Contenu du sommaire : Politiques locales d'hospitalité : confrontations et négociations

Revue Migrations société Mir@bel
Numéro vol. 35, no 194, octobre-décembre 2023
Titre du numéro Politiques locales d'hospitalité : confrontations et négociations
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  • Éditorial

  • Politiques locales d'hospitalité : confrontations et négociations

    • L'accueil des migrants à l'échelle locale : stratégies des acteurs institutionnels et associatifs - Hilary Sanders, Thomas Sommer-Houdeville p. 15-25 accès réservé avec résumé
      Ce dossier a l'ambition d'interroger les prises de position des autorités locales vis-à-vis de la présence des migrants dans les villes, en France et dans différents contextes nationaux à l'étranger. Notre analyse part du constat que la crise des politiques d'asile a conduit la société civile et les gouvernements locaux à mettre en œuvre des mesures fragmentées et palliatives pour gérer des situations parfois critiques. Or, tandis que la couverture médiatique et les discours politiques alimentent une rhétorique de « crise » sur « les vagues migratoires »1, décrivant des administrations submergées et un rejet populaire de l'immigration, l'accueil des populations migrantes peut aussi donner lieu à des formes de solidarité témoignant de la tolérance et de l'adaptation des populations locales aux changements induits par l'arrivée des nouveaux venus envers qui ils manifestent leur soutien2.
    • Une « petite » localité face à l'accueil des réfugiés : Le bricolage et l'adaptation comme leviers d'une politique locale d'hospitalité à Garoua-Boulaï (Est-Cameroun) - Calvin Minfegue p. 27-44 accès réservé avec résumé
      Cet article consiste en une réflexion sur l'accueil des réfugiés dans la commune de Garoua-Boulaï dans la région de l'Est-Cameroun, que nous proposons d'analyser dans le cadre d'une politique locale de l'hospitalité. Il postule que cette politique, mise en œuvre dans une commune située à la frontière de la République centrafricaine, n'est ni la conséquence d'une adhésion totale aux actions et discours des acteurs internationaux étrangers (États et ONG) en matière d'accueil des réfugiés, ni le résultat d'une contestation frontale de ces derniers. Elle consiste d'abord à valoriser les modalités communautaires de l'accueil pour ensuite s'adapter à l'action humanitaire internationale, laquelle est mise en œuvre avec le soutien de l'État camerounais. Enfin, en tant que modalité de l'intervention publique, elle se traduit par un positionnement municipal qui capitalise sur la « manne humanitaire » tout en prenant en compte les enjeux locaux.
    • De l'accueil des étrangers à la fabrique d'une identité locale cosmopolite : le cas du Pays basque sud - Morgan Lans p. 45-64 accès réservé avec résumé
      En Espagne, la Communauté autonome basque et sa capitale économique, Bilbao, ont mis en place une politique de gestion de la diversité axée sur la promotion du « vivre-ensemble interculturel » et d'une identité locale cosmopolite. Cette stratégie inclusive interroge étant donné que cette région espagnole n'a été confrontée à une immigration internationale que depuis environ deux décennies et que l'histoire du nationalisme basque est marquée par une conception ethnoculturelle de l'appartenance. Comment expliquer cette orientation ouvertement inclusive à l'égard de l'altérité ? Cet article s'efforce de répondre à cette question en s'appuyant sur une analyse approfondie de la littérature grise, d'articles de presse et sur une enquête réalisée en 2017 auprès des principaux acteurs associatifs de l'intégration. Pour comprendre ces logiques, nous verrons qu'il est essentiel de prendre en compte le « travail politique » des organisations de la société civile, ainsi que la nature de leurs relations avec les autorités locales. Cependant, ces dynamiques relationnelles ne peuvent être interprétées que si elles sont replacées dans le contexte sociohistorique spécifique de la région et dans le cadre de la gouvernance multi-niveaux de l'accueil.
    • Face à l'État, la solidarité envers les exilés au Pays basque nord : Rapports de force et collaborations - Thomas Sommer-Houdeville p. 65-83 accès réservé avec résumé
      Cet article vise à rendre compte de l'étendue du maillage solidaire au Pays basque nord. Il éclaire les rapports de force et les collaborations qui se nouent entre les acteurs associatifs et militants et les institutions locales sur la question migratoire. Dans ce territoire, des initiatives de solidarité venant de la société civile bénéficient du soutien d'institutions locales qui s'opposent à l'approche répressive de l'État français, au nom d'une autre vision des droits fondamentaux des personnes en exil mais aussi au nom d'une identité régionale basque traditionnellement opposée à l'État français et à l'État espagnol. De ce point de vue, la mairie de Bayonne et la Communauté d'agglomération du Pays basque mettent en place une politique locale d'accueil « rebelle » dans le cadre d'une gouvernance multi-niveaux. Ce positionnement s'intègre dans une stratégie d'institutionnalisation du territoire et un consensus qui dépasse la simple question des migrants. Cependant, ces positionnements institutionnels locaux n'empêchent pas l'émergence de tensions avec le mouvement social solidaire.
    • Accueillir et accompagner les migrants à Grenade (Espagne) : Les mobilisations associatives et citoyennes face aux limites des politiques migratoires - Céline Véniat p. 85-101 accès réservé avec résumé
      À partir d'une enquête ethnographique réalisée en 2021 et 2022 auprès des acteurs associatifs à Grenade, en Andalousie, mon article décrit les mobilisations associatives et citoyennes en faveur de l'accueil des migrants, en décrivant l'articulation entre les différentes formes d'engagement des acteurs au niveau local et les pratiques mobilisées pour interpeller le pouvoir municipal et coopérer avec ce dernier. Mon enquête, qui documente également les parcours d'accompagnement des migrants et la répartition des missions assurées par les différents acteurs au niveau local, donne aussi à voir les pratiques de solidarité citoyenne mises en œuvre pour pallier les insuffisances des dispositifs d'accueil institutionnels.
    • S'opposer, collaborer, concéder. À Avignon, une association d'accueil des migrants aux prises avec les acteurs institutionnels - Jérémy Baudier, Évangeline Masson-Diez, Amandine Spire p. 103-118 accès réservé avec résumé
      Depuis le mois de décembre 2018, l'association Rosmerta héberge en plein centre-ville d'Avignon des jeunes exilés et des familles de migrants. Propriété du diocèse d'Avignon, le bâtiment abritant les personnes accueillies est occupé dans le cadre d'une « réquisition citoyenne » portée par des bénévoles. Cependant, depuis avril 2022, les occupants sont sous la menace d'une expulsion. L'association, devenue un acteur majeur dans le domaine de l'accueil des migrants à l'échelle locale, réfléchit à la pérennisation de cette initiative et à la transformation du lieu d'accueil dans un contexte politique particulier entre une mairie silencieuse, une Église aux positions changeantes et une préfecture discrète. Cet article, qui repose sur une recherche-action collaborative, interroge les rapports qu'entretient avec les institutions cet acteur associatif tributaire de l'évolution des rapports de pouvoir à l'échelle locale. Trois modalités d'interaction se déploient autour et à partir du lieu d'accueil : l'opposition aux pouvoirs publics et religieux, la collaboration et la concession. Face à l'absence d'une politique municipale d'accueil des exilés, quels acteurs sont sollicités pour accompagner les habitants et s'opposer aux politiques ? Comment ce lieu d'accueil créé par Rosmerta, en tant qu'espace de stabilisation et d'ancrage de l'action, transforme-t-il les relations et interactions de l'association avec les institutions ?
    • La gouvernance des immigrés à l'échelle de la ville : le concept d'« adminigration » - Susan Coutin, Walter Nicholls, Hilary Sanders, Niandou Touré p. 119-132 accès réservé avec résumé
      Cet entretien revient sur le concept d'« adminigration » avec Susan Coutin et Walter Nicholls, professeurs à l'université de Californie à Irvine. Les deux chercheurs expliquent la pertinence de ce concept qu'ils définissent comme « la gouvernance des immigrés par le biais de politiques et de programmes à l'échelle de la ville, qu'ils soient ou non explicitement axés sur les immigrés ».
    • Bibliographie sélective - p. 133-142 accès libre
  • Varia

