Contenu du sommaire : L'identité européenne, entre science politique et science fiction

Revue Politique européenne Mir@bel
Numéro no 30, avril 2010
Titre du numéro L'identité européenne, entre science politique et science fiction
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • L'identité européenne, entre science politique et science fiction. . Introduction - Duchesne Sophie p. 7-16 accès libre
  • Le tournant identitaire des études consacrées aux attitudes à l'égard de l'Europe. . Genèse, apports, limites. - Belot Céline p. 17-44 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Malgré l'ancienneté des déclarations politiques relatives à l'identité européenne, l'analyse sociologique du processus d'identification des citoyens européens à l'entité politique européenne n'a vraiment pris corps qu'au tournant des années 2000. Les analyses quantitatives ont alors produit nombre de travaux visant à mieux prendre en compte la dimension affective - par opposition au soutien fondé sur l'évaluation et l'utilité - des attitudes à l'égard de l'intégration. L'article montre comment ces travaux convergent à la fois dans leurs résultats (la multi-dimensionnalité de ces attitudes, la persistance des variables sociales et l'importance du contexte national, l'identification à l'Europe entretenant des liens forts mais complexes avec l'identification à la nation) et dans leurs limites. Il permet de pointer le caractère lacunaire et limitatif des données quantitatives disponibles et rend compte de la difficulté d'analyser un phénomène aussi contextuel que l'identification à l'Europe.
    The identity shift in studies dealing with attitudes towards Europe. Origins, contributions, limitations. Despite the early appearance of political declarations concerning European identity, the sociological analysis of the identification processes of citizens towards their new Union only started to take shape in the first years of the 21st century. Quantitative analysis thus led to many studies aiming to take into account the affective or emotional dimension of attitudes to integration - in opposition to support based on evaluation and utility. This article shows how these studies converge both in their results (the multidimensionality of these attitudes, the persistence of social variables and the importance of the national context, identifications with Europe maintaining strong but complex relations to the nations) and in their limitations. They draw attention to the lacunae and the limitations in the quantitative data available and reflect the difficulty in analyzing a phenomenon that is as context-dependant as identification to Europe
  • Unpacking European identity - Diez Medrano Juan p. 45-66 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Déconstruire l'identité européenne La littérature a traité l'identité européenne sans prêter beaucoup d'attention au sens que les gens donnent à cette expression lorsqu'ils l'utilisent. Cet article est centré sur les processus d'identification. Les données de sondage sur l'identification des Européens tendent à montrer qu'elle est stable et faible. Or la réalité est plus décevante. Cet article repose sur des données qualitatives recueillies en Allemagne, en Espagne et au Royaume-Uni vers la fin des années 1990. Elles montrent que les Européens, lorsqu' ils déclarent s'identifier en tant que tels, veulent dire des choses très différentes. Les significations qu'ils attribuent à cette identification ressemblent rarement à celle que postulent les chercheurs.
    The literature has discussed European Identity without much attention to what individuals mean when they use this term. This article focuses on the identification processes behind this expression. Data on the level of identification among European people show that it is both stable and low. Yet the reality is grimmer. This article draws on qualitative research conducted in Germany, Spain, and the United Kingdom in the late 1990s. The data from this qualitative research shows that Europeans mean many different things when they say that they identify as Europeans. Very seldom do these meanings agree with the researchers' expectations of what it means to identify as European.
  • Europe between integration and globalisation social differences and national frames in the analysis of focus groups conducted in France, francophone Belgium and the United Kingdom - Duchesne Sophie, Haegel Florence, Frazer Elizabeth, Van Ingelgom Virginie, Garcia Guillaume, Frognier André-Paul p. 67-105 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    L'Europe entre intégration et globalisation. Différences sociales et cadres nationaux dans l'analyse d'entretiens collectifs organisés en France, en Belgique francophone et en Angleterre. Le tournant qualitatif qu'ont connu les études européennes à la fin des années 1990 devait permettre d'approfondir la nature des relations que les citoyens de l'Europe entretiennent avec leur Union, et notamment de mieux prendre en compte les dimensions émotionnelle et identitaire. L'enquête comparative par entretiens collectifs dont nous rendons compte dans cet article met au contraire en évidence la forte indifférence à l'égard de l'intégration européenne qui caractérise les groupes populaires et ce, dans les trois pays de l'enquête. Cette indifférence s'explique notamment par le fait que les cadres nationaux de compréhension du processus d'intégration tendent à le noyer dans la globalisation. Le « dissensus contraignant » redouté par les spécialistes des études européennes ne concerne que les groupes les plus éduqués et surtout les plus politisés. Le miroir grossissant de cette approche très qualitative ne permet donc pas de mieux observer l'émergence d'une identité européenne, au contraire. Il conduit à souligner la diversité des processus d'appropriation ou de réaction à l'intégration et l'absence d'autonomie du niveau européen par rapport aux niveaux national et mondial dans les représentations des citoyens.

