Contenu du sommaire : Filmer (dans) le Pacifique
Revue | Journal de la Société des Océanistes |
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Numéro | no 148, 2019 |
Titre du numéro | Filmer (dans) le Pacifique |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Dossier Filmer (dans) le Pacifique
- Le Pacifique au cinéma : représentations et réappropriations - Jessica De Largy Healy, Éric Wittersheim p. 5-22
- L'émergence du film d'auteur en Papouasie Nouvelle-Guinée et l'invention du film processuel. Une trajectoire personnelle - Martin Maden p. 23-36 Cet article se base sur mon expérience du « cinéma direct », ainsi que sur l'éthique et la pédagogie à partir desquelles j'ai animé des ateliers de cinéma direct en Papouasie Nouvelle-Guinée, dans le Pacifique et ailleurs. S'appuyant sur mon parcours singulier de cinéaste papou de Nouvelle-Bretagne et sur ma formation à l'école de cinéma documentaire des Ateliers Varan fondée au début des années 1980 par le cinéaste français Jean Rouch, cet article retrace l'émergence du film d'auteur en Papouasie Nouvelle-Guinée depuis les années 1970 au lendemain de l'indépendance du pays. Il revient sur ma propre pratique et sur les films processuels, une méthode de tournage que j'ai développée dans les communautés rurales et qui articule la démocratie cinématographique et un mode d'intervention sociale permettant une action de justice réparatrice.This paper is based on my experience of “ direct cinéma ”, and the ethics and pedagogy from which I have taught Direct Cinema workshops in Papua New Guinea, the Pacific and internationally. Drawing on my own journey as a png filmmaker, and my training in the Ateliers Varan school of documentary cinema, this paper retraces the emergence of film authorship in Papua New Guinea since the 1970s in the wake of the country's independence. It finally turns on my own practice and on process films, a method of filmmaking I have developed in rural communities which articulates cinematic democracy and social interventions towards restorative justice.
- The Rise of Film Authorship in Papua New Guinea and the invention of Process Filmmaking. A personal Journey - Martin Maden Cet article se base sur mon expérience du « cinéma direct », ainsi que sur l'éthique et la pédagogie à partir desquelles j'ai animé des ateliers de cinéma direct en Papouasie Nouvelle-Guinée, dans le Pacifique et ailleurs. S'appuyant sur mon parcours singulier de cinéaste papou de Nouvelle-Bretagne et sur ma formation à l'école de cinéma documentaire des Ateliers Varan fondée au début des années 1980 par le cinéaste français Jean Rouch, cet article retrace l'émergence du film d'auteur en Papouasie Nouvelle-Guinée depuis les années 1970 au lendemain de l'indépendance du pays. Il revient sur ma propre pratique et sur les films processuels, une méthode de tournage que j'ai développée dans les communautés rurales et qui articule la démocratie cinématographique et un mode d'intervention sociale permettant une action de justice réparatrice.This paper is based on my experience of “ direct cinéma ”, and the ethics and pedagogy from which I have taught Direct Cinema workshops in Papua New Guinea, the Pacific and internationally. Drawing on my own journey as a png filmmaker, and my training in the Ateliers Varan school of documentary cinema, this paper retraces the emergence of film authorship in Papua New Guinea since the 1970s in the wake of the country's independence. It finally turns on my own practice and on process films, a method of filmmaking I have developed in rural communities which articulates cinematic democracy and social interventions towards restorative justice.
- Chris Owen en Papouasie Nouvelle-Guinée : entre idéal collectif et vocation personnelle - Pascale Bonnemère p. 37-51 Il est ensuite question de deux de ses films, Gogodala et Malagan Labadama ainsi que d'un projet de film de fiction jamais abouti. L'article se termine en présentant les activités d'archivage, de formation, de réalisation et de production du National Film Institute ainsi que les difficultés auxquelles il fait face aujourd'hui.Chris Owen, who died in 2018, was a well-known documentary filmmaker who came to Papua New Guinea a couple of years before Independence and left only in 2011. Employed by various national agencies, he took part in most of the films shot in Papua New Guinea. At once director, sound recordist and cameraman, he also lent logistical support to film crews shooting in the country, and was head of the National Film Institute. After having evoked his formative years, the article presents the institutional landscape of the 1970s, when Chris Owen and other young expatriates made their first films, since the article tries not only to portray a personal vocation but also to render a shared artistic and political ideal. The piece goes on to discuss two films, Gogodala and Malagan Labadama , and evokes a feature film project that Chris Owen did not manage to complete. Finally, the article presents the activities of the National Film Institute: archives, training and film-making, and indicates the difficulties confronting the institution today.
