Contenu du sommaire : Jeunesses « de rue » et « à la rue »
Revue | Agora débats/jeunesse |
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Numéro | no 83, 2019/3 |
Titre du numéro | Jeunesses « de rue » et « à la rue » |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Les « cultures d'origine » dans les partenariats école/familles : Analyse croisée de dispositifs de médiation interculturelle - Lila Belkacem, Séverine Chauvel p. 7-24 Cet article montre comment la notion de culture est placée au cœur de certains dispositifs de coopération entre l'école et les familles catégorisées comme issues de l'immigration. À partir de deux cas de médiation interculturelle, il analyse un effet paradoxal majeur : alors que ces dispositifs visent à créer des ponts entre l'école et les parents et à valoriser les populations faisant l'expérience de la minoration sociale et raciale dans la société française, ils légitiment des conceptions culturalistes qui sont au fondement de ces mêmes processus de minoration, tout en ouvrant un espace d'expression apprécié des parents. Enfin, l'article met en lumière les raisons pour lesquelles ces espaces se maintiennent – voire se multiplient – malgré les attentes hétérogènes des acteur·trice·s engagé·e·s.« Cultural backgrounds » in partnerships between the school and families
This article shows how the notion of culture is at the heart of certain mechanisms for cooperation between the school system and families that are perceived as being from immigrant backgrounds. Drawing on two cases of intercultural mediation, it analyses a major paradox: although these programs aim to create bridges between the school and parents, and to valorize social and racial minority groups in French society, they legitimize culturalist conceptions that are at the heart of these same processes of exclusion, whilst also opening up a space for expression that is appreciated by parents. Finally, the article sheds light on the reasons why these spaces are maintained – and indeed increased – in spite of the heterogenous expectations of the people involved. - « Profiter de sa jeunesse avant de se caser » : Entre injonction normative, variation sociale et effet de genre - Emmanuelle Santelli p. 25-42 Basé sur les données recueillies au cours d'une enquête sur la formation des jeunes couples, cet article entend comprendre le passage entre le moment où les jeunes adultes souhaitent « profiter de leur jeunesse » et celui où débute la première cohabitation de couple. Cette période de la jeunesse est marquée par des normes sociales qui agissent différemment selon le sexe et le milieu social mais qui, dans tous les cas, assignent au couple la fonction de se projeter dans un avenir familial. Organisé en quatre parties, l'article tente de reconstituer les différentes étapes de ce processus pour saisir le sens de ces disparités qui, in fine, renvoient à des rôles socialement assignés : tandis que la norme reproductive continue de peser sur les femmes, les hommes, eux, doivent toujours subvenir aux besoins matériels du foyer.« Make the most of your youth before settling down »Based on data collected during a study of young people in new relationships, this article aims to understand the shifts between the time when young adults want to “make the most of being young” and the point at which they settle down for the first time as a couple. This period of youth is marked by social norms that have a different impact depending on the individual's sex and social origin, but which in any case give the couple the function of founding a future family. Organized in four sections, the article attempts to reconstruct the different stages of this process in order to understand the disparities which ultimately reflect socially assigned roles; while norms about motherhood and reproduction continue to weigh on women, men are still seen as having to provide material support for the household.
