Contenu du sommaire
Revue | NECTART |
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Numéro | no 9, 2ème semestre 2019 |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Édito
- Carte postale de Hongrie - Balázs Berkovits p. 3-5
L'invité
- Edgar Morin - Edgar Morin, Éric Fourreau, Emmanuel Négrier p. 12-20
Place des artistes
- « Rendre la transformation possible, remettre du souple dans ce qui était tendu » - Gérald Kurdian p. 22-24
- « Nous voulons ouvrir les consciences vers une autre réalité » - p. 25-28
Dossier - Sous la pression du privé, la politique publique est-elle en train de se réinventer ?
- Présentation - p. 30-31
- Et si l'innovation était du côté de l'action publique ? - Louise Guillot p. 32-41 New public management, intrapreneuriat, État start-up… les logiques d'innovation du secteur privé s'invitent aux guichets des services publics comme dans les discours des femmes et des hommes politiques. Pour se réinventer, l'action publique est-elle condamnée à adopter une approche entrepreneuriale ? Face à cette logique, une autre transformation publique est-elle possible ? Depuis plus de quinze ans, il existe un ensemble de pratiques puisant dans un tout autre champ : l'imagination, la conception, la création. Designers d'objets et de services, architectes et artistes pratiquant une forme d'urbanisme dit culturel se frayent un chemin dans les couloirs de l'administration publique et proposent, à leur manière, une autre forme d'innovation publique. Ces approches, pour plurielles qu'elles soient, s'appuient sur un faisceau d'hypothèses communes : l'importance de repartir des usages et du terrain, le besoin de renouveler nos imaginaires, le caractère fondamentalement collectif et participatif de la refonte des services et des politiques publics.
- La puissance publique peut-elle réguler le phénomène de concentration dans la musique ? - Sandrine Teixido p. 42-51 Cet article analyse le phénomène de concentration dans la musique et les interventions possibles de la puissance publique pour faire face à la menace que représente le modèle économique des géants internationaux du spectacle vivant : rachats verticaux et horizontaux susceptibles de décimer la filière, ainsi qu'un risque d'uniformisation des propositions musicales. La régulation par le biais des politiques sectorielles cache mal l'ambivalence des politiques culturelles, la prépondérance des musiques actuelles et la nécessaire re-politisation des mondes de la musique.
- Entre marketing et branding, les bibliothèques en quête de visibilité ! - Vincent Bonnet, Amandine Jacquet p. 52-61 En réaction aux injonctions des tutelles d'attirer de nouveaux publics, de nombreuses bibliothèques cherchent à polir leur image et à se construire une nouvelle identité en y associant de nouveaux services « innovants », bien souvent au-delà du champ de la culture. Certaines n'hésitent plus à piocher dans le répertoire des entreprises en ayant recours au marketing et au branding : création d'une marque, d'un logo, d'une nouvelle identité, recherche d'innovation… Mais en s'éloignant ainsi des services publics, elles risquent de voir se diluer leur propre identité. Ne faut-il pas alors plutôt explorer un anti-branding, revendiquer ce que l'on est, en être fier, à l'instar par exemple des bibliothécaires italiens qui, s'inspirant de la Gay Pride et du mouvement queer, ont fondé dans leur pays la Bibliopride, journée nationale des bibliothèques ? Cela reviendrait sans doute à se situer dans le champ de l'advocacy davantage que dans celui du branding.
- Les politiques culturelles deviennent-elles des politiques événementielles pour peaufiner leur image ? - Philippe Teillet p. 62-68 Cet article propose une critique de l'« événementialisation » des politiques culturelles, c'est-à-dire de la place croissante que les événements y occupent désormais. Celle-ci est mise en relation avec le déficit de légitimité auquel se heurtent de plus en plus ces politiques. Il s'agirait en effet moins de rechercher par différents événements une plus grande efficacité que de restaurer l'« image » écornée d'une catégorie d'intervention. Une première partie revient sur ce que l'événementialisation est censée offrir de plus par rapport aux programmations de saison ou aux collections permanentes. Une seconde partie pointe en revanche les « pièges » des événements, par leur logique compétitive, par l'usage qu'ils font de l'attention de leurs publics, par les incohérences stratégiques qui les marquent, s'agissant notamment de leurs impacts économique et culturel. À rebours de l'engouement dont ils bénéficient, l'article plaide pour une approche critique du tournant événementiel.
