Contenu du sommaire : Sur quelques énigmes des élections du printemps 2002
Revue | Revue Française de Science Politique |
---|---|
Numéro | Vol. 52, no 5-6, 2002 |
Titre du numéro | Sur quelques énigmes des élections du printemps 2002 |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Sur quelques énigmes des élections du printemps 2002 - p. 483-484
- L'énigme de la cohabitation, ou les effets pervers d'une pré-sélection annoncée - Jean-Luc Parodi p. 485-504 Interprétées à chaud comme un véritable séisme, interprétation que le nombre et l'ampleur des records de toute nature enregistrés (abstentions, blancs et nuls, candidatures, scores des extrêmes, du PC, etc.) peuvent étayer, les élections françaises du printemps 2002 apparaissent, une fois remises en perspective, lues dans leur globalité et analysées à la lumière de la cohabitation, moins sismiques que sur le moment. Car toute la séquence des quatre tours de scrutin est structurée par les résultats du premier tour del 'élection présidentielle et celui-ci est dominé par la pré-sélection des candidats du second tour qu 'a progressivement imposée la cohabitation exceptionnelle de 1997-2002. C'est elle qui maximise la traditionnelle fonction de message que peut remplir le premier tour de l'élection présidentielle et favorise la tentation de votes stratèges aux effets pervers incontrôlables.The mystery of cohabitation or the perverse effects of a predicted pre-selection Interpreted at the time as a real earthquake - an interpretation that the number and scope of every kind of record measured (abstentions, blank and null, candidacies, results of the extremes, of the CP, etc.) can back up ?, the French elections of the spring of 2002 now seem, in retrospect, analyzed as a whole and in the light of cohabitation, less cataclysmic than when they took place. The whole sequence of the four rounds of the election is structured by the results of the first round of the presidential election and this was dominated by the pre-selection of the candidates of the second round that the exceptional cohabitation of 1997-2002 progressively determined. This is what maximized the traditional message function that the first round of the presidential election can perform and fosters the temptation of voting strategies with uncontrollable perverse effects.
- Les hauts et les bas du vote Le Pen 2002 - Nonna Mayer p. 505-520 A partir des trois vagues du panel électoral français 2002, cette étude cherche à comprendre comment l'extrême droite française frôle 20 % des suffrages exprimés au premier tour de l'élection présidentielle de 2002 et retombe à 12 % au premier tour des législatives. Les traits distinctifs du vote Le Pen n 'ont pas changé. Il garde son caractère autoritaire et ethnocen-trique, peu diplômé, masculin et populaire. Sa progression traduit sa percée dans le monde rural et agricole, chez les seniors et dans l'électorat de droite, à la faveur d'une campagne axée sur l'insécurité et de l'usure des grands partis. Mais il souffre toujours d'un déficit de légitimité et de crédibilité politique, et la scission de 1999 a cassé la dynamique partisane, « l'effet Le Pen » n'est plus soutenu par « l'effet FN ».The ups and downs of the le pen vote in 2002 Drawing from the three waves of the French 2002 Electoral Panel, this study tries to explain why the French far right came close to 20 % of the votes in the first round of the presidential election and fell back to 12 % in the first round of the legislative elections. The characteristic features of Le Pen voters haven't changed : authoritarian and ethnocentric, poorly educated, predominatly male and working class. Their rising number is due to Le Pen's breakthrough in the rural and farming world, among the over-fifties and the right wing leaners, thanks to a campaign focused on insecurity and to the wearing out of the mainstream parties. But Le Pen still suffers from his lack of political legitimacy and credibility, and the 1999 scission broke the party's dynamic. The electoral "Le Pen effect" is no more supported by the "FN effect".