- Visualité et imageries du pouvoir en Océanie. Dennis O'Rourke, un cinéaste des « zones de contact » - Jonathan Larcher p. 53-64 L'œuvre du cinéaste australien Dennis O'Rourke (1945-2013) parcourt l'histoire coloniale et postcoloniale du Pacifique. De la déclaration d'indépendance de la Papouasie Nouvelle-Guinée, dont il produit un document de première importance pour l'histoire cinématographique du pays (Yumi Yet, 1976), jusqu'à l'émergence des nouvelles formes de domination symbolique constitutives de la (néo)colonialité, Dennis O'Rourke fait preuve d'une remarquable constance. Par son souci de décrire l'assujettissement et l'expérience des « populations dominées » (peuples autochtones, marginaux du monde rural), et sa documentation de la visualité – « comme représentation culturelle et politique » (Mirzoeff, 2011) en Océanie, Dennis O'Rourke livre une observation minutieuse de l'intrication entre des formes de domination par l'image et des rapports de pouvoirs économiques et politiques.The work of Australian filmmaker Dennis O'Rourke (1945- 2013) covers the colonial and postcolonial history of the Pacific. From Papua New Guinea's Declaration of Independence, for which he produced a document of prime importance for the country's film history ( Yumi Yet , 1976), to the emergence of the new forms of symbolic domination constituting (neo)coloniality, the work of Dennis O'Rourke is remarkably constant. Through his concern to describe the subjugation and the experience of “dominated populations” (indigenous peoples, marginalized groups of the rural world), and its documentation of the visuality – “as cultural and political representation” (Mirzoeff, 2011) in Oceania, Dennis O'Rourke gives a careful observation of the interplay between forms of domination through image making and economic and political power relations.
- L'authenticité au cinéma : notes des îles du Pacifique - Vilsoni Hereniko p. 65-72 L'authenticité au cinéma est une notion difficile à saisir, à expliquer ouà analyser, en particulier dans les longs métrages de fiction. Pourtant, les spectateurs attendent des films de fiction qu'ils soient authentiques, car ils sont censés être des représentations réalistes d'un peuple ou d'une culture. De nombreux facteurs s'opposent à cette recherche d'authenticité, dont la dimension commerciale du cinéma qui conduit souvent à des compromis car il s'agit de divertir et de rendre les cultures autochtones accessibles à un marché global. L'idée qu'un film, avec sa durée limitée, puisse représenter fidèlement un peuple ou une culture, est illusoire, et trahit les difficultés et les obstacles qui s'opposent à une représentation authentique dans une œuvre de fiction. La recherche d'authenticité, cependant, est importante pour les autochtones et les cultures minoritaires, car les représentations erronées peuvent supplanter et se substituer à leurs expériences et conditions de vie réelles.
Authenticity in cinema is elusive and difficult to explain or analyse, especially in narrative feature films that are, ultimately, works of fiction. And yet audiences expect dramatic fictional films to be authentic because they are supposed to be realistic representations of a people or culture. Working against authentic representation are many factors, including the business side of filmmaking that often leads to compromises in order to entertain or to make indigenous cultures accessible to a global market, unrealistic expectations that a single film with its time constraints can fully represent a culture or a people, and the difficulties and challenges of achieving complete authentic representation in a work of fiction. The pursuit of authenticity, however, is important for indigenous people or minority cultures because misrepresentations can displace and replace their actual experiences or realities. - Authenticity in Cinema: Notes from the Pacific Islands - Vilsoni Hereniko L'authenticité au cinéma est une notion difficile à saisir, à expliquer ou à analyser, en particulier dans les longs métrages de fiction. Pourtant, les spectateurs attendent des films de fiction qu'ils soient authentiques, car ils sont censés être des représentations réalistes d'un peuple ou d'une culture. De nombreux facteurs s'opposent à cette recherche d'authenticité, dont la dimension commerciale du cinéma qui conduit souvent à des compromis car il s'agit de divertir et de rendre les cultures autochtones accessibles à un marché global. L'idée qu'un film, avec sa durée limitée, puisse représenter fidèlement un peuple ou une culture, est illusoire, et trahit les difficultés et les obstacles qui s'opposent à une représentation authentique dans une œuvre de fiction. La recherche d'authenticité, cependant, est importante pour les autochtones et les cultures minoritaires, car les représentations erronées peuvent supplanter et se substituer à leurs expériences et conditions de vie réelles.
