Contenu du sommaire : Quelle finance pour une économie durable ?
Revue | Responsabilité et environnement |
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Numéro | no 102, avril 2021 |
Titre du numéro | Quelle finance pour une économie durable ? |
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Propos introductifs
- La finance à l'heure des limites planétaires - Ivar Ekeland p. 3-5 Les concepts-clés de la finance ‒ le rendement et le taux d'actualisation ‒ sont également présents en économie et dans d'autres disciplines, mais avec des significations différentes, ce qui cause nombre de malentendus. Un effort important a été fait pour les dissiper, en distinguant par exemple un taux d'intérêt écologique, ou en introduisant une comptabilité carbone pour les entreprises. On construit ainsi des indicateurs qui permettent d'encadrer l'activité des entreprises et de traduire dans l'activité économique les objectifs climatiques. Il revient aux États de fixer ceux-ci, mais l'on constate de nombreuses carences, notamment en ce qui concerne les subventions persistantes octroyées aux combustibles fossiles. Le jour où une politique climatique sera clairement établie, on ne manquera pas d'instruments pour la financer.Economics and other disciplines use the key concepts of finance (e.g., yields, discount rates) but with different meanings. Much effort has been made to clear up this source of misunderstanding by, for instance, defining an ‟environmental interest rate” or introducing ‟carbon bookkeeping”. Indicators have thus been designed for overseeing the activities of firms and translating climate-related objectives into business activities. Once a climate policy will have been clearly established, the instruments for financing it will not be lacking. Although nation-states set climate objectives, many shortcomings can be observed, in particular the durable subsidies allotted to fossil fuels.
- Prise de conscience du risque climatique et de sa dimension systémique - Laurent Clerc p. 6-9 La prise de conscience collective de la nature systémique du changement climatique est récente. Elle a notamment émergé dans le contexte de réunions internationales placées sous l'égide de l'Organisation des Nations Unies (ONU) et des rapports du Groupe intergouvernemental d'experts sur le climat (GIEC), qui ont reconnu la responsabilité de l'homme dans ce changement. Elle a été beaucoup plus tardive dans le domaine économique et financier où, en dépit d'une accélération de la mobilisation des autorités et des acteurs depuis 2015, les institutions financières peinent à prendre en compte cette nature systémique du changement climatique et à l'intégrer dans leur cadre de gestion des risques financiers et extra-financiers. Une modification de la régulation financière est également nécessaire pour accélérer cette prise en compte.Collective awareness on the systemic nature of climate change is recent. It has notably emerged in the context of international meetings under the auspices of the United Nations (UN) and reports of the Intergovernmental Panel on Climate Change (IPCC), which have recognized human responsibility. It took a longer time in the economic and financial sector where, despite an acceleration in the mobilization of authorities and stakeholders since 2015, financial institutions are struggling to take into account this systemic nature of climate change and to integrate it into their framework for managing financial and extra-financial risks. A change in financial regulation is also necessary to accelerate this consideration.
- La finance à l'heure des limites planétaires - Ivar Ekeland p. 3-5
Les risques financiers
- Les modèles économiques et financiers face à la polycrise écologique - Gaël Giraud p. 10-13 Dans la première partie de cet article, nous expliquons pourquoi la plupart des modèles intégrés économie-climat conventionnels sont incapables d'appréhender la réalité des relations qu'entretiennent ces deux sphères. Dans la seconde partie, nous montrons qu'il existe des échappatoires aux impasses théoriques et pratiques des modèles néo-classiques et suggérons qu'un réalisme minimal oblige à considérer ensemble le réchauffement, la destruction de la biodiversité et la raréfaction des ressources non renouvelables.Why are most of the conventional models that take account of both the economy and climate incapable of apprehending the real relations between these two ? After answering this question, the ways are suggested for eluding the theoretical and practical blockages of neoclassical models. A minimum of realism forces us to take account altogether of global warming, the destruction of biodiversity and the scarcity of nonrenewable resources.
