Contenu du sommaire : Sociologues industriels en RFA. Questions et débats.

Plus qu'un rappel historique du développement de la sociologie industrielle en République fédérale , des années 50 à nos jours , l'auteur propose ici un essai d'interprétation des tendances les plus significatives de cette période. La «renaissance » concerne aussi bien les méthodes que la thématique ou la réflexion théorique. Si le marxisme (redécouvert par les étudiants autour des années 60) contribue largement au débat actuel entre sociologues industriels, comblant ainsi un certain «déficit théorique », il n'apparaît cependant pas avoir résolu jusqu'ici la question essentielle de la «médiation » entre théorie et recherche empirique.

Les réflexions qui suivent illustrent parfaitement l'une des tendances actuelles de la sociologie industrielle en RFA (et ailleurs), celle de la recherche-action. Partant d'une question socialement importante, «la qualification du travailleur peut-elle avoir une fonction de changement dans l'organisa¬ tion du travail ? », l'auteur propose une démarche originale axée sur le potentiel d'autonomie professionnelle du travailleur. Il s'agit moins alors d'en rester à l'analyse des déterminants sociaux de cette autonomie (position que l'auteur considère comme l'une des déficiences de la sociologie industrielle actuelle), mais plutôt de démontrer dans quelle mesure elle représente les chances d'une action sociale transformatrice de la situation de travail et de ses déterminants.

La technique laisse-t-elle à l'organisation du travail une marge de liberté ? Selon fauteur, qui considère que cette marge reste toujours très étroite, les conditions d'un changement des rapports entre technique et organisation , même sur la base d'une action collective des travailleurs, restent subordonnées aux exigences de la valorisation du capital. Partant de la notion de qualification , il s'efforce de caractériser la démarche propre aux sociologues de Göttingen (SOFI) que l'on a indûment, selon lui, qualifiée de «technologisme ». Au total les chances d'améliorer des conditions de travail ne peuvent s'exercer qu'au niveau des élasticités permises par la valorisation du capital ; elles ne seront toujours que le résultat d'un compromis en fonction des rapports de force.

L'intérêt de cette note (dont l'objet premier est d'introduire la démarche théorique proposée par Bechtle dans l'article suivant ) est de situer celle-ci dans le débat actuel sur les rapports entre technologie, organisation du travail , et structures des qualifications. Si la référence à la notion de «stratégie d'entreprise » permet de dépasser la thèse ancienne du déterminisme technologique, cette notion est utilisée ici pour rendre compte des exigences de la valorisation du capital et de l'autonomie relative de l'entreprise elle-même. La question, encore sans réponse, est alors de définir le statut théorique aussi bien de l'entreprise que du capital particulier. C'est ce que tentent à l'ISF (Munich ) Bechtle et ses collègues.

Le concept de stratégie d'entreprise à la base de la démarche théorique proposée par l'auteur ne se réfère pas à la théorie de l'action, mais renvoie plutôt à l'approche marxiste. Prenant acte de l'insuffisance des modèles structurels classiques, il s'interroge (parfois d'une manière auto-critique ) sur les limites de l'autonomie de l'entreprise et celles de l'utilisation de l'asymétrie sociale du pouvoir : comment le procès concret de production permet-il de structurer à la fois technique de production et organisation du travail , tout en contrôlant marché et concurrence ?

Si l'étude des constituants de la conscience ouvrière correspond à une tradition dans la sociologie industrielle allemande , l'article qui suit représente cependant une position originale dans le débat actuel sur la «problématique de la conscience ». Alors que les études anciennes (Popitz , Bahrdt , 1955) mettaient en relation situation de travail et formes de la conscience ouvrière, ici, les auteurs tentent de définir les phénomènes de conscience à partir de la notion d'autonomie relative des «modèles d'interprétation», Ceux-ci seraient en quelque sorte les «théories » (de la pratique quotidienne ) par lesquelles groupes sociaux et classes sociales interprètent la réalité, chaque modèle à la manière d'un filtre, sélectionnant les faits sociaux selon des schémas cognitifs propres, d'où découleraient les règles normatives d'orientation de l'action.

Bien que traitant aussi de la problématique de la conscience , l'auteur se réfère ici plus directement à l'approche marxiste pour traiter les «rapports de médiation » entre conscience des travailleurs et position dans le procès social de reproduction. Dès lors les dimensions de la conscience ne sont explicables que dans la mesure où elles seront rapportées à la «structure nucléaire » des sociétés capitalistes. L'auteur (sans doute le plus représentatif actuellement de cette orientation ) estime que la situation du travailleur comme sa conscience ont leur fondement dans les formes historiquement déterminées de la production sociale, sans définir toutefois comment s'articulent dans la recherche concrète théorie et étude empirique.