Authenticity in cinema is elusive and difficult to explain or analyse, especially in narrative feature films that are, ultimately, works of fiction. And yet audiences expect dramatic fictional films to be authentic because they are supposed to be realistic representations of a people or culture. Working against authentic representation are many factors, including the business side of filmmaking that often leads to compromises in order to entertain or to make indigenous cultures accessible to a global market, unrealistic expectations that a single film with its time constraints can fully represent a culture or a people, and the difficulties and challenges of achieving complete authentic representation in a work of fiction. The pursuit of authenticity, however, is important for indigenous people or minority cultures because misrepresentations can displace and replace their actual experiences or realities. - Disney's Moana and the Portrayal of Moral Personhood in Hollywood's Pacific (1932-2016) - David Lipset p. 73-84 Le but de cet article n'est pas de débattre de la nature commerciale ou des ressorts idéologiques des films hollywoodiens. Mon but est exégétique ou méthodologique. Je veux déplacer la critique des représentations hollywoodiennes des peuples et des cultures du Pacifique vers la manière dont ils sont, ou non, représentés comme des personnes morales, expression dont je préciserai la signification ci-dessous. Je commence par présenter le concept de personne morale dans l'anthropologie sociale et dans le travail du critique littéraire canadien Northrop Frye. Ensuite, j'examine trois films hollywoodiens : Rain (1932) et Blue Hawaii (1961) dans lesquels la personnalité morale des habitants des îles du Pacifique est réduite et marginalisée tandis que les figures des protagonistes occidentaux sont mises en avant, bien que de différentes manières. Pour finir, j'évoque le film Vaiana de Disney (2016), qui exclut totalement les personnages occidentaux, en se focalisant sur les aventures d'une jeune Polynésienne avant le contact avec les Occidentaux. Vaiana y parvient, selon moi, car c'est une comédie musicale d'animation.The goal of this essay is not to build an argument about the commercial basis or ideological functions of Hollywood movies. My goal is exegetical or methodological. I want to shift the critique of Hollywood's representations of Pacific peoples and cultures towards how they are and are not depicted as moral persons, the meaning of which I will detail below. I begin by introducing the concept of the moral person in social anthropology and in the work of the Canadian literary critic, Northrop Frye. I then examine three Hollywood movies, Rain (1932) and Blue Hawaii (1961) in which the moral personhood of Pacific Islanders is reduced and marginalized while Western protagonists are foregrounded, although in different ways. Lastly, I discuss Disney's Moana (2016), a movie which excludes Western characters altogether by focusing on the adventures of a pre-contact Polynesian girl. Moana is able to do so, I propose, because it is an animated musical.
- Quand Disney déchaîne les passions : retour sur la controverse autour de Moana - Mirose Paia, Marie Salaün p. 85-96 Cet article revient sur les principaux enjeux de la controverse qui a accompagné la sortie du film d'animation Moana, en proposant une chronique des diverses réactions auxquelles elle a donné lieu, et en évoquant les différents champs dans lesquels les positions contrastées des acteurs se sont exprimées. Si certains éléments de cette controverse, dont l'origine se situe clairement dans le Pacifique et à l'initiative d'insulaires de la région, ont été largement relayés par les médias français, nous évoquerons ici la situation particulière de la Polynésie française, qui a en effet connu deux versions de Moana : une en français (Vaiana) et une en tahitien (Moana), première adaptation dans une langue polynésienne soutenue par Disney. La virulence des débats constatée ailleurs dans le Pacifique n'y ayant pas trouvé d'écho, nous nous proposons de rendre compte de ce qui constitue en première lecture une exceptionnalité de la Polynésie française.This article reviews the main issues of the controversy that accompanied the release of the animated film Moana , by providing a chronicle of the various reactions to which it has given rise, and by evoking the different fields in which contrasting views were expressed. While some elements of this controversy, whose origin is clearly situated in the Pacific and at the instigation of Pacific Islanders, have been widely covered in the French media, we will discuss the particular situation of French Polynesia, where two versions of Moana circulated: one in French ( Vaiana ) and one in Tahitian ( Moana ), first adaptation in a Polynesian language sponsored by Disney. As the virulence of the debates found elsewhere in the Pacific did not apply to this particular case, we provide an account of what constitutes at first reading an exceptionality of French Polynesia.
