Contenu du sommaire : Maurice Grimaud, un préfet dans le siècle
Revue | Histoire@Politique |
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Numéro | no 27, septembre-décembre 2015 |
Titre du numéro | Maurice Grimaud, un préfet dans le siècle |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Dossier
- Maurice Grimaud à l'épreuve de l'histoire - Sébastien-Yves Laurent, Jean-François Sirinelli p. 1-4
- Maurice Grimaud préfet des Landes (1955-1957) ou « un préfet aux champs » - Bernard Lachaise p. 5-17 C'est dans la préfecture des Landes que Maurice Grimaud débute sa carrière de préfet entre avril 1955 et avril 1957. Le contact est un peu rude avec les Landais que Grimaud juge à chaud et encore plus avec le recul, dans ses mémoires, assez sévèrement. Mais cela s'explique en partie par les conditions de son départ des Landes quand il est victime des divisions internes à la SFIO locale. S'il n'a pas fait l'unanimité dans le monde politique landais, Grimaud s'est montré un préfet très actif pour moderniser l'économie landaise. Il a joué un grand rôle dans la création de la Société d'aménagement des Landes de Gascogne et les responsables économiques locaux lui en ont été reconnaissants.Maurice Grimaud: Prefect of Landes (1955-1957) or a “Prefect in the Fields”Maurice Grimaud began his career as a prefect in the Landes prefecture, where he served from April 1955 until April 1957. He did not get on smoothly with the department's inhabitants and immediately formed a rather harsh opinion of them, one that, to judge by his memoirs, the passage of time did nothing to mollify. But this is partly explained by the circumstances under which Grimaud – the victim of internal divisions within the local SFIO – left Landes. Although not universally appreciated in Landais political circles, Grimaud took a very active hand in efforts to modernize the department's economy. He played an important role in the creation of the Société d'aménagement des Landes de Gascogne and local economic leaders were grateful for his help
- Maurice Grimaud et Mai 1968 - Philippe Nivet p. 18-32 Maurice Grimaud a été le préfet de police de Paris lors des événements de Mai 1968. À partir de ses archives déposées à la Fondation nationale des sciences politiques, recoupées par plusieurs témoignages, cet article montre que Maurice Grimaud chercha à éviter les débordements de violence policière lors des manifestations de Mai 1968. Il étudie ses relations avec le pouvoir gaulliste. Il s'intéresse enfin à l'analyse qu'a pu faire jusqu'à sa mort Maurice Grimaud, qui a beaucoup écrit sur son expérience.“Maurice Grimaud and May 1968”Maurice Grimaud was Paris' prefect of police during the events of May 1968. Drawing upon his archives held at the Fondation nationale des sciences politiques as well as several corroborating accounts, this article shows that he sought to prevent police violence from getting out of hand during the May 1968 protests. It examines Grimaud's relations with the Gaullist government as well as his own understanding of the experience, a subject about which he extensively wrote before his death.
- Maurice Grimaud, le préfet médiatique - Christian Delporte p. 33-42 Pour agir, il faut savoir communiquer. Maurice Grimaud, à cet égard, est un préfet atypique qui a très tôt compris l'usage politique des médias. Avant même mai 1968, il se montre disponible à l'égard des journalistes et gagne, dans la presse, une notoriété utile durant la période de crise que traverse alors la France. Après 68, il mise encore sur les médias pour faire admettre ses projets à l'opinion. Bien après avoir quitté ses fonctions de préfet, il reste un homme de communication, dont il maîtrise des codes et les signes, et un invité toujours choyé de la télévision.“Maurice Grimaud: Media Savvy Prefect”In order to act, one must be able to communicate. In this respect, Maurice Grimaud was an atypical prefect. From a very early time, he understood the political uses to which the media could be put. Even before May 1968, he made himself available to journalists, becoming a well-known figure in the press, a fact that would prove useful during the period of crisis through which France was then passing. After 68, he once again relied on the media to win public support for his projects. Having mastered the medium's codes and symbols, he remained a skilled communicator and was a much sought-after guest on television.
