Contenu du sommaire : Les versants englacés de la haute montagne alpine : Évolution holocène et impacts de la crise climatique actuelle
Revue | Revue de Géographie Alpine |
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Numéro | vol. 111, no 2, 2023 |
Titre du numéro | Les versants englacés de la haute montagne alpine : Évolution holocène et impacts de la crise climatique actuelle |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Les versants englacés de la haute montagne alpine : Évolution holocène et impacts de la crise climatique actuelle - Ludovic Ravanel, Melaine Le Roy, Florence Magnin, Marta Chiarle
- The Glaciated Slopes of the High Alpine Mountains: Holocene Evolution and Impacts of the Current Climate Crisis - Ludovic Ravanel, Melaine Le Roy, Florence Magnin, Marta Chiarle
- Tree-ring Dating of the Little Ice Age Maxima of Arolla Glaciers (Valais, Switzerland) - Melaine Le Roy, Kurt Nicolussi, Christian Schlüchter Little Ice Age (LIA) glacier variations are well constrained in the Alps, partly thanks to an unparalleled body of historical sources. When absent, tree-ring dating can be used to obtain accurate chronological information on glacier maxima. To do so, it is necessary to focus on the trees that immediately bordered the former maximum extent reached by the glaciers in historical times. Here, we present tree-ring dating results for newly sampled wood material and archival data from the forefields of two glaciers in the Pennine Alps, Tsijiore Nouve and Glacier d'Arolla. These sites have historical sources dating back to the early 19th century, i.e. slightly more recent than for the best known Alpine glaciers. At Tsijiore Nouve, the dating of trees embedded in the LIA outer moraine at the valley bottom and of bordering living trees both indicate the presence of the ice near this location as early as summer 1813 CE and of a maximum extent reached in 1816 CE. This is highly consistent with available historical sources pointing to a LIA maximum in 1817 CE. At Glacier d'Arolla we dated the outermost moraine to winter 1816/1817 CE, which is synchronous, despite different glacier response times. The dates we obtained are significantly earlier than available evidence at other Alpine glaciers during the same advance. Our results highlight the ability of tree-ring dating to derive accurate calendar dates for glacier maxima and show – for the first time in the Alps - that some glaciers were already at or near their LIA maxima when the cooling associated with the Mount Tambora volcanic eruption occurred.
- Datation dendrochronologique des maxima du Petit Âge Glaciaire des glaciers d'Arolla (Valais, Suisse) - Melaine Le Roy, Kurt Nicolussi, Christian Schlüchter Les variations des glaciers lors du Petit Âge Glaciaire (PAG) sont bien connues dans les Alpes, en partie grâce à un ensemble inégalé de sources historiques. Lorsque ces dernières sont absentes, la dendrochronologie peut être utilisée pour obtenir des informations chronologiques précises sur les maxima des glaciers. Pour ce faire, il faut cibler les arbres situés en limite de l'extension maximale atteinte par les glaciers à l'époque historique. Ici, nous présentons les résultats d'analyses dendrochronologiques portant sur des bois nouvellement échantillonnés ainsi que sur des bois d'archive qui proviennent de deux glaciers des Alpes Pennines, Tsijiore Nouve et Glacier d'Arolla. Ces sites possèdent des sources historiques remontant au début du xixe siècle, c'est-à-dire légèrement plus tardives que pour les glaciers Alpins les mieux documentés. À Tsijiore Nouve, la datation combinée d'arbres enfouis dans la moraine frontale externe du PAG et d'arbres vivants limitrophes prouve la présence de la glace à proximité immédiate du site dès l'été 1813 ainsi qu'une extension maximum atteinte en 1816. Ces résultats sont parfaitement en accord avec les sources historiques qui mentionnent un maximum du PAG atteint en 1817. Au Glacier d'Arolla nous avons daté le dépôt de la moraine PAG la plus externe à l'hiver 1816/1817, ce qui est synchrone, malgré les temps de réponse différents des deux glaciers. Les dates que nous avons obtenues sont nettement plus précoces que celles disponibles pour d'autres glaciers Alpins au cours de la même période d'avancée. Nos résultats mettent en évidence le potentiel de la dendrochronologie pour obtenir des dates calendaires précises pour les maxima glaciaires et montrent — pour la première fois dans les Alpes — que certains glaciers avaient déjà atteint, ou étaient proches de, leurs maxima du PAG lorsque le refroidissement associé à l'éruption du Mont Tambora s'est produit.