- Tanna : romancer la kastom , éluder l'exotisme ? - Margaret Jolly p. 97-112 De nombreux débats portent sur les représentations de l'exotisme dans le Pacifique, que ce soit dans le domaine de l'anthropologie, des arts ou du cinéma. Le film Tanna, créé et filmé au Vanuatu, sur l'île du même nom, par les réalisateurs australiens Bentley Dean et Martin Butler, a été à la fois applaudi et critiqué pour avoir présenté le Vanuatu et ses habitants comme exotiques. De tels jugements doivent tenir compte de la complexité de cette co-création australienne et ni-Vanuatu qui se situe dans un entre-deux flottant entre réalité ethnographique et fiction cinématographique, tout en évoquant un sentiment de distance et de différence, ainsi que les émotions partagées de la réalité humaine face à un jeune amour et une disparition tragique. Cet article propose donc une analyse du film et de son accueil critique.There have been protracted debates about exoticism in representations of the Pacific, in anthropology, visual arts and the cinema. The film Tanna , created and filmed in the Vanuatu island of that name by Australian filmmakers Bentley Dean and Martin Butler has been both celebrated and criticised for its representation of the people and place of Vanuatu as exotic. Such adjudications have to confront the complexities of a film that is a co-creation between Australia and Vanuatu, that hovers between ethnographic realist and fictional cinematic imaginaries and simultaneously evokes a sense of distance and difference and a sense of the shared human reality of young love and tragic loss. This article offers an analysis of the film and its critical reception.
- Tanna : Romancing Kastom , Eluding Exoticism? - Margaret Jolly De nombreux débats portent sur les représentations de l'exotisme dans le Pacifique, que ce soit dans le domaine de l'anthropologie, des arts ou du cinéma. Le film Tanna, créé et filmé au Vanuatu, sur l'île du même nom, par les réalisateurs australiens Bentley Dean et Martin Butler, a été à la fois applaudi et critiqué pour avoir présenté le Vanuatu et ses habitants comme exotiques. De tels jugements doivent tenir compte de la complexité de cette co-création australienne et ni-Vanuatu qui se situe dans un entre-deux flottant entre réalité ethnographique et fiction cinématographique, tout en évoquant un sentiment de distance et de différence, ainsi que les émotions partagées de la réalité humaine face à un jeune amour et une disparition tragique. Cet article propose donc une analyse du film et de son accueil critique.There have been protracted debates about exoticism in representations of the Pacific, in anthropology, visual arts and the cinema. The film Tanna , created and filmed in the Vanuatu island of that name by Australian filmmakers Bentley Dean and Martin Butler has been both celebrated and criticised for its representation of the people and place of Vanuatu as exotic. Such adjudications have to confront the complexities of a film that is a co-creation between Australia and Vanuatu, that hovers between ethnographic realist and fictional cinematic imaginaries and simultaneously evokes a sense of distance and difference and a sense of the shared human reality of young love and tragic loss. This article offers an analysis of the film and its critical reception.
- John Frum Superstar : images du culte du cargo à Tanna (Vanuatu) - Marc Tabani p. 113-125 L'île de Tanna a attiré plusieurs générations de réalisateurs de films. La plupart ont été immanquablement fascinés par l'histoire de John Frum, un personnage surnaturel dont les prophéties ont donné naissance, au cours de la Seconde Guerre mondiale, à un vaste mouvement indigène de protestation sociale. Cet article examine comment ces productions cinématographiques, en présentant le mouvement John Frum comme une parfaite expression des mystérieux « cultes du cargo » du Pacifique, ont activement contribué à façonner l'image de l'île et de ses habitants. L'analyse des ces influences portera également sur la perception, par les gens de Tanna, des films tournés chez eux, depuis qu'eux-mêmes sont devenus spectateurs, acteurs ou réalisateurs de ce type de productions audiovisuelles.
