Contenu du sommaire

Revue Sciences Sociales et Santé Mir@bel
Numéro vol. 41, no 4, décembre 2023
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Les soins oncologiques de support : une ressource inégalement mobilisée face au cancer - Hélène Kane, Jade Gourret Baumgart, Frédéric Denis p. 5-31 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Alors que les inégalités de prévalence des cancers et de survie ont été bien documentées, moins de recherches ont été consacrées aux inégalités d'accès aux soins oncologiques de support. L'accès à ces soins qui contribuent à améliorer la qualité de vie constitue pourtant un enjeu d'équité en santé. Considérant comment les personnes souffrant d'un cancer mobilisent ces ressources, nous analysons les inégalités de recours à ces soins. La méthodologie associe des observations et des entretiens approfondis en région Centre-Val de Loire. Les résultats font ressortir d'importantes hétérogénéités dans l'accès aux soins oncologiques de support, qui sont proposés en fonction des besoins perçus par les professionnels, et selon les facultés des personnes à communiquer leurs besoins. Des disparités de recours s'ancrent dans des rapports différenciés à la maladie, aux médecines et au système de santé. Tandis que certains cumulent ces soins de support à diverses ressources hors de l'hôpital, d'autres se contentent d'un traitement curatif et spécifique de leur cancer. Positionnés de manière marginale et optionnelle, les soins oncologiques de support constituent une variable d'ajustement et un nœud de construction des inégalités sociales face au cancer.
    While inequalities in cancer prevalence and survival have been well documented, less research has been devoted to access inequalities to supportive cancer care. Access to this care, which contributes to improving quality of life, is nevertheless a health equity issue. Considering how people suffering from cancer mobilize these resources, we analyze the inequalities in access to this care. The methodology combines observations and in-depth interviews in the Centre-Val de Loire. The results show significant heterogeneities in access to supportive cancer care, which is offered according to the needs perceived by professionals and according to the ability of patients to communicate their needs. Disparities in access are rooted in different relationships to the disease, to medicine and to the healthcare system. While some people combine supportive care with various resources outside the hospital, others are satisfied with curative and specific treatment of their cancer. Positioned in a marginal and optional way, supportive cancer care is an adjustment variable and a key factor in the construction of social inequalities in the face of cancer.
  • Les soins de support, entre soins et soin de soi : Commentaire - Jean-Christophe Mino, Céline Lefève, Céline Lefève p. 33-41 accès libre
  • Accoucher pendant la pandémie du Covid-19 en France : d'un « tout s'est bien passé » au sentiment d'une maternité volée - Virginie Rozée, Clémence Schantz p. 43-70 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    À partir de 2020, la pandémie de Covid-19 a entraîné une réorganisation des soins y compris dans les maternités, accentuant ainsi les injonctions biomédicales pendant la grossesse et l'accouchement. En France, les nouvelles restrictions et contraintes observées dans certains hôpitaux ont été fortement médiatisées et relayées sur les réseaux sociaux, avec en particulier la dénonciation de deux pratiques : l'imposition du port du masque et le refus de permettre aux patientes d'être accompagnées pendant l'accouchement. C'est dans ce contexte que nous avons mené la recherche MaterCovid19 sur les vécus de l'accouchement en Île-de-France et à La Réunion pendant la crise sanitaire. La focale est ici mise sur les expériences corporelles des femmes dans les trois maternités hospitalières publiques de l'étude. De leur récit, ressort essentiellement l'appréhension en fin de grossesse de devoir accoucher « seules ». Au final, l'important décalage entre ce que les femmes craignaient et les conditions réelles de leur accouchement fait qu'elles déclarent que « tout s'est bien passé ». Néanmoins, peu d'entre elles avaient anticipé les difficultés d'être seules avec le nouveau-né en suites de couches. La pandémie a ainsi créé un important sentiment de solitude chez les femmes, et notamment un sentiment de maternité volée. La majorité d'entre elles n'ont donc pas décrit une expérience positive de leur accouchement. Ces vécus sont néanmoins liés aux perceptions qu'ont les femmes de la maternité et de la médecine, et à leur histoire personnelle et familiale.
    From 2020, the Covid-19 pandemic has forced a reorganisation of care including in maternity wards, accentuating biomedical injunctions during pregnancy and childbirth. In France, the new restrictions and constraints observed in some hospitals have been widely publicised and relayed on social networks, particularly through the denunciation of two practices: the imposition of wearing a mask and the refusal to allow patients to be accompanied during childbirth. In this context, we conducted the MaterCovid19 research project on experiences of childbirth in Île-de-France and La Réunion during this period. The focus here is on the body experiences of women in the three public hospital maternity units included in the study. The main element that emerges from their narratives is the apprehension of having to give birth “alone”. At the end, the significant discrepancy between what women feared and the actual conditions of their delivery resulted in the declaration that “everything went well”. Nevertheless, few of them had anticipated the difficulties of being alone with the newborn following childbirth. Thus the pandemic created a strong feeling of loneliness among women, linked, even amplified, by a feeling of stolen motherhood. The majority of them therefore did not describe a positive experience of childbirth. The experience is, however, related to the women's perceptions of motherhood and medicine, as well as to their personal and family history.
  • Quand le désordre sanitaire bouscule les relations sociales : Commentaire - Agnès Adjamagbo p. 71-78 accès libre
  • Des « battantes » et des « faibles » ? Tenir au travail avec une endométriose - Alice Romerio p. 79-105 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    L'article porte sur les conséquences de l'endométriose sur la vie professionnelle et s'appuie sur deux enquêtes, quantitative et qualitative. L'endométriose est une maladie chronique inflammatoire qui touche au minimum une femme sur dix en France. L'article montre qu'en rendant plus pénibles les activités de travail, l'endométriose constitue un enjeu de santé au travail. Loin de naturaliser une moindre capacité ou une vulnérabilité des femmes au travail, une approche attentive aux conditions d'emploi et de travail des femmes permet de rendre compte dans quelle mesure l'organisation du travail n'est pas favorable à la santé des femmes au travail, ce qui vient renforcer les inégalités de genre au travail. Le manque de reconnaissance de l'endométriose comme enjeu de santé au travail a des conséquences sur la manière dont cette maladie est appréhendée par les acteurs de la santé au travail et par l'entourage professionnel des femmes atteintes d'endométriose. Elles peinent à trouver des aménagements qui leur permettent de se maintenir en emploi et réalisent un important « travail en plus » pour tenir au travail et se maintenir en emploi.
    This article looks at the consequences of endometriosis on working life, based on two surveys, quantitative and qualitative. Endometriosis is a chronic inflammatory disease affecting at least one in ten women in France. The article shows that by making work activities more difficult, endometriosis constitutes an occupational health issue. Far from naturalizing women's reduced capacity or vulnerability at work, an approach attentive to women's employment and working conditions allows to account for the extent to which the organization of work is not conducive to the women's health at work, reinforcing gender inequalities at work. The lack of recognition of endometriosis as an occupational health issue has consequences for the way in which this disease is perceived by occupational health professionals and by the professional entourage of women suffering from endometriosis. They struggle to find accommodation that will enable them to stay in work, and do a great deal of “extra work” to stay in work and keep their jobs.
  • Un·e pour tou·tes, tou·tes perdant·es ? La difficile prise en compte du corps dans les organisations : Commentaire - Edwige Rémy p. 107-113 accès libre