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Revue | Revue de l'OFCE (Observations et diagnostics économiques) |
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Numéro | no 169, novembre 2020 |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Polarisation et bas salaires : comment sortir certains emplois de l'impasse ? : Une analyse de la situation des salariés affectés aux tâches d'entretien - François-Xavier Devetter, Julie Valentin p. 5-38 En France, comme dans la plupart des autres pays de l'OCDE, on observe une croissance importante de l'une des composantes des emplois non qualifiés : les emplois liés au nettoyage (environ deux millions de personnes ou 8 % de la main-d'œuvre salariée). Cette contribution a pour objet les conditions de travail de ces salariés. À partir de l'exploitation de l'enquête Conditions de travail-risques psychosociaux, 2016, nous montrons d'abord que ces métiers cumulent de nombreuses caractéristiques défavorables (rémunérations basses, conditions de travail pénibles, reconnaissance sociale limitée et perspectives de mobilité faibles). Nous faisons ensuite apparaître qu'un rapport salarial plus protecteur (emploi non externalisé et emploi public) et/ou la moindre spécialisation des travailleurs sur les tâches d'entretien en les incluant dans des fonctions plus larges (de soin et d'éducation en particulier) améliorent sensiblement leur situation. Nous discutons enfin des politiques publiques susceptibles de favoriser ces modalités d'emplois et leur faisabilité, en particulier du point de vue des risques d'éviction des salariés les moins qualifiés et de leur soutenabilité économiqueIn France, as in most other OECD countries, there is a significant growth in one of the components of these unskilled jobs: cleaning-related jobs (about 2 million people or 8% of the labor force). This contribution focuses on the working conditions of these employees. From the exploitation of the Working Conditions — Psychosocial Risks Survey, 2016, we first exhibit the many unfavorable characteristics of these occupations (low wages, arduous working conditions, limited social recognition and low mobility prospects). We show that a more protective wage-labor nexus (non-outsourced employment and public employment) and / or the lesser specialization of the workers on the maintenance tasks significantly by including them in broader functions (care and education in particular) improves their situation. Finally, on this ground, we discuss public policies able to support more protective statutes and organizational models based on a lesser division of labor and their feasibility in regard to the risk of eviction of the least qualified employees and their economic sustainability.
- L'élasticité de l'offre de travail des femmes en France : Petite revue de méthodes et de résultats - Karine Briard p. 39-72 La mesure de l'élasticité de l'offre de travail des femmes à leurs revenus est un champ d'analyse peu unifié, laissant plusieurs questions méthodologiques et empiriques ouvertes. Cet article vise à donner des repères sur les stratégies d'estimation mobilisées dans la littérature empirique et à recenser les estimations menées sur la France.La plupart des études menées sur les vingt dernières années qui explicitent cette élasticité reposent sur l'estimation de modèles structurels à choix discret d'heures, plus flexibles que les modèles à offre continue pour rendre compte de la complexité du contexte décisionnel.Si les élasticités publiées sont dispersées, en raison de différences de date, de champ et de spécification, les résultats convergent sur le fait que l'élasticité de l'offre de travail des femmes est plus élevée que pour les hommes, notamment lorsqu'elles sont en couple et mères de jeunes enfants. En revanche, les résultats divergent sur la sensibilité de l'offre des femmes à celle de leur conjoint, ce qui questionne la modélisation des interactions stratégiques au sein des ménages.Measuring the elasticity of labor supply of women is a weakly unified field of analysis, with many open methodological and empirical questions. This paper aims to provide some benchmarks on the estimation strategies used in the empirical literature and to list the estimates carried out for France.Over the last twenty years, most studies that provide elasticities are based on the estimation of structural discrete choice models, which are more flexible than continuous models to account for the complexity of the decision-making context.Though published elasticities are dispersed due to differences in date, scope and specification, some results converge: the elasticity of labour supply of women is higher than men, especially when they are married and have young children. But the results diverge on the sensitivity of labour supply of women to their spouse's one, what indicates difficulties in modelling strategic interactions within households.
