Contenu du sommaire : Sols en danger : réduire l'artificialisation
Revue | Responsabilité et environnement |
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Numéro | no 91, juillet 2018 |
Titre du numéro | Sols en danger : réduire l'artificialisation |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Les sols : préservons ce socle de la vie pour les prochains siècles ! - Dominique Dron, André-Jean Guerin p. 3-5
Les enjeux et les rôles des sols dans l'économie du vivant
- Les sols au cœur de la zone critique de la Terre - Christian Valentin p. 6-9 Lieux d'échanges d'énergie, d'eau et de matières, les sols constituent le cœur de la zone critique de la Terre. Cette zone correspond à l'« environnement hétérogène et proche de la surface où des interactions complexes impliquant la roche, le sol, l'eau, l'air et les organismes vivants régulent l'habitat naturel et déterminent la disponibilité des ressources biologiques ». Bien qu'à la convergence de trois conventions des Nations Unies – sur la désertification, le climat et la biodiversité –, les sols demeurent largement méconnus du grand public, des décideurs et même de la communauté scientifique, car peu d'enseignements y sont consacrés dans les universités. Ils offrent pourtant des réponses aux grandes questions des dérèglements climatiques, de la sécurité alimentaire et de la réhabilitation des environnements dégradés. Menacés par de nombreuses formes de dégradation (érosion, imperméabilisation, pollution, salinisation...) et grands oubliés des droits français, européen et international, les sols sont l'objet de multiples conflits d'usage (urbanisation, production de produits bio-sourcés non alimentaires, accaparement...).Soil, the Earth's critical zone
As the place of exchanges between energy, water and organic matter, the soil is the Earth's central critical zone. In this heterogenous zone close to the Earth's surface, complex interactions involving rock, soil, water, air and living organisms regulate the natural environment and determine the availability of biological resources. The public, decision-makers and even the scientific community know little about this key topic, which figures in three United Nations conventions (on desertification, climate, and biodiversity) ; and few university courses are devoted to it. Nonetheless, the soil is a major element for handling the big questions of climate change, food security and land restoration. Threatened by several forms of degradation (erosion, impermeability, salinity, etc.), the soil and land – despite being neglected by French, European and international law – are the ground for many a contention about uses related to urbanization, land-grabbing, organic products (not just food), etc. - Fertilité des sols : la qualité par la vie - Luc Abbadie p. 10-12 Le concept de « fertilité » correspond à une vision utilitariste du sol qui s'attache à un certain nombre de caractéristiques physiques, chimiques, biologiques et spatiales qui seraient explicatives de la production agricole et, par extension, de la bonne santé des écosystèmes. Il y aurait un contenant, le bon sol, et un contenu, les plantes. Mais les organismes vivants ne font pas que s'accommoder des propriétés de leur environnement. En adoptant un point de vue évolutif, nous montrons que les plantes prennent le contrôle du sol en adoptant certaines caractéristiques physiologiques et morphologiques ou d'interaction avec les micro-organismes qui les affranchissent d'un certain nombre de contraintes. Il n'y a pas un sol et des plantes, mais un système sol-plante. Ces connaissances incitent à revoir profondément certaines pratiques culturales et sylvicoles.Soil fertility : Quality through life
The concept of “fertility” corresponds to a utilitarian view of the soil with a focus on the physical, chemical, biological and spatial properties that supposedly account for agricultural yields and, by extension, explain the healthiness of ecosystems. This view sees a container (the right soil) and its contents (plant life). However living organisms do not just adjust to the properties of their environment. By looking at changes and modifications, we realize that plants take control of the soil by adopting physiological and morphological characteristics, or interacting with microorganisms, and thus break free of certain exigencies. We thus come to see not the soil opposite plant life, but a soil-plant system. This knowledge leads us to thoroughly revise farming and forestry practices. - L'état des sols en France : l'artificialisation et les autres sources de dégradation - Véronique Antoni, Marlène Kraszewski p. 13-18 Les sols sont au cœur des grands enjeux environnementaux, comme la disponibilité en eau de qualité, la préservation de la biodiversité, la sécurité alimentaire ou la lutte contre le changement climatique. Or, ils ne se renouvellent que très lentement. En dépit de ce rôle essentiel, les sols subissent des dégradations variées : érosion, diminution de leur teneur en matière organique, tassement, contamination, etc. Agriculture et foresterie, industrie, construction de logements et d'infrastructures et changements d'usage en sont les causes. L'artificialisation semble être actuellement la cause principale de la dégradation des sols. En 2015, les sols artificialisés représentaient 9,4 % du territoire métropolitain.The state of the soil in France : “Artificial” land uses and others sources of degradation
