Contenu du sommaire : Médiateurs d'empire en Asie centrale (1820‑1928)
Revue | Cahiers du monde russe |
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Numéro | volume 56, no 4, octobre-décembre 2015 |
Titre du numéro | Médiateurs d'empire en Asie centrale (1820‑1928) |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Médiateurs d'empire en asie centrale (1820 1928)
- Introduction - Isabelle Ohayon p. 617-624
- Foreword. Mediators of the empire in central asia (1820 1928) - Isabelle Ohayon p. 621-624
- Why was russian direct rule over kyrgyz nomads dependent on tribal chieftains “manapps”? - Tetsu Akiyama p. 625-650 Pourquoi l'administration directe russe sur les nomades kirghiz était‑elle dépendante des manaps ou chefs tribaux ? Les manaps jouèrent un rôle majeur en tant que leaders effectifs des nomades kirghiz tout au long de la période impériale et ce, en dépit de l'imposition de l'administration directe russe en 1867. Pourquoi ces chefs tribaux furent‑ils capables de conserver ce rôle et comment les autorités militaires russes traitèrent‑elles avec eux durant le demi‑siècle de leur administration directe ? Ce sont les objets de cette étude. L'utilité première des manaps fut de pallier les points faibles de l'administration directe russe. En effet, l'inadéquation de la gouvernance russe fut un élément clé qui permit à la classe des manaps de se maintenir dans son rôle de principale classe dirigeante des nomades kirghiz jusqu'au XXe siècle. Cependant, les autorités militaires russes ne cherchèrent pas à recruter les manaps en qualité d'intermédiaires politiques, elles durent s'en accommoder. En ce sens, on peut dire qu'elles en furent « passivement dépendantes », mais elles ne firent rien pour les protéger ou les entretenir en tant que représentants d'une élite politique.Why was Russian direct rule over Kyrgyz nomads dependent on tribal chieftains “manaps”? Despite the imposition of Russian direct rule in 1867, the tribal chieftains bearing the title of “manap” played a dominant role as effective leaders among Kyrgyz nomads throughout the imperial period. This article investigates why manaps were able to maintain this role and how the Russian military authorities dealt with them during the half century of their direct rule. Manaps were useful in supplementing the weakness of Russian rule, and, in fact, the inadequacy of Russian governance was a key factor enabling manaps to maintain their role as the primary ruling class of Kyrgyz nomads until as late as the twentieth century. However, Russian military authorities did not actively recruit manaps as political intermediaries, but were obliged to accommodate to them. In this sense, they were in large part “passively dependent” on manaps, but did not actively protect or nurture them as a political elite.
- Казахские чиновники российской империи XIX в. : Особенности восприятия власти - Gul´mira S Sultangalieva p. 651-680 Les fonctionnaires kazakhs de la Russie impériale au XIXe siècle : particularités de la perception du pouvoir. Dans cet article, l'auteur produit une analyse comparative du processus de formation du corps des fonctionnaires kazakhs dans différentes parties de la Steppe au cours du XIXe siècle à travers le prisme de la politique impériale russe de mise en place d'un système administratif vertical de gestion locale, d'un réseau de fonctions pour les représentants de la noblesse kazakhe, et de leur gratification par le biais de grades militaires, de médailles, d'ordres et du droit de porter l'uniforme. L'analyse de différents documents (pétitions, lettres, demandes de nomination, rapports sur l'exécution des obligations de service et missions de l'administration régionale) permet d'examiner la manière dont les Kazakhs percevaient les attributs du fonctionnaire de l'empire. L'auteur dégage ainsi différentes étapes qui marquent l'évolution qualitative du processus d'adaptation de la population kazakhe au nouveau système d'administration et aux membres de leur tribu devenus fonctionnaires et, de ce fait, relais du pouvoir russe dans la Steppe.Kazakh civil servants in nineteenth‑century Imperial Russia: Specific aspects of the perception of power. The article presents a comparative analysis of the formation of the corps of Kazakh civil servants in various areas of the Steppe during the nineteenth century. The frame of reference is Imperial Russia's implementation of a local vertical administrative system, a network of positions for Kazakh noblemen, and a reward system involving military promotion, medals, and the right to wear a uniform. An analysis of various documents such as petitions, letters, petitions for nomination, reports on the fulfillment of the service obligations and missions of the local administration allows the author to examine how the Kazakhs perceived the attributes of imperial civil servants. The author thus identifies qualitatively differing stages in the Kazakh population's adaptation to the new administrative system and to members of tribes who had become civil servants, that is, intermediaries of Russian power in the Steppe.