    European studies experienced a qualitative turn at the end of the 1990s. This was intended to facilitate the deeper investigation into the nature of the relationship that European citizens have with their Union and more particularly it was supposed to better account for the emotional and identity dimensions of this relationship. The comparative research presented in this article, based on focus groups, show on the contrary the clear indifference towards European integration that characterizes working class people in the three countries studied. We explain this indifference notably by the fact that national framing of the integration process tends to drown it in globalization. The “constraining dissensus” dreaded by European Studies scholars concerns only the more educated and above all the more politicized of the participants. The magnifying glass that this qualitative approach provides us thus does not allow us to better observe the emergence of European identity. On the contrary, it leads us to emphasize the diversity of the appropriation or reaction processes to European integration as well as the lack of autonomy of the European level in relation to the national and global levels in the representations of citizens.
  • « Plutôt l'UEFA que l'UE ! ». . (dés-)enchantement de l'identification à l'Europe des jeunes de milieux populaires issus de l'immigration - Weill Pierre-Edouard p. 107-130 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Distant et peu réfléchi, le rapport d'identification à l'Europe des jeunes Français de milieux populaires issus de l'immigration est propice à l'ambivalence, entre enchantement et désenchantement. L'approche qualitative adoptée permet de mettre en valeur les mises en récit d'un sentiment d'appartenance à l'Europe, fondées sur la mobilisation d'expériences sociales aux frontières du politique, qui passent souvent par les affects. L'identification à une communauté politique européenne des jeunes Français de milieux populaires issus de l'immigration, renvoie d'abord à l'adhésion à un socle de valeurs humanistes, dont le football apparaît comme le principal vecteur. Cette identification passe ensuite par un certain désenchantement lorsque les enquêtés évoquent leurs croyances religieuses, ou celles de leurs pairs, comme mises à l'index pour leur incompatibilité avec certaines valeurs dominantes. La possibilité d'un ré-enchantement nous introduit cependant moins à une logique de « choc des cultures », que de cumul des identifications nationale et européenne.
    “UEFA rather than EU !”. (Dis) enchantment in identification with Europe among young working class people of migrant origin. Being both remote and not thoroughly thought out, the identification with Europe among young French people of migrant origin in low socio-economic areas is conducive to ambivalence : between enchantment and disenchantment. Our qualitative approach allows us to analyze the narratives on a feeling of belonging to Europe, based on social experiences at the fringes of the political, which often draw on affect. For young French people of migrant origin in these areas, identification to a European political community is often linked to subscribing to a set of humanist values of which football is the main vehicle. A certain disenchantment is expressed when interviewees perceive religious beliefs – their own or those of their peers – as ostracized because of their incompatibility with dominant values. However, the possibility of a re-enchantment brings us to more the combination of national and European identification than to a “clash of cultures”.
  • One thing leads to another : European and national identities in french school children - Throssell Katharine p. 131-152 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    De fil en aiguille : l'identité nationale et l'identité européenne chez les écoliers français Cet article se veut une contribution au débat théorique sur la notion de l'identité européenne. Il s'appuie sur des données qualitatives originales et approfondies, récoltées lors d'une enquête sur l'apprentissage de la nation par les jeunes enfants en France. Il suggère qu'il semble bel et bien exister une forme d'identité européenne chez ces enfants, mais qu'elle diffère de manière importante dans sa nature et sa fonction de leur identité nationale. L'identité européenne procède d'une auto-identification des enfants « comme » Européens, et non avec l'Europe. Il s'agit d'une identité individuelle, qui ne renvoie pas à un collectif et se nourrit de connaissance plutôt que d'expérience vécue et d'imagination. L'identité européenne de ces enfants, nés dans une Europe intégrée, apparaît ainsi comme un prolongement de leur nationalité : ils sont Européens parce qu'ils sont français. Les fortes différences de nature entre ces deux identités expliquent leur absence d'antagonisme.
    This article aims to contribute to the theoretical understanding of European identity in drawing on material from an original in-depth qualitative study on the learning of the nation by young children in France. It suggests firstly that there seems to be a form of European identity that is operating for these children, but that it is very different to their French national identity. European identity proceeds from a self-identification of the children “as” Europeans and not “with” Europe. For them it is thus a personal identity, which does not refer to a collective, and which feeds on knowledge rather than experience and imagination. The European identity of these children, born in an already integrated Europe, seems to be a continuation of their nationality : they are European because they are French. The fact that these identities appear to differ in both nature and function contributes to their lack of antagonism.
