Contenu du sommaire : L'Afrique face au changement climatique : quels choix financiers ?
Revue | Revue d'économie du développement |
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Numéro | vol. 32, no 4, décembre 2022 |
Titre du numéro | L'Afrique face au changement climatique : quels choix financiers ? |
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- Financement de la transformation du secteur de l'énergie en Afrique - Rabah Arezki p. 5-18 La transformation des systèmes énergétiques de l'Afrique nécessitera de gros investissements. Heureusement, les investissements respectueux du climat suscitent un intérêt croissant au sein de la communauté financière mondiale. Pour tirer parti de cet intérêt, les économies africaines doivent s'attaquer aux problèmes de longue date qui limitent la capacité de leurs systèmes énergétiques à absorber les investissements.The transformation of Africa's energy systems will require large investments. Luckily, there is growing interest in climate-friendly investments in the global financial community. To tap into that interest, African economies must tackle longstanding issues that constrain the ability of their energy systems to absorb investment. Codes JEL: O55, Q54, G21.
- En quoi les pays africains sont-ils structurellement vulnérables au changement climatique ? - Sosso Feindouno p. 19-40 Le changement climatique est indissociable des enjeux majeurs de développement. L'une des nombreuses injustices relatives au changement climatique est qu'il frappe plus durement les pays les plus pauvres du monde, en particulier les nations africaines. L'objectif de cet article est double : (i) évaluer la vulnérabilité structurelle au changement climatique des pays africains en la comparant à celle des Petits États insulaires en développement et à celle des autres pays en développement ; (ii) produire une analyse typologique regroupant les pays africains en fonction des caractéristiques de leur vulnérabilité au changement climatique. Il ressort de l'étude que les pays africains sont presque au même niveau moyen de vulnérabilité que les Petits États insulaires en développement, mais de loin plus vulnérables que les autres pays en développement. Toutefois, certains pays africains sont plus vulnérables que d'autres et les facteurs caractéristiques de la vulnérabilité des pays africains au changement climatique diffèrent d'un pays ou d'un groupe de pays à l'autre. On observe que les températures moyennes élevées, la tendance à la hausse des chocs de températures et de précipitations constituent des caractéristiques de vulnérabilité structurelle au changement climatique communes à tous les groupes de pays africains.Climate change is inseparably linked to major development issues. One of the many injustices associated with climate change is the fact that it most severely hits the world's poorest countries, particularly African nations. The purpose of this paper is twofold: (i) to assess the structural vulnerability of African countries to climate change relative to Small Island Developing States (SIDS) and other developing countries; and (ii) to provide a typology that groups African countries according to their climate change vulnerability characteristics. The study shows that African countries are, on average, almost at the same level of vulnerability as SIDS, but are far more vulnerable than other developing countries. However, some African countries are more vulnerable than others, and the characteristic factors of the vulnerability of African countries to climate change differ from one country or group of countries to another. High average temperatures, increasing trend in temperature and precipitation shocks are identified as common characteristics of structural vulnerability to climate change for all African country groups. Codes JEL: C43, O55, Q01, Q54.
- Le rôle du commerce pour une adaptation résiliente au changement climatique dans l'agriculture africaine - Henri Casella, Jaime de Melo p. 41-88 Cette étude explore les connaissances scientifiques sur la manière dont le commerce peut aider l'Afrique à s'adapter au changement climatique (CC) dans trois domaines : (i) les événements à déclenchement rapide provenant d'événements extrêmes de courte durée (inondations, températures extrêmes) ; (ii) les événements à évolution lente (augmentation des températures moyennes et élévation du niveau de la mer) ; et enfin (iii) les politiques de facilitation du commerce. Événements à déclenchement rapide. Le commerce réduit l'amplitude des dommages liés aux événements extrêmes, par exemple, les sécheresses. Mais certaines réactions de politiques économiques peuvent augmenter l'amplitude de ces chocs. Lors de la sécheresse sud-africaine de 2015-2016, les politiques ont eu des retombées dans les pays voisins. Après la crise financière de 2008-2009, les restrictions à l'exportation imposées par les principaux exportateurs de denrées alimentaires et la réduction des droits de douane par les importateurs ont amplifié le choc. La coordination des politiques est donc nécessaire pour en contrôler les retombées négatives. Événements à évolution lente. Les efforts de modélisation relevés dans la littérature se sont concentrés sur l'exploration des « marges » d'ajustement au changement climatique : changements dans les niveaux de production des cultures existantes ; changements dans les denrées alimentaires ; changements dans l'utilisation des terres ; délocalisation de la main-d'œuvre vers les zones urbaines/migration ; ajustements du volume des échanges à différentes échelles (régionales ou internationales). L'ensemble des modèles examinés montre que l'élargissement des canaux d'ajustement atténue l'amplitude de la perte de bien-être due au changement climatique attendue au cours du 21e siècle. La décomposition des changements de bien-être suggère deux conclusions. Premièrement, les ajustements dans la sélection des cultures et dans les partenariats commerciaux bilatéraux contribuent à peu près également à réduire le coût des ajustements. Deuxièmement, la forte augmentation attendue des prix des