- The Glacier Views of Jean-Antoine Linck – A Milestone for the Mont Blanc Glacier History from the 18th to the 19th Century - Samuel U. Nussbaumer, Heinz J. Zumbühl Interdisciplinary approaches are needed to reconstruct the behaviour of glaciers beyond the beginning of systematic measurements. For example, historical documents have been used to reconstruct former glacier extents successfully at different sites, including in the well-documented Mont Blanc area that became popular since the mid-18th century among artists, scientists, and travellers. Jean-Antoine Linck from Geneva is probably the artist to whom we owe the greatest number of unique glacier views. Linck's special preference were the ice regions, which he discovered and drew with alpinistic daring and naturalistic correctness, preferably by gouache, although many pencil sketches are preserved. Linck subtly used the etching technique to create easily reproducible plates in large format, which are then hand-coloured with gouache and watercolour. This technique allowed him to create numerous reproductions of the same view, while still giving them a unique and original aspect, views that are remarkable for their serenity and silence, while offering luminous atmospheres. These illustrations introduced the realistic representation of the high mountains into the iconography of Genevese painting and thus led to a new kind of landscape painting with a permanent character. From a perspective of glacier history and although many of his artworks are not exactly dated by the author, the work of Jean-Antoine Linck is indispensable since it represents the whole development, specifically of the Mer de Glace and the Glacier des Bossons, but also other glaciers during the period from the end of the 18th century until the 19th century glacier maximum around 1820. Linck's work has the same importance for the Mont Blanc area as that of Caspar Wolf and Samuel Birmann for the central Swiss Alps or Thomas Ender for the Austrian Alps in terms of glacier iconography. Therefore, Linck was both an artist and a glacier historian.
- Les vues glaciaires de Jean-Antoine Linck – un jalon de l'histoire des glaciers du Mont Blanc du xviiie au xixe siècle - Samuel U. Nussbaumer, Heinz J. Zumbühl Des approches interdisciplinaires sont nécessaires pour reconstruire les fluctuations des glaciers au xixe siècle, au-delà du début des mesures systématiques. Par exemple, des documents historiques ont été appliqués pour reconstituer d'anciennes étendues des glaciers sur différents sites, notamment dans la région du Mont-Blanc, qui sont très bien documentés et devenus populaires parmi les artistes, les scientifiques et les voyageurs depuis le milieu du xviiie siècle. Le Genevois Jean-Antoine Linck est probablement l'artiste à qui l'on doit le plus de vues glaciaires exceptionnelles. La préférence particulière de Linck était les régions des glaciers, qu'il a découvertes et dessinées avec une audace d'alpiniste et une exactitude de naturaliste, principalement à la gouache, bien que de nombreux croquis au crayon aient été conservés. Linck a subtilement utilisé la technique de la gravure pour créer des planches de grand format facilement reproductibles, qui ont été ensuite coloriées à la gouache et à l'aquarelle. Cette technique lui a permis de créer de nombreuses reproductions d'une même vue, tout en leur donnant un aspect unique et original. Elles sont remarquables de sérénité et de silence, tout en offrant des ambiances lumineuses. Ces illustrations introduisent la représentation réaliste de la haute montagne dans l'iconographie de la peinture genevoise et conduisent ainsi à une nouvelle forme de peinture de paysage à caractère permanent. D'un point de vue de l'histoire des glaciers, et bien que nombre de ses œuvres ne soient pas exactement datées par l'auteur, l'ouvrage de Jean-Antoine Linck est indispensable. Il représente l'ensemble de l'évolution de la mer de Glace et du glacier des Bossons, mais également d'autres glaciers, pendant la période allant de la fin du xviiie siècle jusqu'au maximum glaciaire du xixe siècle vers 1820. L'œuvre de Linck accorde au territoire du Mont-Blanc la même importance, en termes d'iconographie des glaciers, que celle de Caspar Wolf et Samuel Birmann pour les Alpes centrales suisses, ou de Thomas Ender pour les Alpes autrichiennes. Linck était donc à la fois artiste et historien des glaciers. reconstitutions glaciaires, iconographie, Jean-Antoine Linck, région du Mont-Blanc, Petit âge glaciaire
