Contenu du sommaire : Global Justice and Practice-Dependence
Revue | Raisons Politiques |
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Numéro | no 51, août 2013 |
Titre du numéro | Global Justice and Practice-Dependence |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Éditorial
- Global Justice and Practice-Dependence - Hugo El Kholi p. 5-6
Dossier
- Practice-Based Justice: An Introduction - Hugo El Kholi p. 7 La justice fondée sur les pratiques: une introduction. L'objet de cette introduction est double. Elle consiste, tout d'abord, à fournir aux lecteurs qui n'ont pas de connaissance préalable au débat sur la dépendance aux pratiques l'aperçu nécessaire à une compréhension pleine et entière des contributions de ce volume. Elle vise, ensuite, à rendre les lecteurs déjà familiers de la dépendance aux pratiques plus sensibles à la nature substantielle de cette approche et à leur fournir une typologie pratique. Après avoir opéré une première distinction entre conceptions métaphysiques, conceptions relationnelles et conceptions dépendant de la pratique, je différencie, parmi ces dernières, entre institutionnalisme et conventionnalisme culturel. J'achève cette typologie en distinguant entre trois types d'institutionnalisme selon le statut accordé au fait institutionnel, à savoir le fait que les individus sont toujours déjà placés dans une situation de soumission par rapport aux institutions existantes. Tandis que l'institutionnalisme de fait décrit cette situation comme une simple réalité factuelle qui s'impose à tous les êtres humains, l'institutionnalisme de droit la considère comme une nécessite pratique devant être justifiée à chaque individu. L'institutionnalisme moral, enfin, rend compte du fait institutionnel dans les termes d'un devoir moral, à savoir le devoir de contribuer à l'émergence d'un état de fait dans lequel la liberté de choix de chacun est respectée.The purpose of this introduction is two-fold. First, it is to provide readers unfamiliar with the debates on practice-dependence with the insight necessary to fully comprehend the different contributions to this volume. Second, it is to make readers already well versed in practice-dependence more sensible to the substantive nature of this view and to provide them with a workable typology. After establishing a first distinction between metaphysical, relational and practice-dependent conceptions of justice, I draw a line, among practice-dependent views, between institutionalism and cultural conventionalism. I complete the typology by differentiating between three forms of institutionalism according to how they regard the institutional fact, namely the fact that individuals are always already placed in a state of submission to existing institutions. Whereas de facto institutionalism describes this fact as a mere factual reality which imposes itself upon human beings, de jure institutionalism regards it as a practical necessity which stands in need of justification to each and every individual. Finally, moral institutionalism accounts for the institutional fact in terms of moral duty , namely the duty to contribute to the emergence of a state of affairs in which everyone's freedom of choice is respected.
- Why Practices? - Aaron James p. 43-61 Pourquoi les pratiques? La méthode de justification fondée sur les pratiques suppose un certain degré de sensibilité aux pratiques sociales. Cela soulève des questions épineuses : les pratiques en question doivent-elles être établies ou au moins réalistes ? Quel degré de « construction » pouvons-nous assumer lorsque nous interprétons leur forme ou leurs buts ? Cet article suggère que les réponses à ces questions peuvent varier en fonction de nos objectifs explicatifs. Les exigences liées au réalisme et à l'exactitude sociologique sont relativement faibles lorsque ces objectifs sont purement intellectuels et visant la compréhension morale, plus fortes lorsque l'objectif est de déterminer les conditions générales de la vie humaine en collectivité, plus fortes encore lorsque l'objectif est de justifier les principes comme étant normatifs pour nous, étant donnée notre situation actuelle dans l'histoire du monde. Je suggère que nous n'avons pas de raison d'insister sur un ensemble de questions de justice à l'exclusion des autres, même si les exigences normatives occupent à juste titre une place centrale.The practice-based method of justification requires sensitivity to social practices. This raises difficult questions: Must the practices in question be established or at least realistic ? How “constructive” can we be in our interpretation of their form or aims? This paper suggests that our answers to these questions can vary with our explanatory purposes. Requirements of realism and sociological accuracy are relatively thin given purely intellectual aims of moral understanding, thicker given the aim of addressing humanity, and thicker still given the aim of justifying principles as normative forus , in our current world historical situation. I suggest that we have no reason to insist on one set of animating justice concerns to the exclusion of all the others, even as normative requirements rightly take center stage.