- Repression of kazakh intellectuals as a sign of weakness of russian imperial rule : The paradoxical impact of Governor A.N. Troinitskii on the Kazakh national movement* - Tomohiko Uyama p. 681-704 La répression des intellectuels kazakhs ou la faiblesse de l'administration directe russe : l'impact paradoxal du gouverneur A.N. Trojnickij sur le mouvement national kazakh. Vers 1910, un certain nombre d'éminents intellectuels kazakhs fut arrêté dans l'oblast de Semipalatinsk. Le gouverneur Trojnickij était largement impliqué dans ces arrestations et les bannissements qui s'ensuivirent, ayant recouru pour cela aux services de la police et des informateurs locaux. L'article examine comment le gouverneur insista pour que les intellectuels fussent sévèrement punis, entrant même en conflit avec son responsable hiérarchique, le gouverneur général de la Steppe, et comment les intellectuels adressèrent une pétition aux autorités pour demander leur libération. Il passe aussi en revue les idées de Trojnickij, ses perceptions, préjugés et émotions au travers de ses rapports officiels et de sa correspondance personnelle. La répression résultait tant de la personnalité du gouverneur que de l'état d'esprit des autorités russes en poste dans la Steppe kazakhe, et plus singulièrement de leur manque de confiance en la force de leur propre administration. Les intellectuels bannis s'engagèrent dans des activités littéraires et journalistiques dans des villes limitrophes de la steppe, élaborant les idées et les relations humaines qui furent à la base du futur mouvement pour l'autonomie. Paradoxalement, l'oppression exercée par Trojnickij stimula le développement du mouvement national kazakh.Repression of Kazakh intellectuals as a sign of weakness of Russian imperial rule: The paradoxical impact of Governor A.N. Troinitskii on the Kazakh national movement. Around 1910, a number of prominent Kazakh intellectuals were arrested in Semipalatinsk oblast. Governor Troinitskii was deeply involved in their arrests and subsequent banishments, employing the police and local informers. This article examines how the governor insisted on punishing them severely, sometimes even conflicting with his senior, the governor‑general of the Steppe, and how the intellectuals petitioned the authorities to release them. It also scrutinizes Troinitskii's ideas, perceptions, prejudices, and emotions through his official reports and personal letters. The repression derived both from the governor's personality and the mindset of the Russian authorities in the Kazakh Steppe, especially their lack of confidence in the strength of their own rule. The banished intellectuals engaged in literary and journalistic activities in cities adjacent to the steppe, developing the ideas and human relations that formed the basis of the future autonomy movement. Paradoxically, the oppression by Troinitskii stimulated the development of the Kazakh national movement.
