Contenu du sommaire : Le(s) « nous » des jeunes des quartiers populaires

Revue Agora débats/jeunesse Mir@bel
Numéro no 93, 2023/1
Titre du numéro Le(s) « nous » des jeunes des quartiers populaires
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  • La Protection judiciaire de la jeunesse face à la scolarité des mineur·e·s sous main de justice : Un travail intermittent sur une question marginalisée - Benjamin Denecheau p. 7-22 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
    Qu'implique le suivi de la Protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) sur la scolarité ? À partir d'une recherche qualitative située dans deux unités éducatives de milieu ouvert de la PJJ et composée de 42 journées d'observation, de 20 entretiens semi-directifs de professionnel·le·s et de l'analyse de 380 situations de mineur·e·s, cet article montre que la scolarité et la formation sont prises en compte lorsqu'elles posent problème. Le travail qu'elles requièrent est particulièrement difficile pour les éducateur·trice·s confronté·e·s aux temporalités de l'école et à des processus de formation différents de la leur et du temps judiciaire. Ces discordances et le contexte du travail en milieu ouvert ne permettent pas d'atténuer les distances scolaires déjà fortement marquées pour une majorité des jeunes suivi·e·s.
    What does the involvement of Youth Protection and Juvenile Justice ( Protection judiciaire de la jeunesse [PJJ]) mean for the education of the young people it oversees ? Drawing on qualitative research based in two open educational centres of the PJJ, 42 days of observation and 20 semi-directive interviews with professionals, along with the analysis of 380 situations with minors, this article shows that education and training are only taken into account when they raise problems. They require work that is particularly difficult for educators who are confronted with timeframes of education and training that are different from their own and from those of the justice system. These discordances and the working environments in these open education centres do nothing to reduce the distance that most of these young people already have with the school system.
  • Parcours de décohabitation et maladie chronique : L'autonomie sous contrôle parental de jeunes asthmatiques sévères - Vulca Fidolini p. 23-36 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
    À travers l'analyse des résultats d'une enquête qualitative sur les parcours médicaux de jeunes asthmatiques sévères, cet article étudie la transition vers l'âge adulte du point de vue des patients chroniques. L'objectif est de rendre compte des marges de manœuvre individuelles que les jeunes interviewés négocient dans la prise en charge de leur pathologie au moment de la décohabitation du domicile des parents. Par l'exploration de différents cas empiriques, la contribution interroge l'avancée en âge des jeunes malades chroniques en tant que processus de responsabilisation et d'autonomisation qui se construit dans le cadre des relations enfant/parents et qui est traversé par différentes inégalités.
    Drawing on results from a qualitative study on the medical trajectories of young people living with severe and chronic asthma, this article studies the transition to adulthood from the perspective of these patients. The goal here is to reflect the individual room for negotiation the young people interviewed here have in taking control of their illness when they move out of the parental home. Analysing different empirical cases, the article explores the ageing of these young chronically ill people as a process of responsibilization and autonomization that is constructed in the context of parent/child relationships that are marked by a range of inequalities.
  • Les sœurs et frères de jeunes malades chroniques : supports rapprochés, supports par effacement et rivalités - Virginie Vinel p. 37-51 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
    La place des frères et sœurs dans les soins prodigués à des adolescent·e·s ou des jeunes adultes malades chroniques reste peu connue. À partir d'une enquête qualitative auprès de 91 jeunes âgés de 11 à 22 ans, atteints de diabète de type 1 ou d'asthme, l'article met au jour trois modalités de relations entre frères et sœurs en mobilisant la notion de « support ». Des sœurs peuvent être des supports rapprochés, alors que des germain·e·s, surtout des cadet·te·s, peuvent être disqualifié·e·s en tant que soutiens. En définitive, la majorité des frères et sœurs sont peu visibles, mais ils se révèlent être des supports par effacement. Ces variations sont analysées du point de vue du genre, du rang dans la fratrie et des normes contradictoires qui gouvernent les relations adelphiques contemporaines.
