Contenu du sommaire : Savoirs académiques, savoirs pour l'action ?
Revue | Droit et société |
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Numéro | no 60, mai 2005 |
Titre du numéro | Savoirs académiques, savoirs pour l'action ? |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Présentation. Des modes de socialisation des savoirs académiques - p. 295-307
- Expertises de service, de consensus, d'engagement : essai de typologie de la mission d'expertise en sciences sociales - Irène Théry p. 311-327 Dans le débat social contemporain, le terme d'expert est utilisé de façon ambi-guë. Conformément à la tradition de la sociologie de l'expertise, le mot désigne dans cet article une personne mandatée par une institution pour effectuer un diagnostic et rédiger un avis dans un cadre procéduralement défini. Sont dé-gagés, par des critères purement institutionnels, trois modèles de missions d'expertise : l'expertise de service, l'expertise de consensus et l'expertise d'engagement. On s'attache ici tout particulièrement à décrire la spécificité institutionnelle de cette dernière forme ? aujourd'hui très utilisée par le déci-deur politique ? qui témoigne du déplacement progressif du centre de gravité de l'expertise vers son usage dans le débat public.
- Quand l'expertise scientifique construit la précaution : le cas des maladies à prions - Marc Barbier, Céline Granjou p. 331-351 L'objet de cet article est d'éclairer la complexité et la dynamique des relations entre action publique, expertise et recherche, en s'appuyant sur l'analyse des activités d'expertise dans le domaine particulier des ESST et des prions. Le travail de recherche s'est adossé à une lecture diachronique de l'expertise dans ce domaine pour suivre la structuration conjointe d'une politique de recherche et d'une politique sanitaire. Nous nous attachons à montrer comment la mobi-lisation des chercheurs dans un comité d'experts ad hoc sous-tend la structu-ration d'une politique inédite de précaution, et comment l'expérience de ce dispositif par les experts eux-mêmes vaut d'être considérée dans les débats qui animent la sociologie des risques aujourd'hui.
- Laboratoires du constitutionnalisme européen. Expertises académiques et mobilisations politiques dans la promotion d'une Constitution européenne - Antonin Cohen, Julien Weisbein p. 353-369 Cet article entend restituer l'articulation entre mobilisations politiques et sa-voirs académiques dans la promotion d'une Constitution européenne. En s'appuyant sur une analyse de l'expertise produite par tous ces laboratoires du constitutionnalisme européen que sont les comités de réflexion, commissions parlementaires, mouvements fédéralistes et autres think tanks, en pointant l'activité de différents entrepreneurs académiques de la cause constitution-nelle européenne, aussi bien dans sa genèse transnationale que dans ses usa-ges nationaux, cet article entend notamment s'interroger sur le rôle des pro-fessionnels du droit dans les transformations contemporaines du « champ du pouvoir » européen.
- Le réinvestissement des positions académiques dans le débat public : les signatures des tribunes dans la presse quotidienne en France et en Italie - Carmela Lettieri p. 373-390 Cet article analyse les positions sociales et académiques des signataires de tri-bunes dans six quotidiens en France et en Italie. Ces lieux d'intervention par-ticipent à la structuration des débats publics et sont des forums de mise en scène des positions académiques. Les modes de présentation des auteurs, par-fois fruit de négociations avec les journalistes, contribuent en effet ? par des procédures différentes dans les deux pays ? à la construction de l'autorité. L'analyse des titres et des institutions d'appartenance permet d'évaluer le ré-investissement de ressources acquises dans le milieu universitaire et de la re-cherche dans le but d'acquérir une certaine notoriété, et l'utilisation de ces cautions scientifiques de la part des journaux.
- La politique de recherche de la branche Famille de la Sécurité sociale : un exemple d'interface entre sciences sociales et administration - Jérôme Minonzio p. 393-408 Cet article s'intéresse aux interactions entre les recherches dans le domaine de la famille et des politiques sociales et le processus de décision en matière de politiques familiales. Depuis 1945, ces politiques ont fait l'objet de nombreu-ses controverses à la fois idéologiques, sociales et scientifiques. Dès leur ori-gine, elles ont impliqué des scientifiques et des experts extérieurs à la haute fonction publique administrative, mais aussi des techniques et des savoirs né-cessaires à l'étude des populations ciblées par les politiques familiales et à la mesure de leur impact. Cet article analyse plus particulièrement les difficultés de mise en ?uvre d'une coopération entre chercheurs et administration ainsi que les conditions et les stratégies qui la rendent possible.
- De la ville comme objet de recherche aux experts comme acteurs des politiques urbaines : le cas de l'agglomération rennaise - Yann Bérard p. 411-426 Cet article interroge les rapports entre recherche et expertise à travers le cas des politiques urbaines en intégrant les dynamiques (à la fois territoriale, co-gnitive et normative) auxquelles sont aujourd'hui soumises la plupart des vil-les européennes. S'appuyant sur l'exemple de Rennes, l'auteur propose une démonstration en deux temps : testant d'abord l'hypothèse à caractère général de la constitution d'une « local policy community » structurée dans une large mesure par les experts issus des milieux universitaires, il interroge ensuite plus concrètement les processus d'hybridation et de « co-production » des re-cettes d'ac¬tion publique à l'?uvre dans l'évaluation de la politique de la ville.
