Contenu du sommaire : Nigeria, le fédéralisme dans tous ses États.

Le Nigeria, sous la présidence du général Babangida, se prépare à d'importantes transformations politiques et économiques. En politique, un système fédéral limitant à deux le nombre des partis et un organisme politique de mobilisation tendent à créer une nouvelle culture politique. Sur le plan économique, on assiste à la mise en place d'un programme d'ajustement structurel (PAS) du type FMI. Comment la société nigériane acceptera-t-elle cette démocratie imposée et ce bipartisme auquel elle n'avait jamais été soumise ?

Le Nigeria n'est pas une fédération, mais un système unitaire à forte composante décentralisatrice qui a développé depuis la fin des année soixante un mode original de gestion de son pluralisme culturel. Multiplication du nombre des États par scissiparité, institutionnalisation du principe du «caractère fédéral», spécificité du mode de redistribution des revenus de la rente pétrolière en sont les traits principaux. Une telle évolution, positive au regard du maintien de l'unité du pays, s'avère néfaste pour la promotion de l'intégration nationale.

La question économique est au cœur de la dynamique du fédéralisme nigérian. La croissance tend à provoquer une concentration géographique des richesses qui heurte de front la revendication égalitaire des États. Le fédéralisme a favorisé certaines distorsions économiques, mais a permis dans l'ensemble une certaine décentralisation du développement.

Les caractéristiques des chefs traditionnels du Nigeria ont beaucoup évolué depuis la fin des années cinquante. Souvent diplômés, disposant d'expériences professionnelles à un haut niveau dans la fonction publique ou le secteur privé, ils disposent de réseaux de relations qui ont assuré un renouveau de leur influence. Depuis le retour du Nigeria à un régime militaire, les autorités traditionnelles ont amorcé une certaine relève, par le biais d'associations dites culturelles qui jouent le rôle de pré-partis dans la perspective de 1992.

Depuis dix ans, le Nigeria est censé avoir une politique linguistique. Deux principes sont proclamés : celui du multilinguisme et celui du respect de la langue maternelle. Un troisième principe, non écrit, forme le soubassement de l'édifice : celui de la prééminence de l'anglais. Le multilinguisme aboutit de fait au développement des Wazobiens, ces Nigérians membres des trois grands groupes ethniques haoussa, yorouba et igbo. Ces derniers peuvent enseigner leur propre langue dans les États monolingues, alors que, dans des États très plurilingues comme le Bendel, il est difficile d'engager une politique efficace.

Que pense l'homme de la rue ? Où trouver des données sur son opinion ? Le théâtre yorouba, qui est un véritable moyen de communication populaire, avec sa centaine de troupes, nous présente la réalité sociale de l'ouest du pays. Dans ces pièces, les autres Nigérians ne sont que peu présents et le débat politique et curieusement absent. L'étude des textes des spectacles et des romans populaires montre une vive conscience de la stratification sociale verticale et une défiance certaine à l'endroit des hommes politiques.