Contenu du sommaire : Prendre soin de la nature urbaine
Revue |
Espaces et Sociétés ![]() |
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Numéro | no 192, 2024/2 |
Titre du numéro | Prendre soin de la nature urbaine |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
I. Prendre soin de la nature urbaine
- Prendre soin de la nature urbaine - Ornella Zaza, Alessia De Biase p. 9-18
- Institutionnaliser le jardinage tactique dans la rue : les permis de végétaliser des villes françaises (2004 et 2018) - Aurélien Ramos p. 19-37 Cet article s'intéresse au processus d'institutionnalisation des pratiques informelles de jardinage dans la rue à partir des dispositifs municipaux de permis de végétaliser mis en place depuis le début des années 2000. Il s'appuie sur l'étude des dispositifs élaborés par vingt municipalités françaises et analyse les mécanismes de normalisation et de développement des pratiques de jardinage de rue dans le cadre de politiques urbaines alternatives. En mobilisant le concept de tactique, il s'agit de montrer que la prise en charge institutionnelle du jardinage de rue repose sur le maintien du caractère précaire et temporaire de cette pratique tout en contribuant à sa standardisation, à sa normalisation et à son esthétisation. L'institutionnalisation du jardinage de rue ne contribue pas à renouveler les modalités de gestion du vivant végétal en ville et renforce le caractère exceptionnel et marginal de cet usage de la rue.This article looks at the institutionalisation of informal street gardening practices through municipal greening permit schemes introduced since the early 2000s. It is based on a study of the schemes developed by twenty French municipalities and analyses the mechanisms for standardising and developing street gardening practices as an element of alternative urban policies. Drawing upon the concept of tactics, the aim is to show that the institutional takeover of street gardening depends on maintaining the precarious and temporary nature of this practice, while contributing to its standardisation, normalisation and aestheticisation. The institutionalisation of street gardening does not contribute to a renewal in the management of living vegetation in the city and reinforces the anomalous and marginal nature of this use of the street.
- La végétalisation participative de rues en France, un privilège des espaces urbains péricentraux ? - Amélie Deschamps p. 39-56 La végétalisation participative se déploie désormais à l'échelle des rues grâce à des programmes municipaux comme les « permis de végétaliser » ou les « micro-implantations florales » où ce sont les habitants qui plantent dans l'espace public. De nombreuses villes en France ont mis en place ces dispositifs afin de verdir le domaine public de la voirie. Cependant, à partir des exemples de Lille, Lyon et Paris, cet article montre que les initiatives ne se répartissent pas de manière uniforme dans le tissu urbain. Au contraire, elles sont concentrées dans des quartiers péricentraux de ces métropoles, principalement résidentiels, dans des rues secondaires et où se trouvent parfois des maisons individuelles. Cette concentration est le résultat d'une diffusion de ces initiatives par le bouche-à-oreille. Le tissu urbain privilégié par les habitants rend également compte de leur intérêt pour ces dispositifs, au-delà de leur aspect environnemental, pour la vie de quartier dont ils peuvent être le support.Participatory greening is now being extended to the street level through municipal schemes such as “greening permits” and “micro-planting”, where residents have the right to create gardens in public spaces. Many towns and cities in France have introduced these schemes to green the public realm. However, based on the examples of Lille, Lyon and Paris, this article shows that such initiatives are not uniformly distributed across the urban fabric. Rather, they are concentrated in the mainly residential suburban areas of these cities, in secondary streets and streets that may contain detached houses. This concentration is the result of these initiatives spreading by word of mouth. The urban fabric favoured by residents also reflects their interest in these schemes—beyond their environmental aspect—for the neighbourhood life they can foster.