- Qui émet du CO2 ? Panorama critique des inégalités écologiques en France - Antonin Pottier, Emmanuel Combet, Jean-Michel Cayla, Simona de Lauretis, Franck Nadaud p. 73-132 Cet article propose un panorama des inégalités d'émissions de gaz à effet de serre (GES) entre les ménages français. Il présente de manière détaillée et critique les conventions méthodologiques retenues pour le calcul des « émissions des ménages », et les présupposés qui les accompagnent. Le principe d'attribution généralement retenu, l'empreinte carbone qui assigne aux ménages les émissions des produits consommés, véhicule des conceptions implicites de la responsabilité. Il focalise l'attention sur les contributions des individus, sur leurs choix, il peut occulter le rôle des acteurs non individuels tout comme la composante collective des émissions de GES, et négliger les dimensions de la responsabilité qui ne sont pas liées à la consommation.Nous estimons, à partir des données de l'enquête Budget de famille 2011, la distribution des empreintes carbone des ménages. Les émissions des ménages sont tendanciellement croissantes avec le revenu, mais elles présentent aussi une forte variabilité liée à des facteurs géographiques et techniques qui contraignent à recourir aux énergies fossiles.À partir d'enquêtes sectorielles (ENTD 2008 ; PHEBUS 2013), nous reconstruisons également les émissions de CO2 des ménages liées aux énergies du logement et du transport. Pour le transport, les émissions sont proportionnelles aux distances parcourues du fait d'un recours prépondérant à la voiture individuelle. Le tissu urbain contraint à la fois la longueur des déplacements quotidiens et l'accès à des modes de transport moins carbonés. Pour le logement, si les surfaces à chauffer croissent avec le revenu et l'éloignement des centres urbains, le premier facteur de variabilité des émissions est le système de chauffage. Il est peu lié au niveau de vie mais davantage au tissu urbain, qui contraint l'accès aux différents vecteurs énergétiques.Nous discutons enfin les difficultés posées par l'estimation des émissions des ménages les plus aisés, tant techniques que conceptuelles.This article provides an overview of the inequalities in greenhouse gas (GHG) emissions between French households. It presents in a detailed and critical manner the methodological conventions used to compute “household emissions”, and the related assumptions. The most common principle of attribution, the carbon footprint, which assigns to households the emissions of the products they consume, conveys implicit conceptions of responsibility. It focuses attention on the contributions of individuals, on their choices. It may obscure the role of non-individual actors as well as the collective component of GHG emissions, and neglect the dimensions of responsibility not related to consumption choices.We estimate the distribution of household carbon footprints based on data from the 2011 French Expenditure Survey. Household emissions tend to increase with income, but they also show a strong variability linked to geographical and technical factors that force to use fossil fuels.Based on sectoral surveys (ENTD 2008; PHEBUS 2013), we also reconstruct household CO2 emissions linked to housing and transport energy. For transport, emissions are proportional to the distances travelled due to the predominant use of private cars. Urban settlement patterns constrain both the length of daily commuting and access to less carbon-intensive modes of transport. For housing, while house sizes increase with income and distance from urban centres, the first factor to account for variability of emissions is the heating system. It has little to do with income but more to do with settlement patterns, which constrain access to the various energy carriers.Finally, we discuss the difficulties, both technical and conceptual, involved in estimating emissions of the super-rich (the top 1 percent)
- Redistribution et immigration en Europe : Y a-t-il un dilemme ? - Michel Forsé, Maxime Parodi p. 133-160 Entre ouverture à l'immigration et progrès de la redistribution, serions-nous face à un dilemme qui obligerait à choisir l'une ou l'autre de ces options ? En examinant les données de l'European Social Survey, et en comparant les situations de dix pays européens, il apparaît qu'immigration et protection sociale ne s'opposent pas aux yeux des opinions publiques. Ce sont souvent les sociétés les mieux protégées socialement qui sont les plus ouvertes. Et ceci n'est pas dû à ce qu'on appelle un welfare magnet. Ce rapport positif entre ouverture et protection est lié notamment au sentiment de confiance envers les autres qui joue un rôle important pour l'articulation de ces deux dimensions.Between openness to immigration and progress in redistribution, are we facing a dilemma that would force us to choose one or the other of these options? By examining data from the European Social Survey, and comparing the situations of ten European countries, it appears that immigration and social protection are not in conflict from the point of view of public opinion. Often it is the most socially protected societies that are most open. And this is not due to a so-called welfare magnet. This positive relationship between openness and protection is linked in particular to the feeling of trust in others which plays an important role in the articulation of these two dimensions.