- La participation politique des jeunes soubresauts, fractures et ajustements - Anne Muxel p. 521-544 La séquence électorale du printemps 2002 donne à voir une sorte de condensé symptomatique des attributs ou traits de comportements qui ont caractérisé le rapport des jeunes à la politique au cours de la dernière décennie. Leur participation électorale en dents de scie rappelle la persistance d'une crise delà représentation politique et les records de leur abstention auxpremiers tours de l'élection présidentielle et des élections législatives montrent une relative fragilisation de leur relation au vote. L'ampleur de leur mobilisation contre la présence de Le Pen au second tour corrobore l'élargissement des formes de participation et le développement de la protestation politique au sein des jeunes générations. Mais elle revêt aussi un caractère inédit en conjuguant la participation protestataire avec une remobilisation électorale et civique. C'est parmi les plus jeunes électeurs que l'on observe la plus forte réduction de l'abstention entre les deux tours de l'élection présidentielle et le nombre de suffrages pour Chirac au second tour proportionnellement le plus important. Des traces de cette mobilisation sur leur comportement lors du premier tour des élections législatives peuvent être repérées. Enfin, cet épisode électoral a confirmé l'existence d'une fracture intra-générationnelle induite par le diplôme et différenciant les attitudes ainsi que les choix politiques par rapport à l'extrême droite et la figure lepéniste.The mobilization of youth : chronicle of a political event The voting sequence of the spring of 2002 illustrates a kind of symptomatic brief of the attributes or behavioral features that characterized the youth's relations to politics during the last decade. Their erratic voting turnout recalls the persistence of a crisis in political representation, and the extent of their abstention in the first rounds of the presidential and legislative elections show a relative fragilization of their relationship to voting. The extent of their mobilization against the presence of Le Pen in the second round corroborates the widening of the forms of participation and the development of political protest among the young generations. But it also takes on a new character by joining protest participation with an electoral and civic remobilization. It is among the youngest voters that there is the greatest drop in abstention between the two rounds of the presidential election and the score in the second round for Chirac is the greatest proportionally. Traces of this mobilization on their behavior during the first round of the legislative elections can be seen. Lastly, this voting episode confirms the existence of an intra-gene-rational split seen by one's educational degree and differentiating attitudes and political choices in relation to the far right and the Lepenist figure.
- La beauté de la mort communiste - Bernard Pudal p. 545-559 Bien que le processus de dissociation du PCF soit vraisemblablement d'une grande complexité, on peut sans doute distinguer, pour des raisons analytiques, ce qui relève des mécanismes de dissociation propres au monde communiste ou d'évolutions diverses auxquelles l'institution communiste ne parvient pas à s'adapter, et ce qui relève des multiples formes directes ou indirectes d'anticommunisme(s). L'étude des aggiornamenti (1961-1977 ; 1991-2002) tend à montrer que le « centralisme-démocratique », dimension centrale du communisme, n 'a jamais été réellement mis en cause parce qu'en lui se condense la spécificité de l'expérience communiste. Cet impensé est alors pensé par d'autres selon des logiques anticommunistes structurées par l'ethno centrisme de classe. Pris entre une histoire refoulée et une série de représentations disqualifiantes, le désarroi communiste conduit alors progressivement à la dissociation de l'entreprise politique.The beauty of the communist death Although the process of the FCP's (French Communist Party) dissociation is surely highly complex, it is possible for analytical reasons to separate the mechanisms of dissociation that pertain to the communist world itself or to the various changes to which the communist institution can't adapt from the manifold direct and indirect forms of anticommunism. The study of the aggiornamenti (1961-1977 ; 1991-2002) shows that the "democratic centralism", which is central to communism was never really challenged because the specificity of the communist experience is focused in it. The refusal to deal with this has been dealt with by others in an anticommunist logic structured by class ethnocentrism. Torn between a repressed history and a series of disqualifying representations, the communist confusion progressively led to the dissociation of the political enterprise.
