Contenu du sommaire : Milieux ruraux : varia
Revue | Les Cahiers d'Outre-Mer |
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Numéro | no 241-242, janvier-juin 2008 |
Titre du numéro | Milieux ruraux : varia |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Quand l'agriculture redessine le territoire : à qui profite l'expansion des plantations de palmiers à huile au Sabah ? - Jean-François Bissonnette, Stéphane Bernard p. 3-30 L'État du Sabah en Malaysia connaît actuellement des transformations territoriales majeures causées par la poursuite de l'expansion rapide des plantations de palmier à huile. Dans ce contexte, nous proposons une analyse des implications socio-économiques du modèle de la plantation de palmier à huile qui domine l'économie agricole de cet État. La persistance de la logique coloniale dont l'objectif visait à repousser la frontière de l'exploitation des ressources naturelles guide l'analyse. L'argumentation soutient que l'expansion contemporaine de la culture du palmier à huile au Sabah répond en premier lieu à la logique des croissances capitalistes nationale et mondiale. Les objectifs sociaux ayant motivé d'autres projets de colonisation agricole depuis l'Indépendance de la Malaysia ont pour la plupart été délaissés. Les autorités locales voient prendre forme une économie dont l'importance des retombées pour les populations locales est discutable alors que les impacts environnementaux sont significatifs.
- L'agriculture itinérante sur brûlis en Guyane française : la fin des durabilités écologique et socioculturelle ? - Moïse tsayem Demaze, Sandrine Manusset p. 31-48 Cet article fait le point sur l'agriculture itinérante sur brûlis et les modifications dont elle fait l'objet en Guyane française. L'analyse s'appuie sur une recherche bibliographique et sur une série d'enquêtes effectuées sur le terrain entre 1998 et 2006. L'approche systémique utilisée permet d'aborder les dimensions économiques, socio-culturelles et écologiques de ce système agricole en rappelant ses caractéristiques principales et en relevant les évolutions en cours. La synthèse des données bibliographiques et des observations de terrain montre que cette pratique agricole traditionnelle, appelée abattis, tient une place importante sur les plans social, culturel et écologique, alors que sa fonction économique s'avère essentiellement alimentaire (autoconsommation). Des facteurs démographiques et socio-économiques sous-tendent de plus en plus des modifications dans la conduite des abattis : augmentation des surfaces défrichées, réduction de la durée des jachères, remplacement des abattis par des vergers, etc. Ces modifications amènent à s'interroger sur le devenir de la pratique des abattis car elles ont tendance à limiter les durabilités écologique et socioculturelle de ce système agricole alors que jusqu'à présent, les abattis semblaient bien inféodés au milieu forestier tout en participant à la cohésion socioculturelle et en contribuant à la subsistance des communautés locales.
- Les limites du modèle communal français en Guyane : le cas de Maripasoula - Denis Bassargette, Guy Di Méo p. 49-80 Nous utilisons l'outil de la formation socio-spatiale pour tester la validité du modèle communal en Guyane, à Maripasoula sur le Haut-Maroni. Dans ce milieu enclavé, les éléments de la nature s'imposent : la masse de la forêt en tant que territoire sans borne et l'obsédante présence du fleuve dans la vie quotidienne. Dans ce contexte où les différences ethniques se traduisent par des rapports socio-spatiaux variés et différenciés, les notions d'État, de frontière, de légalité républicaine se dissolvent. La puissance publique, lointaine et sans grande volonté, ne parvient pas à contrôler tout un monde interlope qui tient entre ses mains la plupart des activités économiques. Un système artificiel est ainsi identifié. En effet, ni les structures spatiales, ni les représentations sociales, ni les pratiques économiques ne concordent avec un quelconque territoire municipal. Seule fonctionne quelque peu une instance politique. Dès lors, l'isolement aidant, comment imaginer un développement citoyen respectant le droit des gens, la légalité, la clarté politique et la justice sociale ?
- Essor et restructuration du vignoble chilien : l'exemple du Maule (VIIe région) : 1995-2005 - Martin Paegelow, Darío Enrique Toro Balbontín p. 81-98 La restructuration économique chilienne des deux dernières décennies est considérée comme un exemple réussi d'intégration dans l'économie mondiale. Le secteur vitivinicole n'échappe pas à cette règle. Jadis une culture extensive destinée au marché intérieur, il a été profondément remodelé et est désormais une culture d'exportation de référence. Cet article traite de la croissance et de la restructuration de la vitiviniculture du Maule (VIIe région), situé à 250 km au sud de Santiago. Représentant un peu moins de la moitié de la surface viticole, de la production et des exportations de vin du pays, le Maule est la première région viticole du Chili. Suite à une phase d'expansion en surface rapide à la fin des années 1990, on constate aujourd'hui une sensible augmentation de la production et des exportations. Une véritable politique régionale, intégrant les principaux acteurs, accompagne cet essor et en fixe les objectifs : établir la région (et le pays) comme l'un des principaux exportateurs de vins fins à valeur ajoutée élevée.