- Le rôle des outils financiers pour des populations plus résilientes - Stéphane Hallegatte p. 14-18 En raison de l'augmentation continue des coûts des catastrophes naturelles, la réduction des risques est aujourd'hui une priorité (bienvenue). Toutefois, il est impossible d'éliminer complètement les dommages causés par les catastrophes : il y aura toujours des routes emportées par des inondations et des logements endommagés par des tremblements de terre. Pour réduire autant que possible l'effet des catastrophes, il est donc essentiel d'améliorer la capacité des personnes, communautés, entreprises, régions et pays à faire face aux chocs. Dit autrement, la résilience est un complément indispensable à la réduction des risques. Cet article passe en revue la large gamme des outils financiers permettant d'augmenter la résilience, avec une attention particulière portée à la situation des pays et populations les plus pauvres. Il insiste sur la nécessité de disposer d'un ensemble de solutions complémentaires pour couvrir les différents besoins, sur le rôle-clé des systèmes de protection sociale pour venir en aide aux plus pauvres et compléter les autres mécanismes assurantiels, et sur l'importance d'incorporer les risques dans les processus et les outils budgétaires des gouvernements.Given the ever rising costs of natural catastrophes, risk reduction is a welcome priority. It is, however, impossible to fully prevent the damage wrought by catastrophes: there will always be roads that have been flooded out or homes damaged by earthquakes. To lower as much as possible a catastrophe's impact, the capacity of people, communities, firms, regions and countries to withstand shocks has to be augmented. In other words, resilience is indispensable for risk-reduction. A well-filled financial toolkit for improving resilience is reviewed while paying special attention to the situation of the poorest countries and populations. Emphasis is placed on: the need to have a set of complementary solutions for covering different needs; the key role of welfare systems in helping the poorest and backing up other forms of insurance; and the importance of incorporating risks in budgetary tools and governmental processes.
- Risques de transition, énergie et actifs échoués - Michel Lepetit p. 19-23 Au cœur de la finance verte, le concept d'« actif échoué » appliqué à la production d'énergie est stérile, voire trompeur. La transition bas-carbone est sensée révéler des risques pour les investissements dans des actifs trop exposés aux énergies fossiles. Mais en ce qui concerne la filière du charbon thermique, la théorie des actifs échoués semble ignorer l'existence d'un traité international qui sécurise les investissements énergétiques. Du côté des actifs pétroliers, cette théorie n'intègre pas l'impact majeur des interventions des banques centrales depuis une décennie. Ces deux exemples illustrent les enjeux d'une sous-estimation du rôle crucial et systémique de l'énergie en macroéconomie.Applying ‟failed asset”, a core concept in ‟green finance”, to the production of energy is worthless. The transition toward a low-carbon economy is supposed to reveal the risks of investing in assets too exposed to fossil fuels. In the thermal coal industry however, the theory of failed assets seems to have overlooked the international treaty that guarantees energy investments. With regard to petroleum assets, it does not take account of the major impact of interventions by central banks over the past decade. These two examples illustrate the underestimation of the crucial, systemic part played by energy in macroeconomics.
- Les risques juridiques et réputationnels - Béatrice Parance p. 24-26 La pression exercée par les ONG et la société civile sur les investisseurs se renforce afin de les placer face à leur responsabilité sociétale. Elle s'exerce en amont en usant du ressort réputationnel mis en scène par l'engagement actionnarial et les obligations de transparence qui ne cessent de croître. En ce sens, le règlement européen Discloser de novembre 2019 vient imposer aux investisseurs de rendre compte de la prise en considération des risques ESG susceptibles d'avoir une incidence négative sur leurs investissements. En aval, les actions en responsabilité tendent à se multiplier pour que les investisseurs soient comptables des impacts de leurs investissements sur le changement climatique. Ces actions pourraient prendre appui sur le devoir de vigilance instauré en France par une loi de 2017, et qui pourrait être étendu à l'échelle européenne dans un futur très proche.The pressure exerted by NGOs and ‟civil society” on investors is mounting with the goal of making the latter assume their societal responsibility. It is exerted upstream in the process for making investment decisions by playing on the investor's reputation through ever more actions that target stockholders and invoke the obligation of accountability. In this sense, the EU's fair disclosure regulation of November 2019 requires investors to account for the risks that, related to environmental, social and corporate governance, are likely to have negative effect on investments. Downstream in this decisions-making process, lawsuits based on liability are increasing with the aim of holding investors accountable for the impact of their investments on climate change. The legal grounds for such litigation in France can be the ‟obligation of vigilance” foreseen by an act of law in 2017. This obligation might be adopted Europewide in the very near future.