- Turner's 1836 Alpine Crossing and the Little Ice Age Portrayed in Val Veny and Val Ferret; a Geography of the Sublime - Martin P. Kirkbride, Susan P. Mains, Vanessa Brazier The English artist J.M.W. Turner made his second visit to upper Val d'Aosta in 1836, after which he produced several significant paintings. Here, we accurately locate two of these works and relate them to the climatic and geomorphological environment of the time. We combine critical geomorphological and cultural geographic analyses to derive a more holistic appraisal of Turner's artistic motivations and methods in his Alpine works. The first is a watercolour of Mont Rouge de Peuterey from across the Glacier du Miage. The second is a major oil painting re-imagining of the 1717 Triolet disaster which conflates the complex geomorphological processes of this rock-ice avalanche and subsequent outburst flood into a single dramatic scene. Turner's visit coincided with the mid-nineteenth century maximum advance of glaciers in the region allowing him to witness dynamic geomorphological processes in close proximity. The precise viewpoints of these scenes demonstrate that Turner spent some time in the area to seek out preferred locations and that he was aware of considerable details of local history. The paintings speak of an immersion in the environment of the time, and their study yields fruitful insights into the complex relationships between geography and landscape art.
- La traversée alpine de Turner en 1836 et le petit âge glaciaire dépeints dans le Val Veny et le Val Ferret (massif du Mont-Blanc) - Martin P. Kirkbride, Susan P. Mains, Vanessa Brazier L'artiste anglais J.M.W. Turner (1775-1851) a réalisé sa deuxième visite dans le haut Val d'Aoste en 1836. Elle lui inspira plusieurs tableaux importants. Ici, nous localisons avec précision deux de ces œuvres et les relions à l'environnement climatique et géomorphologique de l'époque. Nous combinons des analyses géomorphologiques et géographiques culturelles pour proposer une évaluation plus holistique des motivations artistiques et des méthodes de Turner dans ses œuvres alpines. La première œuvre est une aquarelle présentant le mont Rouge de Peuterey (2941 m) à proximité du glacier du Miage (Val Veny). La seconde est une peinture à l'huile majeure interprétant la catastrophe du Triolet (3870 m) de 1717 (Val Ferret). Pour cette dernière, l'artiste a combiné en une seule scène dramatique les processus géomorphologiques complexes que sont une avalanche rocheuse impliquant également de la glace et l'inondation qui a suivi. La visite de Turner dans la région a coïncidé avec l'avancée maximale des glaciers au milieu du xixe siècle, ce qui lui a permis d'être confronté à des processus géomorphologiques d'ampleur. Les points de vue précis de ces deux scènes, déterminés ici pour la première fois, montrent que Turner a passé un certain temps dans la région pour rechercher les endroits les plus favorables et qu'il connaissait certains éléments importants de l'histoire locale. Les peintures font état d'une immersion dans l'environnement de l'époque, et leur étude donne un aperçu fructueux des relations complexes qui existent entre la géographie et l'art du paysage en montagne.
- Évolution récente et à venir des glaciers du Val Veny (massif du Mont-Blanc, Italie) : apports de la télédétection satellite optique - Antoine Rabatel, Etienne Ducasse, Victor Ramseyer, Romain Millan Les glaciers du Val Veny (versant italien du massif du Mont-Blanc) ont fait l'objet de nombreuses observations de terrain au cours des dernières décennies, notamment pour l'étude des fluctuations glaciaires ou des processus de surface liés à la couverture de débris. Nous proposons ici d'examiner comment les observations satellitaires peuvent compléter les mesures de terrain sur l'état et le devenir des glaciers du Val Veny. En effet, les produits satellitaires obtenus de manière quasi systématique permettent de rendre compte, non seulement de la perte de surface et de volume, mais aussi des changements dans les vitesses d'écoulement. Le constat que nous documentons ici à l'échelle du Val Veny est un amincissement des glaciers et un ralentissement de l'écoulement de la glace, avec une perte de surface estimée à 25 % d'ici 2050 et une perte de volume variant entre 30 et 43 % selon la source de données utilisée pour l'estimation du volume initial. Dans ce contexte, une portion de la zone supérieure du glacier de Brenva présente un comportement particulier d'épaississement et d'augmentation du flux de glace qui soulève des questions sur son origine. Enfin, les incertitudes dans l'estimation des épaisseurs de glace restent importantes et ont des répercussions sur l'évolution future des glaciers et leur contribution d'un point de vue hydrologique. D'ici 2050, nous estimons que l'apport en eau dû à la perte de volume des glaciers du Val Veny pourrait diminuer de 40 %.
