Contenu du sommaire

Revue Politiques et management public Mir@bel
Numéro vol. 9, no 2, juin 1991
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Présentation générale - Romain Laufer p. 1-3 accès libre
  • Introduction

  • Les choix collectifs portant sur des questions d'intérêt public - James Coleman p. 15-26 accès libre avec résumé
    L'article aborde la question de savoir comment une collectivité peut prendre des choix collectifs efficients sans pour autant créer de scissions en son sein. Après avoir rappelé les problèmes soulevés par le décompte de BORDA et le paradoxe de CONDORCET, et présenté des exemples où les procédures de vote reposent sur l'égalité des individus ou sur la fonctionnalité des groupes (vote par collège), l'auteur en vient à montrer l'intérêt d'une procédure de vote à l'unanimité avec dédommagement des perdants par les gagnants en application du principe de taxation de WICKSELL et du principe de compensation de KALDOR . Si les procédures de donnant-donnant et de marchandage global des assemblées parlementaires tendent à mettre en œuvre le principe d'un dédommagement réel des perdants, le vote à la majorité rend toutefois nombre de choix collectifs inefficients et tyranniques pour la minorité. Il faudrait donc tendre dans la réalité vers des procédures plus proches de l'unanimité.
  • Esthétique du management public - Pierre Guillet De Monthoux p. 27-34 accès libre
  • I - Le destin du régalien

    • Les problèmes de relations entre l'administration communautaire et les administrations nationales - Claudio Franchini p. 37-50 accès libre avec résumé
      Au cours des dernières années, l'augmentation progressive des matières relevant du droit communautaire a entraîné des occasions de plus en plus nombreuses de contact, à différents niveaux, entre les administrations centrales et l'administration communautaire, favorisant la diffusion de formes de coopération et, en particulier, le développement d'une vaste activité de relation, surtout dans les phases de formation et de mise en œuvre des décisions communautaires, ainsi qu'en phase de contrôle de leur application. Les rapports entre les administrations nationales et l'administration communautaire prenaient tantôt la forme d'un dialogue continu, tantôt celle de l'opposition. La raison en est qu'elles ont en vue la tutelle d'intérêts différents, parfois similaires, certes, mais parfois, et plus souvent, divergents, et nécessitant dans tous les cas une action incessante d'adaptation et de rapprochement. Ce processus fait naître en même temps des tendances de signe opposé : la tendance à la transnationalisation des appareils bureaucratiques nationaux, et la tendance au contrôle national de l'administration communautaire.
    • L'éclatement et la dilution des pouvoirs - André Holleaux p. 51-57 accès libre avec résumé
      L'étude sur l'éclatement et la dilution des pouvoirs s'efforce de représenter l'ordre des pouvoirs dans la société contemporaine en se limitant aux aspects politiques, administratifs et psychologiques et donc sans aborder le problème des pouvoirs d'origine économique. Le pouvoir d'aujourd'hui est si démembré et mobile que son organisation revêt des formes nouvelles ; le langage classique et a fortiori conventionnel est de plus en plus difficile à utiliser pour en rendre compte.
    • Situations de crise et risques majeurs : vers une redistribution des pouvoirs ? - Jean-Paul Zuanon, Claude Gilbert p. 59-79 accès libre avec résumé
      La gestion des situations de crise pose un problème très particulier d'exercice du pouvoir régalien, entendu comme pouvoir exceptionnel s'appliquant à des questions extrêmes. Qui décide alors? Doctrine et pratiques ont évolué au fur et à mesure que s'opérait la reconnaissance progressive des risques majeurs (en même temps que se mettait en place la décentralisation). En dépit de cette dernière, le préfet reste toujours officiellement au centre du dispositif (notamment dans le cadre de la mise en oeuvre du plan ORSEC). L'analyse de la façon dont a été gérée la crise de Nîmes souligne pourtant l'écart existant désormais entre doctrine et pratique. La ville de Nîmes et son maire ont en effet joué un rôle de premier plan en prenant en charge des missions relevant normalement du préfet. Des relations complexes se sont donc établies entre le préfet, le maire et les principaux acteurs concernés. Cette place prééminente occupée de fait par l'élu local est-elle une tendance de fond ? Au delà de la personnalité du maire de Nîmes, n'assiste-t-on pas à l'émergence d'une nouvelle classe d'élus locaux, susceptibles d'intervenir beaucoup plus largement dans la gestbn des situations de crise ? N'irait-on pas alors vers une redistribution des cartes, posant le problème d'une remise en cause de la doctrine ? Faut-il pour autant en conclure à l'effacement du régalien, lui-même lié au déclin de la fonction préfectorale en situation de crise, au profit de l'élu (doté de quelle légitimité profonde ?). Préfet et grand élu ne sont-ils pas étroitement liés dans le maintien du régalien ?
    • Expertise et Etat : l'exemple de Volney l'idéologue/voyageur (1757-1820) - Robert Damien p. 81-100 accès libre avec résumé
      La crise de l'Etat participe d'une crise de l'expertise. L'Etat s'est longtemps défini comme capacité d'atteindre un point de vue supérieur pour dégager la vérité de l'intérêt public. Lieu de l'universel, la Souveraineté de son action politique se donnait comme fondée par une connaissance scientifique du Bien commun. Cette détermination experte de l'agir étatique serait aujourd'hui plus qu'hier invalidée. L'inconnaissabilité du réel trop complexe le rendrait ingouvernable, faute d'un point de vue suprême fondé en raison. Le savoir par quoi l'Etat légitime son droit d'agir et de dire la loi est éclaté en de multiples rationalisations qui combattent pour s'ériger en norme de rationalité. Dès sa mise en place, l'Etat républicain dut affronter la mise en question de son "objectivité", VOLNEY, l'idéologue, pendant la Révolution française a affronté l'objection : par quelles procédures scientifiques l'Etat peut-il connaître le réel et se conformer à son propre concept ? Nous examinons quelques unes de ses solutions.
  • II - Les questions fiscales

