Contenu du sommaire : Marxismes chinois

Revue Actuel Marx Mir@bel
Numéro no 73, 2023
Titre du numéro Marxismes chinois
Texte intégral en ligne Accès réservé
  • Présentation - p. 7-9 accès réservé
  • Dossier : Marxismes chinois

    • Marxismes chinois et analyses marxistes de la Chine : les défis du XXIe siècle - Jean-Numa Ducange, Nathan Sperber p. 10-20 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Les marxismes de Chine sont très peu pris en considération en France. Cet article expose quelques hypothèses expliquant cet état de fait et rappelle l'importance de la référence marxiste en Chine à tous les niveaux, des plus hautes instances de l'État à des intellectuels plus ou moins isolés. L'article suggère également quelques pistes pour une analyse marxiste des réalités chinoises aujourd'hui, multiformes, qui empêchent de dresser un état des lieux schématique de l'évolution contemporaine du pays (Chine « capitaliste » ou « socialiste », etc.). Il suggère, au-delà du présent dossier, de poursuivre des recherches sur ces multiples dimensions.
      Marxist ideas and writings originating in China are largely neglected in the French context. This article ventures a few reasons why that may be the case and highlights the pervasive presence of Marxist references in present-day China, from the country's highest political organs to intellectuals. The article also touches on Marxist analyses of China's multifaceted social realities, pointing out challenges in applying broad categorizations to them (e.g., capitalism vs socialism). Beyond this special issue of Actuel Marx, further research on China along multiple dimensions is called for.
    • Les rapports entre parti et État en Chine aujourd'hui : une clé de lecture soviétique - Nathan Sperber p. 21-39 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Les rapports entre parti et État en Chine aujourd'hui : une clé de lecture soviétique L'architecture politique chinoise actuelle a été héritée de l'URSS ; pourtant elle est rarement appréhendée à l'aune de ce précédent historique. Cette étude analyse la relation asymétrique entre le Parti communiste chinois et la puissance publique à la lumière des formes et des pratiques du Parti communiste de l'Union soviétique post-stalinien. On relève l'homologie des structures partidaires et étatiques en URSS et en Chine, ainsi que la pénétration de l'État par le Parti dans ces deux configurations. Dans le cas chinois, cependant, des mécanismes institutionnels propres – tels que les groupes du Parti ( dangzu) – constituent des moyens de contrôle sur l'appareil étatique inconnus en URSS. Le pouvoir chinois actuel se distingue par une conception absolutiste du rôle dirigeant du Parti, à rebours d'efforts entrepris par le passé pour circonscrire son périmètre d'intervention et pour le rapprocher du fonctionnement alors en vigueur en Union soviétique.
      China's current political architecture can be traced to the Soviet system, yet there are few comparative analyses of the two institutional configurations. This study examines the relationship between the Chinese Communist Party and public institutions today through the lens of the formal rules and actual practices of the Communist Party of the Soviet Union in the post-Stalin decades. Party organizations and state institutions closely mirror each other across both systems, ensuring the penetration of the state apparatus by the party. Yet the Chinese political landscape also features distinct party-embedded mechanisms – such as the dangzu (party groups) – that constitute means of control over state activity that did not exist in the USSR. China's current leadership embraces an absolutist conception of the Communist Party's leading role, in contrast to prior endeavors aimed at limiting the party's sphere of intervention and at emulating political norms then in force in the Soviet Union.
    • Qui perd gagne. La guerre commerciale sino-étasunienne en perspective - Rémy Herrera, Zhiming Long, Zhixuan Feng, Bangxi Li p. 40-63 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Après une présentation de l'évolution du solde commercial sino-étasunien ( Partie I), cet article proposedeux méthodes de mesure de l'échange inégal entre les États-Unis et la Chine, l'une considérant le contenu en travail directement incorporé dans l'échange ( Partie II), l'autre, inspirée de Ricci (2018), centrée sur la valeur internationale et mobilisant des tableaux entrées-sorties ( Partie III), permettant d'esquisser une synthèse d'analyse sectorielle ( Partie IV).
      After a presentation of the evolution of the US-China trade balance (Part I), we propose two methods for measuring the unequal exchange between the United States and China, one considering the labor content directly incorporated in the exchange (Part II), the other, inspired by Ricci (2018), centered on international value and mobilizing input-output tables (Part III), making it possible to sketch a synthesis of sector analysis (Part IV).
