Contenu du sommaire : La Chine et l'Asie centrale
Revue | Relations internationales |
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Numéro | no 145, printemps 2011 |
Titre du numéro | La Chine et l'Asie centrale |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Introduction - Hugues Tertrais p. 3-11
- Si proches, si lointaines : l'Asie centrale et la Chine - Vincent Fourniau p. 13-26 Malgré quelque 3 000 kilomètres de frontières communes avec la Chine, les États d'Asie centrale ne lui doivent pratiquement aucune influence culturelle ou politique. Plus lointaine pour elle que la Haute Asie, qui lui a donné plusieurs dynasties, l'Asie centrale a cependant hérité de l'Empire mongol et de son partage au XIIIe siècle. En tant qu'aire historique propre, à la fois fragmentée et islamisée, elle s'est construite comme un espace bien distinct du Pays du milieu. Beaucoup plus récemment, sur le territoire conquis par les tsars, le statut fédéral de l'ex-Union soviétique lui a donné un cadre étatique et des élites aptes à assumer une indépendance et une existence internationale après 1991, et à structurer leur identité sur le modèle de l'État nation, notamment face à la Chine.So near, so far: Central Asia and China
Despite some 3 000 kilometers of common borders, China has hardly any cultural or political influence over the countries of Central Asia. Further away than Higher Asia, which gave China several dynasties, Central Asia has however inherited from the Mongol Empire and from its division in the XIIIth century. As a specific historical region, both fragmented and Islamified, it has constructed itself as an area quite distinct from the Middle Country. Much more recently, on the territory conquered by the Tsars, the federal status of the former Soviet Union gave it both a state framework and elites capable of assuming independence and international existence after 1991, and of structuring their identity on the model of the nation-state, notably in the face of China. - Le règlement des questions frontalières... entre la République populaire chinoise et ses voisins centrasiatiques - Thierry Kellner p. 27-51 À leur accession à l'indépendance en 1991, les républiques d'Asie centrale ont hérité du contentieux territorial et frontalier qui a opposé la République populaire de Chine à l'URSS. Contrairement au secteur oriental de la frontière sino-soviétique qui a fait l'objet d'un accord entre Moscou et Pékin en 1991, la question du secteur occidental n'était pas réglée au moment de la dissolution de l'URSS. Il n'était donc pas exclu que Pékin et les jeunes républiques d'Asie centrale frontalières de la région autonome chinoise du Xinjiang, c'est-à-dire le Kazakhstan, la République kirghize et le Tadjikistan, soient confrontées à d'importantes difficultés dans leurs relations bilatérales. Pourtant, vingt ans plus tard, des progrès décisifs ont été enregistrés sur cette question.Resolving border issues between the prc and its Central Asian neighbours
With their independence in 1991, the Republics of Central Asia inherited the border and territorial dispute which opposed the prc and the ussr during the Cold War. Contrary to the Eastern sector of the border, which was settled by an agreement between Moscow and Beijing in 1991, the question of the Western sector was not settled at the time of the dissolution of the ussr. Thus, it was not excluded that Beijing and the new Republics of Central Asia bordering the autonomous Chinese region of Xinjiang –in other words, Kazakhstan, Kirghizistan and Tajikistan– may be confronted with important difficulties in their bilateral relations. However, twenty years later, decisive progress has been made on this question. - L'Asie centrale vue de Chine - Jean-Pierre Cabestan p. 53-70 Les préoccupations de sécurité ont longtemps dominé la politique de la Chine à l'égard de l'Asie centrale. Mais les objectifs économiques et notamment énergétiques de Pékin ont progressivement et en partie modifié ses priorités. Comme au Xinjiang dans une certaine mesure, la Chine s'efforce de régler les problèmes de sécurité régionale par le développement de la coopération économique et des échanges commerciaux, bref par la prospérité. En dépit des succès enregistrés, cette stratégie butte sur de nombreux obstacles. Culturellement distants ainsi que soumis à de multiples tensions intérieures, les pays d'Asie centrale ne s'investissent pas autant que la Chine dans l'Organisation de coopération de Shanghai. La Russie non plus. Ils restent méfiants face à la politique de Pékin au Xinjiang. Le conflit d'Afghanistan, la lutte contre l'extrémisme islamique et les trafics de drogue compliquent aussi la montée en puissance de la Chine dans une région qui reste ouverte à de multiples influences extérieures.China's view of Central Asia
Security concerns have for a long time dominated China's policy towards Central Asia. However, economic and energy sector objectives have gradually changed Beijing's agenda. As in Xinjiang to a certain extent, China has tried hard to solve regional security problems through the development of economic cooperation and trade, in other words through prosperity. In spite of China's successes in Central Asia, its strategy is facing important obstacles. Culturally distant from China and challenged by multiple domestic tensions, Central Asian countries have not invested as much capital as China in the Shanghai Cooperation Organization. Neither has Russia. The region remains suspicious of Beijing's policy in Xinjiang. The war in Afghanistan, the fight against Islamic extremism and drug trafficking have also complicated China's growing power in Central Asia, a part of the world that remains open to many different outside influences. - La Chine vue d'Asie centrale : le poids des appréhensions culturelles - Marlène Laruelle, Sébastien Peyrouse p. 71-86 Cet article s'interroge sur les appréhensions culturelles liées à la Chine en étudiant un corpus de textes produits par les principaux experts sinologues centre-asiatiques, principalement mais non exclusivement kazakhs. Il part de l'hypothèse que les appréhensions culturelles forment l'un des socles sur lequel se construit de manière indirecte la prise de décision en relations internationales. Le décalage entre une présence chinoise massive sur le plan économique et géopolitique et une méconnaissance de la Chine contemporaine et de sa culture tend à susciter une production académique marquée par des inquiétudes identitaires profondes liées à ce voisinage chinois si soudain, et déjà si incontournable.China as seen from Central Asia: the weight of cultural apprehensions
