Contenu du sommaire : Le financement des biens publics mondiaux
Revue | Revue d'économie financière |
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Numéro | no 151, 3ème trimestre 2023 |
Titre du numéro | Le financement des biens publics mondiaux |
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Le financement des biens publics mondiaux
- Avant-propos - Bertrand Badré p. 9-11
- Introduction - Bruno Cabrillac p. 13-23
- Replacer les biens publics mondiaux dans un contexte de polycrise - Charlotte Gardes-Landolfini p. 27-40 Tandis que le monde est confronté à une « polycrise » sans précédent, la fourniture – et la durabilité – des biens publics mondiaux s'en retrouve profondément affectée. En premier lieu, le climat et la nature, mais également les autres biens publics mondiaux que fournissent les communs, qu'il s'agit de protéger. Définir les biens publics mondiaux dans ce contexte revient à mettre en exergue tant leur caractère central – condition préalable à la durabilité dans un monde interconnecté –, mais aussi leur caractère profondément politique. Leur offre insuffisante et les défis de gouvernance qui leur sont propres doivent ainsi être réinterrogés. Cet article s'attache à décrire les caractéristiques des biens publics mondiaux, leur multiplicité, mais également les liens qui les unissent, les nombreux défis auxquels ils sont confrontés et les esquisses de solutions à l'œuvre. Classification JEL : A10, A13, E61, F63.As the world faces an unprecedented “polycrisis”, the provision – and sustainability – of global public goods is being profoundly affected. First and foremost, climate and nature, but also the other global public goods provided by the commons, which need to be protected. Defining global public goods in this context means emphasizing both their centrality – a prerequisite for sustainability in an interconnected world – and their profoundly political nature. The insufficient availability of these public goods and the governance challenges that are specific to them must therefore be re-examined. This article describes the characteristics of global public goods, their diversity, but also the links between them, the many challenges they face, and possible solutions. JEL classification: A10, A13, E61, F63.
- Communs et biens publics mondiaux - Gaël Giraud p. 41-51 À la traditionnelle partition entre biens publics et privés, les communs ajoutent une nouvelle dimension : celle des ressources, matérielles ou non, que nous pouvons partager et qui sont vulnérables à l'appropriation privée non régulée. On suggère que cette catégorie est clé pour affronter la polycrise écologique, mais elle exige la mise en place d'un nouveau type d'institutions internationales hybrides réunissant acteurs privés, publics et ONG, et dont Drugs for Neglected Disease Initiative (DNDi) offre un exemple prometteur. Classification JEL : F50, F55, G28, Q05.To the traditional division between public and private goods, the commons add a new dimension: that of resources, material or not, that we can share and that are vulnerable to unregulated private appropriation. It is suggested that this category is key to addressing the ecological polycrisis but requires the establishment of a new type of hybrid international institutions bringing together private, public, and NGO actors, of which the Drugs for Neglected Disease initiative (DNDi) offers a promising example. JEL classification: F50, F55, G28, Q05.
- Sens privé, sens commun ? - Jean-Michel Severino p. 53-65 Cet article traite de la transformation de la conception de l'entreprise dans le monde contemporain et de la manière dont elle est conduite à être un nouveau contributeur aux biens publics globaux. Héritière d'une vision de l'entreprise comme simple générateur, notre société évolue sous la pression conjuguée des consommateurs, des salariés, des régulateurs, mais aussi des dirigeants et des actionnaires, dans un monde marqué par l'apparition de causes publiques auxquelles les entreprises sont sommées de contribuer. L'article propose de redéfinir l'entreprise à partir de la valeur qu'elle génère. Cela permettra de remettre en perspective le nouveau paysage de politique publique, comme de stratégie pour les entreprises, qui se dessine. Classification JEL : A13, D21, H04, L21, M14.This article discusses the transformation of the concept of corporations in the contemporary world and how it is driven to be a new contributor to global public goods. Heir to a vision of the company as a simple generator of profit, our society is evolving under the combined pressure of consumers, employees, regulators, but also managers and shareholders, in a world marked by the appearance of public causes, to which companies are summoned to contribute. The article proposes to redefine the corporation on the basis of the value it generates. That will put into perspective the new vision of public policy, as well as corporate strategy, that is emerging. JEL classification: A13, D21, H04, L21, M14.
- Actionnaires, responsabilité sociale des entreprises et biens publics mondiaux - Catherine Casamatta, Sébastien Pouget p. 67-79 Cet article examine pourquoi les sociétés par action tiennent compte de la production de biens publics mondiaux dans leur objectif. Les défaillances de marché et les problèmes de politique publique sont souvent graves au niveau mondial. Dans ce cas, la maximisation du profit ne peut pas garantir des résultats économiques efficaces et équitables. L'article discute de la conception des stratégies des investisseurs socialement responsables et propose diverses implications pratiques. Classification JEL : A13, D21, G01, M14.This article examines why publicly owned companies include the creation of global public goods in their goals. There are often acute market failures and public policy problems on a global scale. In such cases, profit maximization cannot guarantee efficient and fair economic outcomes. The article discusses developing socially responsible strategies for investors and proposes various practical implications. JEL classification: A13, D21, G01, M14.
