Contenu du sommaire : L'Italie du politique
Revue | Pôle Sud |
---|---|
Numéro | N°19 - 2003 |
Titre du numéro | L'Italie du politique |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
L'Italie du politique
- Franchir les Alpes. Regards vers la science politique italienne dans les années de la transition - Christophe Roux p. 3-26 Cet article présente le dossier sur l'Italie, nourri des contributions de politistes transalpins, en revenant sur le regard dominant traditionnellement porté sur la politique dans ce pays et en relevant l'attention modérée qui lui a été portée par la science politique française. La mutation du régime avec le passage à la "Deuxième République" dans les années 1990 a aussi correspondu à un accroissement du nombre d'études françaises sur l'Italie et une diversification des approches. Toutefois, par-delà le cadre français, les études sur la transition italienne restent dans la continuité d'une perception faisant de la Péninsule un cas de démocratie déviante. C'est autour de l'étude de la portée du changement (la "normalisation") que s'oriente désormais une part substantielle des travaux de science politique sur l'Italie, comme l'illustrent les articles qui sont ici présentés.This article introduces the review's file on Italy reminding the traditional perception that has prevailed on Italian politics in mainstream political science for some decades. More specifically it performs a review of the French political science literature which records a rather weak attention dedicated to Italy during the postwar period. The transition towards a "Second Republic" in the 1990s is not only a deep political change but also an academic revolution within French political studies on Italy that have become more numerous and more diversified. However, beyond the French academic production, Italy is still largely considered as a deviant case among Western democracies and most of the current studies — like those "made in Italy" includes in this issue of Pôle Sud— try to assess to what extent a genuine political transformation has been achieved
- Après trois élections : le système politique italien à dix années de la crise - Maurizio Cotta p. 27-45 Trois élections après la crise politique de 1992-94 et la fin de la "Première République", il est permis d'évaluer dans quelle mesure une politique nouvelle s'est instaurée en Italie. En analysant les élections de 1994, 1996 et 2001, l'article souligne les évolutions accomplies. Les éléments les plus importants de changement concernent la structure du système de partis (fin de l'hégémonie démocrate-chrétienne et opposition de deux pôles de centre- gauche et centre-droit) et la constitution des gouvernements (désormais directement influencée par les élections). En dépit de ces changements vers un exécutif plus fort et plus stable, le nouveau système politique italien n'a pas surmonté des problèmes sérieux qui en fragilisent la consolidation : la fragmentation partisane persistante, la condition très particulière du leader de la coalition de centre-droit (S. Berlusconi) qui combine un rôle politique de premier plan avec une position d'entrepreneur leader dans le domaine des médias (source de conflit d'intérêts) et en conflit ouvert avec le système judiciaire, le troisième et la difficulté du centre-gauche capable de dépasser les divisions internes de son camp.Three elections after the political crisis of 1992-94, which has brought about the end of the Italian "First Republic", it is time to try to assess to what extent a new type of politics has consolidated in Italy. By analysing the elections of 1994, 1996 and 2001, this article underlines what has been accomplished during this period The most important elements of change have concerned the structure of the party system and the making of governments. The old party system having as its centre the Christian Democracy has given way to a new one based on two large coalitions of centre-right and centre-left. In spite of these changes which make for stronger and more stable executives, the new Italian political system has not yet overcome some serious problems which weaken its consolidation: the first is the persisting fragmentation of parties (behind the two big coalitions there are still as many as ten parties), the second is the very special condition of the leader of the centre-right Berlusconi combining its prominent political role with its position as the leading entrepreneur in the media field with all the conflicts of interest this entails plus the continuing conflict with the judiciary, the third is the difficulty of the centre-left in finding a leader capable of overcoming its internal divisions.
- La normalisation introuvable : la démocratie italienne de Silvio Berlusconi - Alfio Mastropaolo p. 47-61 Depuis l'arrivée au gouvernement de Silvio Berlusconi, l'Italie subit des transformations importantes qui touchent la substance même de son régime démocratique. S'il est exagéré de parler de régime autoritaire, la définition des rapports entre majorité et opposition, le conflit ouvert avec la magistrature, la mainmise sur les médias nationaux et la confusion entre puissance économique et pouvoir politique constituent des éléments inquiétants. En particulier, la séparation des pouvoirs semble être menacée. L'avènement d'une "normalisation" de la politique italienne grâce à la "Deuxième République" peut donc sembler douteux.Italy has been undergoing important changes that concern the heart of its democratic regime since Berlusconi's victory. If one cannot seriously define current Italy as an authoritarian regime, the definition of the relationships between majority and opposition, the open conflict with the judiciary power, the control of the médias and the confusion between economic activities and political power can be seen as worrying elements. Especially the separation of powers seems to be threatened. That is why the "normalization "of Italian politics thanks to the "Second Republic" may seem dubious.
