Contenu du sommaire : Stratégies internationales des collectivités territoriales
Revue | Revue internationale des études du développement |
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Numéro | no 232, 2017/4 |
Titre du numéro | Stratégies internationales des collectivités territoriales |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Introduction - Bernard Husson, Sadio Soukouna, Yves Viltard p. 11-19
- Cadre juridique imprécis, niveau d'exigence faible : quelle place pour l'efficacité de l'action ? - Jacky Buffet, David-André Camous p. 21-41 La coopération décentralisée s'est historiquement construite autour d'un document juridique unique – la convention de coopération – au contenu flou et peu contraignant. Alors que la montée en puissance de l'action internationale des collectivités territoriales françaises aurait pu militer en faveur d'un document plus exigeant en termes d'engagement et de responsabilités, le législateur a préféré s'orienter vers une formule plus souple en le rendant facultatif, voire en le supprimant. Cet article interroge les motivations d'une telle évolution et envisage ses conséquences éventuelles en termes d'« asymétrie » entre « prestataires » et « bénéficiaires », de faibles incitations à la recherche d'efficacité des actions menées et finalement de responsabilité morale et juridique molle face aux bilans contrastés susceptibles d'en découler. De telles évolutions ne suggèrent-elles pas la construction d'un modèle « libertaire » de coopération ?Decentralized cooperation has historically been organized around a single legal document – the cooperation agreement – which has both been vague and not truly binding. While the increasing involvement of French local authorities in international action could have led to a more demanding document in terms of commitment and accountability, legislators have decided on a more flexible approach, making cooperation agreements optional, or doing away with them altogether. This article examines the reasons for such an evolution and considers its possible consequences in terms of an asymmetry between “providers” and “beneficiaries,” and of weak incentives to seek effective actions and to be accountable morally and judicially with regard to the possibly mixed results entailed. Can such an evolution be indicative of the creation of a “libertarian” cooperation model?
- De la coopération décentralisée à l'action internationale des collectivités : un paradigme économique ? - Hadrien Rozier p. 43-65 L'action internationale des territoires s'était affirmée sur la base d'une pratique solidaire de la coopération décentralisée. Poursuivant des objectifs de rayonnement, les collectivités investissent aujourd'hui l'international dans l'intérêt de leur développement économique. L'observation de plusieurs acteurs appréhendant l'avènement d'un paradigme est-elle pour autant pertinente ? Un changement de paradigme intervient lorsqu'un schéma ne parvient plus à résoudre les anomalies rencontrées, amenant l'idée d'un nouveau modèle à suivre. Si l'idée d'une rupture soudaine ne peut être généralisée, quatre dynamiques marquent une évolution vers de nouveaux principes d'action de l'AICT, acquis au développement local : des territoires plus compétents et responsables sur le plan économique, l'intégration des structures économiques locales dans un système mondialisé, l'appropriation de ces enjeux par les élus et les techniciens, les limites mêmes de la coopération décentralisée.Local authorities first asserted their international role through decentralized cooperation in solidarity. Today, new forms of international action such as innovation, or attracting business investment, as local economic development (LED) has become their priority. However, is the use of the term “paradigm” – meaning a change in vision, standards, and competences – appropriate? While one would be hard-pressed to identify such a transformation, there has been an increasing level of change for the past twenty years, turning the international action of local authorities into a tool for LED. This phenomenon might be due to four causes: the transfer of legal economic competences from the state to the local authorities, the integration of LED in a globalized system, the compliance of local leaders with this evolution, and finally the limits of decentralized cooperation, which brings out the need for new international action criteria.