- Le problème du « destructeur clandestin » et les biens publics mondiaux - Ruchir Agarwal, John-Arne Røttingen p. 83-109 Le présent article examine le problème du « destructeur clandestin », qui représente une menace pour les biens publics mondiaux. Le terme « destructeur clandestin » peut se définir comme quelqu'un qui détériore ou détruit quelque chose qui est bénéfique pour tout le monde, mais qui nécessite la coopération de tout le monde pour être fourni ou protégé. Nous présentons six exemples concrets du problème du « destructeur clandestin », dont une étude de cas fondée sur la pandémie de Covid-19. Nous proposons d'impliquer différentes parties prenantes, de développer une structure de gouvernance mondiale solide et inclusive et de mettre en place des mécanismes de financement innovants. La fourniture et la préservation des biens publics mondiaux exigent une action collective urgente si l'on veut atténuer les conséquences potentiellement catastrophiques. Classification JEL : D62, H87, I18, O30, Q54.This paper explores the “Free Destroyer Problem”, which poses a threat to global public goods. The term free destroyer can be defined as someone who harms or destroys something that is good for everyone but requires everyone's cooperation to provide or protect. We provide six concrete examples of the “Free Destroyer Problem”, including a case study based on the Covid-19 pandemic. We propose engaging diverse stakeholders, developing a robust and inclusive global governance structure, and establishing innovative financing mechanisms. The provision and preservation of global public goods demands urgent collective action to mitigate potential catastrophic consequences. JEL classification: D62, H87, I18, O30, Q54.
- Gestion des biens publics mondiaux et nouvelles formes de multilatéralisme - Julien Arthur, Fabio Grieco, Quentin Paul p. 111-128 Depuis la grande crise financière, le G20 s'est imposé comme le principal forum international de coordination des politiques publiques, au moins en matière économique et financière. L'actualité, que ce soit la pandémie de Covid-19 ou l'urgence de la lutte contre le changement climatique, a poussé le G20 à étendre son champ au-delà de la stabilité financière à d'autres biens publics mondiaux et à aborder ces sujets dans ce cadre analytique. Dans le même temps, le consensus qui est le mode de prise de décision du G20 apparaît comme toujours plus complexe à atteindre du fait des tensions géopolitiques sans pour autant que l'on ne constate un repli de l'interconnexion économique et financière et alors même que la problématique des biens publics mondiaux a attisé la prise de conscience des interdépendances.Le multilatéralisme économique s'est construit par strates successives et souffre aujourd'hui d'un manque de clarté tendant parfois à la cacophonie institutionnelle, en raison du grand nombre d'institutions impliquées et de la création de normes plus ou moins souples et parfois concurrentes, notamment en matière de régulation de la finance durable.Cet article appelle, en prenant l'illustration du changement climatique, à repenser la place du G20, notamment de la filière Finances, dans l'ordre multilatéral en s'appuyant toujours plus sur les institutions de coordination normative comme le Conseil de la stabilité financière ainsi que sur les groupes, comme les forums inclusifs appuyés sur l'OCDE, rassemblant des acteurs volontaires dans la recherche d'un consensus opérationnel visant à la gestion et au financement des biens publics mondiaux. Le G20 se veut ainsi en chef d'orchestre de ce réseau multilatéral afin d'éviter la cacophonie. Classification JEL : F55, H87, Q58.Since the great financial crisis, the G20 has established itself as the main international forum for coordinating public policy, at least in the economic and financial spheres. Current issues, such as the Covid-19 pandemic and the urgent need to combat climate change, have prompted the G20 to extend its focus beyond financial stability to other global public goods and to address these issues within this analytical framework. At the same time, the consensus required for the G20 to take decisions appears to be increasingly difficult to attain due to geopolitical tensions, even though there has been no noticeable weakening of economic and financial interconnections and the issue of global public goods has heightened awareness of interdependence.Economic multilateralism has been built up in successive layers and currently suffers from a lack of clarity that sometimes tends towards institutional cacophony because of the large number of institutions involved and the creation of more or less flexible and sometimes competing standards, particularly for the regulation of sustainable finance.Using climate change as an example, this article calls for rethinking the role of the G20 – especially in the area of finance – in the multilateral order by increasingly relying on coordinating institutions that set standards, such as the Financial Stability Board, as well as on groups like the inclusive forums backed by the OECD that bring together voluntary participants in the quest for an operational consensus around management and financing of global public goods. The G20 should thus see itself as the driving force behind this multilateral network in order to avoid cacophony. JEL classification: F55, H87, Q58.