- State and Fate of Glaciers in the Val Veny (Mont-Blanc Range, Italy): Contribution of Optical Satellite Products - Antoine Rabatel, Etienne Ducasse, Victor Ramseyer, Romain Millan The glaciers of the Val Veny (Italian side of the Mont-Blanc Massif) have been the site of numerous field observations during the last decades, in particular for the study of glacial fluctuations or surface processes related to the debris cover. Here, we propose to examine how satellite observations can complement field measurements on the state and fate of the Val Veny glaciers. Indeed, satellite products obtained in a quasi-systematic way allow to account not only for the loss of surface and volume, but also for the changes in their flow velocities. The overall pattern we document is a glacier thinning and slowdown of the ice flow, with an estimated shrinkage of 25% by 2050 and a volume loss ranging between 30 and 43% depending on the data source used for the estimation of the initial volume. In such a context, a portion of the upper reaches of Brenva Glacier shows an unexpected pattern of thickening and increase in ice flow that rises questions on its origin. Finally, the uncertainties in the estimation of ice thicknesses remain important and have repercussions on the future evolution of the glaciers and their contribution from a hydrological point of view. By 2050, we estimate that the water contribution due to the volume loss of Val Veny glaciers could decrease by 40%.
- Using Borehole Temperatures for Knowledge Transfer about Mountain Permafrost: The Example of the 35-year Time Series at Murtèl-Corvatsch (Swiss Alps) - Wilfried Haeberli, Jeannette Noetzli, Daniel Vonder Mühll Climate-related permafrost is widespread in cold mountains and heavily affects slope stability. As a subsurface phenomenon, however, it is often still absent in the perception of key partners concerning the discussion and anticipation of long-term impacts on high mountain regions from continued global warming. Outreach and knowledge transfer, therefore, play a key role. Long-term observations of permafrost temperatures measured in boreholes can be used to convey answers and key messages concerning thermal conditions in a spatio-temporal context, related environmental conditions, affected depth ranges, and impacts of warming and degradation on slope stability.The 35-year Murtèl-Corvatsch time series of borehole temperatures from which data is available since 1987, is used here as an example. Today, mountain permafrost is well documented and understood regarding involved processes, as well as its occurrence in space and evolution in time. Thermal anomalies caused by global warming already now reach about 100 meters depth, thereby reducing the ground ice content, causing accelerated creep of ice-rich frozen talus/debris (so-called “rock glaciers”) and reducing the stability of large frozen bedrock masses at steep icy faces and peaks.