Controverses - L'idéal universaliste est-il une entrave à la diversité culturelle ?
- Présentation - p. 70-71
- S'exercer à un autre universel : du surplomb à une prescription discutée - Christian Ruby p. 72-84 Nous proposons dans cet article de préciser ce pourquoi nous ne pouvons nous dispenser d'une référence à un universel. À condition toutefois que l'universel soit pensé comme une force politique opératoire, et non comme un idéal, une entrave à quoi que ce soit comme le fut l'universel de surplomb jadis, ou une identité. Il se définira donc comme un enjeu d'émancipation, ancré dans un jeu d'écart « polyphonique et multiculturel » au sein d'un projet commun, en archipels. Il sera radical dans la perspective d'une raison publique – mondiale ? – qui doit rendre possible un rapport de réciprocité, de solidarité entre citoyennes et citoyens, nonobstant l'importance des divergences culturelles et religieuses.
- Orientalisme, femmes et universel - La fin de l'Orient - Fawzia Zouari p. 73-77 Longtemps vécu comme un horizon indépassable depuis les jalons posés par les philosophes des Lumières et sa traduction politique à travers la Déclaration des droits de l'homme, l'idéal universaliste est aujourd'hui remis en question dans le sens où il serait un instrument de domination au service d'une conception uniquement occidentale et une entrave à la diversité culturelle en ne prenant pas en compte les particularismes des autres cultures et des minorités culturelles. La récente actualité sur l'appropriation culturelle a réactivé ce débat.
- Le féminisme à l'épreuve des diversités - Fawzia Zouari p. 79-83
- La terreur serait-elle notre affaire ? - Jean-Marie Songy p. 86-93 Zones quadrillées, foules contrôlées, coûts de sécurité exorbitants... L'organisation de festivals et d'événements a-t-elle encore un sens aujourd'hui, dans ce contexte sécuritaire ? Comment s'approprie-t-on cet espace public de plus en plus sous contrôle ? En quoi consiste la réappropriation politique de cet espace ? À qui profite le climat de terreur qui s'est propagé ces dernières années en France ? La façon dont se déroule la vie culturelle dans l'espace public n'est-elle pas symptomatique de l'état d'une démocratie ? À sa manière, le théâtre de rue est un révélateur de la tolérance morale d'un pays.
- La charte culturelle lyonnaise, une référence en matière de coopération pour fabriquer la ville durable - Élisabeth Renau p. 94-103 Depuis quinze ans, la politique de coopération culturelle de la Ville de Lyon s'incarne dans la Charte de coopération culturelle. Elle constitue aujourd'hui un levier de premier plan au service de politiques locales transversales réunissant les acteurs associatifs, éducatifs, citoyens, créatifs, mais aussi les différents services de la Ville, des collectivités et de l'État afin de favoriser un développement humain, urbain, et une cohésion sociale. L'ambition affichée est de placer la culture au cœur du projet de développement de la ville durable et de contribuer de façon partenariale à répondre aux grands défis posés aux territoires urbains. Par son ancienneté, son envergure, son approche méthodologique et ses finalités, la Charte fait aujourd'hui référence en matière de coopération, tant au plan national qu'international. Quel bilan tirer de cette politique ambitieuse de coopération culturelle ?
- Pourquoi les festivals doivent être évalués à l'aune de leur utilité sociale - Hélène Duclos, Émilie Cherbonnel p. 104-113 À quoi servent les festivals ? À écouter de la musique, découvrir des œuvres, faire la fête... Oui, bien sûr. Mais pourraient-ils avoir une utilité au-delà de ce que l'on en perçoit immédiatement ? Huit festivals bretons ont fait le pari d'interroger ce qu'ils apportent aux personnes, à la société, à leur territoire, au-delà des évidences. Ils ont identifié leur utilité sociale. Mieux que cela : ils l'ont évaluée, mesurée. L'article est tiré de cette enquête, qui montre que, par leur dynamique artistique, festive et conviviale, les festivals favorisent la mixité sociale et intergénérationnelle, attirent aussi bien les entreprises que les étudiants, et ont un impact culturel, humain, social et/ou économique sur leur territoire.