- Maurice Grimaud directeur de cabinet de Gaston Defferre : l'auteur de La police malade du pouvoir... au pouvoir (mai 1981-juillet 1984) - Floran Vadillo p. 43-61 En mai 1981, le ministre de l'Intérieur Gaston Defferre nomme Maurice Grimaud au poste de directeur de cabinet. Ce faisant, il recrute un haut fonctionnaire connu (presque une célébrité depuis son action en Mai 68 et les commémorations de 1978) et estimé tant par ses pairs que par les responsables politiques ; un haut fonctionnaire qui va imprimer un style particulier dans l'exercice de sa charge au point de paraître atypique. Mais le ministre et son directeur de cabinet s'avèrent parfaitement complémentaires ; ainsi, en dépit des nombreuses vicissitudes et de la lourdeur des fonctions assumées, Maurice Grimaud servira-t-il Gaston Defferre avec constance voire même fidélité, l'accompagnant en juillet 1984 dans ses nouvelles fonctions de ministre chargé du Plan et de l'Aménagement du territoire.Maurice Grimaud, Gaston Defferre's Chief of Staff: From La Police malade du pouvoir... to the Halls of Government(May 1981 – July 1984)In May 1981, Interior Minister Gaston Defferre named Maurice Grimaud as his Chief of Staff. In doing so, he recruited a high-ranking civil servant who was at once well-known (indeed, thanks to his action in May 68 and the 1978 commemorations, he was nearly a celebrity) and highly esteemed by his peers and political leaders alike. So unusual was the style in which Grimaud carried out his duties that he came to seem altogether atypical. But the Minister and his Chief of Staff perfectly complemented one another. Despite the many vicissitudes of office and the burdensome duties he had assumed, Grimaud served Defferre in a steadfast and, indeed, faithful manner, accompanying him when the latter was appointed Town and Country Planning Minister in July 1984.
- Face aux « services » (1981-1983) : une autre leçon pour la gauche au pouvoir ? - Sébastien-Yves Laurent p. 62-73 Directeur de cabinet du ministre de l'Intérieur de 1981 à 1983, Maurice Grimaud se trouvé d'emblée placé dans une situation complexe. Il est nommé après une décennie au cours de laquelle la gauche n'a cessé de dénoncer vigoureusement le fait que la police et les services de renseignement ont été mis au service des objectifs politiques de la majorité. Place Beauvau, auprès d'un ministre peu intéressé par la prise en charge de « l'État secret », le préfet Grimaud est un acteur central de la collision entre l'idéal politique de l'ancienne opposition et la loi d'airain que les services de renseignement imposent à l'État. L'absence totale de préparation par l'équipe de campagne et par le PS ainsi que la neutralité de Grimaud qui n'est pas un militant politique de la nouvelle majorité, facilitent l'accommodation rapide de celle-ci aux réalités de la part secrète de l'État. Dès l'arrivée au pouvoir de François Mitterrand, l'État secret s'impose.Head of the Cabinet Office of the Minister of Interior from 1981 to 1983, Maurice Grimaud has to cope immediately withs a complicated situation. He is appointed one decade after the far-reaching denunciation by the Left that the Police Body and the Intelligence Services have been used by the Political Majority for its political purposes. Place Beauvau, close to a Minister not very interested in the management of the Secret State, the Préfet Grimaud is a key actor who observes the collision between the political ideals of the former political opposition and the “iron law” exerted by the Intelligence Services within the State. The lack of preparation by the presidential campaign team and by the Socialist Paty in 1981 and Grimaud's neutrality who is not a political militant make easier the compliance of the new Majority with the realities of the secret part of the State. As soon as Président Mitterand took office, Secret State rules within the State.