- Renforcer la résilience climatique et sanitaire mondiale : le rôle de la coopération économique multilatérale - Benedetta Guerzoni, Giorgia Mangani p. 129-142 Les menaces telles que le changement climatique et la récente pandémie de Covid-19 ont forcé les responsables politiques à reconnaître l'étroite interconnexion entre les questions environnementales et sanitaires. Dans ce contexte, au cours des deux dernières années, les forums et les institutions économiques multilatérales (le G7, le G20, le Fonds monétaire international et la Banque mondiale, entre autres) ont considérablement intensifié leurs efforts pour encourager la communauté internationale à renforcer sa capacité de préparation et de résilience face aux chocs. Malgré les progrès récents, l'amélioration de la résilience climatique et sanitaire mondiale reste une priorité politique essentielle au niveau international, qui nécessite une stratégie globale et un large éventail d'outils. Le renforcement de la coopération économique et financière multilatérale, la coordination des politiques climatiques et sanitaires mutuellement bénéfiques, tout en améliorant les synergies entre les initiatives internationales, sont autant de facteurs essentiels pour transformer les défis pluridimensionnels actuels en une occasion unique de construire des économies et des sociétés durables et résilientes. Classification JEL : F50, F53, F55, F64, F69.Challenges such as climate change and the recent Covid-19 pandemic have forced policymakers to recognize the close interconnection between environmental and human health. In this context, over the last couple of years multilateral economic forums and institutions (the G7, the G20, the International Monetary Fund and the World Bank, among others) have significantly stepped up their efforts to support the international community in reinforcing their preparedness and resilience against shocks. Despite the recent progress, increasing global climate-health resilience remains a key policy priority at the international level, which requires a comprehensive strategy and a wide range of tools. Strengthening multilateral economic and financial cooperation, coordinating mutually reinforcing climate and health policies, while enhancing synergies among international initiatives, is crucial in order to transform the ongoing multi-faceted challenges into a unique opportunity to build sustainable and resilient economies and societies. JEL classification: F50, F53, F55, F64, F69.
- Biens publics mondiaux et développement : l'indispensable convergence de deux écosystèmes d'acteurs du financement - Sébastien Treyer p. 145-156 Le financement des biens publics mondiaux, en particulier du climat, est sur le point d'être intégré dans le mandat formel de la Banque mondiale. Il ne s'agit que du plus récent développement d'un processus de plus long terme de convergence entre deux écosystèmes d'acteurs du financement : le système international de financement du développement, né après la Seconde Guerre mondiale, et celui, plus récent, développé pour financer la protection de l'environnement. Cette convergence est à la fois inévitable et nécessaire, mais elle nécessite d'analyser en détail le risque que l'accent mis sur les biens publics mondiaux ne se fasse aux dépens des objectifs socioéconomiques de développement. Cet article montre que les institutions de financement du développement peuvent aligner l'ensemble de leurs stratégies et portefeuille avec l'Accord de Paris sur le climat en s'assurant qu'ils s'alignent, aux échelles nationales, avec des stratégies de développement économique de long terme compatibles avec la décarbonation profonde de l'économie, dans le cadre de la transformation profonde des modèles de développement requis par l'Agenda 2030. Ce modèle de l'alignement avec l'Accord de Paris peut servir de modèle à d'autres biens publics mondiaux. Au-delà des organisations dédiées au développement international, cet article montre aussi la nécessité d'une réforme plus profonde de l'ensemble du système financier international. Classification JEL : F33, F35, F42, H87.Financing global public goods, in particular climate action, is on the verge of being made part of the World Bank's official mandate. This is just the most recent development in a process of convergence between two financing ecosystems: the international ecosystem for financing development, established after the Second World War, and the more recent institutions established to finance the protection of the environment. This convergence process is both inevitable and necessary, but makes it necessary to take a detailed look into the risk that the focus on global public goods could come at the expense of social and economic goals. This paper shows that the institutions for financing development can align all their strategies and their entire portfolio with the Paris Agreement on Climate by making sure that they align with nationally developed long-term low emissions development pathways, thus avoiding trade offs between development and climate, and fostering transformative change in the spirit of Agenda 2030. This can serve as a model for other global public goods. But beyond dedicated development finance institutions, this paper also shows the necessity for a more thorough reform of the whole international financial system. JEL classification: F33, F35, F42, H87.