    The place of brothers and sisters in treatment provided to teenagers and young adults with chronic illnesses remains poorly documented. Based on a qualitative study with 91 young people between 11 and 22 years old with Type 1 diabetes or asthma, the article documents three kinds of relations between siblings based on the notion of “support”. Sisters may provide close support, while both full siblings and especially younger siblings may be excluded as sources of support. Ultimately most siblings are not very visible but appear to provide support through self-effacement. These variations are analysed from the perspective of gender, birth order, and the contradictory norms that govern relationships between brothers and sisters.
  • Dossier. Le(s) « nous » des jeunes des quartiers populaires

    • Introduction : Le(s) « nous » des jeunes des quartiers populaires : évolution des frontières et des affiliations - Christine Bellavoine, Fanny Salane p. 54-64 accès libre
    • L'histoire comme héritage commun pour des jeunes de quartiers populaires ? - Marie-Hélène Bacqué, Emmanuel Bellanger, Hélène Hatzfeld p. 65-83 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Dans quelle mesure des situations ou des faits connus ou vécus par des jeunes de quartiers populaires constituent-ils des repères communs ? Et contribuent-ils alors à la construction d'un « nous » ? Les ateliers menés avec une centaine de jeunes de dix quartiers ou villes populaires d'Île-de-France ont mis en évidence le marquage mémoriel des attentats de 2001 et 2015 et les compétitions de football. Si les liens avec l'histoire des quartiers populaires sont ténus, des continuités s'affirment dans l'histoire récente : celles des relations violentes avec la police et des luttes contre le racisme et la discrimination dans le monde. Plus que la construction d'un « nous », se dessinent ainsi des dynamiques d'identifications multiples, sources possibles de conscientisation sociale.
      To what extent do the situations or events that young people from working-class neighbourhoods experience constitute shared references ? Do they contribute to the construction of a sense of “us” ? The workshops conducted with around a hundred young people in ten working class neighbourhoods or towns around the Ile de France region, have shown the importance of the memorial impact of the 2001 and 2015 terrorist attacks, and of football competitions. Although links to the history of working-class areas are tenuous, there are continuities with recent history, through themes of police violence and the struggle against racism and discrimination in the world. Rather than the construction of group identity in the form of “us”, we observe dynamics of multiple identifications, as possible sources for the development of social awareness
    • Les structures et les professionnel∙e∙s de jeunesse dans les quartiers populaires : (dé)construire le « nous » des quartiers ? - Christine Bellavoine, Fanny Salane p. 85-102 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Cette contribution analyse comment les structures et les professionnel·le·s de jeunesse des quartiers populaires, qui assoient leurs pratiques sur un travail basé sur la confiance et l'accueil libre, répondent aux missions parfois contradictoires qu'on leur assigne. En effet, ces lieux, inscrits dans les quartiers et leurs sociabilités, doivent également constituer des leviers pour en sortir. La légitimité des professionnel·le·s qui y exercent se construit auprès des jeunes, au quotidien, à partir d'un ancrage et des compétences locales. Cette proximité réveille toutefois le spectre de la politique des « grands frères », symbole d'une non-professionnalité et d'un enfermement des professionnel·le·s dans une identité et un territoire dont ils doivent se démarquer.
      This article analyses how youth structures and professionals in working-class areas, who base their practices on trust and openness, respond to the sometimes contradictory tasks they are assigned. Indeed, these spaces, which are situated within working-class areas and their social spheres, should also constitute ways to move out of them. The legitimacy of professionals who work in these structures is built with the young people on an everyday basis, based on local embeddedness and competence. This proximity sometimes awakens the spectre of the “older brothers” ( grand frère) approach which is a symbol of non-professionalism and of how professionals can find themselves trapped in an identity and territory they need to differentiate themselves from.
