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Revue Revue Française de Sociologie Mir@bel
Numéro 1996, 37-1
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Les mécanismes du vote référendaire en Suisse : l'impact de l'offre politique - Yannis Papadopoulos p. 5-35 accès libre avec résumé avec résumé en anglais avec indexation
    Ce texte se propose d'analyser les comportements politiques des dirigeants et des citoyens en Suisse à travers une étude des 202 votes référendaires qui ont eu lieu sur le plan fédéral de 1970 à 1994. L'existence de ces votes permet d'effectuer des mesures, plus fiables que dans les démocraties purement représentatives, des rapports entre le système politique et son environnement social : réception des décisions par les publics, caractère plus ou moins conflictuel des enjeux à l'ordre du jour, niveau de participation des citoyens. L'approche choisie se distingue des travaux traditionnels sur les comportements politiques, qui recourent principalement à des enquêtes par sondage ou à l'utilisation de données de type écologique. La perspective privilégiée est celle de l'impact de l'offre politique sur les comportements de vote. Le concept d'offre est divisé en quatre dimensions : type juridique de la décision soumise au vote, contenu des projets, « climat politique », configuration des coalitions d'acteurs favorables et hostiles au projet. Cette analyse fournit des indications sur les conséquences d'une large ouverture des processus politiques aux acteurs de la société. Il apparaît globalement que la démocratie directe introduit une dose d'incertitude non négligeable : les logiques des comportements du monde politique et des citoyens ordinaires diffèrent sensiblement, le niveau de conflit atteint une ampleur inattendue, des acteurs marginaux de tendance conservatrice ont un rôle mobilisateur et rencontrent un écho certain. La démocratie directe rend régulièrement visibles des phénomènes de crise de représentation dans les rapports entre gouvernants et gouvernés, tout comme elle peut entraver l'adaptation. Il s'agit là de contraintes sérieuses pesant à leur tour sur l'offre politique.
    Yannis Papadopoulos : Mechanisms of referendum voting in Switzerland : the impact of the political offer. The aim of this text is to analyse the political behaviour of the leaders and citizens of Switzerland based on a study of 202 referendum votes which took place at federal level between 1970 and 1994. With this type of voting it is possible to measure the relations between the political system and its social environment more reliably than in purely representative democracies : the reception of decisions by the public, the more or less conflictual character of the importance of current issues, the level of citizen participation. A new method has been applied here, different to the traditional studies on political behaviour which involve opinion polls or the use of ecology-type data. In this case, the important notion is the impact of the political "offer" on vote behaviour. The "offer" concept is seen with four dimensions : the legal nature of what is being voted, the project content, the "political climate", and the coalition configuration of those in favour of or hostile to the project. This analysis provides indications as to what the consequences are when political processes are wide open to society's actors. It appears in a global manner that direct democracy introduces quite a significant element of uncertainty : the behavourial logic varies appreciably between the political sphere and ordinary citizens, the degree of conflict is unexpectedly high, marginal actors of conservative tendency play a mobilizing role producing a certain amount of response. In direct democracy the representation crises in relations between the government and the governed are often made visible and can also be a hindrance to adaptation. These are serious constrictions which need to be taken into account when formulating political offers.
  • Exclusion, underclass, marginalidad. Figures contemporaines de la pauvreté urbaine en France, aux Etats-Unis et en Amérique latine - Didier Fassin p. 37-75 accès libre avec résumé avec résumé en anglais avec indexation
    Au cours de la période récente, l'apparition de nouvelles formes de pauvreté, fortement marquées par leur caractère urbain, a donné lieu à des modes spécifiques de désignation : exclusion en France, "underclass" aux Etats-Unis, "marginalidad" en Amérique latine. Si les causes et les mécanismes de cette réalité sociale ont fait l'objet de nombreux travaux, en revanche le phénomène de construction par lequel ces notions se sont imposées, les représentations de l'espace social qui les sous-tendent et les effets pratiques qui en résultent ont été peu étudiés. Le propos est ici, sur la base d'une approche comparative entre les trois contextes sociaux et intellectuels, de montrer l'évolution du sens que l'on a attribué à ces notions, des faits qu'elles nomment et qualifient, des enjeux dont elles ont fait l'objet ou qu'elles ont occultés. Il s'agit, en somme, d'analyser la nouvelle topologie sociale dont elles prétendent rendre compte et qu'elles contribuent à produire.
    Didier Fassin : Exclusion, underclass, marginalidad. Contemporary figures of urban poverty in France, the United States and Latin America. Over recent years the appearance of new forms of poverty, strongly marked by their urban characteristics, has made way for new terminology to describe them : "exclusion" in France, underclass in the United States, "marginalidad" in Latin America. If the causes and mechanisms of this new social reality have been the reason for numerous studies, the way in which these notions have come to exist, the representation of the underlying social space and their practical effects have hardly been looked into. This is the subject of this article, which by comparing three social and intellectual contexts, attempts to show the evolution in the meaning given to these notions, what exactly they qualify or define, what stakes are directly involved and which more indirectly. This is an analysis of the new social topology which these forms express and also to which they contribute.