- Faire l'Union : la refondation des partis de droite après les élections de 2002 - Florence Haegel p. 561-576 Un nouveau parti de droite, pour le moment dénommé UMP, a été mis en place entre des deux tours de l'élection présidentielle. Cet article se donne pour objectif d'analyser les enjeux de cette transformation. La genèse de l'UMP permet de saisir dans quelle mesure un parti politique peut être conçu comme la connexion d'un ensemble de systèmes de coopération organisés autour de postes à conquérir. En effet, l'impératif d'unification de la droite française est lié au décalage persistant existant entre les systèmes de coopération législatif et présidentiel. Mais les questions soulevées par cette fusion partisane (l'UMP inclut le RPR, DL et une majeure partie de l'UDF) montrent que cette vision ne peut suffire et que les partis ne sont pas seulement des systèmes de coopération mais aussi des systèmes de production. Dès lors, leurs logiques d'organisation internes pèsent sur ce travail de transformation du social en politique, de la pluralité en homogénéité. Dans le cas de l'UMP, il s'agit d'abord de mettre en commun des modes de fonctionnement, en particulier de définir la place et la légitimité accordées respectivement aux adhérents et aux élus, mais aussi d'organiser l'expression de la pluralité idéologique par la mise en place de courants.Making union. french right wing's re-foundation after the 2002 elections A new right wing party, provisionally named UMP, has been founded between the two rounds of the presidential election. The aim of this paper is to analyze what is at stake in this party transformation. Trough the UMP genesis, we can understand to what extent a political party is a connection of systems of cooperation based on a set of elected posts. Therefore, the claim for unification can be related to the lasting gap between the presidential and the legislative systems of cooperation. But the questions raised by this party merger (UMP includes the former RPR and DL and a major part of UDF) underline the fact that political parties are not only system of cooperation but also system of production. So, the way they are organized leaves it marks on the process of transformation from social into political matters, from plurality into homogeneity. In the case of the UMP, the first problem is to mix different types of organization and especially to decide what place and what legitimacy the party will grant respectively to members and elected representatives, then the party will have to deal with the organization of ideological plurality by the expression of tendencies.
- Les mystères de la chambre bleue : des voix aux sièges lors des élections législatives de juin 2002 - Bernard Dolez p. 577-591 Le scrutin uninominal majoritaire à deux tours a mécaniquement pour effet d'amplifier en sièges les mouvements électoraux. Les élections législatives de 2002 en sont une nouvelle illustration : alors que le rapport droite/gauche peut être estimé à 55/45 au soir du second tour, la droite modérée dispose de 399 sièges sur 577. Quand le FN ne perturbe pas le jeu comme en 1997, l'équation voix/sièges obéit ainsi, non à la loi du cube, mais à la loi du « quatre ». Les effets mécaniques des modes de scrutin ne suffisent pas, en revanche, à rendre compte de la manière dont les sièges se répartissent entre forces politiques au sein de chaque coalition. Le nombre de sièges alloués aux petits partis est principalement fonction de leur mode d'implantation territoriale : le PC a ainsi réussi à conserver un groupe parlementaire en sauvegardant ses bastions, grâce à la bonne résistance de ses sortants. Le vote écologiste est en revanche plus étale, ce qui n'a autorisé l'élection que de trois députés Verts.Mysteries of the blue house : from votes to seats in the june 2002 legislative elections The uninominal election on a majority basis with two rounds has a mechanical effect of increasing electoral movements among the seats allocated to each political forces. The 2002 legislative elections are one more illustration : whereas the right/left balance could be estimated at 55/45 at the end of the second round, the moderate right had 399 out of 577 seats. When the FN doesn't skew the game, as in 1997, the votes/seats equation follows, not the cube law of elections, but the « four » law. The mechanical effects of the type of election do not explain, however, how the seats are divided among political forces within each coalition. The number of seats allocated to little parties is mainly based on how they are established territorially: the CP managed to keep a parliamentary group by safekeeping its strongholds, thanks to the way the incumbents resisted. The ecology vote, on the other hand, was more spread out which resulted in only three Green deputies.