    • « J'ai plus de culture(s) que les autres » : L'expérience privilégiée de la mixité d'un enfant d'origine binationale résidant au Maroc - Gwendolyn Gilliéron p. 145-162 accès réservé avec résumé
      En s'appuyant sur une approche biographique, le présent article discute l'importance de la perception sociale de la mixité dans l'expérience des enfants de couples mixtes au sein de la société marocaine. La binationalité représente le point de départ pour étudier, dans un premier temps, la transmission intergénérationnelle de la mixité parentale à l'enfant et, dans un second temps, la façon dont l'enfant développe son identité. L'article dresse le portrait d'un jeune Franco-Marocain (mère marocaine, père français) résidant à Rabat et présente son rapport à la mixité. En croisant le récit de vie de ce jeune homme avec celui de son père, nous examinerons les « négociations » intergénérationnelles entre le père et le fils. Nous montrerons comment ce jeune franco-marocain développe, en matière d'identité, une « stratégie du caméléon » pour valoriser son origine mixte, ce qui lui permet non seulement de se conformer au projet identitaire de son père, mais aussi de se positionner par rapport à la perception sociale de l'altérité au gré de ses intérêts. Nous verrons également que l'origine maroco-européenne joue un rôle déterminant dans l'expérience de la mixité, car ce jeune homme profite d'une situation sociale privilégiée au sein de la société marocaine. Son récit de vie nous donne à voir que la « négociation » identitaire des enfants issus de couples mixtes est un processus dynamique et non linéaire, qui prend en compte non seulement le projet identitaire parental mais aussi le contexte social local.
  • Note de lecture

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