- Comment la guerre des modèles de financement formate la transition écologique - Arnaud Berger p. 27-31 L'effondrement de la rentabilité des énergies fossiles consacre l'essor des énergies renouvelables et du stockage par des batteries ou sous forme d'hydrogène. L'Europe touche enfin du doigt la souveraineté énergétique qu'elle recherche depuis trente ans et soutient l'élan de la finance climat pour massifier les investissements verts.Or, plus qu'un instrument, le choix du modèle bancaire, entre celui de l'approche anglo-saxonne et celui de l'intermédiation bancaire encore dominante en Europe, formate déjà le modèle économique dans lequel nous vivons. En fonction du modèle choisi, les conséquences sur le pouvoir d'achat et l'emploi, et les attendus sociétaux pourront être très différents.Ces deux modèles se confrontent depuis près de quarante ans sur le territoire européen, au bénéfice d'une progression du modèle de marché des capitaux anglo-saxons. Cela pose la question récurrente du contrôle du capital des entreprises européennes et le risque pour l'Europe de passer d'une dépendance énergétique au pétrole à une dépendance vis-à-vis des capitaux financiers étrangers.The collapse of the profit-earning capacity of fossil fuels is driving the development of renewables and energy storage (hydrogen batteries and fuel cells). After thirty years of efforts, Europe is finally tending toward ‟energy sovereignty” as it backs funding for climate-related programs. The choice of a banking model is more than a funding tool. The current business model has already been formatted by the choice between the Anglo-American approach and the still prevalent model in Europe of intermediation via banks. Depending on the model chosen, the effects on purchasing power and on jobs, as well as the expected benefits for society, will be quite different. In Europe, these two funding models have been contending with each other for more than forty years, even as the Anglo-American capital markets model has been gaining ground. This situation recurrently raises the question of how to exercise control over equity in European firms and manage the risks of a switch from a dependency on petroleum to a dependency on foreign capital.
- Les modèles économiques et financiers face à la polycrise écologique - Gaël Giraud p. 10-13
Le rôle de l'État
- Comment réduire les soutiens publics dommageables à l'environnement ? - Guillaume Sainteny p. 32-35 La question des subventions publiques et des dépenses fiscales dommageables à l'environnement a, jusqu'ici, reçu moins d'attention que celle de la création de nouvelles taxes environnementales. Pourtant, les soutiens publics dommageables à l'environnement se chiffrent à plusieurs centaines de milliards de dollars avant taxes et a plusieurs milliers de milliards de dollars après taxes. Ils présentent de nombreux inconvénients : coût budgétaire ; entraves aux économies d'énergie ; freins aux transitions écologique et énergétique, voire au progrès technique ; faible efficience ; régressivité sociale ; sous tarification des ressources ; effets négatifs sur la santé et les balances commerciales, etc.Le lancement par l'OCDE de l'initiative Green Budgeting donne une nouvelle actualité à ce sujet.The question of subsidies and tax credits that damage the environment has received less attention than the creation of new environmental taxes. Such public ‟subsidies” amount to several hundreds of billions of dollars before taxes but several thousands of billions after taxes. They have many disadvantages. Not only do their costs weigh heavily on government budgets, such subsidies also underprice resources and inhibit the saving of energy, thus impeding the energy and environmental transitions or even hindering the progress of technology. Furthermore, they are inefficient and socially regressive, and have negative effects on health and the balance of trade. The OECD's ‟Green Budgeting” has renewed interest in this topic.
