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Revue Flux Mir@bel
Numéro no 127, 2022/1
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Éditorial - Carine Henriot, Valérie Schafer p. 1-2 accès libre
  • Quand Citroën et Renault exploitaient des autocars : nouveaux entrants et réseaux anciens dans l'agglomération parisienne des années 1930 - Arnaud Passalacqua p. 3-11 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Alors que la mobilité voit aujourd'hui se démultiplier les offres portées par des acteurs venus de différents horizons, que les marchés s'ouvrent à la concurrence et que l'agglomération parisienne entend basculer dans une nouvelle échelle du fait du Grand Paris Express, cet article propose un retour sur l'un des premiers épisodes historiques où un tel mélange s'est opéré : les années 1930. Sur fond de crise économique, qui impose aux constructeurs automobiles de trouver de nouveaux débouchés, et de crise urbaine, marquée par l'essor d'une banlieue mal desservie, c'est le cadre alors établi des services publics qui se trouve remis en cause par la nouvelle concurrence des autocars Citroën et Renault. Les deux constructeurs, déploient une logique nouvelle très volontariste, venue de l'industrie automobile, dans un monde marqué par des logiques d'exploitant peu enclins à prendre des risques. Mais la résistance institutionnelle qui s'oppose à l'essor de leurs services finit par céder et par les intégrer, peu ou prou, dans le périmètre de l'offre de transport, redéfini par la politique de coordination entre rail et route alors à l'œuvre. Ce faisant, elle contribue ainsi à repousser l'autre forme de concurrence nouvelle, plus sauvage et moins identifiable, que représentent les taxis collectifs, eux aussi suscités par la crise économique.
    At a time when the mobility sector is witnessing a proliferation of offers supplied by a variety of companies, when markets are opening up to competition, and when the Paris metropolitan area is about to enter a new era with the Grand Paris Express, this article looks back at one of the first historical episodes in which such a mix took place: the 1930s. On a background of economic crisis, which required car manufacturers to find new outlets, and an urban crisis, marked by the growth of poorly served suburbs, the then established framework of public services was challenged by the new competition from Citroën and Renault coaches. The two manufacturers were deploying a new, very proactive approach, directly inherited from the automobile industry, in a world marked by the logic of operators who were not inclined to take risks. But the institutional resistance to the development of their services eventually gave way and they were integrated, more or less, into the perimeter of the transport offer, redefined by the policy of coordination between rail and road that was then elaborated. In so doing, it helped to push back the other, wilder and less identifiable, form of new competition represented by shared cabs, which were also triggered by the economic crisis.
  • Changements techniques en assainissement urbain : l'expérience des « techniques alternatives » dans l'agglomération lyonnaise (1990-2010) - Céline Patouillard, Jean-Yves Toussaint, Sophie Vareilles p. 12-27 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Cet article porte sur les processus de changements techniques à partir de l'exemple des techniques alternatives. Il s'appuie sur deux études de cas dans l'agglomération lyonnaise : le parc technologique de Porte des Alpes à Saint-Priest et le parc Jacob Kaplan à Lyon. L'enquête implique des entretiens auprès des acteurs mobilisés dans les projets d'aménagement des parcs et une analyse de la documentation produite pour ces projets. Bien que les techniques alternatives se soient développées depuis les années 1970 et qu'elles se révèlent efficaces pour la gestion des eaux pluviales, elles peinent à se banaliser totalement. Afin de mieux comprendre les processus de banalisation et les difficultés qu'ils soulèvent, nous nous intéressons au rôle de la morphologie sociale dans ces processus. Les études de cas montrent que les techniques alternatives s'adossent aux espaces publics urbains et aux réseaux d'assainissement via leurs organisations, leurs usages et leurs éléments techniques. C'est de cette manière que la morphologie sociale participe à la diffusion de ces dispositifs. En dépit d'une certaine diffusion, les techniques alternatives et leurs promoteurs ne parviennent pas à trouver une organisation adéquate dans cette morphologie sociale, ni à la faire évoluer pour en constituer une. De fait, les techniques n'ont pas d'organisation stable et régulière pour leur gestion. Cette organisation est négociée à chaque projet d'aménagement. Le recours à la morphologie sociale dans notre analyse ouvre des pistes pour penser des projets et des politiques, qui considèrent ensemble les nouveaux objets et les moyens nécessaires à leur existence et qui pourraient être ainsi mieux à même de répondre aux crises actuelles, notamment environnementales.