- Les élections de 2002 constituent-elles un « moment de rupture » dans la vie politique française ? - Pierre Martin p. 593-606 Les élections de 2002, présidentielle et législatives, ont été l'occasion d'évolutions électorales importantes et d'événements spectaculaires, comme la présence de Jean-Marie Le Pen au second tour de la présidentielle. Parmi les évolutions électorales significatives du premier tour de la présidentielle, on doit noter l'effondrement du parti communiste, une percée de l'extrême gauche ainsi qu'une nouvelle poussée de l'extrême droite et des Verts. Inversement, le parti socialiste et la droite modérée enregistrent de très mauvais résultats, illustrés par l'élimination de Lionel Jospin et le résultat de Jacques Chirac à moins de 20 %. Mais seule la chute du parti communiste sera confirmée aux élections législatives de juin, marquées par une très nette victoire du nouveau parti de rassemblement de la droite modérée derrière Jacques Chirac -l'UMP ? et un net redressement du parti socialiste. Au total, les élections présidentielle et législatives de 2002 ne constituent pas un moment de rupture - au sens de la théorie des réalignements ? de l'ordre électoral et partisan en place depuis le réalignement de 1984. La vie politique française reste organisée autour de l'affrontement de deux coalitions électorales de gauche et de droite, respectivement dominées par les socialistes et les chiraquiens, avec une force significative isolée à l'extrême droite.The 2002 presidential and legislative elections saw major electoral changes and spectacular events, like the presence of Jean-Marie Le Pen in the second round of the presidentials. Among the significant election changes in the first round were the collapse of the communist party, an advance of the left wing as well as a new sprint of the far right and the Greens. Inversely, the socialist party and the moderate right had very bad scores, illustrated by the elimination of Lionel Jospin and the less than 20 % score by Jacques Chirac. But only the fall of the communist party was confirmed in the June legislative elections, marked by a very clear victory of the new regrouping of the moderate right behind Chirac - the UMP ? and a frank recovery of the socialist party. All things considered, the presidential and legislative elections of 2002 do not signal a moment of rupture ? according to the theory of realignments ? of the electoral and party order in place since the 1984 realignment. French political life remains organized around the clash of two electoral coalitions, left and right, respectively dominated by the socialists and the Chiraquiens, with a significant isolated force on the far right.
Article
- La diversité légitime : nouveau défi de l'intégration européenne - Fritz W. Scharpf p. 609-639 Discuter apropos d'une constitution européenne nécessite de se confronter à d'importants défis politiques qui ne se rencontrent pas réellement dans le cadre institutionnel actuel de l'Union européenne. Le présent article présente tout d'abord trois modes de gouvernement communautaire distincts : les négociations intergouvernementales, la centralisation supranationale et les décisions conjointes. Dans ces trois modes de gouvernement, l'action européenne appliquée et légitime dépend d'un haut degré de consensus entre les membres des gouvernements des États. L'article examine ensuite les conditions des réponses européennes aux trois nouveaux défis politiques : l'élargissement à l'Est, la politique communautaire extérieure et de sécurité ainsi que la protection des États providence européens face à l'impact de l'intégration économique et de la libéralisation du marché. Dans chaque cas, on peut voir que les conflits d'intérêt significatifs entre les membres des gouvernements empêchent toute action dans le cadre institutionnel actuel. Prétendant que ces conflits ne peuvent pas être résolus par une évolution vers des institutions à régime majoritaire, l'article conclut en proposant différentes réponses politiques qui permettraient l'action communautaire dans le cadre d'une diversité légitime.Legitimate diversity : the new challenge of european integration Discussions about a European constitution ought to focus on substantive policy challenges that cannot be met effectively within the present institutional framework of the European Union. The paper begins by discussing the characteristics of three distinct modes of European policy making ? intergovernmental agreement, supranational centralization and joint-decision making. In all three modes, effective and legitimate European action depends on high levels of substantive consensus among member state governments. The paper goes on to examine the requirements of effective European responses to three novel policy challenges ? Eastern enlargement, common foreign and security policy and the protection of European welfare states against the impact of economic integration and liberalization. In each case, it can be shown that politically salient conflicts of interest among member governments will prevent effective action within the present institutional framework. Arguing that these conflicts could not be legitimately settled by a move toward majoritarian institutions, the paper concludes with a discussion of differentiated policy responses that would allow European action in the face of legitimate diversity.
- La diversité légitime : nouveau défi de l'intégration européenne - Fritz W. Scharpf p. 609-639
Brèves
- Une vue européenne sur la science politique française - André-Paul Frognier p. 641-648
Lectures critiques
- Isaiah Berlin, une morale de l'incertitude. À propos de Liberty et de Freedom and it's Betrayal - Cécile Hatier p. 649-651
Comptes rendus
- Jacques Rollet, Religion et politique. Le christianisme, l'Islam, la démocratie - Lucien Jaume p. 651-653
- Gianfranco Pasquino, Il sistema politico italiano. Autorità, istituzioni, società - Gianluca Passarelli p. 653-655
- Revue des revues - p. 657-665
- Informations bibliographiques - p. 667-685