- Quelles mesures pour le financement international du développement et des biens publics mondiaux ? - Thomas Melonio, Jean-David Naudet p. 157-169 La mondialisation des défis de développement durable (crises sanitaires, dérèglement climatique, etc.) n'a pas encore été suivie d'un mouvement équivalent en matière de métrique, de comptabilisation statistique et de promotion des incitations pour les États à produire leur contribution optimale en matière de coopération internationale. Si le cadre de l'aide publique au développement a permis de rendre comparables les efforts de solidarité des pays de l'OCDE, il ne permet plus aujourd'hui de rendre compte de manière suffisamment précise des flux financiers consacrés aux biens publics globaux. Cet article analyse les cadres statistiques existants et s'intéresse à des options alternatives pour mieux refléter et structurer les financements internationaux pour le climat et plus généralement les objectifs de développement durable (ODD). Classification JEL : F50, F55, F63, F64, O19.The globalization of sustainable development challenges (health crises, climate change, etc.) has not yet been followed by an equivalent push in terms of metrics, statistical accounting, and the promotion of incentives for governments to deliver their best possible contribution in terms of international cooperation. While the framework of public development aid has made it possible to compare the solidarity efforts of OECD countries, it no longer provides a sufficiently accurate picture of the funding devoted to global public goods. This article analyzes existing statistical frameworks and looks at various possibilities for better reflecting and structuring international financing for climate and, more generally, the Sustainable Development Goals (SDGs). JEL classification: F50, F55, F63, F64, O19.
- Le financement des biens publics mondiaux par les banques multilatérales de développement - Pauline Fournel, Julien Velud p. 171-186 La définition et la liste des biens publics mondiaux, sans doute plus restreintes que celles relatives aux défis mondiaux, ne font pas consensus au sein des différentes banques multilatérales de développement (BMD). Ces dernières se sont néanmoins engagées, notamment depuis la conférence d'Addis Abeba en 2015, en faveur du financement des objectifs de développement durable (ODD), dont l'atteinte repose en partie sur la fourniture et la protection des biens publics mondiaux (BPM). La plupart des BMD financent déjà certains BPM, notamment le climat, et ont un mandat compatible avec le financement de ces derniers. Il est cependant nécessaire de renforcer leur action en faveur des BPM par le biais de nouvelles approches, comme leur intégration systématique dans les activités des BMD et l'utilisation d'incitations financières et non financières en faveur des BPM. Le Sommet pour un nouveau pacte financier mondial – qui s'est tenu les 22 et 23 juin 2023 à Paris – a appelé à une évolution des BMD pour mieux financer ces BPM en synergie avec les objectifs de développement au cœur des actions des BMD telle que la lutte contre la pauvreté. Le G20 poursuit également cet agenda de meilleure réponse aux BPM par les BMD. C'est également dans ce contexte que la Banque mondiale met au point une feuille de route d'évolution, qui sera discutée lors de ses prochaines assemblées annuelles en octobre 2023. Classification JEL : F33, F35, G02, H87, O19, Q56.The definition and list of global public goods, which are undoubtedly narrower than those relating to global challenges, do not enjoy consensus among the various multilateral development banks. Since the Addis Ababa conference in 2015, MDBs have committed to financing the sustainable development goals (SDGs), the achievement of which partly depends on creating and protecting global public goods. While most MDBs already finance certain global public goods, including climate, and have a mandate compatible with financing them, it seems necessary to strengthen their action in favour of GPGs through new approaches, such as systematically integrating GPGs into MDB activities and using financial and non-financial incentives in favour of GPGs. The Summit for a New Global Financial Pact held June 22-23 202 3 in Paris called for MDBs to begin better financing these GPGs, in synergy with the development goals at the heart of the MDB actions, such as the fight against poverty. The G20 is also pursuing this agenda of having MDBs better respond to GPGs. It is in this context as well that the World Bank is developing an evolution roadmap to be discussed at its next Annual Meeting in October 2023. JEL classification: F33, F35, H87, O19, Q56.
- Des taxes affectées pour financer les biens publics mondiaux : pertinence et mise en œuvre - Vianney Dequiedt, Audrey-Anne de Ubeda, Grégoire Rota-Graziosi p. 187-199 Financer les biens publics mondiaux avec le produit de taxes affectées est une idée régulièrement débattue et mise en pratique en France depuis le rapport Landau de 2004 et la taxe de solidarité sur les billets d'avion ou la taxe sur les transactions financières. Dans cet article, nous proposons une grille d'analyse d'un tel mécanisme de financement, inspirée de la théorie de la conception de mécanismes, scrutant ses propriétés en termes d'efficacité et d'équité, de facilitation de l'engagement et de la coordination des acteurs ainsi que de transparence et de contrôle. Nous utilisons cette grille pour mettre en lumière les forces et les faiblesses de deux cas pratiques : le Fonds de solidarité pour le développement et les fonds internationaux d'indemnisation pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures, tous deux abondés par une fiscalité affectée. Il ressort de cette analyse que les modalités précises de mise en œuvre de la taxe affectée sont importantes pour juger de la pertinence de ce mécanisme de financement. Classification JEL : F55, H23, H87.Financing global public goods with the proceeds of earmarked taxes is an idea that has been regularly discussed and implemented in France after the 2004 Landau report through the solidarity tax on airline tickets and the tax on financial transactions. In this article, we propose an evaluation grid for such a financing mechanism inspired by the theory of mechanism design. We examine its properties in terms of efficiency and equity, facilitation of commitment, coordination of actors, and transparency and control. We use this framework to highlight the strengths and weaknesses of two practical cases: the Solidarity Fund for Development and the International Oil Pollution Compensation Funds, both of which are funded by earmarked taxation. Our analysis shows that the precise modalities of implementation of the earmarked tax are important for judging the relevance of this financing mechanism. JEL classification: F55, H23, H87.
