Contenu du sommaire : Écologie et politique, vingt ans après?
Revue | Ecologie & politique |
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Numéro | no 45. 2012 |
Titre du numéro | Écologie et politique, vingt ans après? |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Éditorial
- Une politique normale dans un monde désorienté - Jean-Paul Deléage p. 5-10
Dossier : Écologie et politique, vingt ans après...
- Écologie et politique : vingt ans d'engagement, et après ? - Estelle Deléage, Denis Chartier p. 11-20
- L'écologie, vision d'avenir à l'épreuve de la realpolitik - Jean-Paul Deléage, Estienne Rodary p. 21-32
- Vingt ans de la revue Écologie & Politique, ou la volonté de peser en théorie sur l'espace de l'écologie - Frédéric Brun, Estienne Rodary p. 33-46
- Le climato-scepticisme médiatique en France : un sophisme moderne - Olivier Godard p. 47-69 Depuis 2006, en France, une nouvelle vague climato-sceptique s'est répandue dans les médias, lancée par le géochimiste et ancien ministre Claude Allègre. L'article en repère les principaux représentants et identifie les caractéristiques communes de leurs discours, au-delà de la variété des motivations individuelles. Ce climato-scepticisme médiatique n'est ni l'expression d'une controverse scientifique ni une contre-expertise, mais un sophisme empruntant avec travestissement et déformation des arguments du débat scientifique au service de visées idéologiques. L'article propose une analyse des ressorts de son succès médiatique, et souligne la convergence troublante du positionnement climato-sceptique et de celui de certains chercheurs en sciences sociales qui mettent en équivalence énoncés scientifiques et discours sociaux et rabattent les produits de la science sur les jeux d'intérêts de ses producteurs et de ses utilisateurs.Since 2006, France has known a new wave of climate skepticism in the media, initiated by the geochemist and former minister Claude Allègre. The article identifies the main advocates of this skepticism and the common features of their discourses, beyond the diversity of the individual motives. Media climate skepticism is not the expression of a scientific controversy nor a second expert evaluation, but a sophism borrowing with distortion the arguments of the scientific debate in favour of ideological aims. The article offers an analysis of the reasons of its media success, and emphasizes the disconcerting convergence of the climate skeptical positioning and that of some researchers in social sciences who equate scientific statements and social discourses, and turn the science's results down on the interests interplays of its producers and its users.
- L'interdisciplinarité entre natures et sociétés, vingt ans après : le point de vue d'une géographe engagée - Nicole Mathieu p. 71-81 Un an après Écologie & Politique, la revue Natures Sciences Sociétés (NSS) aura vingt ans. L'auteure revient sur le moment historique qui leur a donné naissance en rappelant le parallélisme de leurs objectifs : allier le politique au scientifique. L'interdisciplinarité comme pratique autour d'objets de recherche et de problèmes mettant en relation sciences de la nature et sciences sociales est le cœur de NSS. En se limitant au point de vue de la géographie, l'auteure tente d'établir un bilan par rapport aux espérances initiales.The journal Natures Sciences Sociétés (NSS) will be 20 years old next year, one year after Écologie & Politique. The author goes back on the historical moment of their birth by reminding the parallelism of their aims : combining the political with the scientific. Interdisciplinarity as a practice around research subjects and issues linking natural sciences and social sciences is at the heart of NSS. Considering only geography, the author tries to take stock of the initial expectations.
- La bioéconomie, un monde à réinventer - René Passet p. 83-91 Au moment où, par-delà les crises économiques les plus spectaculaires, ce qui se joue n'est autre que l'avenir même de la biosphère porteuse de toute vie, il est urgent de comprendre que le seul paradigme susceptible de durer sera d'ordre bioéconomique. Par « bioéconomie », il faut entendre, non point une discipline nouvelle, ni une branche supplémentaire de l'économie, mais celle-ci tout entière subordonnée au respect des mécanismes régulateurs par lesquels la biosphère assure sa reproduction dans le temps.At a time when, down the most dramatic economic crisis, what is at stake is nothing else than the future of the biosphere as the carrier of all life, we must understand that the only paradigm likely to last will be the bioeconomic order. “Bioeconomy” is not a new discipline, nor another branch of the economy, but the whole economy subordinated to the respect of the regulating mechanisms by which the biosphere ensures its reproduction.