- Netflix, l'usine à séries que le cinéma déteste adorer - Julien Baldacchino p. 116-125 Le film de Martin Scorsese The Irishman, avec Robert De Niro et Al Pacino, sortira au mois d'octobre prochain, mais les salles obscures françaises ne le projetteront pas : il sera diffusé en exclusivité sur Netflix, qui en est aussi le producteur. En à peine quelques années, la firme américaine, qui a fait ses débuts sous la forme d'un vidéo-club par correspondance, a imposé à la fois un modèle économique – la SVoD – et une écriture cinématographique, celle de la série, plébiscitée et plus bankable que jamais. Au point que la Fémis, référence parmi les écoles de cinéma en France, consacre depuis début 2019 sa nouvelle formation… aux show runners, les créateurs de séries. Comment, en quelques années, le paysage de la production cinématographique s'est-il métamorphosé pour s'adapter, de gré ou de force, à ce nouveau modèle ? Et jusqu'à quel point la France, avec sa « chronologie des médias », reste-t-elle un cas particulier ?
- L'éthique hacker infuse-t-elle le cœur de nos sociétés ? - Marie-Christine Bureau p. 126-134 Si l'avènement du cyberespace a pu éveiller le fantasme d'un monde virtuel peuplé de purs esprits communiquant à distance, l'histoire s'est révélée tout autre. Chaque jour à travers le globe se créent de nouveaux espaces encombrés d'outils, de machines et de câbles, où des personnes physiques se retrouvent pour fabriquer des choses ensemble. Qu'est-ce au juste que l'éthique hacker dont se réclament la plupart de ces lieux ? Est-elle une enfant du numérique ou s'inscrit-elle dans une histoire bien plus longue, celle du do it yourself (DIY) ? Si la curiosité, la passion, la libre circulation du savoir, l'art de la bidouille et la coopération s'affirment comme des valeurs en rupture avec l'éthique du travail qui a prévalu dans nos sociétés industrielles, ils ont pourtant déjà animé bien des combats et inspiré nombre de réalisations, souvent aux marges de la sphère productive. Dans les transformations du travail et de l'emploi que nous vivons aujourd'hui, sont-ils porteurs d'un futur désirable ?
- L'art participatif peut-il enfanter le citoyen-à-venir ? - Éliane Beaufils p. 136-145 L'art participatif connaît un tel essor qu'il en devient parfois un instrument dans la politique événementielle des villes. Le citoyen converti en acteur voit son quotidien transfiguré par le jeu ou l'écoute d'un parcours audioguidé. L'art participatif peut alors intensifier son expérience de spectateur, qui en devient plus réflexive. De telles actions courent néanmoins le risque de convertir les actes de réflexion citoyenne en actes de jeu, qui n'ont aucune incidence sur le réel. L'équilibre est fragile à tenir. Parmi les dispositifs, certains sollicitent les citoyens en regard du réchauffement climatique et des bouleversements sociétaux futurs. L'art participatif devient alors davantage un laboratoire de comportements ou de « comportements de pensée » (Brecht), engageant un citoyen-à-venir. Certaines formes constituent des mises en situation directes, d'autres misent sur l'imagination créatrice, d'autres enfin invitent davantage à accompagner un mouvement qu'à agir.
- Les nouvelles routes de la soie du numérique et le défi de l'intelligence artificielle - Emmanuel Lincot p. 146-153 Dans le contexte de l'ambition d'une influence globale et normative, à travers les Routes de la soie, la Chine de Xi Jinping a fait de l'intelligence artificielle (IA) un de ses secteurs prioritaires. Signe des temps, le premier présentateur de télévision virtuel est né à l'automne 2018. Les progrès de la Chine dans les secteurs de l'IA et la capacité pour les autorités de maîtriser les banques de données individuelles sont en passe de quadriller l'ensemble des activités du pays, soit en laissant percer un arrière-plan moralisateur, soit au prétexte de devoir prévenir toute forme de « pollution spirituelle » voire de projet terroriste, comme dans la province turcophone du Xinjiang. Cette surveillance est facilitée par l'absence des géants américains du Net, qui ne sont pas autorisés à exercer leurs activités sur le territoire chinois. Alibaba (vs Amazon) ou iQiyi (vs Netflix) sanctuarisent le marché chinois et tiennent à bonne distance les géants californiens de l'Internet. Une loi antitrust promulguée en 2007 par les autorités veille toutefois à ce que la concurrence soit respectée entre les grands groupes chinois. Celle-ci s'avère acharnée.
- Je vais vous raconter… : Des scientifiques, artistes, acteurs du médico-social et de la culture qui cogitent sur le handicap mental au théâtre - Philippe Mourrat p. 160-162