    • Le fédéralisme suisse à l'épreuve du temps : un modèle pour l'Europe ? - Luc Weber, Katrin Pfeiffer p. 103-138 accès libre avec résumé
      Cet article a pour objet d'examiner le fédéralisme suisse à l'épreuve du temps. Après avoir décrit l'origine et les particularités du système, l'étude cherche à mettre en évidence la dynamique de la répartition des tâches et de leur financement. Elle démontre notamment un clivage étonnant entre l'évolution de la répartition des compétences juridiques en faveur de l'Etat central et celle des dépenses entre collectivités publiques. La coexistence d'un transfert de compétences vers le centre et d'une large autonomie des Etats membres donne à penser que le système fédéral suisse offre un modèle pour la construction de l'Europe.
    • A la croisée des modèles du fédéralisme budgétaire : Bruxelles métropole ou région ? - Françoise Thys-Clement, Cécilia Maes, Anne Drumaux p. 139-155 accès libre avec résumé
      La réforme institutionnelle belge qui a consacré Bruxelles comme une région à part entière a substitué au régime de dotation antérieur principalement un régime d'attribution d'un impôt conjoint : l'impôt des personnes physiques. La question se pose de savoir dans quelle mesure cette attribution de l'IPP aux régions n'est pas porteuse d'externalités fiscales défavorables à la Région de Bruxelles Capitale. En effet le produit localisé de l'IPP se fait sur base de la résidence et non sur base de la source du revenu. Cela signifie que les revenus des "navetteurs" financent les équipements dans leur région de résidence et non dans leur région d'activité. Il existerait ainsi une incitation à l'émigration hors de Bruxelles, ce qui accroîtrait à terme le déséquilibre entre ressources et dépenses d'équipements. Bruxelles, en tant que région métropole, condense certaines caractéristiques, selon la distinction de MIESZKOWSKI, ZODROW (1989), d'un modèle métropolitain de finances publiques locales et d'un modèle régional.
    • Confrontation entre souveraineté européenne et souverainetés nationales face à la (re)définition de politiques fiscales - Michel Englert, Nadine Gouzee p. 157-188 accès libre avec résumé
      Au-delà de la lettre de l'Acte Unique Européen, les dispositions qui instaurent le "Grand Marché" de 1992 impliquent de fait le transfert vers le pouvoir communautaire européen d'importantes compétences réservées jusqu'ici aux Etats. En d'autres mots, des lieux privilégiés d'exercice de la souveraineté nationale passent plus ou moins discrètement sous souveraineté européenne. Etait-ce là l'esprit du traité entré en vigueur en 1987 ? Epineuse question que nous n'aborderons guère ici. Quoi qu'il en soit, cette interrogation n'est pas étrangère au développement d'une dialectique complexe dans le processus de la décision politique. Le but de la présente contribution est d'illustrer -et si possible de clarifier- ce mouvement dans deux exemples particuliers significatifs dans le cas belge : la fiscalité indirecte et la fiscalité des revenus de l'épargne. Dans les deux cas en effet, des modifications législatives sensibles sont intervenues récemment, largement motivées par la perspective de l'"Europe 92". Les similitudes semblent pourtant s'arrêter là : les relèvements de droits d'accises programmés dans le cadre de la réforme fiscale de l'impôt des personnes physiques (décembre 1988) s'appuyaient sur des projets de directives élaborés par la Commission européenne en vue d'une harmonisation de la fiscalité indirecte, tandis que l'abaissement de 25 à 10 % du taux de précompte mobilier sur les revenus des nouveaux actifs financiers à revenus fixes (février 1990) était justifié par l'absence d'harmonisation fiscale à l'ouverture du marché européen des capitaux. Occasions saisies pour un redéploiement fondamental de la pression fiscale ou dynamique de l'intégration européenne s'engageant progressivement sur la voie de la "désescalade" fiscale ? Une réponse tente d'être apportée en abordant les deux cas successivement.
  • III - Les politiques publiques