- Urban Food Policies: Decentralized Cooperation and African Cities - Andrea Magarini, Yota Nicolarea, Egidio Dansero, Maria Bottiglieri p. 67-93 Cet article introduit l'idée que les politiques alimentaires urbaines (PAU) dans le champ de la coopération peuvent être considérées comme un nouveau domaine de travail, d'échanges et de recherche appliquée au sein des villes et des autorités locales, ainsi qu'entre elles, dans le Nord et le Sud globaux. En effet, la mise en place d'actions reposant sur différents mécanismes par nombre de villes laisse penser que les PAU sont susceptibles de générer des impulsions positives, de nouvelles perspectives et des avantages réciproques. Notre article s'intéresse à diverses expériences internationales en cours, puis examine les projets pertinents mis en place en Italie et sur le continent africain. Nous étudions des aspects liés à la gouvernance, soulignons les caractéristiques essentielles de la coopération décentralisée et de ces expériences de développement, avant de conclure sur les perspectives potentielles dans ce domaine.The article introduces Urban Food Policies (UFP) in the field of decentralized cooperation as a relatively new field of work, exchange and action-oriented research within and between cities, and local authorities in the global North and South. Indeed, a plethora of cities have been implementing actions with different implementation mechanisms indicating that UFP can generate positive stimuli, new perspectives, and reciprocal benefits. The article examines a number of ongoing international projects to then focus on the relevant programs developed in Italy and on the African continent, looking into aspects of governance, outlining essential features of decentralized cooperation and of these ongoing development projects, and concluding with potential prospects in this area.
- De nouvelles perspectives pour la coopération entre villes : l'Alliance euro-latino-américaine - Cristian Díaz Castro p. 95-114 Les collectivités territoriales constituent un acteur-clé du développement sur la scène internationale. Elles cherchent depuis quelques années à se regrouper par paires afin de coordonner des échanges et renforcer leur amitié, leur coopération et leurs démarches de plaidoyer. Pourtant, loin de remettre en cause le poids des acteurs étatiques sur la scène internationale et de favoriser l'insertion du local dans le global, les associations actuelles ont tendance à concentrer leurs échanges sur des projets de coopération ponctuels et encadrés par une coopération, dite traditionnelle. Cet article s'intéresse à un nouveau modèle de coopération horizontale, dit « en alliance », conçu et mis en œuvre par l'Alliance euro-latino-américaine de coopération entre les villes (AL-LAs) : ce modèle apporte-t-il de nouvelles orientations dans la manière d'exercer la coopération entre les villes ?Cities are key actors for development on the international scene. For some years now, cities have been gathering in groups or associations to coordinate exchanges and reinforce their relationship and cooperative bonds, as well as lobbying. However, far from questioning the importance of state actors in an international context and stimulating the insertion of the local into the global, city networks tend nowadays to cooperate on limited projects, within the framework of so-called traditional cooperation. This article focuses on a new model of horizontal cooperation, which is said to be “alliance-based,” conceived and implemented by the Euro-Latin American Alliance for Cooperation among Cities (AL-LAs). The main objective is to shed light on new directions for city-to-city cooperation.
- L'internationalisme municipal comme vecteur de démocratisation : L'étude de cas de la ville lituanienne de Kaunas (1919-1939) - Ringailė Kuokštytė p. 115-137 L'article s'intéresse à la ville lituanienne de Kaunas, capitale de la Lituanie pendant l'entre-deux-guerres. Cette période fut un moment historique pour le pays, devenu indépendant, et pour les résidents de Kaunas tout particulièrement : la ville se développe en rapport avec la modernité occidentale pour devenir une ville européenne, y compris grâce à l'action extérieure de la municipalité. Malgré des apports techniques et disciplinaires, l'internationalisme municipal permet à la ville de Kaunas de développer, en dépit de tendances centralisatrices, une dynamique locale propre de démocratisation, illustrée par l'importance dont se dote progressivement le rapport, entendu en termes d'ouverture, de la municipalité à la presse. Cette évolution, même si non intentionnée, comporte une signification empirique importante : elle modifie la logique d'interaction entre les autorités municipales et ses administrés et se veut politique.This article examines the case of the Lithuanian city of Kaunas, the country's capital in the interwar years. This was a historic period for Lithuania, which had become independent, and more specifically for the inhabitants of Kaunas: the city developed along the lines of Western modernity and became a European city, in part thanks to the municipality's external action. In spite of technical and disciplinary contributions, as well as a tendency to centralization, municipal internationalism allowed the city of Kaunas to develop its own democratization dynamic, illustrated by the growing importance and openness of the relationship between the municipality and the press. This evolution, even if it was not intentional, is highly significant empirically: it altered the interactions between the local authorities and the citizens, and was meant to be political.