    • Le « tianxia » selon Zhao Tingyang : l'ordre du monde de Confucius à Mao - Viren Murthy p. 64-77 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Devant les désordres du monde d'aujourd'hui, il existe au sein du confucianisme chinois un courant qui tente, dans les termes traditionnels du tianxia, « tous sous le ciel », d'esquisser les contours d'un nouvel ordre du monde et d'un horizon soutenable pour l'avenir. En le rapportant aux perspectives marxistes, cet article s'efforce de dégager ses motifs essentiels et de décrypter les termes du débat auquel il donne lieu. Quels enseignements parvient-il à dégager de cette philosophie millénaire ? Est-il à comprendre comme une alternative au marxisme ? Ou bien serait-il capable de se repenser autour d'une critique de l'impérialisme ? L'article interroge en ce sens un auteur contemporain significatif, Zhao Tingyang.
      In today's chaotic world, there is a current within Chinese Confucianism that attempts, to design a new world order for the future in the terms of tianxia (“all under heaven”), a traditional vision of the world/China, which dates back to early Chinese history. Through comparisons with Marxist perspectives, this article draws out the essential points of tianxia theory and reveals the terms and stakes of debates and questions around this theory. What does such a millenarian philosophy teach us? Should we understand it as an alternative to Marxism or would it be possible to rethink it in terms of a critique of imperialism? With these questions in mind, this article discusses the important contemporary Confucian tianxia theorist, Zhao Tingyang.
    • Modernisation à la chinoise et possibilités d'une nouvelle forme de civilisation - WU Xiaoming, Qi Tao, Soline Schweisguth p. 78-93 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Les débats actuels au sujet de la « voie chinoise » sont intimement liés à deux questions primordiales. Premièrement, quelle espèce de modernisation cette « voie chinoise » représente-t-elle ? Et deuxièmement, quel rapport entretient-elle avec la sinisation du marxisme ? Cet article vise à répondre à ces enjeux à partir d'une double perspective, celle du récit historique et celle de la philosophie de l'histoire. Cet article soutient que la modernisation à la chinoise est née des conditions historiques particulières du xxe siècle et que la sinisation du marxisme, en tant que méthodologie, s'est montrée capable de cerner la nature et la signification de ces conditions. Au xxie siècle, la « voie chinoise » représente un projet socialiste en renouvellement continu. Apportant un début de réponse à la crise mondiale du post-néolibéralisme, elle en quête des possibilités d'une nouvelle forme de civilisation.
      Discussion of the Chinese path of development cannot be separated from two essential questions. First, what has been the kind of modernization pursued by China? And second, what is the relation between China's modernization and Marxism's Sinicization? This article addresses these debates from the vantage points of historical narrative and the philosophy of history. We argue that Chinese-style modernization was born out of the special historical conditions of the twentieth century and that the Sinicization of Marxism, as a methodology, was able to accurately identify the nature and significance of these conditions. Having now entered the twenty-first century, the “Chinese path” embodies a self-renewing socialist project. As such, it is beginning to offer a response to the global crisis faced by post-neoliberalism, exploring the possibility of a new kind of civilization.
  • Débat

    • Théorie, pratique et interprétation historique. Réponses à des doctorants de l'université de New York - Wang Hui p. 94-108 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Dans cet entretien, inédit en langue occidentale, Wang Hui aborde les rapports entre pensée politique et pratiques de la révolution. Prenant comme point de départ les Thèses sur Feuerbach de Marx, il explore la façon dont cette question a été appréhendée dans la philosophie (Platon, Kant, Deleuze, Spivak…) ainsi que, dans le contexte chinois, par Mao Zedong et le mouvement communiste. Wang approfondit également la conception gramscienne de l'intellectuel organique afin de suivre les transformations de cette figure au fil du xxe siècle. Examinant un épisode décisif de l'histoire du Parti communiste chinois – la campagne de rectification de Yan'an dans les années 1940 –, il poursuit la réflexion à propos des relations entre le parti révolutionnaire et les intellectuels, et de ce qu'il en est advenu par la suite.