- Constructivism and Reflexive Constitution-Making Practices - James Gledhill p. 63-80 Constructivisme et pratiques réflexives d'élaboration de la constitution L'approche par la dépendance aux pratiques fait une tentative bienvenue de frayer un chemin entre, d'une part, le cosmopolitisme libéral, et, d'autre part, l'étatisme et le nationalisme. Ce faisant, elle cherche à réconcilier l'universalité de la justice avec le rôle particulier que jouent les principes de justice dans le contexte des différentes pratiques sociales. Dans cet article, j'affirme cependant que le « tournant pratique » dans la théorisation de la justice n'est pas allé assez loin, que ce soit méthodologiquement ou substantiellement. D'un point de vue méthodologique, il est nécessaire de dépasser le positivisme résiduel de l'approche par la dépendance aux pratiques en faveur d'une approche interprétative qui rende compte de la nature réflexive et évolutive des pratiques sociales. D'un point de vue substantiel, porter l'attention sur la réflexivité des pratiques sociales, en particulier sur les pratiques d'élaboration réflexive de la constitution, fournit le cadre d'une approche républicaine de la justice internationale ayant le souci de réconcilier l'idée kantienne d'universalité de la justice avec l'idée de souveraineté populaire de Rousseau et Hegel.The practice-dependent approach to global justice makes a welcome attempt to steer a course between egalitarian liberal cosmopolitanism, on the one hand, and statism and nationalism, on the other. In so doing, it seeks to reconcile the universality of justice with the particular role principles of justice play within the context of different social practices. In this paper, I argue, however, that the “practice turn” in theorising about justice has not gone far enough, either methodologically or substantively. Methodologically, it is necessary to move beyond the residual positivism of the practice-dependent approach to an interpretive approach that takes account of the reflexive, developmental nature of social practices. Substantively, focusing on the reflexivity of social practices, and particularly practices of reflexive constitution-making, provides a framework for a republican approach to international justice concerned with reconciling Kant's idea of the universality of justice with the emphasis on popular sovereignty of Rousseau and Hegel.
- Global Justice and Two Conceptions of Practice-Dependence - Malte Frøslee p. 81-96 La justice globale et deux conceptions de la dépendance aux pratiques La dépendance aux pratiques a récemment reçu une attention soutenue en théorie politique, pas seulement pour des raisons méthodologiques, mais aussi en raison de son soutien ostensible à l'étatisme – la position qui veut que la portée des principes de justice soit limitée à l'État-Nation. Cet article vise à réfuter l'affirmation selon laquelle la dépendance aux pratiques conduit nécessairement à l'étatisme. Il distingue deux sens de la dépendance aux pratiques dans les travaux de Rawls afin de clarifier la façon dont l'étatisme découle, non pas de la méthodologie rawlsienne en tant que telle, mais plutôt du genre de pratiques dont sa conception dépend. En distinguant les pratiques fondamentales des pratiques institutionnalisées, nous pouvons identifier une conception de la dépendance aux pratiques, à l'oeuvre dans les travaux de Jürgen Habermas, qui conduit au cosmopolitisme. L'article contraste enfin la critique interne de Rawls concernant l'État-Nation avec la critique externe de Habermas, et se prononce en faveur de cette dernière approche.Practice-dependence has recently gotten a lot of press in political theory, not only for methodological reasons, but also because of its ostensible support for statism – the view that the scope of principles of justice is limited to the nation-state. This article aims to refute the claim that practice-dependence necessarily entails statism. It distinguishes two senses of practice-dependence in Rawls's work in order to elucidate how statism follows not from Rawls's practice-dependence methodologyas such , but from the kind of practices on which his conception depends. By distinguishing basic practices from institutionalised practices, we can identify a conception of practice-dependence, realised in the work of Jürgen Habermas, which entails cosmopolitanism. Finally, the article contrasts Rawls's internal criticism of the nation-state with Habermas's external criticism and argues in favour of the latter approach.
- The Practice-Dependence Red Herring and Better Reasons for Restricting the Scope of Justice - Saladin Meckled-Garcia p. 97 La fausse piste de la dépendance aux pratiques et de meilleures raisons de restreindre la portée de la justice. Dans cet article, j'avance trois thèses. La première est qu'il existe effectivement une approche spécifique de méthodologie morale, différente du raisonnement moral standard, qui peut être décrite comme « dépendance à la pratique ». Selon moi, sa spécificité repose sur l'affirmation selon laquelle les principes moraux servant à réguler les pratiques sociales doivent être les principes visant à remplir au mieux l'objet de ces pratiques, un objet qui peut être mis au jour à partir des compréhensions partagées de la pratique. Les participants considèrent que les sociétés politiques internes ont un objet différent de la pratique des relations internationales. Selon cette approche, par conséquent, différents principes moraux s'appliquent dans chacun des cas : des principes de justice distributive entre citoyens, d'une part, et des principes de coopération équitable entre États, de l'autre. Ma seconde thèse est que cette approche échoue néanmoins à passer un test important : la contrainte de justifiabilité. Toute formulation d'un principe moral qui assigne aux individus des droits et des devoirs, des bénéfices et des charges, devrait être justifiable visà- vis de ces personnes au regard d'une valeur morale. Pourtant, comme je le montre ici, l'approche par la dépendance aux pratiques ne peut offrir aucune justification du caractère approprié des principes qui soit fondée sur des valeurs. Ma dernière thèse consiste à noter que les défenseurs comme les détracteurs de la dépendance aux pratiques ont attribué cette approche à des théoriciens qui