The soil lies at the center of key environmental issues, such as the availability of a quality water supply, the conservation of biodiversity, food security, or climate change. However it is regenerated very slowly. Despite its importance, the soil is undergoing degradation owing to various factors : erosion, the loss of organic matter, compression, contamination, etc. Among the causes are farming, forestry, industry, changes in land uses and the construction of housing and infrastructures. This “artificialization”, whereby land is devoted to urban areas, infrastructures, industry and roads, is apparently the major cause of soil degradation. In 2015, 9.4% of France's surface area had thus been “artificialized”. - Les sols, facteurs d'atténuation ou, au contraire, d'aggravation du changement climatique - Suzanne Lutfalla, Lauric Cécillon, Pierre Barré p. 19-23 Dans cet article, nous présenterons comment les sols influencent le climat en tant que réservoir dynamique de carbone. Après avoir rappelé l'origine, la nature et le devenir du carbone des sols, nous montrerons que l'évolution des flux de carbone entre les sols et l'atmosphère est une composante majeure de celle de la concentration en CO2 atmosphérique. Nous discuterons ensuite des incertitudes fortes qui entourent les évolutions futures des stocks de carbone des sols, à toutes les échelles. Puis, nous reviendrons sur l'avènement, au niveau local (notamment dans le cadre des intercommunalités françaises) comme au niveau international, de politiques volontaristes en matière de séquestration du carbone dans les sols. Nous conclurons sur le fait que si les sols ont un fort potentiel d'atténuation du changement climatique et que la réalisation de ce potentiel s'accompagnera de bénéfices très importants pour la qualité des sols, la priorité pour lutter contre le changement climatique reste la baisse des émissions de gaz à effet de serre d'origine anthropique.The soil, a factor attenuating, or exacerbating, climate change
How does the soil, as a dynamic carbon sink, affect the climate ? The origin, nature and future of CO2 in the soil are described before showing that the movement of carbon between the earth and the atmosphere is a major factor in this gas's concentration in the atmosphere. The uncertainty surrounding carbon sequestration is examined on all scales by discussing the policies adopted locally (in particular by groups of communes in France) and internationally for storing carbon in the earth. The soil has a strong potential for attenuating climate change. If realized, this potential would, in turn, have major benefits for the quality of the soil. - Le statut juridique des sols face à l'artificialisation : état des lieux et perspectives - Philippe Billet p. 24-28 Assise de la plupart des activités humaines, le sol est largement oublié par le droit lorsqu'il s'agit d'envisager sa protection contre l'artificialisation. Le Code de l'environnement l'ignore comme milieu naturel, tandis que le Code de l'urbanisme organise son occupation en peinant à garantir une utilisation « économe ». Le droit de l'Union européenne, après avoir vainement tenté de promouvoir une directive-cadre sur les sols, s'est orienté vers des lignes directrices contre l'artificialisation, sans valeur contraignante, et vers une politique de saupoudrage, dispersant les mesures de protection sans principes directeurs. Fondée sur la loi ALUR de 2014, la nouvelle politique de planification de l'occupation des sols repose sur la densification, en imposant, en amont, une réflexion sur l'artificialisation des sols et en supprimant les dispositions favorisant l'étalement urbain. La neutralité en matière de dégradation des sols appelle le développement d'outils incitatifs et, peut-être, la reconnaissance d'une communautarisation de certains des services fournis par les sols.The land's legal status pertaining to human uses : An inventory and prospects
As the basis of most human activities, the ground – soil and land – has been more or less overlooked by the law when the intent is to protect it from being built or covered, i.e., “artificialized”. The Environmental Code ignores it as a natural environment, whereas the Code of Urbanism tries to see to it that the use of land is “economical”. After futile efforts for drafting a framework directive, EU law has turned toward issuing guidelines, with no binding effect, for preventing these “artificial” uses of the land and toward a scattershot policy of dispersed protective measures without any guiding principle. Under the French ALUR Act of 2014, the concept of “densification” underlies a new policy of land planning and use. This act has voided the earlier arrangements that favored urban sprawl ; and it calls for a consideration of the issue of “artificialization”, which devotes pieces of land to urbanization, infrastructures, industry and roads. Neutrality with regard to the land and soil degradation implies providing incentives and, perhaps, recognizing a “communitarization” of the services provided by the ground.