- L'écologisme des pauvres, vingt ans après : Inde, Mexique et Pérou - Joan Martinez Alier, N'Bellia Guerchouche, Mathilde Baroudi, Charlotte Tafforeau p. 93-116 Si nous adoptons le point de vue des pauvres, nous pouvons interpréter le développement du capitalisme (ou système de marché généralisé) comme une Raubwirtschaft (ou une économie de pillage continuel et croissant) afin d'encourager l'accumulation du capital et de couvrir les dépenses des riches. Envisagés ainsi, les mouvements sociaux des pauvres ont souvent un contenu écologique (peut-être seulement implicite) lorsqu'ils tentent de maintenir les ressources naturelles en dehors de l'économie financière, commerciale, sous contrôle communautaire.If we adopt the point of view of the poor, we can interpret the development of capitalism (or general market system) as a Raubwirtschaft (or an economy of continual and increasing plundering) so as to encourage capital accumulation and cover the expenditures of the rich. So considered, the social movements of the poor often have an ecological content (maybe only implicitly) when they try to maintain the natural resources out of the financial, commercial economy, under common control.
- Rio+20 : la victoire du scénario de l'effondrement ? - Denis Chartier, Jean Foyer p. 117-130 La Conférence des Nations unies pour le développement durable de juin 2012 (CNUDD Rio+20) a déçu. Ses résultats ne sont pas en adéquation avec l'urgence écologique, sociale et économique, et aucune alternative ne semble vraiment émerger. Dans un contexte de crise économico-financière mondiale et de basculement des rapports de forces géopolitiques au profit des pays émergents, Rio+20 marque, à différents égards, un retour à une logique de realpolitik. Non seulement le multilatéralisme semble en panne, mais une vision intégrée du développement durable marque le pas face au retour à un développementalisme dur, dans un marché mondial dérégulé. La prégnance du secteur privé dans les modes de gestion de l'environnement et l'incapacité à prendre en considération la question de la finitude des ressources constituent d'autres manifestations de ce « réalisme » politique. Rio+20 marque enfin la grande difficulté des mouvements sociaux (qu'il s'agisse de ceux présents au Sommet des peuples ou dans l'enceinte de la conférence officielle) à peser sur les politiques internationales. Bien qu'il soit difficile de faire un bilan définitif de Rio+20 quelques mois après la fin de la conférence, rien ne prédispose à la structuration, pourtant urgente, des institutions et des paradigmes qui permettront de mettre en place les politiques de l'anthropocène.The United Nations Conference on Sustainable Development held in June 2012 (UNCSD Rio+20) has disappointed many participants and observers. Its results are seen as somewhat inadequate in the face of the urgency of the ecological, social and economic situations and no clear alternative has emerged. In a context of global financial crisis and of transformation of geopolitical relations in favour of emergent nations, Rio+20 marks a return to the logic of realpolitik. Not only does multilateralism seem exhausted, but an integrated vision of sustainable development is losing steam to the hard form of developmentism still promoted in the deregulated world market. The increasing presence of the private sphere in the modes of management of the environment and the incapacity of the international community of truly taking into account the finitude of resources are manifestations of this political realism. Rio+20 reveals the difficulties that social movements (be they those present at the People's Summit or those accredited to partake in the official conference) have in truly impacting on international politics. Although it is difficult to draw a definitive assessment of Rio+20 so soon after the end of the conference, nothing seems to predispose the structuration – nevertheless urgent – of institutions and paradigms that will facilitate a politics of the Anthropocene.