- Adapter la gouvernance budgétaire aux impératifs écologiques - Alain Grandjean p. 36-39 La crise de la Covid-19 a mis entre parenthèses les règles budgétaires en Europe et a autorisé des plans de relance significatifs, dont une partie a été affectée à la lutte contre le changement climatique. Celui-ci nous impose néanmoins des dépenses publiques lourdes et récurrentes, sur une décennie ou plus, qui ne sont pas compatibles avec un retour rapide au respect des règles antérieures, un retour dangereux par ailleurs au plan macroéconomique. Pour autant, une coopération budgétaire et monétaire structurée est indispensable au sein de l'Union européenne, sous peine de dérives économiques, politiques et sociales. Il nous faut donc adapter ces règles, définies il y a plus de trente ans, pour relever ce défi, tout en limitant la crise sociale inévitable à court terme, et en évitant une crise des dettes publiques. Cet article propose des pistes pour répondre à ces enjeux-clefs pour l'avenir de l'Europe et sa capacité à faire face aux multiples crises à laquelle elle a à faire face.The COVID-19 pandemic has sidelined budgetary rules in Europe and served to justify major simulus plans with part of the funds earmarked for the fight against climate change. This imposes heavy, recurrent public expenditures over a decade or more that are incompatible with a fast return to the status quo ante (which would be dangerous macroeconomically). Nonetheless, budgetary and monetary cooperation is necessary within the European Union to avoid economic, political and social distortions. The rules defined more than thirty years ago have to be adjusted to this situation, while limiting the inevitable short-term social crisis and averting a public debt crisis. Responses are proposed to these issues related to the future of Europe and the EU's capacity for handling the many problems facing it.
- Les enjeux de la taxonomie européenne pour la finance verte - Anna Creti p. 40-44 Nous décrivons ici les principaux éléments de la taxonomie verte, soit l'ensemble des critères définissant les activités compatibles avec l'ambition d'atteindre la neutralité carbone. Constituant la première tentative en Europe de classer les secteurs émissifs à une granularité assez fine, celle des codes NACE, la taxonomie se veut un processus évolutif. Nous mettons également en avant la nécessité, dans le cadre de ce processus, de rendre les principes applicables et concrets, mais aussi coordonnés avec les politiques européennes en matière de décarbonation des activités économiques.The main items of a ‟green taxonomy” are described : the set of criteria about the activities consistent with attaining carbon neutrality. This taxonomy represents the first attempt in Europe to make a granular classification (using NACE codes) of the sectors that emit CO2. Emphasis is laid on the need, as part of this evolving process, to make the principles applicable and concrete and, too, to coordinate them with European policies for ‟decarbonizing” the economy.
- Un mini-péage sur les paiements : une solution pour financer la transition vers une économie durable - Jean-Charles Rochet p. 45-47 Nous proposons la création d'une nouvelle taxe qui rapporterait suffisamment pour alléger la fiscalité du travail tout en finançant la transition énergétique. Il s'agit d'un mini-péage sur tous les mouvements de fonds entre les comptes bancaires des contribuables français, particuliers et entreprises. Ces mouvements représentent plus de 100 fois le PIB. Un péage à un taux très faible instauré sur un tel volume fournirait une recette fiscale substantielle, et ce même en tenant compte de la contraction qu'il entraînerait sur ce volume.Il serait peu coûteux à prélever et difficile à éviter. Son taux uniforme et l'absence d'exonérations le rendraient transparent et plus facile à faire accepter. Enfin, ce prélèvement serait progressif, car les ménages les plus riches « consomment » beaucoup de paiements scripturaux.The new tax, proposed herein, would bring in enough revenue to alleviate taxes on labor while financing the energy transition. It would set up a mini-toll for all cashless flows between the bank accounts of French taxpayers, both private persons and firms. Since these flows represent more than 100 times the GDP, a toll at a very low rate would yield substantial revenue, even after taking into account the contraction of the volume of cashless payments that would result. Levying this tax, which would be hard to dodge, would come at a low cost. Its uniform rate and the absence of exemptions would make it transparent and easier to accept. The levy would be progressive, since the wealthiest households make many more cashless payments.