- Les sols au cœur de la zone critique de la Terre - Christian Valentin p. 6-9
Les réponses des États à l'artificialisation des sols
- Orientations et outils de gestion de la consommation d'espace au plan national - Laetitia Conreaux-Mantziaras, Hélène Faucher p. 29-33 La direction générale de l'Aménagement, du Logement et de la Nature (DGALN) du ministère de la Cohésion des Territoires assure, depuis presque vingt ans, le portage des politiques publiques visant à limiter l'artificialisation des sols. Elle accompagne les collectivités dans l'amélioration de la gestion de leurs sols et de leur foncier au travers de la montée en qualité de leurs documents d'urbanisme et d'une intégration renforcée des préoccupations environnementales dans leurs politiques d'aménagement. D'autres politiques, portées par différents ministères, participent également à la réduction de l'étalement urbain, par exemple en incitant, au moyen de mesures fiscales, à la construction dans des zones déjà urbanisées ou en valorisant les projets agricoles (elles ne seront pas abordées dans cet article consacré à l'urbanisme).Résultant d'une prise de conscience collective et progressive, la préservation des terres non artificialisées constitue l'un des enjeux majeurs de l'amélioration de la qualité du cadre de vie de nos territoires.Orientations and tools for managing “land consumption” on the national scale
For nearly twenty years now, the DGALN in the French Ministry of Territorial Cohesion has been the vector of public policies for limiting the “artificialized” land consumed (built or covered) by urban areas, infrastructures and industry. It assists local authorities with land and real estate management by improving the quality of documents on urbanism and by more effectively bringing environmental issues into town and country planning. Policies conducted by other ministries also take part in the effort to curb urban sprawl, for example, by providing fiscal incentives for building in areas that are already urbanized or by backing farming projects. Owing to a gradual awareness, the conservation of lands that have not been “artificialized” is a major issue for improving the quality of life in France. - Les friches industrielles : une nouvelle ressource secondaire ? - Philippe Merle, Jean-Luc Perrin p. 34-37 Polysémique, la notion de friche industrielle est difficile à appréhender : la définir comme un terrain non utilisé ne renseigne en rien sur ses caractéristiques et encore moins sur ses potentialités. Un changement de perspective est nécessaire. Cela passe, tout d'abord, par la reconnaissance du caractère « local » des enjeux des friches industrielles : additionner des superficies au niveau national recouvre des cas trop divers pour permettre une action efficace. Une fois cette optique adoptée, on peut analyser le sujet des friches industrielles suivant une logique qui s'apparente à celle adoptée en matière de traitement des déchets : c'est-à-dire, en premier lieu, éviter à la source la constitution de friches polluées. Éviter de dégrader les sols en respectant un objectif d'usage futur – lequel est désormais défini en amont pour toutes les installations nouvelles – est en effet un des objectifs de la politique d'encadrement des installations industrielles. En deuxième lieu, chercher à en réutiliser la plus grande part possible (éviter de déclarer trop facilement qu'un site est pollué et, de fait, le rendre inapte à tout usage). Et, en troisième lieu, esquisser des pistes de reconversion de ces friches – certaines ont d'ores et déjà été ouvertes par la loi ALUR (Accès au logement et urbanisme rénové) – permettant d'inscrire les terrains à réhabiliter dans une vision d'« économie circulaire » des sols.Industrial wastelands, a new secondary resource ?