- Le ralliement des kazakhs au pouvoir soviétique (1917 1920) : Convictions politiques, système tribal et contexte russe* - Xavier Hallez p. 705-752 Le ralliement des Kazakhs au pouvoir soviétique (1917‑1920) : convictions politiques, système tribal et contexte russe. Cet article présente des parcours individuels et des formes de l'engagement politique dans la société kazakhe entre 1917 et 1920. Il porte sur un pan de l'histoire révolutionnaire qui n'a encore jamais été abordé autrement que par le biais de l'approche idéologique. Le ralliement de Kazakhs au pouvoir soviétique et au parti bolchevik ne peut se comprendre qu'en croisant l'étude du discours politique avec l'influence du contexte général et l'intervention du système tribal. Ce dernier élément est tout particulièrement mis en avant, sans pour autant réduire la vie politique kazakhe à des rapports de force entre tribus. Il apparaît que les Kazakhs devenus soviétiques ou bolcheviks entre 1917 et 1918 appartenaient à des tribus et des clans faibles ou minoritaires et qu'ils avaient été mis à l'écart du mouvement national kazakh, dominé par les deux principales tribus. La présente étude s'attache à retracer la constitution de ces groupes hétéroclites. La période est divisée en cinq phases, correspondant à des motivations particulières pour ce ralliement ou, au contraire, pour un rejet du modèle soviétique ou bolchevik.Kazakh rallying to Soviet power (1917‑1920): Political convictions, tribal system, and Russian context. This article deals with individual biographies and forms of political commitment in Kazakh society during the period 1917‑1920. It focuses on a part of the history of the Russian Revolution that has so far been studied only from an ideological point of view. The coming over of Kazakhs to Soviet power or the Bolshevik party can only be understood by crossing the studies of political discourse, the influence of the general context and the presence of a tribal system. The latter is particularly significant for our analysis, but this does not mean that we reduce Kazakh political life to a play for power between tribes. It appears that the Kazakhs who became Soviet or Bolshevik between 1917 and 1918 had in the past been excluded from the Kazakh national movement dominated by the two main tribes and belonged to weaker or minority tribes and clans. This study traces back the constitution of these heterogeneous groups. The period is divided into five stages corresponding to specific motivations for the rallying to or rejection of the Soviet or Bolshevik model.
- Испытание властью : Из истории формирования бюрократии Казахской АССР, 1920‑е гг. - Dina A. Amanžolova p. 753-792 L'exercice du pouvoir : de la formation de la bureaucratie en République socialiste soviétique autonome kazakhe dans les années 1920 L'article analyse la corrélation entre facteurs ethniques et organisation politique dans la formation de la direction de la RSSA kazakhe dans les années 1920. Il s'intéresse notamment à la façon dont les particularités de la république – prédominance de la culture nomade sur des territoires immenses, complexité des relations intra‑ethniques et morcellement politique de l'intelligentsia kazakhe, rôle de celle‑ci dans la vie politique de l'ensemble de la région centrasiatique, notamment en matière de bornage, etc. – et les problèmes de la bolchevisation des cadres nationaux et de l'indigénisation des organes de pouvoir et de gestion ont influé sur le caractère et la stabilité du système politique dans la république. Il montre aussi en quoi la spécificité des relations mutuelles entre ceux que l'on nomme les « Européens », la « vieille » intelligentsia kazakhe et les nationaux promus, a trouvé son expression dans ladite lutte de faction entre les différents groupes de l'ethnobureaucratie. L'article conclut sur le développement dynamique et multivectoriel du système soviétique – équilibre complexe de pratiques culturelles et politiques, de hiérarchies, de symboles et de modèles comportementaux – dans un espace ethnosocial original.
New at governing: A history of the formation of bureaucracy in the Kazakh ASSR in the 1920s
The article analyzes the correlation between organizational policy and ethnic factors in the formation of the leadership of the Kazakh ASSR in the 1920s. This Republic was characterized by a predominant nomadic culture over a vast territory, complex intra‑ethnic relationships, and the Kazakh intelligentsia's political fragmentation and role in the political life of Central Asia – in issues related to boundaries, among others. The article focuses on how these features and problems related to the bolshevization of national cadres and the growing percentage of natives among government officials and in the administration impacted the nature and stability of the Republic's political system. The author shows how the specificity of the relationships between the so‑called “Europeans,” the “old” Kazakh intelligentsia and promoted nationals found expression in the so‑called factional infighting between various groups of the ethnic bureaucracy. The article closes with an observation on the dynamic and multidimensional development of the Soviet system – as a complex balance of political and cultural practices, hierarchies, symbols and role models – within an original ethno‑social context.
Comptes rendus
- Comptes rendus - p. 793-931