- Impact des techniques de conservation des eaux et des sols sur le rendement du sorgho au centre-nord du Burkina Faso - Constant Évariste Dapola Da p. 99-110 Face à la dégradation de leurs espaces vitaux, les populations du Burkina Faso en général, de la région de Dem en particulier, ont pris conscience de la nécessité d'enrayer ce fléau. Elles ont, seules ou avec l'appui des moyens techniques et financiers de l'État, des projets et des ONG, entrepris des travaux de conservation des eaux et des sols ainsi que d'agroforesterie. Après plus de deux décennies de pratiques, le paysage agraire de la région de Dem est aménagé en partie suivant différentes techniques : cordons pierreux, cordons d'Andropogon gayanus, paillage et zaï. Au cours de la campagne agricole 2002, des mesures ont été effectuées sur la croissance et le rendement du sorgho en fonction du type d'aménagement pratiqué. Tous les champs ont été choisis sur des topographies de bas glacis. Les résultats obtenus permettent d'affirmer que les techniques de conservation des eaux et des sols pratiquées dans la région de Dem sont bénéfiques pour les cultures et pour les communautés rurales. Les rendements de sorgho les meilleurs sont obtenus avec la pratique du zaï (1,730 t/ha), parce que cette technique allie fertilisation du sol par apport de compost ou de fumier et meilleure conservation de l'humidité après chaque pluie. Même le paillage qui, parmi les différentes techniques appliquées, donne les résultats les plus bas (0,77 t/ha), offre des rendements six fois supérieurs à ceux des parcelles sans aménagement (0,12 t/ha). L'impact positif des techniques de conservation des eaux et des sols sur le rendement du sorgho laisse entrevoir des possibilités d'accroissement de la production agricole, pour peu que les populations soient sensibilisées et que ces techniques soient améliorées pour une large diffusion auprès des paysans exploitant les mêmes types de sols, sous le même climat.
- Incidences écologiques, anthropiques et paléoécologiques sur l'évolution des forêts du Gabon : Essai de synthèse - Bernard Peyrot p. 111-144 Les forêts pluviales du Gabon, omniprésentes, couvrent 85 % de la superficie du pays. Considérées comme des forêts primaires ayant toujours existé, elles font l'objet d'une exploitation industrielle capitale pour l'économie nationale et depuis peu, d'études scientifiques dans l'optique de la définition de politiques de conservation de leur biodiversité comme d'insertion dans un développement durable. Divers indicateurs montrent que ces forêts sont fragiles et très sensibles aux aléas environnementaux. Dans leur physionomie actuelle elles sont relativement récentes à l'échelle géologique puisque façonnées par les changements paléoécologiques de l'Holocène mais aussi du Pléistocène dont elles portent les stigmates. Dans un contexte de sous-peuplement il apparaît paradoxalement qu'elles n'ont pas échappé à une emprise humaine, perceptible à divers degrés, et qui a laissé des empreintes discrètes mais significatives s'avérant très anciennes et généralisées. Aujourd'hui, bien que sous la menace d'une exploitation forestière accrue jointe à un accroissement de la variabilité pluviométrique, la déprise humaine due à l'exode rural favorise la conservation des écosystèmes forestiers.
- Savoirs locaux et gestion des écosystèmes sahéliens - Ibrahim Bouzou Moussa, Boubacar Yamba p. 145-162 Pour asseoir une base de développement durable, la Convention sur la Diversité Biologique (CBD), à travers l'approche écosystémique, replace l'homme comme acteur et décideur. L'approche a été appliquée dans trois écosystèmes de la région de Maradi au Centre Sud du Niger. La méthodologie fondée sur des entretiens et des observations directes dans les champs a permis de montrer que les différents acteurs identifiés ont une connaissance fine de leurs écosystèmes, connaissance qui oriente l'utilisation et les pratiques culturales. Enfin, ces observations et constatations de « l'intérieur » revêtent une importance capitale en matière de développement local.