The island of Tanna has attracted successive generations of filmmakers. Most of them have been invariably fascinated by the story of John Frum, a supernatural figure whose prophecies gave rise during World War Two to a huge indigenous movement of social protest. This paper analyses how these film productions, by presenting the John Frum movement as a perfect expression of the mysterious South Pacific “cargo cults”, actively contributed to shape the image of Tanna and its inhabitants for a worldwide audience. The analysis of these influences will also focus on how these films are perceived by the Tannese, since they themselves became spectators, actors and producers in this film-making process. - Essai. Pour émerger un cinéma autochtone dans le Pacifique - Chantal Spitz p. 127-132 Dans cet essai critique, l'autrice polynésienne Chantal Spitz retrace l'histoire des représentations océaniennes dans la littérature puis dans le cinéma européen et américain, dénonçant la perpétuation des clichés exotisants et de l'aliénation autochtone face à cette nouvelle déferlante d'images. Membre en 2017 du jury du Festival international du film océanien, principale rencontre autour du film dans le Pacifique organisée chaque année à Papeete, elle revient sur l'évolution du festival depuis sa création en 2004 et propose une réflexion sur l'éthique qui devrait gouverner les productions océaniennes. Plaidant pour la mise en œuvre d'une structure locale pour l'enseignement des arts de l'audiovisuel, elle rappelle l'urgence de donner aux Océaniens les moyens de devenir des acteurs-producteurs de leur histoire à l'heure de la mondialisation.In this critical essay, the Polynesian writer Chantal Spitz retraces the history of Pacific representations in Western literature and cinema, denouncing the perpetuation of exoticizing stereotypes and the Indigenous alienation from this new surge of images. A member in 2017 of the Festival international du film océanien , the main Pacific gathering organised each year in Papeete, she revisits the evolution of the festival since its creation in 2004 and develops a reflection on the ethics that should govern Oceanian productions. Advocating for the implementation of local structures devoted to teaching audiovisual arts, she points to the importance in this era of globalisation of enabling Pacific Islanders to become the actors-producers of their own history.
- Questions d'« authenticité » : filmer une controverse religieuse et culturelle à Moorea (Polynésie française) - Gwendoline Malogne-Fer p. 133-144 Cet article revient sur la réalisation d'un documentaire consacré au renouveau culturel dans l'Église protestante mā'ohi de Polynésie française. Pain ou coco. Moorea et les deux traditions montre les différentes modalités d'appropriation de ce renouveau, débouchant sur une opposition entre paroisses « traditionnelles » et « culturelles ». À travers la généalogie du projet, l'examen des conditions pratiques de tournage et des réactions suscitées par la diffusion du documentaire, cet article analyse les enjeux méthodologiques et de réflexivité associés à la démarche filmique.This article focuses on the making of a documentary film on the cultural revival within the Mā'ohi Protestant Church in French Polynesia. Pain ou coco. Moorea et les deux traditions (Bread or Coconut. Moorea and the Two Traditions ) shows the various responses to this revival, generating an opposition between “traditional” and “cultural” local churches. Through the genealogy of the project, the examination of the practical conditions of filming and the reactions that followed the broadcasting of the documentary, I analyze the methodological and reflexivity issues at stakes in the filming approach.
- Visual Anthropology and Intangible Cultural Heritage preservation in American Samoa - Micah Van der Ryn p. 145-155 Cet article décrit une initiative pionnière en anthropologie visuelle appliquée entreprise dans les années 1990 sur le Territoire des Samoa américaines. En réponse à l'influence croissante des médias occidentaux dans l'archipel, des compétences filmiques furent développées localement en tant qu'intervention autochtone pour la préservation du patrimoine culturel immatériel. Dans le cadre de ses fonctions à l'American Samoa Community College, l'auteur assurait la formation des étudiants à la théorie et à la pratique de l'ethnographie et de l'anthropologie visuelle. Il collabora avec des collègues samoans et des étudiants pour identifier et coordonner des projets de film et des événements susceptibles de contribuer à la transmission de certains aspects du patrimoine culturel samoan aux générations futures. À travers la description de plusieurs tournages, ces travaux sont conceptualisés en tant qu'effort « d'indigénisation de l'anthropologie » visant à perpétuer le patrimoine culturel immatériel des Samoa américaines.