- Comment réduire les soutiens publics dommageables à l'environnement ? - Guillaume Sainteny p. 32-35
Nouveaux instruments financiers
- L'obligation verte : le roi est nu - Julien Lefournier p. 48-51 Internaliser une externalité négative revient à payer un surcoût. L'utilité de l'obligation verte se fonde sur l'hypothèse que ce surcoût serait, au moins partiellement, transféré aux prêteurs obligataires – les acheteurs de l'obligation verte – mettant ainsi à contribution la finance pour le bien commun. Cette hypothèse n'est pas réaliste. Nous le montrons de manière simple en expliquant comment le fonctionnement du marché primaire obligataire s'y oppose dès lors que des investisseurs professionnels participent au placement des obligations vertes. Pour ces derniers, le fait que l'obligation verte ne se différencie pas contractuellement d'une obligation classique empêche de lui conférer la moindre valeur singulière. Cela entraîne à son tour nécessairement que le taux de rendement d'une obligation verte ne puisse pas être inférieur à celui d'une obligation classique (toutes choses égales par ailleurs). Finalement, l'obligation verte ne peut pas constituer une incitation à réaliser un projet vert.As internalizing a negative externality amounts to paying an additional cost, the usefulness of the bond is based on the assumption that this additional cost would be, at least partially, transferred to bondholders ‒ The buyers of green bonds ‒ thus making finance contribute to the common good. This assumption is unrealistic. We show this in a simple way by explaining how the mechanics of the primary bond market forbid it when professional investors participate in the placement of green bonds. For those (non green) investors, the fact that the green bond is not contractually different from a traditional bond prevents them from giving it any singular value. This in turn necessarily means that the rate of return on a green bond cannot be lower than that on a traditional bond (all other things being equal). Finally, the green bond cannot constitute an incentive to carry out a green project.
- De la compensation du carbone au financement de la neutralité - Renaud Bettin p. 52-54 Dans le sillage de l'avalanche des engagements pris par les grandes entreprises à devenir un jour « neutres en carbone », le marché, jusque-là confidentiel de la compensation carbone, prépare son décollage. Réglementé dans le cadre du Protocole de Kyoto, ce mécanisme est utilisé volontairement par un nombre croissant d'acteurs privés et trouve désormais toute sa place au sein d'une stratégie carbone. Loin d'inciter à réduire à la source les émissions carbone, cet outil finance néanmoins la transition et un développement bas-carbone partout sur la planète. Pour que la confiance s'installe du côté des entreprises comme du côté des porteurs de projet, la compensation carbone doit faire sa mue. Son utilisation doit être davantage cadrée et sa perception renouvelée pour qu'enfin, nous la considérions comme ce qu'elle est vraiment : un moyen de contribuer à une neutralité carbone mondiale et collective.Following the avalanche of commitments made by big firms to eventually become ‟carbon neutral”, the market of carbon offsets, till then known only to insiders, started taking off. A growing number of private parties are voluntarily using these offsets, which were set up under the Kyoto Protocol and are now being enshrined in carbon strategies. Far from offering incentives for reducing CO2 at its origin, this procedure is, nonetheless, being used to finance the transition toward low-carbon development on the planet. To build confidence among firms and project leaders, carbon offsets have to undergo a change. Their uses must be better regulated, and the perception of them has to be updated so that they are seen to be what they really are : a means toward carbon neutrality worldwide.