    Technical changes are analysed through the case of SUDS. This analysis is based on two case studies in the Lyon metropolitan area: Technology park (Saint-Priest) and Jacob Kaplan park (Lyon). The survey includes interviews with stakeholders involved in these urban projects and an analysis of the documentation produced during these projects. SUDS are implemented since 1970's and are effective for the storm-water management. Despite this, their implementation raises problems. In order to better understand the processes of trivialization and the difficulties they raise; we consider the role of the social morphology in this process. The case studies show that SUDS use for their development not only the organisations, but also the rules of usage and technical items of the public spaces and the sewer system. This is how, the current social morphology contributes to the development of SUDS. Despite of a certain development, these objects and their promoters do not find an appropriate organization in this social morphology; and they are not able to make it change to constitute one. In fact, the SUDS do not have a stable organization; this organization is negotiated in each urban project. The use of the social morphology in our analysis opens up avenues for thinking about projects and policies, which consider together new objects and the means necessary for their existence and which could thus be better able to respond to current crises, especially environmental ones.
  • Les ambivalences des politiques locales de déplacements au concret de la conception d'un projet d'espace public : le cas du Vieux-Port de Marseille - Benoit Romeyer, Frédérique Hernandez p. 28-47 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Cet article participe de l'analyse des projets d'aménagement urbain visant un redéploiement des modes alternatifs à l'automobile. Plus particulièrement, il cherche à éclairer la manière dont les ambivalences contenues dans les politiques locales de mobilité tendent à se répercuter sur les projets d'aménagements urbains. En appui sur des cadres théoriques issus des travaux sur la conception en urbanisme, celui-ci étudie la genèse d'un projet de réaménagement d'espace public en croisant l'analyse organisationnelle de son dispositif de production collective (les acteurs et les procédures engagés) et l'analyse substantielle de son contenu concret (les enjeux et les partis pris d'aménagement en balance). Il prend pour cas d'étude un projet de réaménagement d'espaces publics à l'interface entre transports et aménagement urbains : le Vieux Port de Marseille. Amorcé en 2009 par le lancement d'un concours international de maîtrise d'œuvre visant sa semi-piétonnisation, le réaménagement du Vieux-Port participe d'une stratégie globale de réorganisation des déplacements et des circulations à l'échelle du centre de Marseille. Cet aménagement urbain primé constitue ainsi un exemple propice à l'observation empirique de la rencontre, sur un même espace et une même scène de conception, d'une diversité d'approches de la conception urbaine. L'étude de cas proposée se fonde sur deux méthodologies complémentaires : l'analyse d'un ensemble de corpus permettant de replacer le projet dans une trajectoire spatiale et temporelle large, et la passation d'entretiens semi-directifs auprès des parties prenantes du pilotage et de la conception du projet. Les résultats obtenus éclairent, d'une part, les travaux s'intéressant aux nouveaux cadres de coopération dans la production des projets d'urbanisme et, d'autre part, ceux portant sur les déclinaisons spatiales des politiques de mobilité urbaine.
    This article contributes to the analysis of urban development projects aiming at a redeployment of alternative modes of transport to the car. More specifically, its aim is to analyse how ambivalences contained in local mobility policies tend to affect urban projects. Based on theoretical frameworks derived from work on urban design, it studies the genesis of a project for the redevelopment of public space by combining the organisational analysis of its collective production system (the actors and procedures involved) and the substantial analysis of its concrete content (the stakes and the planning biases in balance). It takes as a case study the Vieux-Port of Marseille whose redevelopment as a public space is at the interface between transport and urban design. The redevelopment of the Vieux-Port, which began in 2009 with the launch of an international design competition aimed at semi-pedestrianisation, is part of an overall strategy to reorganise transport and traffic in the centre of Marseille. This award-winning urban development thus constitutes an example conducive to the empirical observation of the encounter, in the same space and on the same design stage, of a diversity of urban design approaches. The case study is based on two complementary methodologies: a literature review enabling the project to be placed in a broad spatial and temporal trajectory, and the conduct of semi-directive interviews with the stakeholders involved in the steering and design of the project. The results obtained contribute, on the one hand, on the work dealing with new cooperation frameworks in the production of urban projects and, on the other hand, on the spatial declinations of urban mobility policies.