This article examines the cultural apprehensions linked to China by studying a corpus of texts written by the main Central Asian Sinologists, most of whom are Kazakh. Its sets out from the hypothesis that cultural apprehensions comprise one of the bases on which decision-making in international relations is, indirectly, formed. The discrepancy between China's massive presence on the economic and geopolitical levels and Central Asia's lack of knowledge of contemporary China and its culture tends to give rise to academic works that are stamped by deep identity anxieties connected to this very sudden, and already essential, Chinese proximity. - Les recompositions de la scène politique ouïgoure dans les années 1990-2000 - Rémi Castets p. 87-103 L'ouverture du Xinjiang consécutive à la Politique de réforme, puis la chute du rideau de fer au tournant des années 1990, ont généré de nouveaux espaces d'expression et d'action pour l'opposition ouïgoure. Le rétablissement des liens entre les communautés de la diaspora et le Xinjiang, mais aussi l'arrivée de nouveaux militants ont régénéré une scène alors divisée et assoupie. Néanmoins, les évolutions rapides du contexte politique en Chine, en Asie centrale ainsi que le contexte post-11 septembre 2001 vont amener cette scène militante à se recomposer rapidement afin de répondre aux nouvelles contraintes auxquelles elle a dû faire face.The mutations of the Uyghur political scene through the 1990s and the 2000s
The opening of Xinjiang following the Policy of Reform and the dismantling of the Iron Curtain at the turn of the 1990s have generated new spaces for expression and political action among Uyghur communities. The restoration of links between diasporic circles and Xinjiang, along with the arrival of new militants, have invigorated an ageing and divided scene. However, the strengthening of the Chinese state's pressure in Xinjiang and Central Asia and the new post-9/11 context have raised new constraints that have accelerated the mutations of anticolonial networks across Xinjiang and the diaspora. - Des musulmans de langue chinoise entre Chine et Asie centrale - Élisabeth Allès p. 105-115 Les musulmans de langue chinoise appelés Douganes en Asie centrale et Hui en Chine ont une longue histoire d'adaptation dans cet espace turcophone qui se situe entre l'Asie centrale et le Xinjiang. Perçus comme Chinois par les uns et comme différents parce que musulmans par les autres, ils ont été des médiateurs entre le monde chinois et les populations locales. Toujours dans un entre-deux, ils se sont engagés au cours du XXe siècle dans des stratégies politiques dont l'objectif était bien le maintien de leur existence dans ces territoires. Cet article s'attachera à analyser les circonstances et les diverses stratégies mises en œuvre par quelques-unes des personnalités significatives de chaque côté de la frontière pour s'inscrire dans les enjeux locaux et nationaux.Chinese-speaking Muslims between China and Central Asia
Chinese-speaking Muslims, known as Tungan in Central Asia and Hui in China, have a long history of adaptation in this Turcophone area, situated between Central Asia and Xinjiang. Perceived as Chinese by some, and as different by others, because they are Muslims, they were mediators between the Chinese world and the local populations. Always in between the two, during the 20th century they engaged in political strategies so as to maintain their existence in these territories. This article analyzes the circumstances and the various strategies implemented by some of the significant personalities of each side of the border to become involved in local and national issues. - Le Club de l'énergie de l'ocs, un élément (moteur)... d'intégration régionale ? - Hélène Rousselot p. 117-132 En 1996, la Russie, la Chine, le Kazakhstan, le Kirghizistan et le Tadjikistan fondaient l'association « Shanghai 5 », convertie, en juin 2001, en une structure régionale de coopération multilatérale – l'Organisation de coopération de Shanghai. Composée de trois grands pays producteurs-exportateurs d'hydrocarbures (Russie, Kazakhstan, Ouzbékistan) et de trois pays consommateurs-importateurs (Chine, Kirghizistan et Tadjikistan), l'ocs se dote d'un Club de l'énergie en 2007. Dans ce cadre, ces pays aux intérêts à la fois convergents et conflictuels doivent élaborer des stratégies complexes. Mais ce Club de l'énergie reste un lieu de discussions et n'entre que pour une faible part dans un processus d'intégration encore très hypothétique.The Energy Club of the sco: a (driving) element of regional integration?
In 1996, Russia, China, Kazakhstan, Kirghizia and Tajikistan established the “Shanghai 5” Association, converted in June, 2001 into a regional structure of multilateral cooperation – the Shanghai Cooperation Organisation. Composed of three big energy producing and exporting countries (Russia, Kazakhstan, Uzbekistan) and of three energy consuming and importing countries (China, Kirghizia and Tajikistan), the sco set up its Energy Club in 2007. In this context, these countries with convergent and conflicting interests have to elaborate complex strategies. But this club is only a forum for discussion, and only plays a small part in a process of still very hypothetical integration.