restreignent la portée de la justice sur la base d'une justification morale. Ces conceptions sont, en fait, incompatibles avec l'affirmation du caractère approprié des principes dans la mesure où la restriction de la portée de la justice repose sur un fondement moral indépendant. Elles sont aussi compatibles avec la contrainte de justifiabilité. Pour toutes ces raisons, je conclus que la dépendance aux pratiques est une fausse piste dans le débat sur la justice globale.In this paper, I make three points. The first is that there is indeed a distinctive approach to moral methodology, different from standard moral reasoning, that can be described as “practice-dependence”. I argue that its distinctness lies in recommending an aptness claim , namely that moral principles for regulating social practices must be principles for better fulfilling the point of those practices, a point discoverable in shared understandings of the practice. Participants treat domestic political societies as having a different point to the practice of international relations. On this approach, then, different moral principles apply in each case: principles of distributive justice between citizens in the former and principles of cooperative fairness between states in the latter. My second point is that this approach fails, however, an important test which I call the justifiability constraint . Any formulation of a moral principle assigning rights and duties, benefits and burdens, to people should be justifiable to those persons by reference to a moral value. Yet, as I show, the practice-dependence view cannot offer any justification based on moral value for the aptness claim. My last point is that both endorsers and critics of practice-dependence have mistakenly attributed this approach to theorists who restrict the scope of justice on the basis of moral justification. Such views are, in fact, incompatible with the aptness claim given that they offer plausible independently derived moral grounds for restricting the scope of justice. They are also compatible with the justifiability constraint. For these reasons, I conclude that practice-dependence is a red herring for debates on global justice.
- Practices, Institutions, and Global Public Good Regimes - Isaac Taylor p. 121-135 Pratiques, institutions, et régimes des biens publiques globaux Une conception de la justice dépendant des pratiques est une conception qui considère que les principes de justice dépendent, dans leur contenu, de la nature des pratiques qu'ils visent à réguler. L'institutionnalisme, une forme de dépendance à la pratique, affirme que c'est la forme institutionnelle qui détermine les principes de justice. Plus précisément, les principes de justice devraient permettre la poursuite effective du but et de l'objet de l'institution qu'ils régulent. Puisqu'il ne peut y avoir, selon cette approche, de principes de justice en l'absence d'institutions, une de ses conséquences est de nier qu'instaurer de nouvelles institutions, lorsqu'elles n'existent pas déjà, soit un devoir de justice. Dans cet article, je plaide à l'encontre de cette dénégation, et prends le cas des biens publics globaux comme un cas exemplaire où il peut y avoir des devoirs de justice d'instaurer de nouvelles institutions.A practice-dependent conception of justice holds that principles of justice depend, in their content, on the nature of the practice that they are intended to regulate. Institutionalism, one variety of practice-dependency, claims that it is institutional form which determines principles of justice. Specifically, principles of justice should enable the effective pursuit of the point and purpose of the institution they regulate. One consequence of this view is that it cannot be a duty of justice to set up new institutions when none already exist, as there are no principles of justice in the absence of institutions – call this the “conservative institutionalist claim”. In this paper, I argue against this claim, and use the case of global public goods as an example of when there can be duties of justice to set up new institutions.
- Practice-Based Justice: An Introduction - Hugo El Kholi p. 7
Varia
- The Populist Phenomenon - Nadia Urbinati p. 137-154 Le phénomène populiste Cet article propose un compte-rendu analytique du populisme. Il soutient que les composants qui en font un phénomène identifiable sont une simplification et une polarisation des divisions politiques afin de renforcer l'unification des masses contre les élites existantes, suivant un fil narratif incarné la plupart du temps par un leader. Le populisme est, par conséquent, à la fois interne à la démocratie représentative et un défi à celle-ci ; il rivalise avec elle sur le terrain de la signification et de la mise en pratique de la représentation puisqu'il vise à une identification plus authentique entre représentés et représentants. Après un préambule sur la distinction entre le mouvement populaire et le populisme, cet article défend l'idée que, pour mieux comprendre ce phénomène, il est nécessaire de le replacer au sein de la tradition romaine et républicaine.The paper advances an analytical rendering of populism and argues that the components that make it a recognizable phenomenon are simplification and polarization of political divisions in the view of achieving a deeper unification of the masses against the existing elites and under an organic narrative that most of the time a leader embodies. Populism is thus internal to and a challenge of representative democracy; it competes with it on the meaning and practice of representation since aims at a more genuine identification between the represented and the representatives. After a premise on the distinction between a popular movement and populism, the paper argues that to better understand this phenomenon we should situate it within the republican as Roman tradition.
- The Populist Phenomenon - Nadia Urbinati p. 137-154
Lectures critiques
- Practice-Dependence, Trade, & Equality: A Review of Aaron James's Fairness in Practice: A Social Contract for a Global Economy (New York: Oxford University Press, 2012) - James Christensen p. 155-166
- A Review of Laura Valentini, Justice in a Globalized World: A Normative Framework (Oxford: Oxford University Press, 2011) - Theodore M. Lechterman p. 167-176