- La dissociation italienne. Le monde du décisionnisme majoritaire et celui de la concertation - Luigi Bobbio p. 63-78 L'Italie apparaît aujourd'hui dissociée en deux mondes différents qui se présentent séparés et antithétiques. Le premier est celui de la politique, en particulier au niveau national. Le second est celui des politiques publiques, en particulier au niveau local. La première sphère est dominée par la règle majoritaire poussée à l'extrême, la seconde est dominée par le principe de l'accord et du partenariat intergouvernemental. L'article examine les différences entre les deux mondes et suggère que, alors que le premier est celui pris en compte par l'opinion publique, on devrait aussi considérer sérieusement le second, dès lors que les processus de gouvernance qui interviennent en son sein sont de grande importance pour la production des politiques publiques. Il discute enfin le fait de savoir si les pratiques intervenant dans le second monde peuvent contrer les tendances populistes et majoritaires du premier.The Italian polity appears to be dissociated into two different worlds which are separated and antithetical. The first world is the world of politics specially at the national level. The second world is the world of policies specially at the local level. The first sphere is dominated by the rule of majority, in a very extreme version. The second sphere is dominated by the principle of agreement and intergovernmental partnership. The article examines the differences between the two worlds and suggests the while the first world is normally taken into account by public opinion, we should consider seriously also the second one, as the processes of governance that occur within it are of great importance for the delivery of public policies. Finally the article discusses whether the practices within the second world can hinder the populist and majoritarian tendencies of the first one.
- Les effets de l'européanisation sur la représentation politique en Europe du sud - Leonardo Morlino p. 79-96 Cet article s'interroge sur la modification de la représentation en Europe du Sud induite par le processus d'européanisation. Les deux premières sections donnent une définition des deux phénomènes clés qui sont reliés ici, c'est-à-dire la représentation et l'Européanisation. Elles suggèrent également les quelques mécanismes possibles qui peuvent compter pour cette connexion. La troisième partie présente les principales hypothèses à vérifier empiriquement afin de répondre aux questions fondamentales posées par cette recherche. Les quatrième et cinquième parties précisent le temps et l'espace de la recherche, révèlent les Fonds structurels comme étant la politique au cœur de cette étude, passent en revue les principaux résultats de la précédente recherche en faisant surtout référence au cas de l'Italie. La sixième partie présente, quant à elle, les résultats de la recherche principale faite sur le cas italien mais dans une perspective comparative. La conclusion fait un retour sur le chemin parcouru et celui qu'il reste à parcourir.This article ask if there has been a reshaping of territorial representation in Southern Europe brought about by the ongoing process of Europeanization. The first two sections provide a definition of the two key phenomena that are connected here, representation and Europeanization, and suggest a few possible mechanisms that may account for that connection. The third section presents the main hypotheses to control empirically in order to reply to the key questions of the research. The fourth and fifth ones clarify time and space of the research, indicate the Structural Funds as the policy at the core of research, review the main results of previous research on either a similar topic or the same one. The sixth section presents the preliminary results of the research mainly with reference to Italy, but in comparative perspective. The concluding remarks look back to the path covered and forward to the path still to be traveled
- Le policy change dans la décennie de transition : pressions exogènes et contingence, opportunisme et apprentissage, décideurs dans l'intérêt public - Giliberto Capano p. 97-112 Cet article donne un compte rendu interprétatif de dix ans d'un processus continu de changement au sein des politiques publiques italiennes durant la "décennie de transition". Le changement inattendu est examiné en se concentrant sur quatre facteurs pertinents : le processus d'européanisation, la dramatique crise politique, l'opportunisme des acteurs et les dynamiques d'apprentissage. Cette analyse suggère que le policy change italien a plus été mené par l'opportunisme des acteurs politiques - contraint par une conjoncture critique - plus que par un policy learning conscient. Ainsi, la capacité d'innovation des politiques publiques est encore sous-développée, ce qui pourrait ne pas être sans risque pour le futur du pays.This article gives an interpretive account of a ten years process of continuous change in Italian public policies, during the so called "transition decade". This unexpected policy change is examined focussing on four relevant factors : the europeanisation process, the dramatic political crisis, the actors'opportunism and the learning dynamics. What the analysis presented suggests is that the Italian policy change has been led more by the political actors 'opportunism — constrained by the critical juncture — rather then their conscious policy learning. So the policy innovation capacity is still underdeveloped and this could be very dangerous for the future of the country.
