Contenu du sommaire : Mayotte à la dérive
Revue | Plein droit |
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Numéro | no 120, mars 2019 |
Titre du numéro | Mayotte à la dérive |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Édito
- « Juste, on te garde vivant » - p. 1-2
Dossier - Mayotte à la dérive
- « Français à tout prix » : Mayotte au prisme de « l'ingénierie démographique » - Emmanuel Blanchard p. 3-7
- À Mayotte, le déni n'est pas la solution - Rémi Carayol, Marie Duflo, Lisa Giachino, Isabelle Mohamed, Mohamed Nabhane p. 8-11 Cette tribune est parue sur Mediapart alors que l'île de Mayotte était secouée par de violentes chasses à l'homme et des destructions de villages à caractère nettement xénophobe. Les auteur·es ont accepté que ce texte soit reproduit ici pour revenir sur le contexte historique qui explique ces poussées de violences racistes et déconstruire les contre-vérités trop souvent énoncées.
- Mayotte : de quoi la violence est-elle le nom ? - Sophie Blanchy, Damien Riccio, Nicolas Roinsard, Juliette Sakoyan p. 12-15 Cet article collectif a été publié sur le blog Mediapart de Nicolas Roinsard, au printemps 2018 alors que le conflit social, dont les « migrants clandestins » ont été les premières victimes, atteignait son paroxysme. Les auteur·es s'interrogent : les questions migratoires sont-elles vraiment les seules en cause dans l'explosion de la violence ? Ne sont-elles pas plutôt le symptôme d'une crise plus profonde ?
- Fantasmes et réalités démographiques - Antoine Math, Marie Duflo p. 16-19 À Mayotte, l'utilisation tendancieuse des données démographiques fait florès, qu'il s'agisse du nombre de « clandestins » sur l'île, de celui des Comoriennes venues y accoucher, voire de la consommation de riz. Si le procédé est courant dès lors que l'on aborde les questions migratoires, il a de graves conséquences dans le Département et justifie l'adaptation d'un infra-droit. Pourtant, d'autres données statistiques, économiques et sociales, mériteraient bien davantage d'être relevées et dénoncées.
- Les « décasages », une vindicte populaire tolérée - Myriam Hachimi Alaoui, Élise Lemercier, Élise Palomares p. 20-23 Les conflits entre les habitants des îles des Comores s'inscrivent dans une longue histoire marquée par la colonisation, la partition politique des années 1970 et la départementalisation de Mayotte en 2011. En 2016, le rejet de l'immigration venant des autres îles a pris la forme de grandes opérations de « décasages » planifiées et publiquement assumées. Visant des personnes installées de longue date à Mayotte et parfois en situation régulière, elles ont entraîné, au-delà de la perte du logement, la destruction des solidarités familiales, la déscolarisation des enfants et la déstabilisation de la situation administrative.
- L'irresponsabilité de l'État - Marie Duflo p. 24-27 Au nom du « droit à la différenciation des départements et régions d'outre-mer », un infra-droit constitué de multiples mesures dérogatoires au droit commun s'est mis en place et peu à peu et a été étendu au droit applicable aux « étrangers ». Il ne restait que le principe constitutionnel d'indivisibilité territoriale pour, au moins, préserver le droit de la nationalité. Ce verrou vient de sauter avec la loi du 1er mars 2019 qui consacre un « droit du sol » spécifique à Mayotte. À se demander si Mayotte est vraiment française…
- Privés d'école - Daniel Gros p. 28-31 Un des domaines où la mise à l'écart des étrangers a le plus de conséquences à long terme est celui de la scolarisation des enfants. Les trésors d'imagination déployés par les maires pour dresser des obstacles à l'inscription à l'école ont pour effet de priver des milliers d'enfants de familles étrangères de l'accès à l'éducation. Et à aucun niveau, municipal, départemental ou national ne se manifeste la volonté de mettre fin à ce scandale de la privation du droit fondamental à l'école.
- Une jeunesse en insécurité - Nicolas Roinsard p. 32-35 Tout le monde s'accorde à dire, à Mayotte, que l'insécurité (civile) est essentiellement le fait d'une fraction de la jeunesse. On oublie trop souvent de dire que cette même jeunesse est aussi en insécurité (sociale), et que l'une ne va pas sans l'autre. Si la lutte contre la délinquance passe par une subtile combinaison de mesures éducatives et de mesures répressives, la question sociale est essentielle. La sécurité d'une population se mesure aussi et surtout aux conditions de son intégration.
Mémoire des luttes
- L'Arci ou la culture de l'altérité - Filippo Miraglia, Claire Rodier, Hélène Spoladore p. 36-40 L'Association récréative et culturelle italienne (Arci) naît officiellement en 1957, mais trouve ses origines dans le mouvement d'éducation populaire qui s'épanouit au milieu du xixe siècle. Comment ce mouvement tourné vers l'éducation et la culture en est-il venu à s'engager progressivement dans la lutte contre le racisme, puis dans la défense des droits des migrants pour finalement intégrer toutes les dimensions du fait migratoire en Italie et au-delà ?
- L'Arci ou la culture de l'altérité - Filippo Miraglia, Claire Rodier, Hélène Spoladore p. 36-40
Le focus juridique
- Le droit à Mayotte : une fiction ? - Marjane Ghaem p. 41-44 À y regarder de plus près, à Mayotte, ce n'est pas seulement la singularité du droit des étrangers et son lot continu de dérogations qui choquent, mais plus encore l'acharnement de l'administration à ne pas appliquer cet infra-droit. Comme s'il ne s'agissait pas seulement de limiter les droits des personnes étrangères, mais bien de les en priver. Aucun texte législatif ne pourra garantir des droits dans un contexte où la politique du chiffre reste la seule boussole des autorités. On prendra ici l'exemple paradigmatique de l'éloignement en observant le traitement réservé à Mayotte aux personnes frappées d'une OQTF (obligation de quitter le territoire français) accompagnée, le plus souvent, d'une IRTF (interdiction de retour sur le territoire français).
- Le droit à Mayotte : une fiction ? - Marjane Ghaem p. 41-44