    • Parlement et politiques publiques : l'exemple de la Ve République - Didier Maus p. 191-222 accès libre avec résumé
      Les spécialistes des politiques publiques ont largement négligé l'aspect parlementaire de ce thème. De son côté, le Parlement utilise des méthodes et un langage qui l'éloignent de la stratégie des politiques publiques. Cette contribution rapproche ces deux cercles, en procédant à un recensement et à une évaluation des moyens à la disposition du Parlement pour intervenir dans les politiques publiques. A partir du moment où la loi demeure l'instrument central des transformations politiques, et où les procédés du contrôle parlementaire se sont développés, il devient indispensable de poser la question d'une meilleure intervention du Parlement dans le champ des politiques publiques, champ trop exclusivement considéré comme relevant de la seule responsabilité gouvernementale.
    • Les nouvelles formes de lutte anti-pollution ou la carotte sans le bâton : l'exemple du Clean Air Act - Jean-Michel Saussois p. 223-236 accès libre avec résumé
      Cette communication a pour but de présenter la manière de penser et de mettre en place une politique anti-pollution atmosphérique aux Etats-Unis. L'exercice du contrôle est en train de changer de forme. Il ne s'agit plus de contrôler si les nouveaux assujettis ont obéi aux objectifs fixés mais d'allouer des crédits de pollution. Le régalien ne s'exerce plus par le commandement décrété mais par l'octroi de droits à négocier sur un marché.
    • La gestion des quotas laitiers France/CEE - Frédéric Langer p. 237-255 accès libre avec résumé
      La politique des quotas laitiers instituée dans la Communauté Européenne en 1984 enfreint le principe de la liberté économique. Après le prix du lait, c'est désormais la production qui est fixée par lEtat. Pour l'appliquer en France, les autorités ont dû enfreindre en outre un autre principe : celui de l'égalité. En redistribuant des quotas supplémentaires gratuits à certains producteurs, au nom d'un ambitieux plan de restructuration, l'Etat a endossé la responsabilité d'une gestion inéquitable. En effet, le choix des bénéficiaires de cette redistribution a été laissé au libre jeu de mécanismes institutionnels qui ont largement échappé au contrôle central. Les producteurs des régions où les cessations ont été nombreuses ont été avantagés par rapport aux autres. La recherche de l'équité (ou plutôt de moins d'injustice) dans les pénalités est un des axes qui permet de décrire les différents stades de la gestion des quotas et peut-être de rendre compte du malaise qui entoure cette gestion malgré son succès affiché. Celle-ci n'est pas une gestion publique puisqu'elle ne respecte pas l'égalité. Ce n'est pas non plus une gestion privée. C'est un objet social qui manifeste autant la crise de légitimité du libéralisme que celle de son contraire, l'interventionnisme.
    • Les états nationaux ont-ils encore la maîtrise de leur politique de la recherche et de la technologie ? - Michel Callon, Philippe Larédo p. 257-275 accès libre avec résumé
      Depuis plusieurs années se sont développées de nouvelles formes d'intervention des pouvoirs publics dans le domaine de la recherche et de la technologie. L'Etat se contente de moins en moins du seul soutien à la recherche académique. Il n'hésite pas à rentrer dans les contenus pour financer de manière sélective certains thèmes ou domaines ; il organise les interactions entre le monde universitaire et l'univers industriel, en favorisant l'émergence de réseaux de collaboration qui vont souvent jusqu'aux usagers eux-mêmes. L'étude empirique détaillée, consacrée à l'impact des programmes de recherche communautaires, confirme cette évolution. Les interventions dans le domaine du nucléaire et de l'environnement correspondent au modèle traditionnel : les financements vont presqu'exclusivement à des organismes publics. D'autres programmes, comme Esprit et Matériaux, contribuent à l'inverse à faire émerger de nouvelles formes de coordination entre la science et l'industrie. Les deux notions de recherche technologique de base et de réseaux technico-économiques sont utilisées pour décrire cette évolution. A terme, celle-ci peut contribuer à affaiblir les prérogatives de l'Etat national qui pourrait très bien se contenter de soutenir la recherche de base, en laissant la CCE et les régions développer les réseaux technico-économiques.