- Prendre soin de la nature urbaine en tant que bien commun : le cas de Bologne - Roberta Bartoletti, Franca Faccioli p. 57-82 L'article présente les résultats d'une recherche relative aux pratiques des citoyens qui, dans la ville de Bologne, prennent soin des espaces verts en tant qu'ils sont des biens communs urbains selon les principes du public engagement et de l'administration partagée. À partir d'un corpus de 28 entretiens, réalisés sur la période 2019-2020 auprès de porteurs de pactes de collaboration sur les espaces verts urbains, nous nous concentrons sur les expériences des citadins qui sont devenus actifs, individuellement ou au sein de groupes informels, en analysant les motivations, les pratiques et les multiples formes de valorisation de la nature en ville – sociale, relationnelle, esthétique et écologique. Le dispositif de soin partagé de la nature urbaine apparaît comme une expérience ambivalente, où l'individualisation de l'entretien est tempérée par des orientations vers la dimension collective, et où, même face aux risques de dépolitisation, les citoyens démontrent qu'ils sont capables de se réapproprier les politiques de public engagement portées par la mairie.This article presents the results of research into the practices of citizens in the Italian city of Bologna who care for green spaces as urban commons under the principles of public engagement and shared administration. Based on a corpus of 28 interviews, conducted over the period 2019-2020 with promoters of collaborative agreements on urban green spaces, we focus on the experiences of citydwellers who have become active in this domain, individually or within informal groups, analysing their motivations and practices and the ways—social, relational, aesthetic and ecological—in which they value nature in the city. The participatory system of caring for urban nature emerges as an ambivalent experience, where the individualisation of care is tempered by the emergence of a collective dimension, and where, even when faced with the risks of depoliticisation, citizens demonstrate that they are capable of reappropriating the public engagement policies promoted by the city council.
- Le jardin liminaire : réminiscences imaginaires et urbanité rurale - Viviana Comito p. 83-104 Dans les villes, les habitants s'impliquent de plus en plus dans la création de micro-espaces végétalisés sur la voirie. Ce phénomène fait écho à la relation, bien plus souple dans le monde rural, entre espaces privatif et public. Cette recherche vise à mieux définir ce qu'on désigne comme les « jardins liminaires » en milieu rural habité : des espaces linéaires en pleine terre, situés entre le bâti et la voirie, cultivés spontanément par des particuliers dans l'emprise publique. Quelles sont les différentes formes de cette appropriation et quelle est la diffusion de cette pratique ? S'agit-il d'un usage ancien ? Le jardin liminaire serait-il compensatoire d'une campagne perdue ? Qui sont les acteurs et quelles sont leurs motivations ? Comment réagissent les collectivités ? Enfin sont évoqués l'utilité et le potentiel de ces jardins de rue en contexte rural.City dwellers are increasingly engaging in street gardening. This trend is a reminder of the more informal relation between public and private space in rural settings. This paper examines the phenomenon of “border gardens” in rural communities, defined here as a linear band of open ground between buildings and the roadway, which are voluntarily and spontaneously gardened by private individuals on public ground. It explores how this appropriation takes place, who the gardeners are, what motivates them, and how public authorities respond. The potential and benefits of these linear community gardens for the countryside are also discussed, hinting at how they could counterbalance not only to a loss of imagery, but also to some of its actual shortcomings.
- Du soin apporté à la nature et du bien-être des citadins - Lise Bourdeau-Lepage p. 105-119 L'objectif de cet article est de montrer que l'on ne peut pas prendre soin de la nature urbaine sans s'intéresser au bien-être des citadins, car il existe un lien intense entre les deux dans un jeu de rétroaction. D'abord, le concept de bien-être est défini. Des enquêtes menées dans les villes françaises depuis 2015 révèlent quels sont les éléments considérés comme importants pour leur bien-être par les citadins français, en particulier les aménités naturelles. De plus, elles donnent à voir le sens restrictif qu'ils donnent au terme « nature ». Par la suite, nous explicitons les raisons de la nécessité à repenser le soin prodigué à la nature dans son ensemble en milieu urbain et de le placer au cœur des conceptions urbanistiques et sociétales. Ensuite, nous signalons les enjeux sociaux, politiques et environnementaux de cette question et le besoin d'un changement de posture dans la société française. Pour finir, nous formulons quelques propositions pour qu'une plus grande attention soit portée au vivant dans son ensemble et envisager l'apport possible de l'éthique des vertus.The aim of this article is to show that we cannot care for urban nature without taking an interest in the well-being of citydwellers, because there is an intense connection and feedback loop between the two. First, the concept of well-being is defined. Surveys carried out in French cities since 2015 reveal which factors French citydwellers consider important to their well-being, in particular natural amenities. Such surveys also reveal the restrictive meaning that people assign to the term “nature”. We then explain why there is a need to rethink the care given to nature as a whole in the urban environment, and to place it at the centre of urban planning and concepts of society. We then highlight the social, political and environmental issues at work and the need for a change in attitude in French society. Finally, we put forward some proposals for greater attention to be paid to the living world as a whole and consider the possible contribution of virtue ethics.