    • Une place à prendre ? Les « jeunes » dans les espaces publics d'un quartier en gentrification - Alice Lancien p. 103-120 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Cet article prend pour objet l'analyse d'une séquence ethnographique autour des différentes manières d'occuper les places assises dans un espace public du quartier en gentrification de La Chapelle à Paris. La description des compromis entre les différentes parties prenantes à travers le prisme des jeunes qui fréquentent cet espace permet de mettre en évidence les différentes catégorisations dont ces jeunes font l'objet et qu'ils sont eux-mêmes amenés à produire pour justifier et trouver leur place dans cet espace en transformation. L'approche empirique permet de discuter les travaux sur la gentrification en nuançant et complexifiant les analyses centrées sur des dynamiques d'éviction et de compétition pour l'espace. Les modalités de gestion du partage de l'espace ouvrent sur l'hypothèse d'une gestion « de fait » de ce dernier, qui s'apparenterait à une « infra-politique » de l'espace public urbain.
      This article analyses an ethnographic sequence around the different ways of occupying places to sit in a public space in the increasingly gentrified La Chapelle area in Paris. The description of the compromises between be different elements involved through the perspective of young people using this space allows us to demonstrate the different ways young people are categorised, and the different categories they produce themselves to justify and find their place in this changing space. The empirical approach allows us to explore existing studies on gentrification, providing nuance and complexity to studies focused on dynamics of eviction and competition for space. The modalities for managing the sharing of public space pave the way for a hypothesis on “de facto” management which takes the form of “infra-politics” of urban public space.
    • Les jeunes des quartiers populaires face aux transformations de leur lieu de vie : une communauté d'expérience contrastée - Grégory Busquet, Jeanne Demoulin, Claudette Lafaye p. 121-136 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      À partir d'entretiens et de vidéos réalisés dans le cadre de la recherche participative Pop-Part, l'article s'interroge sur la manière dont des jeunes issus d'une dizaine de quartiers populaires franciliens font l'expérience des transformations urbaines qui affectent leur lieu de vie. Il montre tout d'abord que celles-ci sont à la fois valorisées et critiquées. Puis il fait apparaître que la nostalgie de ce qui a disparu, articulée à celle de l'enfance, marque les discours sans être exempte d'une tonalité critique. Enfin, les changements de peuplement accompagnant certaines de ces mutations urbaines et les confrontations et interrogations qui en découlent contribuent à la construction d'identités collectives qui restent néanmoins fragiles.
      Drawing on interviews and videos conducted as part of the participative research Pop-Part, this article explores the way young people from 10 working-class neighbourhoods in and around Paris experience the urban transformations that affect the spaces they live in. Firstly, it shows that these changes are both appreciated and criticized. Secondly it reveals that the nostalgia for what has disappeared, which is connected to a nostalgia for childhood, is characteristic of the discourse, without being exempt from a critical tone. Finally, population changes associated with some of these urban changes and the confrontations and questions that result from this contribute to the construction of collective identities that nevertheless remain fragile.
    • Le « nous » négocié des jeunes du pavillonnaire modeste : Étude de cas en Seine-et-Marne - Claire Aragau, Claire Carriou p. 137-155 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Les espaces du pavillonnaire ont souvent été associés, dans l'opinion publique comme dans plusieurs travaux de recherche, à des formes d'individualisme poussées en marge des grands centres urbains. Partant d'un cas en Seine-et-Marne, cet article voudrait montrer l'émergence d'un « nous » chez les jeunes du pavillonnaire, à partir de trajectoires résidentielles convergentes et d'affiliations territoriales plurielles. Ce « nous » s'élabore autour de l'expérience commune d'une ascension fragile pour accéder au pavillonnaire et pour s'extraire des quartiers urbains populaires dont ils partagent des éléments de culture et des références dans leur vie familiale. Il offre en définitive un capital culturel qui fait du périurbain pavillonnaire un lieu d'assurance et de réassurance, et qui leur permet de naviguer entre différents mondes sociaux.
      In public opinion and in several research projects, single-family detached housing has often been associated with forms of advanced individualism on the outskirts of major urban centres. Drawing on a case study in Seine-et-Marne, this article seeks to show the emergence of a sense of “us” among young people in these housing areas, based on converging residential trajectories and multiple territorial affiliations. This “us” is developed around the shared experience of fragile upward social mobility in accessing single-family detached housing and moving away from the working-class urban neighbourhoods with which they share elements of culture and family. This sense of identity also provides cultural capital that means suburban single-family residential areas provide confidence and reassurance, which allows young people to navigate between different social worlds.
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