- Utilisation des températures de forage pour le transfert de connaissances sur le permafrost (pergélisol) de montagne : L'exemple de la série temporelle de 35 ans à Murtèl-Corvatsch (Alpes suisses) - Wilfried Haeberli, Jeannette Noetzli, Daniel Vonder Mühll Le permafrost (pergélisol) lié au climat est très répandu dans les montagnes froides et affecte fortement la stabilité des pentes. Cependant, en tant que phénomène de subsurface, il est encore souvent absent de la perception des partenaires clés en ce qui concerne la discussion et l'anticipation des impacts à long terme sur les régions de haute montagne d'un réchauffement climatique continu. La sensibilisation et le transfert de connaissances jouent donc un rôle essentiel. Les observations à long terme des températures du permafrost mesurées dans des forages peuvent être utilisées pour transmettre des réponses et des messages clés concernant les conditions thermiques dans un contexte spatio-temporel, les aspects environnementaux connexes, les gammes de profondeurs affectées et les impacts du réchauffement et de la dégradation sur la stabilité des pentes. La série temporelle de 35 ans de Murtèl-Corvatsch sur les températures de forage, dont les données sont disponibles depuis 1987, est utilisée ici à titre d'exemple. Aujourd'hui, le permafrost de montagne est bien documenté et bien compris en ce qui concerne les processus impliqués, ainsi que sa présence dans l'espace et son évolution dans le temps. Les anomalies thermiques causées par le réchauffement climatique atteignent déjà aujourd'hui une profondeur d'environ 100 mètres, réduisant ainsi la teneur en glace du sol, provoquant un fluage accéléré des éboulis/débris gelés riches en glace des « glaciers rocheux » et réduisant la stabilité des grandes masses rocheuses gelées sur les faces et les pics glacés escarpés.
- Warming Permafrost in the Western Alps: A Further Evidence of Elevation Dependent Warming? - Paolo Pogliotti, Edoardo Cremonese, Umberto Morra di Cella The present study aims at characterising the recent thermal evolution of permafrost in the Aosta Valley region (Italy, Western European Alps) using active layer thickness anomalies and warming trends of both surface and deep temperatures as indicators. The dataset includes monitoring sites located at different altitudes and geomorphological contexts such as rock walls, high-altitude plateau and proglacial margins.The results show that the thickness of the active layer is increasing everywhere and that anomalies are consistent between sites despite their different characteristics and distances. Significant warming trends of about +0.2°C/10y are observed at 15 m depth in sites around 3000 m of elevation. In steep rockwalls warming trends at the rock surface are significant only on the north-facing faces where values are on average +0.42°C/10y at elevations above 4000 m.The present study aims to provide a snapshot on the current thermal evolution of permafrost in the north-western Alps as well as consistent and useful information for risk management. Taking advantage of this analysis, the study also aims to highlight as the temperature measures in permafrost could contribute to the elevation-dependent-warming debate.
- Réchauffement du permafrost dans les Alpes occidentales: une nouvelle preuve d'un réchauffement qui dépend de l'altitude? - Paolo Pogliotti, Edoardo Cremonese, Umberto Morra di Cella La présente étude vise à caractériser l'évolution thermique récente du permafrost dans la région de la Vallée d'Aoste (Italie, Alpes européennes occidentales) en utilisant comme indicateurs les anomalies d'épaisseur de la couche active et les tendances au réchauffement des températures de subsurface et en profondeur. L'ensemble des données comprend des sites d'étude situés à différentes altitudes et dans des contextes géomorphologiques variés tels que des parois rocheuses, des plateaux de haute altitude, et des marges proglaciaires.Les résultats montrent que l'épaisseur de la couche active augmente partout et que les anomalies sont cohérentes entre les sites malgré leurs caractéristiques et distances. Des tendances significatives au réchauffement d'environ +0,2 °C/10 ans sont observées à 15 m de profondeur dans des sites situés autour de 3000 m d'altitude. Dans les parois rocheuses, les tendances au réchauffement à la surface de la roche ne sont significatives que sur les versants nord où les valeurs sont en moyenne de +0,42 °C/10 ans à des altitudes supérieures à 4000 m.La présente étude fournit également un aperçu de l'évolution thermique actuelle du permafrost dans les Alpes du nord-ouest ainsi que des informations cohérentes et utiles pour la gestion des risques. Profitant de cette analyse, l'étude vise également à souligner que les mesures de température dans le permafrost pourraient contribuer au débat sur la dépendance du réchauffement à l'altitude.