- La compensation biodiversité, un instrument économique au service de l'intérêt général - Jean-Christophe Benoît, Antoine Cadi, Sophie Ménard p. 55-58 La loi de 1976 traduit, pour la première fois dans la législation française, l'esprit de ce qu'est la conception progressive d'un projet d'aménagement du territoire, laquelle doit, en premier lieu, chercher à éviter les impacts négatifs de celui-ci sur l'environnement, puis, dans un second temps, à réduire ceux qui n'ont pu être évités, en adaptant techniquement le projet. Enfin, pour la fraction des impacts résiduels, il s'agit alors de les compenser par une action guidée par l'objectif de non-perte de biodiversité. Bien que renforcée par la loi sur la reconquête de la biodiversité en 2016, cet outil demeure toutefois mal utilisé, puisque le succès de sa mise en œuvre dépend non seulement de l'interprétation des textes normatifs nationaux par les acteurs du territoire (Bigard et al., 2018)1, mais également de l'existence de contrôles et de sanctions. Pour dépasser cette vision, l'approche de la séquence Éviter-Réduire-Compenser (ERC) adoptée par les leviers économiques et financiers semble permettre de dessiner une application plus juste de l'outil considéré afin d'agir en faveur de l'intérêt général.For the first time in French legislation, an act of law in 1976 reflected a progressive approach to programs of rural planning. Projects of development have to try to avoid having a negative impact on the environment and then projects must be technically adjusted to reduce the unavoidable negative effects. Any remaining negative effects are to be offset by actions guided by the objective of not lessening biodiversity. Though bolstered by a 2016 law on biodiversity, this approach has been poorly adopted. Its successful application depends not only on the interpretation that local authorities make of national regulatory texts but also on the existence of controls and sanctions. To move ahead, the principle of avoiding-reducing-offsetting adopted for economic and financial leverage seems to allow for a fairer application of biodiversity mitigation for the sake of the public interest.
- La mesure de l'empreinte biodiversité comme outil d'atteinte des objectifs globaux - Joshua Berger, Antoine Cadi, Sophie Ménard, Antoine Vallier p. 59-63 La crise multidimensionnelle actuelle souligne plus encore, si cela était nécessaire, l'urgence de lutter contre la dynamique d'effondrement de la biodiversité en s'attaquant à ses causes principales pour avancer vers un modèle de société plus durable. Pour y contribuer, les entreprises ont besoin de disposer de cibles, de scénarios et d'outils. Elles ont également besoin de partenaires crédibles pour développer et mettre en œuvre dans la durée leur stratégie en faveur de la biodiversité. Pour ce faire, il existe un certain nombre d'initiatives contribuant au développement des outils nécessaires à la mesure de l'empreinte biodiversité et à la mise en évidence des actions permettant de réduire effectivement les pressions sur la biodiversité. Parmi ces outils, le Global Biodiversity Score (GBS) est un outil de mesure de l'empreinte biodiversité concourant à l'atteinte de l'objectif global d'inversion de la courbe d'érosion de la biodiversité. Au sein des acteurs économiques, la communauté financière peut jouer un rôle-clé dans l'inversion de la perte de biodiversité en choisissant les projets et les investissements ayant les impacts les plus positifs sur la nature.The current multidimensional crisis emphasizes even more, were it necessary, the urgency of fighting against the collapse of biodiversity. The major causes must be tackled in order to advance toward a more sustainable society. For this, firms need targets, scenarios and tools. They also need credible partners for following up on the implementation of their strategies in favor of biodiversity. The tools needed to measure the ‟biodiversity footprint” are being designed along with actions for actually reducing the pressure on biodiversity. Among these tools is the ‟global biodiversity score” (GBS) for measuring the biodiversity footprint and reaching the global objective of reversing the downward trend. The financial community can play a key role in this by choosing the projects and investments that have the most positive effects on nature.