denrées alimentaires résultant du réchauffement climatique est susceptible de toucher plus durement l'Afrique subsaharienne. Facilitation des échanges. Un système commercial mondial opérationnel est un bien public dont la valeur augmentera avec le changement climatique. L'accès libre et sans entrave à l'approvisionnement mondial en denrées alimentaires (et autres produits essentiels) doit être garanti, en particulier pour l'Afrique. Cela requiert un rapprochement entre les régimes commerciaux et climatiques. Pour commencer, outre l'élimination des subventions néfastes (combustibles fossiles, pêche), les pays développés pourraient conclure un Accord plurilatéral sur les Biens Environnementaux (ABE). Un tel accord serait une triple victoire pour le commerce, pour l'environnement et pour l'agriculture africaine qui nécessite un accès sans droits de douane aux Biens Environnementaux ciblés à l'Adaptation (BEA) au changement climatique. L'étude étudie les droits de douane portant sur les biens environnementaux en les comparant aux autres biens. Ensuite, des provisions sur la préservation de l'environnement devraient figurer dans l'architecture des traités sur le commerce en Afrique. L'étude conclut que les pays africains pourraient améliorer le fonctionnement de l'architecture politique continentale par plusieurs mesures. Tout d'abord, en intégrant des provisions environnementales dans le traité de la ZLECAf (Zone de Libre-Échange Continentale Africaine). Ensuite, en retirant les BEA des listes d'exclusion de la ZLECAf, en réduisant simultanément leurs barrières commerciales sur les BEA et sur les Produits Préférables Écologiquement (PPE).The paper reports on evidence on how trade can help Africa adapt to Climate Change (CC) along three dimensions: (i) fast-onset events from short-lived extreme occurrences (floods, extreme temperatures); (ii) slow-onset events (rise in average temperatures and sea-level rise); (iii) trade facilitation policies. Fast-onset events. Trade reduces the amplitude of extreme events like a drought. But policy reactions to large shocks can increase the amplitude of the shock. During the South African drought of 2015-6, policies had spillovers in neighboring countries. Following the 2008-09 financial crisis, export restrictions by major crop exporters and reduction in tariffs by importers amplified the shock. Policy coordination is needed to control spillover effects. Slow-onset events. Modelling efforts have concentrated on exploring the ‘margins' of adjustment to CC: changes in production levels of existing crops; switches in crops; changes in land utilization; labor relocating to urban areas/migration; adjustments in the volume of trade at different scales (regional or international). All reviewed models show that enlarging the channels of adjustment mitigate the amplitude of the loss in welfare from expected CC over the 21st Century. Decomposing the welfare changes suggests two conclusions. First adjustments in crop selection and in bilateral trade partners contribute approximately equally to reducing the costs of adjustments. Second, the expected sharp increase in food prices resulting from warming is likely to hit SSA most strongly. Trade facilitation. A functioning global trading system is a public good to become more valuable under CC. Free and unfettered access to global food (and other key) supplies must be ensured, especially for Africa. This requires a rapprochement between the trade and climate regimes. As an entry point, besides dealing with harmful subsidies (fossil fuels, fisheries), developed countries could conclude a plurilateral Environmental Goods Agreement (EGA) that would be a triple win for trade, for the environment, and for African agriculture that needs tariff-free access to climate-Adaptation related EGs (AEGs). The paper documents the magnitude of tariffs on Environmental Goods. The paper concludes that African countries could improve the functioning of the continental policy architecture by several measures. First, by excluding AEGs from exclusion lists on the AfCFTA while simultaneously reducing their barriers to trade on AEGs and EPPs. Second, preserving the environment should be mainstreamed in the African trade architecture by including environmental provisions. Codes JEL : Q50, Q56, F18, F64.
- Changement climatique et viabilité budgétaire en Afrique subsaharienne - Patrick Amir Imam, Kangni Kpodar p. 89-124 Dans le contexte d'une exposition et d'une vulnérabilité élevées au changement climatique, cet article étudie comment le changement climatique, mesuré par l'occurrence de catastrophes naturelles, affecte les résultats budgétaires dans un échantillon de 45 pays d'Afrique subsaharienne au cours de la période 2000-2019. Si l'on examine les différents indicateurs de résultats budgétaires – recettes, dépenses, solde budgétaire et dette publique totale – nos prévisions sont largement confirmées par les estimations à effets fixes et les projections locales. Les chocs climatiques entraînent une baisse des recettes, ont un impact limité sur les dépenses, mais aggravent le déficit budgétaire et la dette publique totale. Néanmoins, la transmission des chocs de catastrophes naturelles aux résultats budgétaires semble se limiter à la première année suivant la catastrophe naturelle.Against the backdrop of high exposure and vulnerability to climate change, this paper examines how climate change, measured by the occurrence of natural disasters, affects fiscal outturns in a sample of 45 sub-Saharan African countries during the period 2000-2019. Looking at various indicators of fiscal outturns—government revenue, expenditure, budget balance, and total public debt—our priors are largely supported by the fixed-effect estimations and local projections. Climate shocks lead to lower revenues, have a limited impact on expenditure, but worsen the budget deficit and total public debt. Nonetheless, the transmission of natural disaster shocks to fiscal outturns appears to be confined within the first year after the occurrence of the natural disaster. Codes JEL : Q54, N27, H61.