- Les think tanks font-ils la différence dans le système politique ? - Sonia Lucarelli, Claudio M. Radaelli p. 113-129 Cet article se propose de discuter le rôle des instituts de recherche indépendants {think tanks) dans le système politique italien. Nous commencerons par nous demander ce que peut apporter l'étude des think tanks à notre compréhension des politiques italiennes et du changement dans l'action publique, et ainsi nous informer sur les instituts de recherche et les défis qu'ils affrontent. Nous soutenons qu'ils ont à faire face à un environnement plus compétitif qu'auparavant. Ensuite, nous nous appuierons sur l'approche par coalition de cause afin d'examiner le rôle de ces groupes de réflexion dans les changements majeurs de la vie politique et de l'action publique. Nous allons présenter deux cas d'études, à savoir le changement des lois électorales et l'avancée vers l'Euro. Les think tanks en tant qu'organisations n'ont pas joué un rôle significatif dans les réformes électorales, bien que certains responsables de ces groupes s'y soient personnellement engagés. Nous tenterons d'expliquer pourquoi les think tanks sont restés quelque peu en périphérie de ce débat. À l'inverse, dans l'arène des politiques économiques, les think tanks ont fonctionné comme forum de politiques publiques. Ils ont ainsi facilité l'interaction sociale entre intellectuels et l'émergence d'un discours de politique économique basé sur le paradigme de "finances saines" et de "convergence EMU" (Economie and monetary union, union économique et monétaire). Nous conclurons par quelques suggestions en vue de prolonger ces recherches: nous pensons que l'analyse des groupes de réflexion et du savoir acquis dans la mise en œuvre des politiques publiques devrait être intégrée aux approches théoriques du changement dans l'action publique, plutôt que de venir alimenter une autre "industrie familiale" de recherches sur un sujet spécifique et limité.The article discusses the role of independent research institutes (think tanks) in the Italian political system. We first argue why ajveus on think tanks can add to our understanding of Italian politics and policy change, and then provide information on research institutes and the challenge they face. We find that they face a more competitive environment than in the past. Next, we draw on the advocacy coalitions approach to examine the role of think tanks in major political and policy change. We present two stylised case studies, that is, the change of the electoral laws and the run-up to the Euro. Think tanks as organisations have not played a significant role in electoral reforms, although some think tank leaders have been personally engaged. We explain why think tanks have been somewhat at the periphery of this debate. By contrast, in the arena of economic policy, think tanks have operated as policy fora. They have thus facilitated social interaction amongst intellectuals and the emergence of an economic policy discourse based upon the paradigm of 'sound finance' and EMU (Economic and Monetary Union) convergence. We conclude with some suggestions for further research on think tanks: we think that the analysis of research institutes and policy-oriented knowledge should be integrated in theoretical approaches to policy change, rather than fuelling yet another 'cottage industry' of studies on a specific and very limited topic.
- Changement et continuité dans la culture politique italienne - Pierangelo Isernia p. 131-153 Un certain nombre de travaux de sciences sociales ont tôt mis en évidence un paradigme "familaliste-paroissial-localiste" pour caractériser la culture politique italienne. Ce paradigme a été soumis à la critique dans les années 90. Cet article se propose de le tester empiriquement sur la base des sondages disponibles. Il en ressort que le sentiment d'identité nationale italien n'est faible que si l'on le considère sous son aspect strictement civique ; si l'on inclut l'idée de faire partie d'une communauté culturelle, alors celui-ci se révèle nettement plus consistant, et l'Italie apparaît comme une nation moins "anormale" qu'il n'y paraît.A number of social sciences studies have built a "familialistic-parochial-localistic" paradigm since the early 1960s in order to characterise the Italian political culture. Such a paradigm was criticised in the last decade. This article wants to test it empirically on the basis of available opinion polls. It appears that the feeling of national identity is weak if we consider it only under its "civic" aspect (i.e. the satisfaction vis-à-vis the political system) ; once we include the idea of being part of a cultural community, then such a feeling is clearly quite more significant and Italy appears as a more "normal" nation than it usually seems.