- L'obligation verte : le roi est nu - Julien Lefournier p. 48-51
Les entreprises
- Les politiques environnementales et sociales des entreprises : quel dialogue avec les investisseurs ? - Edith Ginglinger p. 64-68 Les politiques d'investissement des investisseurs institutionnels prennent de plus en plus en compte les enjeux environnementaux et sociaux (E&S). Cet article retrace quelques résultats des recherches réalisées sur les leviers dont disposent les investisseurs pour que les entreprises incluses dans leur portefeuille s'orientent vers des décisions cohérentes avec leurs objectifs E&S. Les investisseurs peuvent soit faire confiance au conseil d'administration pour améliorer les pratiques E&S des entreprises, soit échanger directement avec les dirigeants de celles-ci, soit encore soumettre des résolutions aux votes des actionnaires lors des assemblées générales.Institutional investors' investment policies increasingly take environmental and social issues into account. This review of research on the leverage that investors have for making the firms in their portfolios turn toward decisions aligned with environmental and social objectives points to three possibilities : investors can place their confidence in corporate boards of administration for improving the performance in relation to these objectives ; they can have direct exchange with corporate leaders ; or they can submit resolutions for a vote at shareholder meetings.
- Comptabilité et environnement : compter autrement - Frédérique Déjean p. 69-72 La comptabilité au service du développement durable ou la mesure de ce qui compte vraiment : quels enjeux pose cette relation entre comptabilité et environnement ? Peut-on et doit-on valoriser le capital naturel ? Pourquoi et comment mesurer autrement ? Quels sont les apports d'une comptabilité intégrée ? Quelle place pour l'information et la performance extra-financières ? Et quelles sont les incidences pour l'appréciation de la performance de l'entreprise ? Telles sont les questions auxquelles cet article tente de répondre.What is at stake in the relation between bookkeeping and the environment? Bookkeeping at the service of sustainable development or for measuring what really counts? Can and should we set a value on ‟natural capital”? Why and how to account differently? What are the advantages of an ‟integrated” accountancy? What is the place for extra-financial information and performance? What are the effects of assessing a firm's performance?
- BNP Paribas et la finance verte - Sébastien Soleille p. 73-76 La finance verte est devenue en quelques années un enjeu majeur pour de nombreux acteurs financiers. Pour BNP Paribas, un tel développement doit contribuer à l'alignement de ses activités avec l'objectif climatique de l'Accord de Paris et lui permettre d'œuvrer à l'atteinte des objectifs de développement durable (ODD) de l'ONU. Pour être un leader de la finance durable, le Groupe travaille à plusieurs chantiers transverses et met en œuvre des leviers d'action complémentaires : alignement de son portefeuille de crédit avec l'Accord de Paris, proposition de produits et services financiers « verts » à tous ses clients (investisseurs, entreprises, particuliers), orientation des flux financiers vers des activités en ligne avec la transition énergétique et écologique, dialogue approfondi avec ses clients et les entreprises dans lesquelles le Groupe investit sur leurs stratégies et actions en matière de transition énergétique et écologique.In the past few years, green finance has become a major issue for several players in finance. It should help BNP Paribas bring its business activities in line with the climate objectives set by the Paris Agreement and enable the firm to work toward the UN's sustainable development goals. To be a leader in sustainable finance, BNP Parisbas is using levers for : aligning its loan portfolio with the Agreement ; proposing ‟green” financial products and services to all its customers (individuals, investors and firms) ; orienting financial flows toward activities related to the energy and environmental transitions ; and deepening the dialog, with its clients and the firms in which it invests, about their strategies and actions in pursuit of these transitions.
- Leviers économiques pour la biodiversité - Laurent Piermont p. 77-84 L'atteinte des objectifs de préservation de la biodiversité suppose d'intégrer celle-ci dans l'économie et de trouver des leviers de création de valeur permettant un financement, en complément de l'action publique, de cette préservation par le secteur privé qui a les moyens techniques et financiers pour ce faire. Dans cet article, sont abordées les méthodes pertinentes de l'action avec la nature (et non contre elle), aboutissant à des solutions fondées sur cette dernière. Sont également examinés, outre les leviers et outils disponibles, les conditions de la création de valeur permettant de financer cette action en faveur de la biodiversité, en considérant que contrairement à ce qui est observé en matière climatique, les résultats de cette action ne permettent que difficilement de dégager les moyens nécessaires pour la rémunérer directement.Reaching the objectives set for the conservation of biodiversity means integrating this issue in the economy and finding leverage for creating value and, as a supplement to public actions, obtain funding from the private sector, which has the technical and financial means to provide it. The pertinent methods for actions with (and not against) nature are discussed that could come up with nature-based solutions. Besides the already available levers and tools, attention is paid to the conditions for creating value that would allow for financing actions in favor of biodiversity. Contrary to what is observed in climate-related matters, the results of these actions would bare raise the funding needed.