- Une gouvernance mondiale pour gérer le climat en tant que bien public - Mark Carney p. 203-224 La stabilité de notre climat est un bien public mondial dont les bénéfices dépassent largement le coût. Le problème du « passager clandestin » signifie ici qu'un climat stable est menacé par trois tragédies : celle des communs, celle de l'horizon et celle du passage d'un sentiment moral à un sentiment de marché.La préservation d'un climat stable nécessite une coordination entre les États-nations qui possèdent des intérêts, des ressources financières et des capacités différents. Cette coordination commence à se mettre en place dans le cadre du processus des Nations unies sur le changement climatique. En créant un consensus aux niveaux mondial et national sur la nécessité de préserver notre climat, le dynamisme du secteur privé est maintenant libéré. Lorsque la société fixe un objectif clair, il devient rentable de faire partie de la solution et coûteux de continuer à faire partie du problème.La transformation du secteur financier amplifiera et accélérera l'action publique en faveur du climat. La planification de la transition par tous les acteurs est essentielle. Classification JEL : F55, H87, O19, Q05.The stability of our climate is a global public good whose benefits far outweigh its cost of provision. The nature of free riding means that a stable climate is threatened by three tragedies: of the commons, of the horizon, and of the shift from moral to market sentiments.Preserving a stable climate requires coordination among nation states with different interests, financial resources, and state capacities. Through the United Nations climate change process, this coordination is beginning to happen. By creating a consensus at the global and national levels on the need to preserve our climate, the dynamism of the private sector is now being unleashed. When society sets a clear goal, it becomes profitable to be part of the solution, and costly to remain part of the problem.Reforms to the plumbing of the financial sector will amplify and accelerate public climate action. Transition planning by all actors is essential. JEL classification: F55, H87, O19, Q05.
- Les financements climat entre ubiquité et exiguïté : enjeux politiques de leur définition - Patrick Guillaumont, Sylviane Guillaumont Jeanneney p. 225-237 Pour s'assurer que les financements climat sont additionnels par rapport au financement du développement et qu'ils sont alloués efficacement et équitablement, il convient de distinguer selon qu'ils visent l'atténuation ou l'adaptation, mais aussi de savoir s'il s'agit d'un objectif principal ou occasionnel, ce qui dans le premier cas s'accompagne généralement de conditions concessionnelles. L'atténuation, qui vise à préserver un bien public mondial, doit être dotée d'une enveloppe mondiale spécifique (non incluse dans l'aide publique au développement) et être allouée selon des critères d'efficacité projet par projet par des institutions agréées. Le financement de l'adaptation doit lui-même être doté d'une enveloppe mondiale au moins égale ; s'il est concessionnel, il doit être réservé aux pays à faible revenu et aux autres pays ne contribuant quasiment pas aux émissions de CO2 et leur être alloué principalement en fonction de leur vulnérabilité physique au changement climatique. Quant au financement des pertes et des dommages (dus au changement climatique), il devrait principalement être intégré au financement de l'adaptation et pour le reste venir renforcer les mécanismes existants de réponse aux chocs, climatiques ou autres. Les flux correspondant à chaque enveloppe devraient être utilisés selon des modalités et des conditionnalités distinctes. Classification JEL : F35, G32, H41, H84, O19, Q54.To ensure that climate finance is additional to development financing and that it is allocated effectively and equitably, it is necessary to distinguish between whether it is aimed at mitigation or adaptation, but also to know whether it is a main or intermittent goal. If it is the former, it is generally accompanied by concessional conditions. Mitigation, which aims to preserve a global public good, must be allotted a specific global budget (not included in Overseas Development Assistance, ODA) and be allocated on a project by project basis by accredited institutions according to the criteria of effectiveness. Adaptation financing must in turn have a global budget no lower than that of mitigation; if it is concessional, it should be reserved for low-income countries and other countries contributing almost no CO2 emissions and be allocated to them mainly according to their physical vulnerability to climate change. Funding to compensate for losses and damages (due to climate change) should mainly be included in the financing of adaptation. The rest should be handled by reinforcing the existing systems of response to shocks, climatic and otherwise. The funds corresponding to the separate budgets should be allocated in accordance with the distinct terms and conditionality of each budget. JEL classification: F35, G32, H41, H84, O19, Q54.