Dossier. Jeunesses « de rue » et « à la rue »
- Introduction : L'occupation juvénile de l'espace public par défaut d'espace privé - Francis Lebon, Thomas Sauvadet p. 43-54
- Jeunesses populaires et jeunesses de rue - Gérard Mauger p. 55-69 La délinquance et les violences urbaines qui focalisent par intermittence l'intérêt des partis politiques, des médias et des sciences sociales trouvent leur ancrage spatial dans la rue et leur implantation sociale dans une fraction minoritaire de ceux qu'ils désignent comme les « jeunes de cité », incarnation contemporaine des « classes dangereuses ». Sur la base de ses propres enquêtes et de quelques autres travaux, l'auteur montre comment on peut tenter de rendre compte à la fois de cette localisation spatiale et de cet ancrage social en mettant en évidence les « raisons » et les « causes » des pratiques délinquantes et/ou émeutières d'une fraction des « jeunes de cité » : la minorité de jeunes des classes populaires, souvent issue de l'immigration et reléguée dans les zones urbaines sensibles (ZUS).Working class youth and street youth
Delinquency and urban violence, which sporadically attract attention from political parties, media, and social sciences, are spatially anchored in the street and socially anchored in a small minority of those referred to as “housing project kids”, the contemporary incarnation of the “dangerous classes”. Drawing on both his own studies and others, the author shows how we can try to account for this spatial localisation and social anchorage by shedding light on the “reasons” and “causes” of the delinquent and/or riotous behavior of a fraction of these “project kids”, who are a minority of young people from working classes, often from immigrant backgrounds relegated to sensitive urban areas (zones urbaines sensibles, ZUS). - « Avoir un local à soi » : Enjeux de territoire entre jeunes de rue et institutions d'un quartier populaire - Alice Daquin p. 71-88 Cet article analyse l'importance des pratiques des espaces publics dans la construction identitaire des jeunes hommes de quartiers populaires, et les rapports de force qu'elles engendrent avec les institutions locales (police, bailleur, mairie). Issus d'un travail ethnographique, l'article démontre, notamment à travers l'échec de l'obtention d'un local pour les jeunes, l'absence d'espace de conflictualisation, d'intégration et de participation où cette jeunesse pourrait prendre place.“A place of one's own”This article analyses the importance of activities in public spaces in the identity construction of young men in disadvantaged neighbourhoods, and the power relations they give rise to with local institutions (police, landlords, town councils). Based on ethnographic fieldwork, the article demonstrates – particularly through the failure of youth centre project – the lack of a space for conflictualisation, integration, and participation which these young people can call their own.
- Références plurielles à la rue dans les expressions numériques des jeunes sans domicile - Marianne Trainoir p. 89-109 Les activités, les pratiques culturelles, communicationnelles et d'information ainsi que le rapport au monde des jeunes sont aujourd'hui intimement liés aux outils numériques, y compris dans les franges les plus marginalisées de la population juvénile. À partir d'une enquête mêlant ethnographie de terrain et ethnographie des espaces numériques, nous proposons dans le cadre de cet article une analyse des références à la rue dans les expressions numériques des jeunes sans domicile, qui sont en effet, nombreux à faire usage des réseaux socionumériques. Dans leurs publications, les références à la rue comme espace de vie, espace de pratiques, espace imaginaire et milieu d'interconnaissance sont plurielles et dévoilent des expériences individuelles et collectives.Multifaceted references to the “street” in the digital expressions of homeless youth
The cultural practices, but also the communication and information practices of young people today, along with their relationship with the world, are all intimately connected to digital tools. This is true even for the most marginalised young people. Based on a study that combines ethnographic fieldwork, and ethnography of digital spaces, this article analyses the references to the street that are made by the many young homeless people who use social networks and digital media. In their online comments and publications, references to the street as a living space, a space for practices, an imaginary space, and a space for sociability are diverse and reveal individual and collective experiences. - Grandir dans une chambre d'hôtel : Pourquoi l'espace public ne compense-t-il pas l'absence de chez-soi ? - Odile Macchi, Nicolas Oppenchaim p. 111-124 L'objectif de cet article est d'expliquer pourquoi la fréquentation du quartier de résidence et la participation aux sociabilités juvéniles qui s'y tiennent ne compensent que très rarement l'absence d'appropriation de l'espace domestique des adolescents sans logement fixe. Il s'appuie sur des entretiens répétés menés auprès d'une quarantaine d'adolescents hébergés en hôtel social, pour montrer comment ceux-ci font face à un défaut d'espace privé, qui ne leur permet pas de se ménager des marges d'autonomie au sein de leur famille, mais aussi à de nombreux déménagements, dans des quartiers souvent enclavés, qui entraînent un faible investissement des espaces publics situés à proximité de chez eux.Growing up in a hostel room
This article seeks to explain why frequenting neighbourhood spaces and participating in young peoples' social interaction that occurs there does not compensate, or only rarely, for the lack of appropriation of a domestic space among homeless teenagers. It draws on repeated interviews conducted with forty teenagers living in social hostels, to show how they deal with a lack of private space, which prevents them creating spaces of autonomy within their families. It also shows how they deal with repeated relocations, often to isolated neighbourhoods, which leads to lesser investments in local public spaces.
Lectures
- Comptes rendus - p. 125-134