- De l'observation des écroulements aux solutions opérationnelles : près de deux décennies d'études sur les risques cryo-gravitaires dans le massif du Mont-Blanc - Florence Magnin, Ludovic Ravanel, Matan Ben-Asher, Josué Bock, Maëva Cathala, Pierre-Allain Duvillard, Pierrick Jean, Jean-Yves Josnin, Suvrat Kaushik, André Revil, Philip Deline L'augmentation de la fréquence des écroulements rocheux (V > 100 m3), d'abord observée dans les Alpes européennes depuis les années 2000, a impulsé des études sur les parois de haute altitude et le permafrost de paroi. Le massif du Mont-Blanc (MMB) est progressivement devenu un terrain d'étude pilote grâce aux nombreuses données et connaissances acquises au travers de divers projets de recherche. L'analyse statistique de la distribution des écroulements (> 1300 événements recensés entre 2007 et 2021) met en évidence leur lien avec la distribution du permafrost ainsi qu'avec l'augmentation de la température de l'air. Cette analyse ouvre des perspectives prometteuses en termes de développement d'outils de prévision pour aider les pratiquant·es de la haute montagne et les acteurs·rices dans leurs stratégies d'atténuation des risques. Néanmoins, la compréhension des mécanismes de déstabilisation des parois rocheuses se heurte à la diversité des processus thermo-hydro-mécaniques potentiellement impliqués. Pour améliorer cette compréhension, les recherches actuellement menées dans le MMB se concentrent sur les processus d'infiltration et de circulation de l'eau dans les parois à permafrost en combinant des approches de modélisation numérique avancées avec des études de terrain ad hoc. Le couplage de modèles thermiques et hydrogéologiques, et leur combinaison avec des méthodes géoélectriques pourraient permettre d'évaluer la distribution et la quantité d'eau ou de glace interstitielle, une information cruciale pour les applications géotechniques. Parallèlement, la synthèse des données et connaissances acquises dans des approches intégrées des changements de paysage et des risques liés à la dégradation du permafrost, au recul des glaciers, à la formation potentielle de lacs et à la déstabilisation des parois rocheuses, apparaît comme une base essentielle pour les projets d'aménagement du territoire. Enfin, les échanges thermiques et hydrologiques entre les parois à permafrost et les appareils nivo-glaciaires qui y sont nichés (tabliers de glace et glaciers suspendus) sont une autre perspective de recherche à explorer, avec des implications pluridisciplinaires.
- From Rockfall Observation to Operational Solutions: Nearly 20 years of Cryo-gravitational Hazard Studies in Mont-Blanc Massif - Florence Magnin, Ludovic Ravanel, Matan Ben-Asher, Josué Bock, Maëva Cathala, Pierre-Allain Duvillard, Pierrick Jean, Jean-Yves Josnin, Suvrat Kaushik, André Revil, Philip Deline The enhanced rockfall frequency (V > 100 m3) first noticed in the European Alps, has motivated investigations on high mountain rock walls and rock wall permafrost since the 2000s. Mont-Blanc massif (MBM) has become a pilot study area thanks to the wealth of data and knowledge on rockfall and permafrost dynamics acquired through successive research projects. Statistical analysis of rockfall distribution (> 1300 events inventoried between 2007 and 2021) shows that they are related to permafrost distribution and increasing atmospheric temperature, opening promising perspective for developing forecasting tools to support mountain practitioners in their risk mitigation strategy. However, understanding how rock wall destabilizations develop is challenged by the variety of potentially involved thermo-hydro-mechanical processes. To face these challenges, research currently carried out in the MBM focuses on water infiltration and circulation processes in frozen rock walls by combining advanced numerical modelling approaches and ad hoc field surveys. The coupling of models simulating heat and water transport with geoelectrical imaging methods could allow assessment of ground water/ice distributions and contents that is highly relevant for geotechnical purposes. Concurrently, the combination of acquired data and knowledge in integrative approaches of landscape changes and hazards involving permafrost degradation, glacier retreat, possible lake formation and rock wall destabilization appears as an essential basis for land-planning concerns. Finally, thermal and hydrological interactions between rock wall permafrost and ice bodies nestled on rock faces (ice aprons and hanging glaciers) is another direction of research to be pursued with cross-disciplinary implications.