  • Evaluation et efficacité pédagogique des enseignants du secondaire. Le cas des mathématiques - Georges Felouzis p. 77-105 accès libre avec résumé avec résumé en anglais avec indexation
    Cet article propose une mesure et une analyse de l'efficacité pédagogique des enseignants du secondaire, à partir d'une enquête portant sur 36 classes de seconde en mathématiques. Le premier résultat concerne « l'effet-enseignant » : toutes choses égales par ailleurs (niveau de départ, âge, sexe, origine sociale), les performances des élèves à des épreuves communes varient de manière significative selon la classe et l'enseignant (l'écart peut aller jusqu'à 5 points sur 20 dans les cas les plus extrêmes). Cette efficacité différentielle est analysée comme le résultat d'un effet d'attente, mesuré par les pratiques de notation. Deux résultats essentiels ressortent : ? Les notes attribuées aux élèves ne dépendent pas totalement de leurs performances effectives, mais aussi des pratiques de notation de l'enseignant, plus ou moins sévères ou indulgentes. ? Toutes choses égales par ailleurs (niveau de départ, âge, sexe, origine sociale), les pratiques de notation les plus indulgentes impliquent de meilleures performances des élèves à des épreuves communes en fin d'année. Ces résultats amènent une réflexion plus générale sur les effets de contexte et la place des interactions dans la construction de la réussite et de l'échec scolaires.
    Georges Felouzis : Evaluation and teaching efficiency in secondary school teaching. The case of mathematics. This article aims to evaluate and analyse the degree of efficiency in secondary school teaching based on a survey carried out in 36 classes of "seconde" maths (fifth year). The first result concerns the "teacher effect" : when comparing the performance of students on common exercises (between groups of equal age, level of education, sex and social background) there was found to be a large discrepancy depending on the class and the teacher (the marks varied from 5 to 20 in the more extreme examples). This difference is analysed as the result of the "expectation effect", in other words, the sort of mark that will be awarded for the exercise. There are two main results : - The marks awarded to the pupil are not always based on their real performance but according to the teacher's marking habits, more or less generous. - When all factors (initial level, age, sex, social background) are equal the more generous marking habits imply better performance in end-of-year testing. These results underline the need for a more global reflection on the effects of context and the role interactions play in the development of success or failure at school.
  • Note critique

    • L'histoire de la statistique, laboratoire pour la théorie sociale - Libby Schweber p. 107-128 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      "La politique des grands nombres" d'Alain Desrosières et "La mesure de l'Etat" d'Eric Brian sont consacrés à l'histoire des statistiques ou des mathématiques, dans leurs liaisons avec les sciences sociales et l'administration. Une comparaison de l'approche théorique développée dans ces deux ouvrages permet d'examiner ce que les développements récents en histoire et en sociologie des sciences permettent d'apporter à la sociologie dans son ensemble. Si l'un et l'autre se positionnent par rapport aux problèmes soulevés par le constructivisme et le relativisme, ils ne le font pas de la même manière, ce qui s'observe à la fois dans les questions qu'ils posent, dans les méthodes qu'ils adoptent, et dans le type de réponses qu'ils recherchent - voire dans la période couverte par chacun, courte et fouillée chez E. Brian, longue et extensive chez A. Desrosières. Pour ce dernier, le constructivisme se traduit par le souci des conséquences politiques du caractère construit des objets statistiques. Sa position, au fond relativisté, s'accompagne d'une approche classificatoire, visant à faire ressortir ce qu'il considère comme étant les caractéristiques intrinsèques (et trans-historiques) de la statistique. Au contraire, E. Brian propose un type de constructivisme méthodologique qui prend en compte à la fois le caractère construit des sources historiques et celui de sa propre analyse. Cette approche est liée à une position réaliste, qui fonde sa tentative d'exercer un contrôle épistémologique sur la construction de son objet.
      Libby Schweber : The history of statistics, a laboratory for social theory. "La politique des grands nombres" (The politics of large numbers) by Alain Desrosières and "La mesure de l'Etat" (The measure of State) by Eric Brian are devoted to the history of statistics or mathematics and their links with social sciences and the administration. By comparing the theoretical approach developed in these two works, it is possible to examine in what manner recent developments in history and sociology of sciences have contributed to sociology as a whole. If the authors of these works take a stand in relation to the problems put forward by constructivism and relativism, it is not in the same way. This can be seen by the questions they ask, in the methods adopted and in the type of reply they are seeking, as well as in the period covered : short and detailed for E. Brian, longer and more extensive for A. Desrosieres. For the latter, constructivism is found in the concern for political consequences leading to the construction of statistical objects. His position, basically relativist, is also accompanied by a classificatory approach aiming to highlight what he considers to be the intrinsic (and trans-historic) characteristics of statistics. On the contrary, E. Brian puts forward a methodological constructivism which takes into account both the constructed nature of historical sources and that of his own analysis. This is the approach of a realist who needs a base in order to hold an epistemological control over the construction of this object.
  • Les livres

  • Résumés (anglais,allemand, espagnol) - p. 181-186 accès libre