The concept of industrial wastelands is hard to define, given its many meanings. Defining it as unused lots of land tells us nothing about the land's characteristics and even less about its potentials. We must shift perspectives. First of all, the issues related to sites previously occupied by industry are local – the national statistic obtained by adding the surface areas of all wastelands covers cases that are much too diverse for effective remedial actions. Once we shift perspectives, we can analyze these former industrial sites in terms of waste management in general. We must, first of all, avoid soil degradation by treating the causes –with the objective of making it possible to reuse the land in the future. This reuse is now to be defined before building any new installation. Secondly, we must try to reuse as many of these sites as possible and not declare offhand that a location is polluted and thus unfit for any use. Thirdly, we must outline approaches (some of them opened under the ALUR Act on housing and urbanism) for reconverting wastelands by placing the land to be rehabilitated in a broader view of a “circular economics”. - Favoriser la réutilisation des friches commerciales - Michel Valdiguié, Philippe Schmit p. 38-40 L'aménagement commercial en France conduit à privilégier le développement en périphérie plutôt que le renforcement des centres urbains. La logique des opérateurs du commerce diffère de celle des investisseurs de l'immobilier commercial. Ce jeu d'acteurs conduit à fragiliser le commerce de proximité et à accroître les mètres carrés accessibles en voiture, dans une logique de captation des flux. D'autres pays et régions d'Europe, notamment la Grande-Bretagne, l'Allemagne et, en Espagne, la Catalogne, pratiquent autrement, privilégiant l'implantation dans des secteurs démographiquement denses. De plus, le droit européen permet, depuis janvier 2018, de prendre en compte non seulement des critères d'aménagement du territoire et d'environnement, mais également de préservation des centres-villes, des critères que mobilise encore trop peu la législation française. Première destination mondiale en matière de tourisme, la France peut-elle durablement fragiliser ses atouts en poursuivant le développement de zones commerciales inesthétiques et la consommation de terres agricoles qui nous fournissent les produits nécessaires à notre alimentation ? Cette question mérite que nous consacrions un débat au modèle de développement du commerce dans le futur.Boosting the reuse of business wastelands
Retail stores in France have grown on the periphery of urban areas instead of revitalizing downtown business area. Businessmen and investors have not pursued the same rationale. The game between these players threatens neighborhood stores while increasing the surface area devoted to retail businesses that can be reached by car – the purpose being to form a customer catchment basin. Other lands in Europe (in particular Great Britain, Germany, Spain and Catalonia) prefer installing new businesses in areas with a dense population. Since January 2018, European law admits criteria related not only to territorial planning and the environment, but also to the conservation of downtown areas ; but this has not yet stimulated much legislation in France. As the world's leading tourist destination, can France continue jeopardizing its assets by developing unaesthetic business zones that consume farmlands, which provide the produce needed for our food supply ? The question of a model for retail business in the coming years should be discussed. - La fiscalité peut-elle contribuer à limiter l'artificialisation des sols ? - Guillaume Sainteny p. 41-45 Malgré l'existence de près d'une trentaine de taxes sur l'artificialisation des sols, la fiscalité n'a pas été, jusqu'ici, un outil capable de la limiter. Une des raisons principales de cette artificialisation tient à la différence de prix existant entre le non bâti urbanisable et le non bâti non urbanisable. Cette différence découle, en partie, de la minoration de la valeur du foncier rural non urbanisable causée par la charge fiscale qui pèse sur lui et les dispositions du Code rural. Une nouvelle taxe sur l'artificialisation, comme évoquée ces derniers temps, ne prendrait pas davantage en compte ce facteur. En outre, elle ne pourrait être ni internalisante ni même suffisamment incitative. Si l'on souhaite utiliser l'outil fiscal dans un but de modération de l'artificialisation, il apparaît bien plus efficace de recourir aux prélèvements existants en les remodelant en fonction de cet objectif que de créer une nouvelle taxe. Cela peut notamment se faire en modifiant leurs taux, en les modulant sur la base de critères géographiques, en diminuant le nombre des cas d'exonérations ou d'abattements lorsqu'ils sont contraires à l'objectif recherché et en réduisant nettement la taxation du foncier non bâti, de façon à lui permettre de dégager un rendement net positif minimal.Can tax policies help limit “land artificialization” ?