  • L'Europe au tableau noir. . Comment les instituteurs français enseignent-ils l'Union européenne aujourd'hui ? - Bozec Géraldine p. 153-186 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Cet article propose une analyse de la manière dont l'Union européenne est enseignée aujourd'hui par les instituteurs français. Il montre que les programmes scolaires ne mettent pas en relief l'Union européenne comme communauté politique, la présentant essentiellement comme une collection de pays sans signification spécifique. Ils ancrent de manière prévalente le cadre national dans les repères des enfants, tout en faisant une nouvelle place à un universalisme associé désormais au monde entier. Les instituteurs témoignent du même tropisme national dans leur enseignement, mais cette attitude relève avant tout de routines professionnelles car des clivages idéologiques importants existent entre eux sur la nation et sur son importance. Des différences d'attitudes envers l'Union européenne sont aussi repérables, mais elles se heurtent au poids des programmes scolaires et des ouvrages pédagogiques, au refus de faire entrer la politique dans la classe et au caractère relativement flou du projet européen aux yeux des instituteurs. Au final, ces logiques combinées rendent l'UE difficile à traduire sur un plan pédagogique autrement qu'en la présentant à travers les pays qui la composent.
    Europe on the blackboard. How do French primary teachers teach the European Union today ? This article offers an analysis of the way French primary teachers teach Europe today. It shows that the school curriculum does not emphasize the EU as a political community, but rather presents it as a collection of countries without a specific signification. The curriculum emphasizes the prevalence of the national frame in the orientations of children, whilst according a new place to a vision of universalism now related to the global world. The teachers themselves demonstrate this same orientation towards the national level in their teaching, but this attitude is more a result of professional routines because significant ideological cleavages exist between them concerning the nation and its importance. It is also possible to identify different attitudes towards the EU, but these attitudes come into conflict with the weight of the school curricula and teaching materials. They also conflict with the essentially blurry notion of the European project in their eyes and the refusal to engage in politics in the classroom. Finally, the combination of these different rationales renders the EU difficult to transpose into a pedagogic project beyond simply presenting it via its different constituent countries.
  • European identity and european citizenship in three ?eurocities? : a sociological approach to the European Union - Favell Adrian p. 187-224 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Identité et citoyenneté européennes dans trois « Eurocités ». Une approche sociologique de l'Union Européenne. Ce texte complète le livre Eurostars and Eurocities dans lequel sont analysées les pratiques et les sentiments de ceux qu'on peut considérer comme l'archétype des nouveaux Européens, à savoir, les Européens mobiles partis s'installer dans un autre pays de l'UE. La recherche repose notamment sur soixante entretiens avec des résidents des trois points centraux de la mobilité européenne que sont les trois « Eurocités » : Amsterdam, Londres et Bruxelles. L'article analyse les opinions sur l'Europe de ceux qui sont partis, le plus souvent dans le désir d'échapper au cadre étroit de leur nation d'origine. Il montre la faible consistance des attitudes des Eurostars à l'égard de l'UE, qui contraste avec la réalité de l'usage intensif qui est le leur des possibilités nouvelles qu'elle offre à ses citoyens. Sauf pour ce qui touche aux droits politiques ouverts par le Traité de Maastricht : les Eurostars ne votent pas dans les villes où ils sont installés, et s'ils s'intéressent à la politique, c'est pour la majorité d'entre eux celle de leur pays d'origine. C'est dans leur vie quotidienne, en tant que consommateurs, voisins, usagers des services publics locaux et entrepreneurs culturels qu'ils exercent leur citoyenneté européenne. C'est ainsi qu'ils légitiment le projet européen, plutôt qu'en développant une soi-disant « identité européenne », mettant ainsi en question le fameux « déficit démocratique » de l'Union européenne.
    This text is a complement to the book Eurostars and Eurocities in which the practices and sentiments of those who might be considered archtypal new Europeans are analysed - that is, the views of the ultra-mobile Europeans who have moved to live and work and work in another member state of the EU. The research is based on 60 interviews with residents of three of the major hubs of European mobilty : the “Eurocities” of Amsterdam, London and Brussels. Focusing on those who moved, most often because of a desire to get away from the restrictive circumstances they felt in their own home country, the article analyses the opinions of these individuals about Europe. It shows the low consistency of their attitudes towards the EU, which contrasts with their intense usage of the new possibilities that the EU offers its citizens. This however is not the case concerning the political rights guaranteed by the Maastrict Treaty. Eurostars rarely vote in the cities where they live, and if they are interesteed in politics, for the majority it is politics in their home country. It is in their daily life, as consumers, neighbours, public service users and cultural entrepreneurs that they exercise their European citizenship. This is also how they legitimate the European project, rather than in developing a so-called “European identity”. The findings thus end by questioning arguments concerning the notorious “democratic deficit” of the EU.
  • Chantiers de recherche transfert d'idée et résistances au changement : le cas de la banque centrale européenne après la crise. . Questionnement scientifique et objectifs de la thèse - Fontan Clément p. 225-234 accès libre
  • Lectures critiques - Bérard Yann p. 235-239 accès libre
  • Lectures critiques - Laurens Sylvain p. 241-243 accès libre
  • Erratum - p. 247 accès libre