Vari@rticles
- Souveraineté eurasienne : un régime, une proposition, un exemple - Jane Burbank p. 74-92 Cet article propose et définit un type de souveraineté appelé « régime de souveraineté eurasienne ». L'interprétation se fonde sur une analyse, dans la très longue durée (du XIe siècle à nos jours), d'un mode de gouvernement s'exerçant dans une région stratégique pour l'affirmation de l'autorité politique russe, celle de Kazan et de ses environs. Les attributs principaux de ce régime sont le pouvoir supérieur du souverain (le khan, l'empereur), souvent issu d'un peuple étranger à la région ; la normalité des différences culturelles entre groupes de sujets; la gouvernance au moyen d'intermédiaires (conseils de villes, chefs de clans, autorités religieuses, et autres pouvoirs locaux); les relations personnelles, contractuelles et souples avec les pouvoirs "externes" le long de frontières mouvantes et, verticalement, dans les hiérarchies des serviteurs; la précarité des élites autour du souverain; et la pratique de révision des règlements ("a politics of re-making the rules"). La souveraineté est préservée et animée par les élites précaires qui s'engagent à la réfection des règles du jeu. La renégociation continue des contrôles sur multiples unités sociales et économiques par les élites autour du grand chef maintien et renforce le régime de souveraineté eurasienne.This article proposes and defines basic characteristics of a "Eurasian sovereignty regime." I develop this concept based on an analysis over a long time frame (from the 11th century to the present) of a mode of governance exercised in Kazan and its hinterlands, a strategic region for Russian political authority. Key elements of the enduring Eurasian sovereignty regime are the superior power of the ruler (the khan, the emperor), who often comes from outside the region; the normality of cultural differences within the population; the parceling out of authority to intermediaries (leaders of city councils or clans, religious authorities, other local powers); personal, contractual, and flexible relations with "external" powers along unfixed frontiers and, vertically, inside the hierarchies of servitors; the contingent position of elites surrounding the sovereign; and their practice of revising regulations ("a politics of re-making the rules"). Sovereignty is preserved and activated by precariously positioned elites who engage in redoing the rules of the game. The ongoing renegotiation of controls over multiple social and economic entities by elites around the paramount leader maintains and reinforces the Eurasian sovereignty regime.
- Réinventer la commune ? Genèse de la commune mixte, une structure administrative inédite dans l'Algérie coloniale - Christine Mussard p. 93-108 Dans l'Algérie française de la fin des années 1860, l'État est à la recherche d'une organisation administrative du territoire conquis. Plusieurs formes communales se développent et parmi elles, la commune mixte. Pour ses concepteurs, la création de cette entité a une visée singulière : étendre la colonisation dans l'intérieur du pays par l'accroissement du peuplement européen dans des villages ; favoriser le contact colons/colonisés et le développement d'une « éducation civique » de ces derniers. C'est donc une construction transitoire vers la commune de plein exercice, telle qu'elle existe en métropole.“Reinventing the Commune? Birth of the Mixed Commune, a Novel Administrative Structure in Colonial Algeria”In French Algeria in the 1860s, the state sought an administrative organization for the conquered territory. Several communal forms were developed and, among them, that of the mixed commune. The creation of this entity served a particular purpose in the eyes of its designers: by increasing the European population in villages, it extended colonization into the country's interior. This, it was hoped, would encourage contact between colonists and the colonized and help spread “civic education” among the latter. The mixed commune thus represented a temporary structure meant to lay the groundwork for the establishment of full-fledged communes of the type found in metropolitan France.
- Les années 68 : moment programmatique. Le PCF et la CDU à la recherche de l'avenir - Mathieu Dubois p. 109-123 Les « années 68 » ont constitué dans la plupart des partis politiques d'Europe de l'Ouest un moment programmatique. Le nombre sans précédent et l'importance historique des programmes rédigés alors reflètent la volonté des partis de réagir à la « crise du temps » caractéristique de la période et au défi politique lancé par les mouvements étudiants en réaffirmant leur rôle social à travers leur capacité à proposer un projet d'avenir. Jamais les programmes ne tinrent une place aussi déterminante dans la propagande et l'activité militante, devenant un élément majeur de la transformation de l'engagement politique. Cet article propose une lecture alternative des programmes à l'aune du rapport au temps et d'une comparaison transnationale des évolutions du PCF et de la CDU, deux partis aux cultures nationales et partisanes opposées, mais au sein desquels le programme commun de gouvernement de la gauche (1972) et le Programme fondamental de la CDU (1978) jouèrent un rôle en bien des points similaire, réintroduisant au coeur de la politique la question du projet.“Les années 68, a Programmatic Moment: The PCF and CDU in Search of the Future”For most Western European political parties, “les années 68” represented a programmatic moment. The unprecedented number and historic importance of the political programs drafted at the time reflected a desire among parties to react to the “crisis of time” characteristic of the period as well as to the political challenge mounted by student movements. By putting forward a project for the future, these parties sought to reaffirm their social role. Never before had political programs occupied such an important place in activist propaganda and activity, significantly contributing to the transformation of political engagement. This article offers an alternative interpretation of these programs from the perspective of their relationship to time as well as a transnational comparison of the evolution of the PCF and CDU, two parties characterized by contrasting national and partisan cultures. Despite their differences, the left's common government program (1972) and the CDU's Fundamental Program (1978) in many respects played a similar role, restoring the issue of planning to the heart of political life.