- L'assurance indicielle peut-elle relever le défi de la vulnérabilité face au changement climatique ? - Michael R. Carter p. 125-151 Le risque climatique est depuis longtemps un défi pour les ménages agricoles et les éleveurs dans les pays à faible revenu, décourageant les investissements et la croissance de la productivité. Le risque climatique représente également un défi budgétaire pour les gouvernements qui fournissent des paiements de protection sociale à leurs citoyens les plus défavorisés ayant souffert des chocs climatiques. L'avancée constante du changement climatique ne fait qu'aggraver ces deux défis. L'assurance indicielle, qui peut être utilisée pour déclencher des paiements aux ménages ou aux gouvernements, lorsque des chocs climatiques se produisent, semblerait avoir le potentiel d'améliorer les coûts de ces deux défis. Mais comme cela est de plus en plus reconnu, l'assurance indicielle est imparfaite et peut échouer à mesurer précisément les chocs et à déclencher les paiements d'assurance lorsqu'ils sont nécessaires. Une première étape pour remédier à cette imperfection de l'assurance indicielle consiste à définir des normes de qualité cohérentes qui permettent aux ménages et aux gouvernements d'évaluer si la protection offerte par un contrat d'assurance indicielle vaut son prix. Cet article résume les travaux qui commencent à apparaître sur les normes de qualité à la fois pour les assurances indicielles micro et souveraines. Disposer de ces normes de qualité devient un outil utile pour concevoir de meilleurs contrats d'assurance indicielle et constitue une première étape pour aider l'assurance indicielle à atteindre son potentiel en vue de relever le défi du changement climatique.Climate risk has long been a challenge to agricultural and livestock raising households in low-income countries, discouraging investment and productivity growth. Climate risk also presents a budget challenge to governments that provide social protection payments to their most disadvantaged citizens who have suffered from climate shocks. The steady advance of climate change only serves to deepen both of these challenges. Index insurance, which can be used to trigger payments to households or governments when climate shocks occur, would appear to have the potential of ameliorate the costs of both challenges. But as has become increasingly recognized, index insurance is imperfect and can fail to accurately measure shocks and release insurance payments when they are needed. A first step in addressing this imperfection in index insurance is define coherent quality standards that allow households and governments to evaluate whether the protection offered by any index insurance contract is worth its price. This paper summarizes emerging work on quality standards for both micro and sovereign index insurance. Having these quality standards in hand becomes a useful tool for designing better index insurance contracts and is a first step in helping index insurance to fulfill its potential to meet the challenge of climate change. Codes JEL : G22, O13, O16.
- Les politiques de change africaines face au changement climatique : existe-t-il un risque de compétitivité polluante ? - Jean-Louis Arcand, Patrick Guillaumont, Sylviane Guillaumont Jeanneney p. 152-171 Cet article fait apparaître empiriquement qu'en Afrique au sud du Sahara les dépréciations réelles de la monnaie sont polluantes en termes d'émission de CO2 et que cet effet s'estompe avec une augmentation du revenu par tête. Ces résultats sont en conformité avec les prévisions d'un modèle théorique où l'intensité en carbone du secteur des biens échangeables est supérieure à celle du secteur des biens non échangeables, où la part relative du secteur des échangeables augmente avec la dépréciation réelle, et où le différentiel en intensité carbone entre les deux secteurs diminue avec le produit par tête. La spécificité africaine pour ce qui a trait à l'impact polluant des dépréciations est un résultat robuste, et semble liée à la faible taille du secteur manufacturier.This article demonstrates that real currency depreciations increase CO2 emissions in sub-Saharan Africa, and that this marginal effect is decreasing in capita income. The econometric results are consistent with the predictions of a simple theoretical model where the carbon intensity of the tradable sector is higher than that of the non-tradable sector, where the relative share of the tradable sector is increasing in real depreciation, and where the carbon intensity differential between the two sectors is a decreasing function of output per capita. The African specificity with regard to the polluting impact of depreciations is empirically robust, and seems to be linked to the small size of Africa's manufacturing sector. Codes JEL : F41, 024, 055, Q54.