  • L'aménagement d'un centre-ville sans voiture à Oslo : véritable politique de restriction automobile ou simple requalification de l'espace public consécutif à l'effacement du trafic motorisé ? - Grégoire Tortosa p. 48-64 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    L'alternance politique à la municipalité d'Oslo en 2015 a amené aux affaires une coalition travaillistes-socialistes-écologistes qui, depuis, porte l'ambition de faire du centre-ville d'Oslo le plus vaste espace piéton d'Europe. Depuis 2018, la municipalité déploie ainsi son projet de « vie urbaine sans voiture » qui vise progressivement à chasser l'automobile du centre-ville et à réattribuer une nouvelle fonction aux espaces publics reconquis. Alors que cette entreprise est présentée par ses protagonistes comme une ambitieuse mesure de restriction automobile, en rupture avec la politique de mobilité des années passées, cet article défend la thèse qu'elle constitue, en réalité, le prolongement et la dernière phase d'un long processus, entamé depuis les années 1990, d'effacement des réseaux routiers de surface, participant tout autant à fluidifier la circulation automobile qu'à rouvrir la ville sur son front de mer. Ainsi, Oslo présente l'originalité d'une situation urbaine où la quête d'accroissement des capacités routières des années 1990, a permis, 25 ans plus tard, la piétonnisation d'un centre-ville, déchargé du trafic automobile. L'approche automobile de la mobilité, propre au paradigme de la ville moderne, et celle omnimodale, propre à celui de la ville durable, ailleurs opposées et concurrentes, semblent ici former un continuum, la première ayant permis l'avènement de la seconde. L'espace actuellement soustrait à la voiture en surface, au profil des modes alternatifs a, en effet, été largement compensé et précédé par le creusement d'un réseau routier souterrain destiné à faciliter la circulation automobile.
    The 2015 political turnover at the municipality of Oslo brought to power a Labour-Socialist-Green coalition which, since then, has strived to make Oslo's city centre the largest pedestrian space in Europe. Since 2018, the municipality has rolled out its “car-free urban life” project which aims at progressively chasing automobiles out of the city centre and giving a new purpose to the regained public spaces. While this endeavour is presented by its initiators as an ambitious automotive-restricting measure, and a shift from the mobility policies of the previous years, this article argues that it is, in fact, the continuation and last step of a longer process, launched in the 1990's: the removal of ground road networks, aimed at decongesting automotive traffic as well as reopening the city-centre onto its seafront. Thus, Oslo offers a very peculiar urban situation: the search for an increased road capacity in the 1990's allowed, 25 years later, the city centre being exclusively pedestrian and freed from automotive traffic. While the automotive-centred approach to mobility—specific to the modern city paradigm—and the omnimodal approach—specific to the sustainable city paradigm- are elsewhere opposed and mutually exclusive, they seem to form, in Oslo, a continuum, the former having paved the way to the latter. Indeed, the ground lost by automotive mobility in surface, at the benefits of alternative transports, was preceded and largely offset by the tunnelling of an underground road network which facilitates automotive traffic.
  • La gouvernance des données urbaines entre territoire de projets et projet de territoire. L'exemple de Rennes Métropole - Marie-Anaïs Le Breton, Hélène Bailleul, Jean-Baptiste Le Corf, Boris Mericksay p. 65-84 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Par l'observation dans le temps de trois moments marquants de la politique des données à Rennes, cet article se propose de réfléchir à la manière dont des projets informationnels sont utilisés comme levier de production et de réinvention des services urbains nécessitant de repenser les principes de l'action publique. Nous posons comme hypothèse principale que la mise en place d'une gouvernance collective des données serait un moyen de régulation des rapports de force entre les acteurs et, de surcroît, que cette dynamique permettrait de façon volontariste de repositionner progressivement la métropole dans ce secteur hautement concurrentiel. Entre recherche d'un positionnement et défense d'une réappropriation des données par le local, le rôle des acteurs publics dans la gouvernance informationnelle mérite d'être étudié par une approche qualitative et historique. L'article décrit les bifurcations de la politique des données dans une trajectoire locale, celle de Rennes Métropole, au regard des idéologies qui sous-tendent les projets menés depuis le début des années 2010 et de leurs actualisations ces dernières années. L'article conclut sur les difficultés qu'il reste à surmonter pour pouvoir parler de gouvernance partagée des données, en abordant notamment l'inclusion limitée des citoyens et la question ambiguë de la souveraineté.
    The observation of the politics of data in Rennes (Brittany, France) over time enable to analyse the way information projects are used as a lever for the production and reinvention of urban services, both challenging the principles of public action. Our main hypothesis is that the implementation of a collective governance of data is used for regulating the power relations between actors and, moreover, that this dynamic would allow the metropolis to progressively reposition itself in this highly competitive sector. Between the search for a position and the defense of a local reappropriation of data, the role of public actors in the information commons deserves to be studied through a qualitative and historical approach. The article describes the bifurcations of data policy in a local trajectory, that of Rennes Métropole, with regard to the ideologies underlying the projects carried out since the early 2010s and their updates in recent years. The article concludes with the challenges that still need to be overcome in order to talk about shared data governance, including the limited inclusion of citizens and the ambiguous issue of sovereignty.
  • Redeploying Urban Infrastructure. The Politics of Urban Socio-Technical Futures, Jonathan Rutherford, Cham: Springer Nature, 2020, 191 p. - Denis Bocquet p. 85-86 accès libre