- L'histoire des représentations comme soutien normatif d'une politique publique : le cas des attitudes collectives face à la mort - Pierre-Yves Baudot p. 429-447 La thèse du tabou de la mort s'est imposée en France entre le début des an-nées 1970 et celui des années 1990. Elle a été portée par un certain nombre d'acteurs sociaux qui, en la construisant, ont justifié l'intervention d'acteurs non religieux, dont l'État, dans ce secteur des derniers instants de l'individu. Cet article voudrait examiner les conditions qui ont permis à cette thèse du tabou de s'imposer. C'est notamment parce que le savoir produit se refusait officiellement à soutenir des entreprises plus militantes, parce qu'il prétendait à son autonomie, qu'il a pu être utilisé comme une ressource par certains ac-teurs du champ religieux, naturalisant en retour la thèse du tabou.
Question en débat - La réforme de la procédure pénale française en débat
- Quand connaître, c'est reconnaître ? Le rôle de l'expertise familiale dans la production d'un sens commun du parent (homosexuel) - Marine Boisson, Anne Verjus p. 449-467 À l'occasion du débat sur le PaCS, en 1998, l'« expertise familiale » fut nota-blement prise à partie pour avoir soustrait le débat à la délibération publique, pour avoir été à la fois instrumentalisée et confortée dans un magistère savant par le pouvoir politique, et enfin pour avoir agi comme une force politique conservatrice. Or, l'observation des catégories mises en ?uvre depuis 1998 montre que la controverse entre militants associatifs, chercheurs et « ex-perts », en créant les conditions d'une redéfinition des enjeux liés à la condi-tion homosexuelle et d'une publicisation de la question du mariage, a au contraire apporté une contribution majeure à la reconnaissance de la parenta-lité des couples de même sexe.
- Quand connaître, c'est reconnaître ? Le rôle de l'expertise familiale dans la production d'un sens commun du parent (homosexuel) - Marine Boisson, Anne Verjus p. 449-467
Etudes
- Le combat des gladiateurs. La procédure pénale au prisme de la loi Perben II - Pierrette Poncela p. 473-493 La loi dite « Perben II » a suscité, et continue de susciter, de nombreux débats et commentaires ; elle bouleverserait la procédure pénale française. Prenant distance avec les analyses en termes de crise ou de rupture, la présente étude s'inscrit dans une perspective théorique tendant à considérer la procédure pénale comme un champ où se nouent et se dénouent des microrelations de pouvoir, des stratégies de rapports de forces, en recherche constante d'équilibres et d'ajustements. Les dispositions juridiques nouvelles sont étudiées dans un contexte de réformes et de transformations des pratiques, observables depuis plusieurs années dans la procédure pénale.
- La protection réelle de l'embryon - Cosimo Marco Mazzoni p. 499-512 Tutelle réelle de l'embryon signifie protection effective sur la base du droit po-sitif en vigueur. L'étude cherche à montrer que l'embryon humain est un objet sous tutelle, établie par l'ordre juridique. Elle conteste que l'embryon soit titu-laire de droits subjectifs et donc qu'il puisse acquérir la qualification juridique de personne. La signification du terme de vie est conceptuellement différente au sens biologique et au sens juridique. Les codes civils européens assignent la capacité juridique au f?tus qui est né vivant. Avant cet instant, le système ju-ridique est en mesure d'accorder une protection à l'embryon toutefois diffé-rente de la norme qui protège la vie humaine de la personne déjà née. Bref, la protection de l'embryon est indépendante de sa qualification comme sujet.
- Le combat des gladiateurs. La procédure pénale au prisme de la loi Perben II - Pierrette Poncela p. 473-493
Chroniques bibliographiques
- Comment protéger le téléspectateur ? : Le contrôle des messages publicitaires comme expérimentation d'un dispositif juridique (1968-1987) - Sylvain Parasie p. 515-532 Comment mettre en place les règles juridiques d'une activité nouvelle, surtout quand celle-ci est aussi plastique que l'expression publicitaire ? C'est ce pro-blème qui se pose aux acteurs chargés, dans le cadre de la Régie française de publicité, du contrôle des messages publicitaires télévisés entre octobre 1968 et avril 1987. Explorant ce contrôle pour mieux comprendre comment on construit des règles juridiques, l'article montre, d'une part, comment les pro-tagonistes élaborent conjointement les règles d'une expression publicitaire non mensongère et, d'autre part, que le public des téléspectateurs/consom¬mateurs ne constitue pas simplement le « contexte » de l'élaboration de la rè-gle, mais qu'il est simultanément le produit du contrôle.
- Lu pour vous - p. 559-592
- À propos de : Y a-t-il un modèle américain ? - p. 539-556
- Comment protéger le téléspectateur ? : Le contrôle des messages publicitaires comme expérimentation d'un dispositif juridique (1968-1987) - Sylvain Parasie p. 515-532