- Prendre soin de la nature urbaine - Ornella Zaza, Alessia De Biase p. 9-18
II. Varia
- Les rapports à l'espace de la culture de consommation touristique globalisée - Jean-Baptiste Welté p. 123-139 Cet article analyse les pratiques touristiques globalisées (par l'accélération technologique et sociale) comme une culture de consommation. Elles se structurent effectivement autour d'offres de marchés qui diffusent imaginaires et symboles. Différentes sous-cultures émergent de cette culture de consommation. Elles se construisent sur des valeurs spécifiques traduites dans des pratiques et un rapport à l'espace spécifique des lieux visités. À partir d'une étude ethnographique internationale dans des boutiques de luxe, et d'entretiens semi-directifs avec des touristes, nous identifions quatre sous-cultures de consommation touristiques qui s'articulent autour d'un carré sémiotique construit sur la relation contraire entre « là-bas » (les lieux visités) et « chez soi » (le pays de provenance). Nos résultats permettent d'identifier des complémentarités et des contradictions entre ces sous-cultures qui viennent dépasser les oppositions traditionnelles entre touristes et résidents.This article analyses tourism practices that have become globalised (through technological and social acceleration) as a consumer culture. They are structured around market offerings that disseminate images and symbols. Different subcultures emerge from this consumer culture. They are built on specific values which are translated into practices and a relation to space that are specific to the places visited. Drawing upon an international ethnographic study conducted in luxury stores, and semi-structured interviews with tourists, we identify four subcultures of tourist consumption that are interconnected around a semiotic square built on the relation of opposition between “over there” (the places visited) and “at home” (the country of origin). From our findings, we identify complementarities and contradictions between these subcultures that go beyond the traditional binaries distinguishing tourists and residents.
- Les rapports à l'espace de la culture de consommation touristique globalisée - Jean-Baptiste Welté p. 123-139
III. Controverse
- La nature, un prétexte pour alimenter la fabrique urbaine ? - Ornella Zaza p. 143-147
- Défendre les jardins ouvriers, ou la lutte pour une ville vivante - Ivan Fouquet, Viviane Griveau-Genest p. 149-160
- Aménager ou ménager les natures urbaines : les injonctions paradoxales d'un urbanisme en quête d'écologie - Jean-Noël Consalès p. 161-170
- La nature, un prétexte pour alimenter la fabrique urbaine ? - Ornella Zaza p. 143-147
IV. Traductions
- Regard d'un botaniste sur le monde Dernière conférence de Patrick Geddes à l'université de Dundee - Patrick Geddes p. 173-188
- Vers la ville sauvage - Annalisa Metta p. 189-210
- Regard d'un botaniste sur le monde Dernière conférence de Patrick Geddes à l'université de Dundee - Patrick Geddes p. 173-188
V. Rétrospective
- Penser la nature, penser la ville : une histoire intellectuelle et politique - Denis Bocquet p. 213-220
- Penser la nature, penser la ville : une histoire intellectuelle et politique - Denis Bocquet p. 213-220
VI. Compte rendu de thèses
- Saisir la rénovation urbaine en train de se faire : entre habiter et gouverner l'attente - Philippe Hamman p. 223-229
- Saisir la rénovation urbaine en train de se faire : entre habiter et gouverner l'attente - Philippe Hamman p. 223-229
Notes de lecture
- Bram Büscher, Robert Fletcher, Le vivant et la révolution. Réinventer la conservation de la nature après le capitalisme, Arles, Actes Sud, 2023, 336 p. - p. 231-234
- Damien Deville, La société jardinière, Paris, Le pommier, 2023, 168 p. - Flavia Pertuso p. 234-237
- Jérôme Denis, David Pontille, Le soin des choses : politiques de la maintenance, Paris, La Découverte, 2022, 265 p. - Émilie Pillon p. 237-239
- Bram Büscher, Robert Fletcher, Le vivant et la révolution. Réinventer la conservation de la nature après le capitalisme, Arles, Actes Sud, 2023, 336 p. - p. 231-234