Contenu du sommaire : Les États-Unis et l'Europe depuis 1945

Cet article propose de présenter l'histoire du Collège de l'Europe libre. Fondé par l'organisation anticommuniste National Committee for a Free Europe en 1951 et situé à Strasbourg-Robertsau, il offrait des bourses d'études aux jeunes réfugiés d'Europe de l'Est ayant fui leur pays soviétisés pour venir en Occident. Au-delà de son but humanitaire, l'initiative avait aussi une mission ouvertement politique. Il s'agissait de former de futurs cadres politiques en cas d'effondrement du bloc soviétique. L'article relate l'origine du projet d'Université, son insertion au cœur de la guerre psychologique américaine, son établissement en France ainsi que son rôle dans la stratégie américaine à l'égard des nations captives de l'URSS au début de la guerre froide.

Le Réarmement moral, un mouvement transnational religieux et anticommuniste, met en place entre 1949 et 1951 une université privée – le Collège de la Bonne Route – dont l'activité se situe entre la Suisse, les États-Unis et la Grande-Bretagne. Une institution pensée pour former ses plus jeunes recrues à la « guerre des idées » afin de défendre une société d'inspiration chrétienne en pleine Guerre froide. Cet article part ainsi de l'étude de cas pour analyser, plus spécifiquement, le réseau international des élites économiques, politiques, académiques et religieuses qui participent activement aux activités du Collège et du Réarmement moral, conduisant à une meilleure prise en compte du rôle des mouvements religieux dans les processus d'américanisation de l'Europe et d'internationalisation des élites.

L'histoire économique des relations transatlantiques d'après-guerre s'est articulée autour de deux discours prédominants : l'aide américaine à la reconstruction de l'Europe par le plan Marshall et « le défi » des investissements des entreprises américaines en Europe. Mais peu de recherches ont lié ces deux éléments. De plus, les études existantes ont négligé l'expansion des entreprises européennes outre-Atlantique. Cet article tâchera de remédier à ces deux lacunes de la recherche en examinant les relations transatlantiques sous l'angle des entreprises. En particulier, le cas de l'épicier belge Delhaize, sa participation aux programmes d'assistance technique des États-Unis dans les années 1950, les défis qu'il a dû relever dans les années 1960, et son expansion sur les marchés des États-Unis dans les années 1970 offrira une nouvelle dimension à l'histoire des relations transatlantiques au cours du xxe siècle et l'histoire de la mondialisation.

D'avril 1959 à décembre 1961, le prince Charles de Luxembourg assuma la présidence du Board of Industrial Development (BID), un instrument de promotion du Grand-Duché à destination des investisseurs américains. Pourtant, il ne s'agit que d'une façade derrière laquelle les États-Unis cherchèrent à établir une base opérationnelle pour la CIA, tout en favorisant la mise en place du service de renseignement luxembourgeois. Un homme joua un rôle déterminant dans toutes ces opérations ainsi que dans la formation du BID. Il s'agissait d'un agent de la CIA, Joseph E. Gurley. En trois ans d'activités, le BID permit toutefois à cinq entreprises américaines de s'installer au Grand-Duché.

Cet article retrace les origines et la genèse de la mobilisation collective du patronat américain et ouest-européen de l'industrie pharmaceutique de 1963 à 1970. Il démontre que cette mobilisation naît dans un contexte marqué par l'émergence d'un mouvement global de contestation du prix des médicaments s'exerçant, d'une part, à l'échelle internationale avec l'affirmation des pays non-alignés et, d'autre part, à celle des États avec la diffusion des conclusions des investigations du sénateur américain Estes Kefauver sur le prix des médicaments. La pression provenant avant tout des pays en voie de développement, elle pousse les dirigeants de l'industrie pharmaceutique de part et d'autre de l'Atlantique à coopérer afin de défendre les intérêts de la branche. À la fin des années 1960, elle débouche ainsi sur la création de nouvelles structures internationales capables de répondre aux enjeux posés par ce mouvement.

Cet article étudie le chemin « paradoxal » d'une institution transnationale en Europe de l'Est. Le texte aborde la généalogie internationale du réseau Open Society Foundations (OSF) avant 1989 et la synergie entre sa philosophie et les aspirations intellectuelles de l'époque. Il se concentre par la suite sur l'université d'Europe centrale (Central European University, CEU), l'institution la plus pérenne et la plus visible de la constellation Soros en Europe de l'Est. Son développement s'inscrit dans les processus de transformations politiques et académiques durant la période « postcommuniste ». Trois questions sont examinées dans leurs dynamiques diachroniques imbriquées : l'identité académique de l'institution, la géographie philanthropique et la socialisation universitaire d'une nouvelle génération. Cette étude de cas permet d'observer les dynamiques entre les espaces académique et politique ainsi que de mettre en question des dates et des périodes charnières. Cette approche entend dépasser l'opposition entre la perspective des democratic studies et celle des analyses critiques.

Dans une perspective d'études culturelles, cet article analyse les tendances actuelles au sein des médias de masse visant à transformer la réalité en son simulacre ; on peut parler à cet égard d'un pastiche de télé-réalité qui, tout en visant à divertir l'audience la plus large, occulte le véritable rapport de force qui oppose un grand public, dupe, aux intérêts dominants des milieux d'affaires. En conclusion, le texte examine les structures hiérarchiques verticales qui caractérisent le pouvoir des entreprises face au potentiel supposément plus égalitaire des structures horizontales, de type réseau, favorisées par Internet.