This article describes a pioneering initiative in applied visual anthropology which was undertaken in the 1990s in the United States Territory of American Samoa. In response to the perceived increasing Western media influence in the archipelago, filming skills were developed locally as an Indigenous intervention for the preservation of intangible cultural heritage. In his role at the American Samoa Community College, the author was responsible for training Samoan students in the theory and practice of ethnography and visual anthropology. He collaborated with Samoan colleagues and students to identify and coordinate film projects and events that would contribute to the transmission of aspects of Samoan cultural heritage to the next generation. Through the description of several film projects, this work is conceptualized as an “indigenizing anthropology” effort towards the continuity of intangible cultural heritage in American Samoa. - Un ajustement postcolonial. À propos de Gilles Dagneau et des années calédoniennes du Gendarme Citron - Éric Soriano p. 157-168 Au début des années 2000, l'Agence de développement de la culture kanak acquiert quatorze bobines de films réalisés par un gendarme en Nouvelle-Calédonie dans les années 1950-1960. Ces images exceptionnelles permettent de voir le cycle des cérémonies de l'igname, une séance collective de désenvoûtement et des chants aé-aé de Canala et de l'île des Pins. Cette acquisition fut l'occasion de consacrer ce gendarme, bien malgré lui, comme le « Jean Rouch des Kanak » et d'imposer ces images comme un objet de patrimoine. En 2008, le cinéaste Gilles Dagneau s'empare alors de ces bobines pour en faire un documentaire : Le Gendarme Citron. Une aventure cinématographique en Nouvelle-Calédonie. En filmant le monde de Citron comme Citron filmait le monde kanak, Gilles Dagneau rééquilibre la position des protagonistes dans un monde encore dominé par la colonisation. Ces bobines sont en effet aussi celles d'un petit paysan en ascension sociale après la Seconde Guerre mondiale. Son regard socialement situé révèle en creux la singularité du regard ethnologique de ces années-là.In the early 2000s, the adck ( Agence de développement de la culture kanak ) acquired fourteen reels of films made by a constable (or “gendarme”) in New Caledonia in the years 1950-1960. These exceptional images show the cycle of ceremonies of the yam, a collective session of exorcism and aé-aé of Canala and the Isle of Pines. This acquisition is an opportunity to promote this constable, unwillingly, as the “Jean Rouch of the Kanak” and consider these images as an object of heritage. In 2008, filmmaker Gilles Dagneau uses these reels to make a documentary: Le gendarme Citron. A cinematic adventure in New Caledonia . By filming the world of Citron as Citron films the Kanak world, Gilles Dagneau rebalances the position of the protagonists in a world still dominated by colonization. These reels are also those of a small peasant in social climbing after the Second World War. His socially situated point of view reveals the singularity of the ethnological gaze of those years.
Comptes rendus
- Compte rendu de la série Redfern Now, par Rachel Perkins et al. - Vanessa Castejon p. 171-173
- Compte rendu de Cultures physiques. Le rugby à Samoa par Clément Julien - Sophie Chave-Dartoen p. 174-175
- Compte rendu de Nourritures, abondance et identité. Une socio-anthropologie de l'alimentation à Tahiti par Christophe Serra Mallol - Nancy J. Pollock p. 176-179
- Compte rendu de The Polynesian iconoclasm. Religious revolution and the seasonality of power par Jeffrey Sissons - Guillaume Alevêque p. 179-180
- Compte rendu de Tides of Innovation in Oceania. Value, materiality and place sous la direction de Elisabetta Gnecchi-Ruscone et Anna Paini - Stéphanie Leclerc-Caffarel p. 180-183
- Compte-rendu de Océanie sous la direction de Peter Brunt et Nicholas Thomas - Pascale Bonnemère p. 183-184
Actes et actualités