrique institutionnelle ». Cette expérience est-elle la préfiguration d'un au-delà du salariat1 ? Peut-elle contribuer à faire évoluer nos cadres législatifs et notre modèle social, fondés sur le paradigme salarial ? La réponse n'est pas écrite et se construit progressivement, à l'intérieur, à partir et autour des CAE.
- Les transformations du travail dans l'économie numérique - Pierre-Yves Gomez p. 8-17
Étude France Stratégie
- Quelle régulation pour les relations d'emploi « triangulaires » ? : À propos de : « Les tiers dans la relation de travail : entre fragmentation et sécurisation de l'emploi », note d'analyse de Jean-Yves Kerbouc'h et Emmanuelle Prouet, publiée le 13 mars 2018 par France Stratégie - Dominique-Anne Michel p. 68-75
Pratiques Pédagogiques Innovantes
- La Business Track de l'ESCP Europe. Un cursus sur-mesure pour les étudiants « professionnels » - Isabelle de Boysson p. 76-82 FocusLancé en septembre 2017, la Business Track est une nouvelle voie au sein du programme du master grande école (MIM) de ESCP Europe. Elle permet d'accompagner et soutenir ses étudiants dans leurs expériences et engagements professionnels. Il s'agit d'un dispositif optionnel proposé aux étudiants des principales associations professionnelles de l'école, notamment la Junior Entreprise (ESCP Europe conseil)1 et ESCP Challenge2, ainsi qu'aux étudiants entrepreneurs de ESCP Europe. Inspiré du programme de la filière apprentissage, la BT offre aux membres de ces associations qui le souhaitent la possibilité de suivre sur l'ensemble de la première année de Master un cursus sur-mesure, aménagé en fonction de leurs obligations associatives et professionnelles, assorti d'un accompagnement personnalisé par un coach référent tout au long de l'année. Devant le succès de la première année test, la formule a été reconduite en septembre 2018 et ouverte à d'autres associations professionnelles de l'école.
- La Business Track de l'ESCP Europe. Un cursus sur-mesure pour les étudiants « professionnels » - Isabelle de Boysson p. 76-82
Récit
- « Comme tout le monde », un film documentaire réalisé selon l'approche « effectuale » - Julien Billion p. 83-90 Le film documentaire « comme tout le monde » consacré aux jeunes sans domicile a été réalisé sans ressources financières et sans l'intervention d'un producteur. Son mode de production est révélateur d'une manière d'entreprendre qui peut être analysée dans le cadre de la théorie de l'effectuation posée par Saras Sarasvathy. Partir des ressources existantes, être clair sur ce que l'on peut risquer, engager d'autres parties prenantes, accepter les surprises... Ces principes ont permis à l'équipe de « comme tout le monde » de piloter leur projet de bout en bout, en commençant petit, sans en perdre le contrôle.Dans un premier temps, l'équipe a réalisé une web-série lancée par une campagne de crowdfunding et noué un partenariat avec un média. Dans un second temps, elle a cherché des financements publics et privés et reçu l'appui d'un grand groupe de communication. Dans un troisième temps, elle a créé une entreprise de production audiovisuelle sous format associatif, tissé un partenariat avec une association de solidarité, tourné un documentaire au format long et trouvé un distributeur.
- « Comme tout le monde », un film documentaire réalisé selon l'approche « effectuale » - Julien Billion p. 83-90
Entretien
- Conversation avec un jeune entrepreneur qui dort dans la rue - Julien Billion p. 91-95 Les jeunes sans domicile ont vécu, le plus souvent, une rupture familiale et une trajectoire scolaire déviante : école buissonnière, exclusion des établissements scolaires, redoublements, abandon en cours de formation, obtention d'un diplôme peu valorisé, absence de diplôme. Leurs trajectoires professionnelles s'inscrivent, dans une certaine mesure, dans le prolongement de la trajectoire scolaire. Les épisodes sans domicile fragilisent le lien avec l'école et le travail et suscitent d'autres ruptures. Les jeunes vivant dans la rue sont soit chômeurs, soit travailleurs pauvres. Ils alternent des emplois légaux et illégaux et exercent des « petits boulots ». Certains choisissent, comme Pascal, de s'engager dans une forme d'entrepreneuriat via le statut de micro-entrepreneur.Dans l'entretien qui suit, Pascal, 29 ans, un jeune sans domicile fixe, se confie sur son rapport à la famille, à l'école, au travail, à l'entrepreneuriat.
- Crédit aux PME : les objectifs commerciaux influencent les décisions des banquiers - François Geoffroy, Pascal Koeberlé p. 96-104 Cette recherche apporte un éclairage sur la façon dont sont octroyés les crédits aux entreprises, en rupture avec ce qu'avance la littérature financière. En effet, les banquiers ne fondent pas leurs décisions exclusivement sur des informations financières ou sur le risque du projet à financer. D'autres éléments participent à la prise de décision bancaire. Nous présentons les résultats d'une recherche qualitative qui montrent que les financements des PME sont influencés en partie par les objectifs commerciaux des banquiers.
- Compétences et pouvoir d'agir du dirigeant de micro-entreprise - Thomas Rouveure p. 105-118 Les structures d'accompagnement ont besoin d'outillage pour améliorer la qualité du pilotage des très petites entreprises en phase de démarrage. La Nomenclature d'Activités de l'Entrepreneur (NAE) proposée ici a été testée au cours d'une recherche-intervention menée auprès de seize micro-entreprises en phase de post-naissance. Elle permet d'approfondir les différentes composantes du métier de dirigeant et ses différentes activités et de diagnostiquer ses besoins en compétences.
- Conversation avec un jeune entrepreneur qui dort dans la rue - Julien Billion p. 91-95