- Le clientélisme revisité. La politique clientéliste et le développement économique dans l'Italie de l'après-guerre - Simona Piattoni p. 155-174 En interprétant le clientélisme comme stratégie politique pouvant être adoptée rationnellement, cet article propose une alternative à l'approche culturaliste. Ainsi, en se focalisant sur les choix opérés par les clients et les patrons dans certaines configurations du pouvoir local, sont identifiés quatre types de clientélisme ayant fonctionné dans le sud de l'Italie après la deuxième guerre mondiale, ainsi que les conséquences économiques de chacun d'entre eux.By interpreting clientelism as a political strategy which can be rationaly adopted, this paper proposes an alternativ to the culturalist approach. In this way, by examining the choices of patrons and clients under given constellations of local power, it has identified four types of clientelism that obtained in southern Italy in the postwar period and the economic consequences entailed by each.
- Globalisation et mouvements sociaux. Hypothèses à partir d'une recherche sur la manifestation contre le G8 à Gênes - Donatella Della Porta p. 175-195 Cet article se base sur une recherche menée lors des manifestations anti-mondialisation à Gênes en juillet 2001. Il analyse une image de la globalisation comme un phénomène essentiellement néo-libéral dont on a cru jusque-là qu'il provoquerait une fin des mouvements sociaux. L'auteur défend au contraire l'idée que celle-ci a offert des ressources et des contraintes nouvelles à une action collective qui met en lumière une demande de participation politique contestant le modèle classique de démocratie représentative.This paper is based on a research led during the anti-globalisation protest in Genoa in July 2001. It challenges the dominant view of globalisation as a negative perspective for social movements. The author argues that this phenomenon has brought both resources and constraints for collective action that emphasises a will of political participation and contest the classical scheme of democratic representation.
- Intelligence de l'Italie - Marc Lazar p. 197-208 L'auteur analyse de manière synthétique les différentes contributions présentées dans ce numéro par les auteurs italiens. Il rappelle d'abord que la science politique italienne est confrontée à une situation de crise inédite des institutions de son pays qu'elle est contrainte d'analyser "à chaud". Il montre ensuite qu'aujourd'hui comme hier, la science politique affronte deux des questions les plus classiques qui se posent à l'Italie: celle de la nation et de la nature de la démocratie. Enfin, il constate que la science politique italienne est obligée d'analyser avec de nouvelles méthodes et de nouvelles hypothèses la transition incertaine qu'affronte le pays, et l'énigme que représente le cas de Silvio Berlusconi.The author briefly analyses the articles written by Italian political scientists. He first reminds that Italian political science must face an original situation of crisis of the country's institutions (of which it must give an instant-analysis). Then he shows that, still today, two main classical problems are given: the question of nationhood and the question of the nature of democracy. Finally he states that Italian political science must work with new methods and new hypothesis in order to assess an uncertain transition and the specific case represented by Silvio Berlusconi.
- Franchir les Alpes. Regards vers la science politique italienne dans les années de la transition - Christophe Roux p. 3-26
Lectures
- Mireia Grau, Araceli Mateos (dir.) : Análisis de Políticas Públicas en España : Enfoques y casos. - Emmanuel Négrier p. 211-212
- Joan Subirats et Raquel Gallego (dir.) : Veinte años de autonomías en Espana. leyes, politicas publicas, instituciones y opinion publica. - Emmanuel Négrier p. 213-215
- Olivier Masclet, préface d'Olivier Schwartz : La gauche et les cités. Enquête sur un rendez-vous manqué - Marie-Carmen Garcia p. 215-217
- José Alvarez Junco : Mater dolorosa. La idea de España en el siglo XIX - Hubert Peres p. 218-220
Revue des revues
- Revues italiennes : Rivista Italiana de Politiche Pubbliche n° 3, 2002; Rivista Italiana di Scienza Politica n° 1, 2003; Stato e Mercato n° 1, 2003. - Filippo Tronconi p. 223-224
- Revues espagnoles : Revista de Estudios Políticos, avril-juin 2003; Revista Española de Ciencia Política n° 6, avril 2002. - Philippe Maffre, Marion Réau p. 225-226
Comptes rendus de congrès
- Le congrès annuel de la Société Italienne de Science Politique à Trente (septembre 2003) - Luca Verzichelli p. 229
- 6e congrès de l'Association Espagnole de Science politique et de l'Administration : "Gouverner en Europe, gouverner l'Europe". Barcelone 18-20 septembre 2003. - William Genieys, Jean Joana, Philippe Maffre, Emmanuel Négrier, Marion Réau, Piere Valarié, Cécilé Franck, J. Rodriguez, J. Moreno p. 230-233