Variations
- La France vert clair ? - Jean-Paul Deléage p. 131-144 S'appuyant sur les travaux de Michael Bess, cet article analyse les conditions historiques de la modernisation de la France à partir de 1945 ; puis il décortique les ambiguïtés de la mise en place d'une politique d'État de l'environnement à la française à partir de 1971, dans le contexte de l'émergence de l'écologie politique.Resting on the works of Michael Bess, this paper analyses the historical conditions of the modernization of France from 1945; it then dissects the ambiguities of the implementation of a French state environmental policy from 1971, in the context of the emergence of political ecology.
- L'inégalité écologique, une notion écran ? - Salvador Juan p. 145-158 En dépit de références toujours plus abondantes sur la concentration spatiale des problèmes d'environnement et les externalités économiques dans différentes zones, la pensée écologique n'avait pas vraiment évoqué les inégalités sociales. Depuis quelques années, cette thématique envahit les revues scientifiques et les rapports administratifs. Mais ce succès passe par un flou manifeste dans une définition articulant des échelles et des questions très diverses et peut relever d'un symptôme : la compensation de l'impossible diminution des problèmes écologiques, dans le cadre de l'économie de croissance, par la réduction des inégalités sociales leur étant liées. L'article montre ce que cette notion apporte et oublie. Il insiste, d'une part, sur les lacunes dans les raisonnements et les données, d'autre part, sur les contradictions d'une perspective qui risque de conduire à une dilution des nuisances sans diminution de ces dernières et à des inégalités sociales beaucoup plus importantes, dans les années à venir, que celles qui sont aujourd'hui constatées.Despite increasing references on the spatial concentration of environmental problems or the economic externalities in various areas, the ecological thought did not really evoke the social inequalities. Since a few years, this thematic invades scientific journals and official reports. But this success lies on an obviously vague definition articulating very diverse scales and issues, and results perhaps from a symptom : the compensation of the impossible decrease of the ecological problems within the framework of the growth economy, by the reduction of the related social inequalities. This article shows what this concept brings and forgets. It insists, on one hand, on the existing holes in the reasoning and the data, and, on the other hand, on the contradictions of a prospect which is likely to lead to a dilution of the nuisances without reducing them, and to much more important social inequalities in the years to come than those that are recorded nowadays.
- La France vert clair ? - Jean-Paul Deléage p. 131-144
Sources et fondements
- Bilan de Rio - Jean Chesneaux p. 159-175
Dissonances
- Cinq propositions pour le développement durable - Matthieu Calame p. 177-184 La recherche d'une économie écologique et socialement vertueuse nécessite la mise en œuvre de cinq réformes de structure pour modifier les comportements des particuliers et des entreprises : passer du monomonétarisme au plurimonétarisme, en finir avec les sociétés à responsabilité limitée, modifier les règles comptables des entreprises, remettre en cause la propriété individuelle absolue et, enfin, trouver une alternative au consumérisme.The pursuit of an ecological and socially virtuous economy requires to carry out five structural reforms in order to modify the behaviours of the individuals and the corporations: passing from plurimoneratism to monomonetarism; getting it over with the limited companies status; changing the accounting rules of corporations; challenging absolute individual property; and finding an alternative to consumerism.
- La fronde contre le gaz de schiste : essai d'histoire immédiate d'une mobilisation éclair (2010-2011) - Pierre-Marie Terral p. 185-194 Après plus d'un an de mobilisations, cet article propose de revenir sur l'éclosion en France au début de l'année 2011 d'un mouvement populaire d'ampleur contre l'exploitation des gaz de schiste emprisonnés dans le sous-sol, devenus une ressource énergétique convoitée. Au nom de la préservation de l'environnement, cette mobilisation éclair connaît un écho important jusqu'à créer un certain unanimisme politique et obtenir ses premières victoires. Ce regard d'histoire immédiate sur la singularité de ce mouvement essaiera d'en dresser un premier bilan.After more than one year of mobilisation against the shale gas, the article goes back on the origin and growth of this protest movement in France. On behalf of environmental protection, this fast mobilization has had immediate success, leading to the creation of a certain political unanimity resulting in some first victories. The article tries to take stock of this movement and identify its specific characteristics.
- Cinq propositions pour le développement durable - Matthieu Calame p. 177-184
Notes de lectures
- Notes de lectures - p. 195-205