The nearly thirty taxes on using the land for urbanization, industry and infrastructures have not proven capable of limiting this “land artificialization”, a process that mainly stems from the price difference between unbuilt lots of lands depending on whether they are “urbanizable” or not. Part of this difference comes from the lower value of rural real estate owing to taxes and to provisions in the French Rural Code. A recent proposal for a new tax on “land artificialization” would not be any more effective ; and it lacks incentives. To moderate this trend in land use, adjusting current taxes would be more effective for reaching this goal than introducing a new tax. This could be done by modifying current tax rates as a function of geographical criteria, by exempting fewer persons or granting fewer deductions when such measures stymie reaching the goal, or by cutting taxes on unbuilt land so that such properties yield a net positive return. - Avis du CESE (du 13 mai 2015) : « La bonne gestion des sols agricoles, un enjeu de société » - Cécile Claveirole p. 46-50 2015 ayant été déclarée par la FAO « Année internationale des sols », le Conseil économique, social et environnemental (CESE) s'est saisi de ce sujet, dans son volet agricole.Troisième assemblée consultative de la République française, composée de représentants de la société civile organisée, le CESE travaille sur les problématiques de notre société, soit par auto-saisine, soit par saisine du gouvernement, ou encore en réponse à des pétitions citoyennes. La section de l'Agriculture, de la pêche et de l'alimentation du CESE a décidé d'étudier la question de la bonne gestion des sols agricoles, qui concerne toute notre société, à la fois sur le volet quantitatif – consommation de terres agricoles et naturelles, imperméabilisation et artificialisation de celles-ci – et sur le volet qualitatif – fertilité des sols, modes de production de biens alimentaires, préservation de la biodiversité.Cet avis du CESE, co-rapporté par Agnès Courtoux et Cécile Claveirole, a été adopté par l'assemblée plénière du CESE, réunie le 15 mai 20151.Opinion of the CESE of 13 May 2015 : The management of farmlands, a societal issue
The UN's Food and Agriculture Organization declared 2015 to be the “international year of soils”. In France, the Economic, Social and Environmental Council (CESE : Conseil Économique, Social et Environnemental) took account of this topic in its work on agriculture. Attended by representatives of nonprofit organizations, the council's third assembly addressed the societal issues of farmland management. The CESE's division on agriculture, fishing and the food supply has decided to study this question both quantitatively (the farmlands and natural areas converted to other uses, in particular for building, the impermeability of the soil) and qualitatively (soil fertility, modes of production, produce, the conservation of biodiversity). The Council's plenary assembly adopted this opinion on 15 May 2015. - La réhabilitation des terres dégradées dans les zones sèches - Monique Barbut p. 51-55 Représentant près de 41 % des terres émergées, les zones sèches abritent plus de 2 milliards d'individus souffrant de la dégradation continue des terres, desquelles ils tirent leurs moyens de subsistance. Aujourd'hui, en raison de la désertification et de la sécheresse, près de 12 millions d'hectares de terres arables disparaissent chaque année. Il est donc primordial d'inverser cette tendance liée à une utilisation non durable des terres, à des conditions climatiques défavorables et à la croissance démographique. Dans ce contexte, la neutralité en matière de dégradation des terres constitue le cadre d'action privilégié. Basé sur la réhabilitation des terres dégradées et sur la gestion durable des terres, le mécanisme de neutralité constitue un outil essentiel pour les décideurs responsables de la planification de l'utilisation des terres et le développement de leur territoire. Au-delà de cette neutralité, seule une amplification des bonnes pratiques à grande échelle permettra d'assurer la sécurité alimentaire, hydrique, énergétique et humaine.Recovering degraded land in arid zones
Representing nearly 41% of the land above sea level, arid zones are home to more than two billion people who suffer from the ongoing degradation of the land and soil that provide them sustenance. Owing to desertification and droughts, nearly twelve million hectares of land are no longer arable each year. It is urgent to halt this trend related to unsustainable uses of the land, unfavorable climate conditions and population growth. The target of “degradation neutrality” has been set. Based on the restoration of degraded land and sustainable land management, this goal is important to the decision-makers in charge of land planning and development. Apart from degradation neutrality, only an amplification of good practices on a large scale can provide security for the water and food supplies, for energy and for human beings.