      In this conversation, hitherto unpublished in any Western language, Wang Hui explores the interrelations between political theory and revolutionary practice throughout the twentieth century. With Marx's Thesis on Feuerbach as an entry point, Wang discusses the way in which this question has been addressed by philosophers (from Plato and Kant to Deleuze and Spivak) and by actors of China's communist movement, foremost Mao Zedong. Expanding on Gramsci's conception of the organic intellectual, Wang traces how this figure has transformed over time. Examining the Yan'an Rectification Movement of the 1940s, a key episode in the history of Chinese communism, Wang further elaborates on the complex relations between intellectuals and the party at the time - and on what has become of them since.
  • Documents

    • Une lettre inédite de Karl Marx à Jules Guesde sur la France, l'« Orient » et l'« Occident » (1879) - Jean-Numa Ducange p. 109-114 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Les marxismes de Chine sont très peu pris en considération en France. Cet article expose quelques hypothèses expliquant cet état de fait et rappelle l'importance de la référence marxiste en Chine à tous les niveaux, des plus hautes instances de l'État à des intellectuels plus ou moins isolés. L'article suggère également quelques pistes pour une analyse marxiste des réalités chinoises aujourd'hui, multiformes, qui empêchent de dresser un état des lieux schématique de l'évolution contemporaine du pays (Chine « capitaliste » ou « socialiste », etc.). Il suggère, au-delà du présent dossier, de poursuivre des recherches sur ces multiples dimensions.
      Marxist ideas and writings originating in China are largely neglected in the French context. This article ventures a few reasons why that may be the case and highlights the pervasive presence of Marxist references in present-day China, from the country's highest political organs to intellectuals. The article also touches on Marxist analyses of China's multifaceted social realities, pointing out challenges in applying broad categorizations to them (e.g., capitalism vs socialism). Beyond this special issue of Actuel Marx, further research on China along multiple dimensions is called for.
  • Interventions

    • Ernst Bloch : le philosophe marxiste dissident de la RDA - Arno Münster p. 115-133 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Converti au marxisme, en 1919, dans le sillage de György Lukacs, exilé, dès mars 1933, en fuyant le nazisme, en Suisse, en France, en République tchèque et finalement aux États-Unis (1938-1949), Ernst Bloch, auteur du Principe espérance, décide en février 1949 de retourner en Europe et d'accepter la chaire de professeur d'histoire de la philosophie que lui offrait l'Allemagne de l'Est, à l'université de Leipzig. Après avoir appuyé tout d'abord, dans ses conférences, non sans un certain enthousiasme, le projet de la « construction du socialisme », Ernst Bloch sera pourtant vite déçu de la politique des dirigeants de la RDA qui, comme Walter Ulbricht, étaient complètement alignés sur les positions de l'Union soviétique et imitaient, avec zèle, les méthodes staliniennes. Accusé de « révisionnisme » et de liens avec le groupe oppositionnel de W. Harich, préconisant une voie « allemande » et démocratique vers le socialisme, il sera interdit d'enseignement, dès avril 1957. Il quittera la RDA en août 1961, une semaine avant la construction du Mur de Berlin.
      Converted to Marxism, in the wake of George Lukacs, in 1919, going into exile from Nazi-Germany in 1933 (Switzerland, France, Czecho-Slovakia, United States), Ernst Bloch, the author of The Principle of Hope , decided to return to Germany in February 1949, accepting the professorship for History of Philosophy at the university of Leipzig which the East-German authorities offered him. After his temporary adhesion to the official doctrine of the construction of Socialism in a country calling itself « the first Antifascist State of Workers and Peasants on the German Soil », Ernst Bloch was soon disappointed in the politics of the East-German government which was completely aligned with the positions of the Soviet Union, applying the methods of Stalin. Accused of « Revisionism » and of his political « links » to the Harich-group of Opponents to the regime, which preconized a « democratic German way to Socialism », Ernst Bloch was dismissed of his professorship in April 1957. He left East-Germany in August 1961, one week before the construction of the Berlin Wall.