- Fonds climatiques : l'heure du grand ménage a sonné - Philippe Le Houérou p. 239-260 Au cours des trente dernières années, pas moins de 94 fonds verts pour le climat ont été lancés afin de financer des projets et des programmes de lutte contre le changement climatique dans les marchés émergents et dans les économies en développement. Chacun de ces fonds peut avoir trouvé une justification au moment de sa création. Toutefois, considérés comme un tout, ils ne s'additionnent pas et leur contribution aux flux totaux de la finance verte reste marginale.Dans cet article, nous avons recensé 81 fonds actifs à la fin de 2022. Il est en outre difficile, voire impossible, d'évaluer ne serait-ce que les aspects les plus élémentaires de la gestion financière et de l'impact de ces fonds en tant que « système » et canal de financement de la lutte contre le changement climatique. Étant donné le caractère impérieux à renforcer les politiques et les projets d'adaptation au changement climatique et d'atténuation de ses effets sur les marchés émergents et dans les économies en développement, et plutôt que de créer de nouveaux fonds qui viendraient s'ajouter à l'étonnante atomisation actuelle, il est urgent de réduire massivement le nombre considérable de fonds climatiques existants et de réformer les fonds qui subsisteront, de manière à renforcer leur transparence, leur efficacité, leurs effets de synergie et leur impact. Cela constituerait une première étape judicieuse dans la rationalisation et la redéfinition de l'architecture chaotique de l'aide au développement actuelle, d'autant plus que la plupart de ces fonds relèvent du financement public. Classification JEL : F35, G02, H04, O16.Over the last 30 years, at least 94 green-climate funds have been created to finance climate-related projects and programs in emerging markets and developing economies (EMDEs). Each individual fund may have been justified at the time of its creation. As a system, however, they do not add up and their contribution to the total flows of green finance remains marginal.In this paper, we count 81 active funds as of the end of 2022. Moreover, it is quite difficult, if not impossible, to evaluate even the most basic aspects of the financial management and impact of these funds as a « system » and a channel of climate finance. Given the urgency of scaling up both mitigation and adaptation policies and projects in EMDEs, and before creating new funds that would add to the current astonishing fragmentation, it is urgent to increase the transparency, efficiency and impact of today's existing publicly financed funds. That would be a useful first step in rationalizing and redefining the current messy aid architecture. JEL classification: F35, G02, H04, O16.
- Vers une économie mondiale durable : le rôle des banques multilatérales de développement dans le financement des biens publics mondiaux - Odile Renaud-Basso p. 261-275 Nous faisons aujourd'hui face à un défi unique et sans précédent : une double crise environnementale et climatique. Cette crise pourrait entraîner des conséquences irréversibles et dangereuses pour l'humanité. Elle résulte largement d'une défaillance de marché, à laquelle il est nécessaire de remédier. Réaliser ces changements ambitieux, mais essentiels, est la responsabilité de tous les acteurs, et les besoins de financement sont grands. Les gouvernements, le secteur privé mais aussi les particuliers ont leur rôle à jouer. De plus, les banques multilatérales de développement, comme la BERD, doivent faciliter le financement des biens publics mondiaux et accompagner les pays en développement pour résoudre leur crise en garantissant leur compétitivité à l'échelle mondiale. L'objectif est d'amener ces économies à évoluer afin d'assurer que le pouvoir du marché aboutisse aux résultats escomptés. Cela consiste principalement à mobiliser des capitaux privés et à reformer des systèmes économiques. Réussir à s'attaquer sérieusement et efficacement à ces enjeux constitue à la fois une capacité à faire face à la crise, mais aussi à saisir une opportunité économique. Classification JEL : F33, G02, H04, O19, P45, Q56.Today, we are facing a unique and unprecedented challenge: a dual environmental and climate crisis. This crisis could have irreversible and dangerous consequences for humanity. It results mainly from a market failure, which needs to be addressed. The responsibility of making the ambitious, but necessary, shifts, is incumbent on all players and the need for financing is massive. Governments, the private sector, and private individuals all have a role to play. In addition, multilateral development banks (MDBs) such as the EBRD must facilitate the financing of global public goods and help developing countries resolve their climate crisis, while ensuring their competitiveness on a global scale. The aim is to help these economies develop to ensure that market forces lead to the desired results. This mainly involves mobilizing private capital and reforming economic systems. Succeeding in seriously and effectively tackling these issues means showing both the ability to cope with the crisis and to seize an economic opportunity. JEL classification: F33, H04, O19, P45, Q56.