- Transferring Cryosphere Knowledge between Mountains Globally: A Case Study of Western Canadian Mountains, the European Alps and the Scandes - Emilie Stewart-Jones, Stephan Gruber Permafrost is present in mountains globally, yet most research has been focussed in the small area covered by the European Alps. This paper presents a method for comparing regional climates at a coarse scale to highlight similarities and differences between the European Alps and the Scandes to western Canadian mountain regions with permafrost. Climate variables from the ERA5 reanalysis relevant to mountain permafrost are averaged over the 1986–2005 period and compared. This helps to understand where permafrost conditions can be compared and where new research is needed. In this application, we conclude that a direct transfer of knowledge about ground temperature regimes and spatial patterns from the Scandes and Alps to western Canada is inappropriate because (1) the areas in western Canada receive more radiation than those in the Scandes, and less than in the Alps, (2) the areas in western Canada are more continental than the Scandes and the Alps, (3) the areas in western Canada extend into much colder conditions that the Scandes and the Alps, and (4) overlap in climatic variables is concentrated in small areas. Further research is needed to understand permafrost in mountains of western Canada.Despite the imperfections of reanalysis products, they present a unique and homogeneous data source for the remote and sparsely measured cryosphere regions. As such, this method can better inform the transfer of cryosphere knowledge between mountains globally.
- Transfert des connaissances sur la cryosphère entre les montagnes au niveau mondial : Une étude de cas des montagnes de l'Ouest canadien, des Alpes européennes et des Scandes. - Emilie Stewart-Jones, Stephan Gruber Le pergélisol est présent dans les montagnes au niveau mondial, mais la plupart des recherches se sont concentrées sur la petite zone couverte par les Alpes européennes. Cet article présente une méthode de comparaison des climats régionaux à une échelle grossière afin de mettre en évidence les similitudes et les différences entre les Alpes européennes et les Scandes, d'une part, et les régions montagneuses de l'ouest du Canada avec pergélisol, d'autre part. Les variables climatiques de la réanalyse ERA5 pertinentes pour le pergélisol des montagnes sont moyennées sur la période 1986-2005 et comparées. Cela permet de comprendre où les conditions du pergélisol peuvent être comparées et où de nouvelles recherches sont nécessaires.Dans cette application, nous concluons qu'un transfert direct des connaissances sur les régimes de température du sol et les modèles spatiaux des Scandes et des Alpes à l'ouest du Canada n'est pas approprié parce que (1) les régions de l'ouest du Canada reçoivent plus de rayonnement solaire que celles des Scandes, et moins que celles des Alpes, (2) les régions de l'ouest du Canada sont plus continentales que les Scandes et les Alpes, (3) les régions de l'ouest du Canada s'étendent dans des conditions beaucoup plus froides que les Scandes et les Alpes, et (4) le chevauchement des variables climatiques se concentre dans de petites régions. Des recherches supplémentaires sont nécessaires pour comprendre le pergélisol dans les montagnes de l'ouest du Canada.Malgré les imperfections des produits de réanalyse, ils constituent une source de données unique et homogène pour les régions éloignées et peu mesurées de la cryosphère. En tant que telle, cette méthode permet de mieux informer le transfert des connaissances sur la cryosphère entre les montagnes du monde entier.
- Christmas Mass Movements in the Italian Alps - Marta Chiarle, Costanza Morino, Giovanni Mortara, Walter Alberto, Mario Ravello, Aristide Franchino, Giuseppe Orombelli, Marco Giardino, Luigi Perotti, Guido Nigrelli Mass movements at high elevation during wintertime are rare events in the Italian Alps, but are generally large events compared to those occurring in other seasons. In a context of climate change, their interpretation is particularly challenging due to the risk implications during a highly tourist season in the mountains, and because their occurrence seemingly contradicts the attribution of recent mass movements in high-alpine environments to global warming. To shed some light on this topic, we reviewed 12 mass movements in the Italian Alps that occurred at elevations above 1500 m, documented from mid-December to January, henceforth during the Christmas period. The aim is to understand whether recent events may be related to ongoing climate and environmental changes. Even though the small number of analysed mass movements does not allow statistically based conclusions, some preliminary considerations could be drafted. We observe a seeming increase in the frequency and elevation of winter mass-movement events in the last two decades, with an increased number of failures involving rock slopes under permafrost conditions, and a transition from heavy-precipitations controlled mass movements to temperature-anomalies and -fluctuations controlled mass movements. We also show that any type of instability process can occur in winter, including debris flows, with rock falls/avalanches prevailing. These findings may partly stem from an increased number of mass-movement reports deriving from the growing attention in recent years to the impacts of climate change and their related risks. Considering the growing anthropic pressure on alpine areas even in winter, especially for tourism purposes, it is crucial to broaden our knowledge on winter mass movements by expanding and analysing a larger case history, through the opportunities offered by new technologies and citizen science.
