Contenu du sommaire : Mineurs mal accompagnés

Une fois n'est pas coutume, un coup de colère en guise d'édito : parce que parfois, la colère, c'est non seulement tout ce qui nous reste, mais aussi ce qui est le plus susceptible de nous porter, y compris vers de nouvelles luttes.

À rebours des représentations des « mineurs non accompagnés » sous le prisme de la « crise », de la « charge » voire du « danger », cette étude interroge la manière dont la constitution de ces jeunes en une catégorie spécifique d'intervention sociale peut être perçue, à des degrés divers et selon des formes multiples, comme une « chance », un « tremplin » voire une « manne » pour les adultes mobilisés autour d'eux.

Loin d'être un phénomène nouveau, la migration des jeunes venus d'ailleurs sans leur famille fait depuis les années 1990 l'objet d'une politisation accrue. Cependant, l'analyse du processus de catégorisation des mineurs isolés étrangers depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale est révélatrice de l'emprise des logiques politiques, héritées de l'époque coloniale et de la guerre froide, qui sous-tendent aujourd'hui encore la compréhension de la migration juvénile par les institutions. S'observe ainsi une continuité dans les pratiques d'identification et de prise en charge de l'enfance en danger, entre logique de police et raison humanitaire.

La protection des mineurs isolés étrangers par l'Aide sociale à l'enfance apparaît bien souvent comme une mise à l'abri sans que soit prise en compte la singularité de ces jeunes. Si cette prise en charge signifie tranquillité administrative et accompagnement éducatif, elle représente aussi bien souvent pour eux un renoncement à une certaine autonomie, à une liberté d'action et d'autodétermination. Cette infantilisation, qui traverse toute la protection de l'enfance, est particulièrement mal vécue par les jeunes étrangers isolés du fait de leurs expériences antérieures et de leurs aspirations.

Le soutien à l'autonomie des mineurs isolés étrangers constitue un angle mort du système d'accueil mis en place en Italie. La conception même de ce qu'est ou devrait être la protection de l'enfance étrangère en danger et les logiques d'assistanat et d'infantilisation qui la sous-tendent concourent à leur isolement, sinon à leur mise à l'écart. En Lombardie, une expérience originale d'accueil et d'accompagnement montre toute l'importance et les enjeux de l'émancipation de ces jeunes adultes en devenir.

La prise en charge des personnes étrangères mineures et isolées en Seine-Saint-Denis, d'abord guidée par l'impératif de protection de l'enfance en danger, s'est réorganisée autour d'un traitement différentiel fondé sur l'extranéité. L'analyse des archives départementales des services de l'aide sociale, réalisée dans le cadre du projet MINA 931, restitue ce processus interne. Opposé à ce tournant, qui s'imposera comme un modèle dans nombre de départements, le Gisti a souvent dénoncé la dégradation des pratiques du 93, en particulier lorsqu'en 20112, son président a choisi de laisser pendant des mois des enfants à la rue pour obtenir une aide de l'État.

Dans quelle mesure les mineurs non accompagnés, catégorisés par l'Éducation nationale parmi les « élèves allophones nouvellement arrivés », bénéficient-ils effectivement des modalités de scolarisation prévues pour les élèves étrangers ? Dans l'académie d'Aix-Marseille, leur scolarisation et leur orientation font l'objet d'un traitement à part, résultant de choix politiques, de contraintes plurielles mais aussi des tensions entre des acteurs pris dans des logiques et des pratiques contradictoires.

Cette contribution, fruit d'un dialogue entre une juriste et une psychologue, questionne et rend compte de l'interconnexion de ces deux disciplines dans le cadre de la prise en charge de mineures et mineurs étrangers isolés dans un service d'hébergement du Val-de-Marne. Ces professionnelles proposent d'analyser l'interdépendance entre les aspects administratifs et la santé mentale de ces jeunes, en partant des parcours de trois d'entre eux qu'elles ont été amenées à accompagner.

L'Université de Genève a mobilisé des étudiants de master dans le cadre d'une « clinique juridique » consacrée aux droits des jeunes étrangers non accompagnés. Cette formation pratique met en place des sessions d'informations juridiques auprès et avec les jeunes concernés. Elle passe aussi par des actions de sensibilisation et de plaidoyer, qui mettent en lumière la problématique de l'âge dans l'accès aux droits des jeunes.

Pour bénéficier d'une protection, les mineures et mineurs isolés étrangers au Cameroun doivent solliciter le statut de réfugié. Chronophage, complexe et restrictive, cette procédure semble à bien des égards quasi inaccessible et peu protectrice pour ces jeunes qui tentent de trouver refuge aux frontières nord du Cameroun, après avoir fui les exactions commises par Boko Haram. Et dans l'attente que l'administration compétente statue sur leur sort, qu'advient-il de ces enfants non accompagnés ?

Hommes de papier est un podcast qui propose une rencontre avec des sans-papiers, pendant 35 minutes. La voix de l'intime, de celles et ceux que l'on entend si peu, y est au cœur. Elle partage et rend compte de l'expérience du rejet, vécue comme une mise à l'épreuve de soi, et d'un quotidien comme placé en suspens faute de papiers. Disponible sur toutes les plateformes, ce document sonore consacré à l'exil et à l'accueil en France est à écouter1, si possible, avant de poursuivre.

Réunissant des migrantes chinoises travailleuses du sexe, le collectif Les Roses d'Acier se mobilise depuis 2014 contre les arrestations policières, les lois de pénalisation de la prostitution et en faveur d'actions communautaires visant à réduire les risques de violence et d'isolement. À travers cette mobilisation, ces femmes s'entraident, affirment la complexité de leurs parcours de vie au-delà du seul travail du sexe et font entendre une voix qui leur est propre.