- La négociation de l'accord sur la biodiversité en haute mer (BBNJ) : dans la fabrique multilatérale de la gouvernance financière d'un bien commun - Tanguy Stehelin p. 277-289 Le 3 mars 2023 se sont conclues les négociations relatives au troisième accord d'application de la Convention des Nations unies sur le droit de la mer, dite de Montego Bay, dont l'objet est la protection de la biodiversité en haute mer et l'encadrement des activités qui se déploient dans cet espace. Cet accord dit BBNJ ( Biodiversity Beyond National Jurisdiction) a été formellement adopté le 9 juin suivant par consensus, et doit maintenant être signé et ratifié par les futurs États parties. Se fondant sur la classification développée par Elinor Ostrom faisant de la haute mer et des ressources biologiques qu'elle contient des common-pool resources (biens communs), cet article a pour objet d'analyser les conséquences de l'adoption de ce traité en matière de gouvernance d'un bien commun dont l'exploitation a vocation à produire une ressource financière encore difficilement quantifiable. Classification JEL : D07, F64, H04, Q01, Q56.On March 3, 2023, negotiations were concluded on the third implementing agreement for the United Nations Convention on the Law of the Sea, known as the Montego Bay Convention, the purpose of which is to protect biodiversity on the high seas and regulate the activities that take place there. This so-called BBNJ agreement (for Biodiversity beyond national jurisdiction) was formally adopted by consensus on the June 9, and now needs to be ratified and signed by future governmental parties. Based on Elinor Ostrom's classification of the high seas and the biological resources they contain as « common-pool resources », the aim of this article is to analyze the consequences of the adoption of this treaty for the governance of a common good, the exploitation of which is expected to generate a financial windfall that is as yet difficult to quantify. JEL classification: D07, F64, H04, Q01, Q56.
- Océan, bien public mondial : un enjeu pour l'humanité - Robert Calcagno p. 291-303 Depuis quelques décennies, l'Océan est devenu objet de conquête. Non seulement il est soumis à des pressions très importantes – surexploitation de certaines ressources, pollutions, changement climatique –, mais aussi cette immensité voit son statut changer de manière accélérée. Aujourd'hui, sur la base des conventions internationales existantes, environ 36 % de la surface océanique sont sous souveraineté ou juridiction d'un État côtier. Ce qui signifie que les 64 % restants sont des eaux internationales dans lesquelles il n'existe pas ou peu de règles. D'une part, il est clair que les limites administratives définies par les traités n'ont pas de réalité physique ou biologique et, d'autre part, l'Océan fournit de nombreux services aux populations, au climat, à l'économie, qu'il est important de préserver, dans un contexte de crise climatique. Beaucoup reste donc à faire pour protéger la biodiversité, lutter contre la surexploitation des ressources halieutiques et la prolifération des déchets plastiques. Classification JEL : F64, H41, Q05.In recent decades, the Ocean has become an object of conquest. Not only is it subject to major pressures - overexploitation of certain resources, pollution, climate change - but the status of this vast expanse is changing at an accelerating pace. Today, based on existing international conventions, around 36% of the ocean's surface is under the sovereignty or jurisdiction of a coastal state. This means that the remaining 64% is in international waters with few or no rules. The administrative limits defined by treaties have no physical or biological reality and the Ocean provides numerous services to populations, the climate, and the economy, which it is important to preserve in a context of climate crisis. Much remains to be done to protect biodiversity, combat overfishing, and the proliferation of plastic waste. JEL classification: F64, H41, Q05.