- Frane di Natale nelle Alpi Italiane - Marta Chiarle, Costanza Morino, Giovanni Mortara, Walter Alberto, Mario Ravello, Aristide Franchino, Giuseppe Orombelli, Marco Giardino, Luigi Perotti, Guido Nigrelli
- Ascension du mont Blanc (4808 m) : quels risques prend-on dans le Grand Couloir du Goûter et dans la face nord du mont Blanc du Tacul ? - Ludovic Ravanel, Jacques Mourey, Lorig Tamian, Sébastien Ibanez, Didier Hantz, Pascal Lacroix, Pierre-Allain Duvillard L'alpinisme est une pratique sportive qui dépend fortement des conditions des milieux physiques dans lesquels elle se développe. Les alpinistes doivent ainsi faire face à des aléas glaciaires et périglaciaires importants, tels que ceux qui affectent les deux principaux itinéraires d'ascension du mont Blanc (4808 m ; Alpes européennes occidentales) : les chutes de pierres dans le Grand Couloir de l'aiguille du Goûter sur la Voie Royale et les chutes de séracs sur le versant NNO du mont Blanc du Tacul sur l'itinéraire des Trois Monts. Les aléas dans ces deux secteurs ainsi que la fréquentation ont été mesurés grâce à un dispositif multicapteurs et à des acquisitions photographiques automatiques, respectivement. Sur le premier site, où l'on déplore une très forte accidentalité avec en moyenne 3,7 décès par an, 17 768 passages ont été comptabilisés au cours de l'été 2019 et 2 648 signaux sismiques ont été classés comme des chutes de pierres ayant affecté le Grand Couloir. Le risque de décès associé à ces chutes de pierres, dont la fréquence est dépendante des températures et de la présence d'eau liquide dans le terrain, serait de 1,7 × 10-4. Au Tacul, où en moyenne 0,6 décès se produit chaque année, 6 770 passages ont été relevés au cours de l'été 2017, ainsi que 31 chutes de séracs sans lien avec les températures. Le risque de décès y est de 8,3 × 10-5. L'aléa est également quantifié pour chacune des traces faites sur le versant glaciaire. Les résultats obtenus permettent de préciser les risques encourus par les alpinistes et de favoriser des stratégies de réduction des risques.
- Climbing Mont Blanc (4808 m a.s.l.): What Are the Risks in the Grand Couloir Du Goûter and On the North Face of Mont Blanc Du Tacul? - Ludovic Ravanel, Jacques Mourey, Lorig Tamian, Sébastien Ibanez, Didier Hantz, Pascal Lacroix, Pierre-Allain Duvillard Mountaineering is a sport highly dependent on the conditions of the physical environments in which it takes place. As a result, mountaineers have to deal with major glacial and periglacial hazards, such as those affecting the two main routes used to climb Mont Blanc (4808 m a.s.l.; Western European Alps): rockfalls in the Grand Couloir du Goûter on the Voie Royale and serac falls on the NNW slope of Mont Blanc du Tacul on the Trois Monts route. Hazards in these two sectors and the number of climbers were measured using a multi-sensor system and automatic photographic acquisition, respectively. On the first site, which has a very high accident rate with an average of 3.7 deaths per year, 17,768 passages were recorded during the summer of 2019 and 2,648 seismic signals were classified as rockfalls affecting the Grand Couloir. The average risk of death associated with these rockfalls, the frequency of which depends on temperatures and the presence of liquid water in the ground, is estimated at 1.7 × 10-4. At Tacul, where an average of 0.6 deaths occur each year, 6,770 passages were recorded during the summer of 2017, as well as 31 serac falls unrelated to temperatures. The risk of death is 8.3 × 10-5. The risk is also quantified for each track made on the glacier. The results obtained makes it possible to specify the risks experienced by climbers and to promote risk reduction strategies.