- Orientations et outils de gestion de la consommation d'espace au plan national - Laetitia Conreaux-Mantziaras, Hélène Faucher p. 29-33
Actions locales ou privées contre l'artificialisation des sols
- La consommation d'espaces naturels en Île-de-France : bilan, enjeux, outils - Martin Omhovère, Martin Wolf p. 56-61 Région capitale englobant non seulement une métropole de rang mondial, mais aussi de vastes espaces agricoles et naturels, l'Île-de-France connaît de longue date une forte concurrence dans l'utilisation de ses sols. Dotée de compétences spécifiques en matière de planification, la région Île-de-France est en quête permanente d'un cadre équilibré de développement de son territoire, notamment en matière de préservation de ses espaces ouverts. Forte de cette expérience, l'Île-de-France constitue un exemple inspirant des différents outils susceptibles d'être mobilisés en matière de suivi des espaces, d'étude des logiques sous-tendant leur transformation et de politiques visant à maintenir la dynamique des écosystèmes agricoles et naturels.The “consumption” of natural areas in Île-de-France : The assessment, issues and the toolsÎle-de-France, a region encompassing not only the capital, Paris, but also vast farmlands and natural areas, has long experienced strong pressures on land uses. With special powers in matters of urban and rural planning, the region is constantly striving for a balanced development of its territory and, in particular, for a conservation of open, unbuilt areas. Owing to its experience, Île-de-France is a noteworthy example of how to use tools for monitoring and managing the land, for studying the rationales underlying land uses, and for drafting policies to maintain the dynamics of natural and agricultural ecosystems.
- Préserver la terre, stimuler l'activité agricole : 30 ans d'aménagement et d'urbanisme dans le département des Bouches-du-Rhône - Marc Beauchain p. 62-67 Les Bouches-du-Rhône accueillent plus de deux millions d'habitants. Depuis 50 ans, ce département a subi des bouleversements considérables.Dans cette métropole multipolaire, l'espace agricole et rural est entièrement « sous le souffle » de la périurbanisation.Dès la fin des années 1960, la nécessité de préserver les terres et la production agricoles suscite une politique d'aménagement rural structurée autour de la connaissance des milieux, de la concertation, de la contractualisation des engagements, de l'utilité de marier agriculture et environnement et d'accompagner les mutations économiques.Cette politique de long terme a permis d'éviter une disparition « programmée » des sols et de l'activité agricoles, de maintenir 148 600 hectares de SAUées1, de produire près de 500 millions d'euros/an de valeur ajoutée et de hisser ce département au premier rang de l'agriculture biologique en France.Par-delà les acteurs, les objectifs, les outils et les résultats de cette expérience locale, à travers cet article, nous en appelons à une urgente et indispensable prise de conscience nationale sur une consommation excessive de terres agricoles.Conserving the land, stimulating farming : Thirty years of urban and rural planning in Bouches-du-RhôneFor fifty years now, Bouches-du-Rhône, a French department with more than two million inhabitants, has experienced major changes. In this metropolitan department, several cities, including Marseille, have sprawled out over farmlands and rural areas. Since the end of the 1960s, the need to conserve the land and preserve farming has inspired a rural planning policy based on : knowledge of local environments, the conciliation of farming with environmental issues, cooperation, contractualization, and adjustments to economic changes. This long-term policy has averted the “expected extinction” of farming ; and 148,600 hectares have been saved, thus producing nearly €500 million/year of added value and placing the department in the lead of organic agriculture in France. An urgent call for a national awareness of our “overconsumption” of farmland...
- Quelle gouvernance pour les relations des villes avec leur hinterland ? - Fabienne Trolard, Guilhem Bourrié p. 68-73 Depuis 2008, plus de la moitié de la population mondiale vit dans les villes. Ce changement global nous impose de changer de paradigme, la Terre devant être considérée comme un ensemble d'espaces et de ressources limités. Cela nécessite d'avoir une vision systémique intégrée et dynamique des villes et de leur hinterland, dans le but d'assurer les besoins vitaux des populations. La méconnaissance des sols, les pressions foncière et réglementaire et l'organisation de la décision en mode sectoriel et par projet sont les principaux freins à un tel changement. La démarche est inclusive et repose sur la construction d'indicateurs de risques à partir de scénarios partagés par toutes les parties prenantes et qui tiennent compte des ressources en sols, en eau et en production alimentaire, autant d'éléments conditionnant le développement et l'attractivité des territoires. Suite au sommet de Rio de 1992, des initiatives locales et/ou internationales ont été mises en œuvre, signe d'un engagement sur cette voie ; elles ne demandent qu'à être diffusées, partagées et enrichies.What governance for the relations of a city with its hinterland ?