- Désengagement de l'État et réponses paysannes au Cameroun - Moïse Moupou, Lawrence Akei Mbanga p. 163-183 Poussé par les bailleurs de fonds, l'État du Cameroun s'est désengagé des secteurs de production et partant, des subventions multiformes de l'agriculture. En réaction à cette situation, les paysans ont décidé de se prendre en main eux-mêmes en créant ou renforçant les associations locales. L'émergence des associations locales de toutes sortes et la multiplication des initiatives locales ont contribué également à l'amélioration des conditions et du cadre de vie des populations rurales. La population s'organise pour contribuer financièrement, physiquement et matériellement pour construire, aménager et réhabiliter les infrastructures diverses. Ces initiatives communautaires, souvent appuyées financièrement et techniquement par les ONG locales, nationales, internationales et aussi par la coopération internationale constituent autant de tentatives de réponse à la dégradation des conditions de vie et de l'incapacité de l'État camerounais à assurer un fonctionnement correct et régulier des services publics et des équipements ruraux. Malgré les efforts multiformes faits par les associations locales, aucun village n'a atteint un degré de développement appréciable. Toutefois, la situation aurait été catastrophique si elles n'existaient pas.
- La RN 6 : un exemple d'intégration économique sous-régionale et un facteur de désenclavement du Niger - Abdou Bontianti, Issa Abdou Yonlihinza p. 185-208 Avec une superficie de 1 267 000 km2, le Niger est le plus grand pays de l'Afrique de l'Ouest. L'enclavement qui se traduit par l'éloignement des ports et la faiblesse du réseau routier annihile les efforts de développement du pays. L'essentiel des importations et des exportations se fait à travers la route en provenance ou en direction des pays côtiers. Malgré la présence du fleuve Niger, qui le traverse du nord-ouest au sud-est sur 520 km, le transport fluvial est médiocre. De plus, la voie aérienne, déjà embryonnaire, s'est considérablement rétrécie avec la disparition de la compagnie « Air Afrique » et les difficultés du pays à développer une alternative. S'y ajoute l'absence de chemin de fer. Les transports routiers sont donc importants pour le désenclavement du Niger. La capitale, Niamey, est à 1 060 km du port le plus proche, celui de Cotonou : 80 % des importations arrivent par voie maritime et entrent au pays par la route. Les difficultés rencontrées par les opérateurs économiques nigériens sur la voie supposée naturelle de désenclavement du Niger, la voie béninoise, ont entraîné une recomposition de l'espace de circulation de l'import-export. Ces constats nous ont amené à étudier une autre voie qui pourrait offrir des possibilités d'ouverture du Niger sur la sous-région ouest-africaine. Ainsi, depuis un certain temps, un regain d'intérêt est perceptible pour la voie burkinabé. Les offensives de charme engagées par les autorités portuaires de Lomé au Togo et de Téma et de Takoradi au Ghana y sont-elles pour quelque chose ? Les nouveaux aménagements entrepris sur la route Niamey ? Torodi ? frontière Burkina Faso ont-ils stimulé la desserte ? Autant de questions qui nous ont permis d'évaluer l'importance de la RN6 pour le désenclavement du Niger.
- Les réseaux de transport terrestres au Gabon : Bilan et perspectives - Léandre Edgard Ndjambou p. 209-231 Partie prenante de l'ancienne Afrique Équatoriale Française, le Gabon, indépendant depuis le 17 août 1960, a pris son développement en main, amplifié la gamme de ses exportations (pétrole, minerais et bois) et engagé un effort d'équipement dans le prolongement de ce qui avait été entrepris à l'époque coloniale. En résultent : le port d'Owendo, doublant les installations anciennes de Libreville et le développement de Port-Gentil, vers lesquels converge l'essentiel des productions de l'intérieur du pays, grâce notamment à la réalisation du chemin de fer Transgabonais, qui laisse dans une certaine mesure en marge les installations de Port-Gentil. Mais vu l'insuffisance de ses infrastructures terrestres et fluviales intérieures, l'État a dû recourir à l'emprunt pour financer les travaux nécessaires d'où les limites constatées dans l'aménagement et l'organisation des réseaux de communication, et les entraves à l'évacuation des produits concernés, aggravés par les difficultés financières actuelles du pays mais aussi les priorités retenues par les autorités. Des dysfonctionnements en découlent qui freinent la mise en place d'un réseau de transport national bien structuré qui pourrait toutefois, à la faveur de la réalisation du projet du minerai de fer de Bélinga, connaître une nouvelle phase de développement.