- La stabilité financière comme bien public mondial - Hélène Rey p. 305-316 Le système financier international reste centré sur le dollar qui est, de loin, la principale monnaie de réserve ; la politique monétaire de la Federal Reserve américaine a une influence importante sur le Cycle financier mondial. Les États-Unis, en tant qu'hégémon, jouent le rôle de banquier mondial et assurent l'économie globalisée en période de crise, devenant prêteur en dernier ressort par l'intermédiaire de lignes de swap. Ils contribuent ainsi à la provision du bien public mondial qu'est la stabilité financière. Leur rôle doit bien sûr être complété par des régulations prudentielles robustes, une utilisation active des politiques macroprudentielles, voire de contrôle des capitaux, et par les actions des institutions de Bretton Woods, celles du Fonds monétaire international en particulier. La taille relative des États-Unis diminuant dans l'économie mondiale, le système monétaire international est potentiellement confronté à un nouveau dilemme de Triffin : la demande pour les liquidités en dollars croît avec l'économie mondiale, tandis que la capacité budgétaire des États-Unis, qui garantit la valeur de la monnaie américaine, décroît en termes relatifs. De plus, l'architecture financière mondiale existante semble jusqu'à présent incapable de canaliser le capital là où il aurait une valeur sociale marginale élevée, pour aider à produire ces autres biens publics mondiaux que sont la lutte contre le changement climatique et la préservation de la biodiversité. Classification JEL : F30, F33, F42.The international financial system remains centered on the dollar, which is by far the main reserve currency; the monetary policy of the US Federal Reserve has an important bearing on the Global Financial Cycle. The United States, as hegemon, plays the role of world banker and underwrites the globalized economy in times of crisis, becoming lender of last resort via swap lines. The US thus contributes to the provision of financial stability, an important global public good. Its role must of course be supplemented by robust prudential regulations, active use of macroprudential policies, in some cases capital controls, and by the actions of the Bretton Woods institutions, in particular the International Monetary Fund. With the relative size of the United States shrinking in the global economy, the international monetary system potentially faces a new Triffin's Dilemma: the demand for dollar liquidity grows with the global economy while the fiscal capacity of the United States, which guarantees the value of the American currency, decreases in relative terms. Moreover, the existing global financial architecture seems so far incapable of channeling capital to where it would have high marginal social value, helping produce those other global public goods of combating climate change and preserving biodiversity. JEL classification: F30, F33, F42.
- Stabilité financière et monétaire internationale : un bien public en quête d'un cadre de gouvernance - Vera Songwe p. 317-326 Partant de la littérature sur les biens publics mondiaux, nous examinons l'adéquation du système financier et monétaire américain en tant que bien public mondial par rapport aux marchés émergents et aux économies à faible revenu. Nous analysons les externalités négatives causées par les crises du système financier et la possibilité d'adopter une taxe de type Pigouvien avec des implications pour les économies de marché frontalières et émergentes. Nous examinons le cadre institutionnel nécessaire à la mise en place d'une version du système financier et monétaire international véritablement axée sur les biens publics mondiaux, en réfléchissant à la gouvernance mondiale d'un tel système et, en particulier, aux outils nécessaires à une collaboration et à une coordination mondiales inclusives et améliorées . Classification JEL : D53, D62, E40, E58, F02.Drawing from the literature on global public goods, we examine the adequacy of the US financial and monetary system as a global public good in relation to emerging markets and low-income economies. We analyze the negative externalities caused by crises in the financial system and the possibility of adopting a Pigouvian-type tax with implications for frontier and emerging market economies. We examine the institutional framework needed for a truly global public goods version of the international financial and monetary system, reflecting on the global governance of such a system and on the tools needed for inclusive and enhanced global collaboration and coordination. JEL classification: D53, D62, E40, E58, F02.
Chronique d'histoire financière
- Une brève histoire de la comptabilité écologique - Harold Levrel, Antoine Missemer p. 327-334
Finance et littérature
- Balzac et la tragédie des enclosures - Alain-Gérard Slama p. 335-342
Articles divers
- Effets des infrastructures sur la réduction de la pauvreté dans la Communauté économique et monétaire de l'Afrique centrale - Franck Mondesir Tsassa Mbouayila p. 345-368 Cet article apprécie les effets des infrastructures sur la réduction de la pauvreté dans la Communauté économique et monétaire d'Afrique centrale (CEMAC). À partir d'un échantillon de cinq pays de la zone CEMAC, la robustesse des résultats est testée grâce à la méthode des doubles moindres carrés (2SLS) avec la prise en compte des spécificités culturelles. La période de l'étude s'étend de 1981 à 2019. Les résultats révèlent qu'un accès amélioré de la population aux infrastructures économiques et sociales occasionne la réduction de la pauvreté. Du point de vue de la politique économique, ces résultats constituent une ligne directrice pour la mise en œuvre et l'utilisation des infrastructures dans les pays de la CEMAC, comme instrument pour améliorer le niveau de vie et les revenus de la population et ainsi réduire la pauvreté. Classification JEL : E06, H05, O04.This article assesses the effects of infrastructure on poverty reduction in the CEMAC. From a sample of five countries in the CEMAC zone, the robustness of the results is tested by using the Double Least Squares Method (2SLS), taking into consideration cultural specificities. The study period extends from 1981 to 2019. Results show that improved access of the population to economic and social infrastructure leads to poverty reduction. From the point of view of economic policy, these results give guidance for the implementation and use of infrastructure in the countries of the Economic and Monetary Community of Central Africa (CEMAC) as an instrument to improve the level standards and the income of the population and thus reduce poverty. JEL classification: E06, H05, O04.
- Effets des infrastructures sur la réduction de la pauvreté dans la Communauté économique et monétaire de l'Afrique centrale - Franck Mondesir Tsassa Mbouayila p. 345-368