Since 2008, more than half the world's population is living in cities. This global change forces us to switch paradigms ; the Earth should now be seen as a place of limited resources and with limited land. This calls for a systemic vision, integrated and dynamic, of cities and their hinterland, the goal being to satisfy the population's basic needs. The major obstacles to this change are pressures on the land, lack of knowledge about the soil, regulations, and the organization of decision-making by sector and by program. An inclusive approach calls for designing indicators of risks from simulations that, shared by all stakeholders, take account of resources related to the land, the water supply and food production. Following the Rio Summit in 1992, local and international programs were implemented that signaled commitments ; they need to be diffused, shared and furthered. - Réduire l'étalement urbain : mission (im)possible ? - Christian Garnier p. 74-81 La consommation d'espace est consubstantielle à la croissance urbaine et à des mouvements démographiques. Son expansion rapide, pourtant manifeste, est restée très longtemps occultée chez les professionnels et les décideurs qui la considéraient comme normale et ne posant aucun problème, la France étant l'un des moins densément peuplés des grands pays européens. D'introduction récente – presque par effraction –, le principe de réduction de la consommation d'espace est désormais inscrit dans notre cadre juridique. Il peine à se concrétiser, socialement et politiquement, en raison de facteurs structurels multiples et profonds. Toutefois, la nouvelle donne environnementale et géopolitique augure de vraies remises en cause. On peut espérer que les tentatives de certains territoires visant à prendre en main la question ne resteront pas à l'état de prototype. En partenariat avec Veolia, FNE a établi un diagnostic sans complaisance, avant d'examiner des pistes de solutions concrètes, nourries par l'expérience du terrain.Curbing urban sprawl : (im)possible ?“Land consumption” comes along with urban growth and demographic trends. The anthropic use of more and more land, though evident, has long been overlooked by professionals and decision-makers. For them, it was normal, it was not a problem. The population density in France is among the lowest of the major countries in Europe. The principle of reducing “land consumption”, though recently introduced in the law, has barely had any concrete, social or political, effects. However the new environmental and geopolitical situation signals a turning point. Hopefully, attempts by local authorities to address this issue will move beyond the stage of prototypes. In partnership with Veolia, France Nature Environnement has made an unsparing diagnosis and examined possible concrete solutions based on feedback from the field.
- Après la remédiation, le double enjeu de la restauration et de la requalification des sols - Corinne Leyval p. 82-85 Le fort développement industriel du début du XXe siècle, puis son déclin à la fin du siècle dernier, ont fortement impacté des surfaces considérables de sol. Dans un contexte de raréfaction des sols et de pressions foncières croissantes, la remédiation et la réhabilitation de ces sols fortement anthropisés sont des enjeux forts. Au-delà de la nécessité d'éliminer la pollution présente et les risques associés pour l'environnement et la santé, la restauration et la refonctionnalisation de ces friches et sols délaissés méritent d'être prises en considération. La possibilité de valoriser ces sols non seulement pour des usages comme la production de biomasse non alimentaire, mais aussi comme réserve de biodiversité est mise en avant dans cet article. Souvent perçues au départ comme un handicap, les friches industrielles peuvent ainsi devenir un véritable atout qu'il convient de valoriser.After remediation, the challenges of land restoration and soil improvement
The strong development of industry from the start of the 19th century till its decline at the end of the century has had a considerable impact on vast swaths of land. Given the scarcity of land and mounting pressures on it, a major question is how to restore the land and regenerate the soil, which human actions have heavily affected. Beyond the need to remove pollution and the question of risks to the environment and health, we must turn attention of land restoration and the reuse of wastelands and abandoned areas. The land is to be improved not just for uses such as the production of biomass but also as a reservoir of biodiversity. Industrial wastelands, though often seen as a burden, can become an asset to be developed.
- La consommation d'espaces naturels en Île-de-France : bilan, enjeux, outils - Martin Omhovère, Martin Wolf p. 56-61