- Souveraineté eurasienne : un régime, une proposition, un exemple - Jane Burbank p. 74-92
Pistes & débats
- « Le préfet dans tous ses états ». Une histoire de l'institution préfectorale est-elle (encore) possible ? - Gildas Tanguy p. 124-145 Au sein d'une historiographie de l'État et des administrations publiques qui s'est considérablement enrichie et renouvelée depuis une vingtaine d'années – embrassant des dimensions très hétérogènes de l'appareil étatique (histoire économique, juridique, politique, sociale, etc.) –, l'institution préfectorale (à l'instar d'ailleurs d'autres corps de la haute fonction publique) est longtemps demeurée en retrait de ce foisonnement intellectuel et empirique. Sans doute parce que deux grandes traditions de recherches – l'histoire politique du corps puis l'approche systémique de l'institution telles que nous les qualifions ici – ont largement prédominé, cristallisant et durcissant ainsi une certaine vision de l'institution. Fort de ce constat, l'article s'attarde sur les apports heuristiques d'une historiographie récente qui a cherché à dépasser et à renouveler ces approches classiques en jetant les bases d'une ethnologie et d'une anthropologie des pratiques administratives préfectorales, mettant ainsi en scène les administrateurs départementaux dans leur pratique quotidienne et routinière du métier. Si ces travaux novateurs ont permis une relecture de l'institution plus que féconde, ils n'épuisent pas bien évidemment le champ des possibles. L'article propose ainsi quelques pistes et chantiers de recherche qui mériteraient d'être entrepris à court et moyen terme.This article is both a critical review of the prefectoral historiography and an advocacy for a socio-history of the prefectoral institution. Two major approaches have been followed in the scientific literature on prefects. One approach insists on the French prefect as the « representative of the State » in the provinces, as such a highly politicized civil servant. Those writings study the relationship between prefects and the central government in a rather top-down perspective. Another approach has paid lots of attention to the environment of the institution : prefects are described there within the local politico-administrative system, in which they appear as being major players of the informal structure of territorial government. In that perspective, researchers do insist on the functional dimension of the role of prefect. More recent research – especially from historians and socio-historians – have tried to go beyond these classical distinctions and are proposing a real ethnology and anthropology focused on the ordinary practices and routines of prefects at work and especially on the full repertoire of diverse activities performed on an everyday basis by prefects. In order to fullfill this new scientific agenda, this article draws up some heuristics directions of research.
- « Le préfet dans tous ses états ». Une histoire de l'institution préfectorale est-elle (encore) possible ? - Gildas Tanguy p. 124-145
Sources
- Les « archives des Verts » du Centre international de recherches sur l'écologie (CIRE) : documenter l'histoire proche de l'écologie politique - Sébastien Repaire p. 146-161 Les archives des Verts conservées au Centre international de recherche sur l'environnement (CIRE) constituent un ensemble précieux pour l'historien de l'écologie politique. Leur consultation est cependant rendue malaisée, laborieuse et aléatoire en raison de l'absence de classement des fonds. Mais, au-delà de la contrainte qu'elle représente, la persistance de cet état primaire offre à l'historien un matériau supplémentaire à analyser. L'intérêt du fonds d'archives ne réside plus seulement dans son contenu mais également dans sa forme, le domaine de l'archivistique créant la possibilité d'un regard nouveau sur l'histoire des partis politiques.The Greens' archives kept at the Centre international de recherche sur l'environnement (CIRE) represent a valuable resource to the historian of environmentalism. Accessing them, however, is a cumbersome process due to the lack of a filing system. While this is a constraint, it also provides the historian with additional material to analyse. Indeed, the archives are of interest not only because of their content, but also because of the very state in which they are kept. In this regard, archives can offer a new outlook on the history of political parties.
- Les « archives des Verts » du Centre international de recherches sur l'écologie (CIRE) : documenter l'histoire proche de l'écologie politique - Sébastien Repaire p. 146-161