Document
- La question urbaine au prisme des Nations unies : Retour sur la conférence « Habitat III » - Samuel Ripoll p. 141-162 La troisième conférence des Nations unies sur le logement et le développement urbain durable – plus connue sous le nom de « Habitat III » – s'est tenue à Quito du 17 au 20 octobre 2016. Après « Habitat I » (Vancouver, 1976) et « Habitat II » (Istanbul, 1996), les États y ont adopté un Nouveau Programme pour les villes qui définit la stratégie de la communauté internationale pour les vingt ans à venir en matière de développement urbain. Malgré l'importance du sujet et l'intense mobilisation suscitée par la conférence, l'écho médiatique et politique de l'événement s'est avéré relativement limité. Faut-il pour autant y voir un échec ? Sur quels plans faut-il rechercher les résultats et les impacts des conférences internationales sur les sujets urbains ? Pour éclairer ces questions, cet article propose une analyse empirique du processus Habitat III et de la manière dont les questions urbaines sont abordées et débattues aux Nations unies depuis le premier sommet de 1976.The third United Nations conference on housing and sustainable urban development – better known as “Habitat III” – took place in Quito from October 17 to 20, 2016. Following “Habitat I” (Vancouver, 1976) and “Habitat II” (Istanbul, 1996), the member states adopted a New Urban Agenda which sets out priorities for the international community in terms of urban issues. Despite how crucial these problems are and how dynamic the conference was, the media and political echoes remained quite limited. Yet, does it mean that the conference was a failure? Where should we try to find the results of such conferences? To shed light on these issues, this paper aims at analyzing the Habitat III process and the way urban issues have been dealt with and debated within the United Nations since the 1976 summit.
- La question urbaine au prisme des Nations unies : Retour sur la conférence « Habitat III » - Samuel Ripoll p. 141-162
Varia
- The Social Life of Policy Reports : Reporting as a Tool in the Transitional Justice Battlefield in Rwanda - Astrid Jamar p. 165-194 Avec une approche latourienne, cet article examine les rôles sociaux joués par les rapports d'orientation, produits et utilisés quotidiennement dans la mise en œuvre de la justice transitionnelle au sein des tribunaux Gacaca au Rwanda ; la qualité des rapports donne l'impression de processus efficaces et éloignés des difficiles politiques du passé. Cet article retrace le parcours des rapports politiques de Gacaca et étudie leur évolution, depuis le rôle qui leur était envisagé à leurs fonctions réelles. Prévus comme des garants techniques, ces rapports sont devenue des outils centraux dans le champ de bataille de la justice transitionnelle - presque comme si ils étaient renvoyés les uns aux autres, remettant en question tant le passé que la nature de la transition. Parce que les processus de justice transitionnelle aboutissent surtout à la production de rapports qui cherchent à clarifier et à rendre compte d'un lourd héritage de violence, cette analyse apporte une contribution importante pour la construction de récits consacrés à la justice transitionnelle. Considérant l'omniprésence de rapports dans le déploiement des politiques dépendantes de l'aide, cet article attire l'attention sur les aspects souvent occultés de la politique complexe et sur le rôle litigieux joué par les organisations internationales donatrices. Ce texte encourage donc les discussions sur la matérialité de l'aide internationale et sur ses conséquences sociales.Adopting a Latourian approach, this article examines the social role played by policy reports, which are produced and used in the everyday implementation of transitional justice, using the Gacaca Courts in Rwanda as a case study. As glossy end products, transitional justice reports create the image of more efficient processes unaffected by difficult politics. The article traces the journey of Gacaca policy reports and the shift from their envisioned role to their actual performed functions: considered as technical safeguards, reports become central tools in the transitional justice battlefield – almost as if reports were used as weapons while arguing about the past and the nature of the transition. Since transitional justice processes mostly culminate in the production of reports which presume to clarify and make accountable complex legacies of violence, such an analysis contributes significantly to addressing the construction of transitional justice narratives critically. Given the ubiquity of reports in aid-dependent policy implementation, this article draws attention to often glossed-over aspects of complex politics and to the contentious role played by international aid organisations. By doing so, the paper encourages discussions about the materiality of international aid and its social consequences.
- Analyses bibliographiques - p. 195-208
- Hommage à Claude Arditi - p. 209-210
- The Social Life of Policy Reports : Reporting as a Tool in the Transitional Justice Battlefield in Rwanda - Astrid Jamar p. 165-194