    • Les quatre usages du concept de l'armée de réserve - Hadrien Clouet p. 134-154 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      En dépit de son importance, tant dans la théorie générale des crises que dans la conscience populaire, la notion « d'armée de réserve » a suscité peu de discussion théorique au sein du marxisme. Cet article propose de rassembler les contributions éparses qui la mobilisent pour identifier les usages de cette notion, et son apport au-delà des notions de chômage ou d'inoccupation. Si elle s'inscrit, à l'origine, dans un débat sur l'approche économique ou démographique des questions de population, la notion d'« armée de réserve » est employée avec quatre objectifs distincts dans la littérature marxiste. En premier lieu, elle sert d'opérateur historique, pour identifier les spécificités de chaque séquence capitaliste (et non-capitaliste). En second lieu, elle définit l'exercice d'un pouvoir d'État. En troisième lieu, elle joue le rôle d'opérateur synchronique, pour circonscrire les rapports de pouvoir à l'œuvre sur chaque territoire à une même époque. En dernier lieu, elle constitue un opérateur partisan, susceptible d'aider la constitution d'un sujet politique révolutionnaire.
      Despite its relevance for both general crisis theory and popular consciousness, the notion of « reserve army » has generated little theoretical discussion within Marxism. This article therefore gathers the few contributions that mobilize it, in order to specify the uses of this notion, and what it helps us to understand, beyond the concepts of unemployment or inoccupation. The invention of the « reserve army » settled a debate between economic and demographic approaches to population. But since then, the concept has been used in the Marxist literature following four distinct objectives. First, it has served as a historical operator, identifying the specificities of each capitalist (and non-capitalist) sequence. Second, it has defined the exercise of state power. Thirdly, it has acted as a synchronic operator, to study the power relations in each territory at a given period. Finally, it has operated as a partisan tool, likely to help the constitution of a revolutionary political subject.
    • Aux sources de la marxologie : david riazanov et l'institut marx-engels - Jean Dieuleveux p. 155-176 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      En s'appuyant sur l'historiographie russe la plus récente, cet article retrace le parcours de l'académicien soviétique David Riazanov, de son premier engagement aux côtés des populistes russes à son exécution lors des grandes purges. L'article se concentre principalement sur la contribution essentielle de Riazanov à la fondation de la « marxologie » scientifique à travers la création de l'Institut MarxEngels de Moscou en 1921. En présentant l'éditeur de la première MEGA tant comme un érudit marxiste respecté que comme un militant inflexible opposé à l'emprise de Staline sur le parti, l'article traite également des enjeux inhérents à toute recherche marxologique, comme la difficile articulation entre approche scientifique et impératif politique.
      By drawing on the most recent Russian historiography, this paper covers the career of the Soviet academician David Riazanov from his first commitment alongside the Russian populists until his execution during the Great Purge. The article mainly focuses on Riazanov's essential contribution to the foundation of scientific « marxology » through the creation of the Marx-Engels Institute of Moscow in 1921. By portraying the first MEGA editor both as a respected Marxist scholar and as a staunch militant opposed to Stalin's stranglehold on the party, this paper also addresses the issues inherent in any Marxological research such as the difficult articulation between scientific approach and political imperative.
    • Du sens commun à son « noyau sain ». L'historicité du sens commun selon Gramsci - Louis Rouquayrol p. 177-193 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Gramsci avance, dans ses Cahiers de prison, un certain nombre de propositions sur le sens commun. À partir d'elles, on peut penser une méthode qui permettrait de construire une histoire du sens commun et une histoire de la philosophie comme pratique de transformation du sens commun. Cinq thèses, en particulier, sont examinées : 1) tous les hommes sont philosophes ; 2) l'histoire de la philosophie livre une histoire déformée du sens commun ; 3) le sens commun est affecté de différents niveaux de profondeur historique ; 4) il existe un noyau sain du sens commun (le bon sens) ; 5) la transformation du sens commun engage un processus moléculaire par lequel un individu s'élève à la conscience critique de ses propres manières de penser, de sentir et d'agir.
      Gramsci puts forward, in his Prison Notebooks, some propositions on common sense. From them, a method is conceivable that would allow one to elaborate a history of common sense and a history of philosophy as a practice of transformation of common sense. Five theses, in particular, will be examined: 1) all men are philosophers ; 2) the history of philosophy delivers a deformed history of common sense ; 3) common sense has levels of historical deepness ; 4) there is a healthy core of common sense (good sense) ; 5) the transformation of common sense requires a molecular process by means of which a person develops a critical awareness of his ways of thinking, feeling, and acting.
  • Livres