- Paris, je t'aime ! Quand la finance épouse les objectifs climatiques - Stéphane Voisin, Julie Raynaud, Peter Tankov p. 85-89 Facteur-clé du succès de l'Accord de Paris et de sa mise en œuvre, le concept d'alignement fait référence à des méthodes utilisées par un nombre croissant d'institutions financières pour évaluer la compatibilité de leurs portefeuilles avec les objectifs de cet accord. Censées informer les investisseurs et les particuliers sur la performance climatique de leur épargne, ces démarches sont sujettes à caution en raison des nombreuses variantes dans les hypothèses sous-jacentes et du cumul d'incertitudes qui peuvent en affecter le calcul et le résultat, comme l'analyse l'étude de l'ILB Alignement Cookbook. Peu comparables, ces méthodes peuvent être utilisées à des fins de communication pour exprimer la cohérence d'une stratégie de gestion avec un engagement climatique et informer de « la température implicite » d'un portefeuille, mais elles ne sont pas aptes à servir d'indicateurs dans la gestion du risque climatique. Les allégations d'impact positif qui les accompagnent parfois sont également discutables, même si la dynamique d'alignement, adoptée à une grande échelle, peut conduire à décarboner l'économie réelle, ce qui est précisément l'objectif qui lui est assigné dans l'Accord de Paris.A key factor for the success of the Paris Agreement and its application is ‟alignment”, a concept referring to the methods that a growing number of financial institutions use to evaluate the compatibility of their portfolios with the Agreement's objectives. Intended for informing investors and individuals about the ‟climate performance” of their investments and savings, these methods should be handled prudently given the many variants of the underlying hypotheses and a cumulation of uncertainty (which can affect calculations and results, as shown in the ILB Alignment Cookbook). These not very comparable methods can be used for the purpose of communications (about the coherence of a managerial strategy that makes a climate commitment or about a portfolio's ‟implicit temperature”), but they are not fit as indicators for managing climate risks. The accompanying claims about a positive impact are subject to discussion, even if the dynamics of ‟alignment” on a large scale may lead to decarbonizing the real economy. This is precisely the objective assigned to it in the Paris Agreement.
- Covid-19 et CO2 : la finance peut-elle contribuer à la convergence des luttes ? - Christian de Perthuis p. 90-93 En 2020, la lutte contre la circulation du virus a nettoyé le ciel et fait baisser les émissions de CO2 comme nul autre événement auparavant. La recherche d'une plus grande résilience face à la pandémie a renforcé l'action face au risque climatique. S'agit-il d'une conjoncture fortuite qui disparaîtra avec l'amenuisement de la charge virale ? Sous le choc de la pandémie, les sociétés pourraient au contraire amorcer un virage plus durable vers la résilience, en faisant converger la lutte contre la circulation des virus et celle contre la prolifération du CO2. Cet article examine comment une telle convergence pourra s'organiser à moyen et à long termes et trace quelques voies permettant à la finance d'y contribuer véritablement.In 2020, the fight against the circulation of the virus cleared the sky and lowered CO2 emissions for the first time ever. The quest for more resilience in handling the pandemic has reinforced climate-related actions. Is this convergence a happenstance that will disappear as the viral load dwindles ? Under the shock of COVID-19, societies might prime the pump for a more lasting shift toward resilience thanks to a convergence between the combat against the circulation of viruses and the fight against the proliferation of CO2. This discussion of how this convergence can be organized in the medium and long terms indicates how finance could make a genuine contribution.
- Les politiques environnementales et sociales des entreprises : quel dialogue avec les investisseurs ? - Edith Ginglinger p. 64-68