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Revue | Revue Interdisciplinaire Management, Homme & Entreprise — RIMHE |
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Numéro | no 9, novembre-décembre 2013 |
Titre du numéro | International |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Editorial - Martine Brasseur, Hajer Kefi, Ewan Oiry p. 2
- Business ethics and moral skepticism - Alain Anquetil p. 3-14 L'éthique des affaires et le scepticisme moral L'expression « éthique des affaires » évoque souvent une incompatibilité entre l'éthique et la vie économique marchande. Cette incompatibilité reflète une attitude sceptique sur la possibilité d'une éthique dans les affaires. Il en résulte une problématique épistémologique : celle de l'influence du scepticisme sur les théories qui ont été élaborées dans le champ de l'éthique des affaires. Dans cet article, nous défendons l'hypothèse selon laquelle une telle attitude sceptique a pu contribuer à structurer les approches normatives proposées dans l'éthique des affaires. À cette fin, nous montrerons à partir d'exemples issus de la littérature la manière dont les théoriciens répondent à ce scepticisme avant de proposer des positions normatives.Notre méthodologie se développera en deux temps. D'abord, nous distinguerons quatre formes de scepticisme sur l'éthique dans les affaires : la première, idéologique, est fondée sur une critique des fondements du système économique ; la seconde, anti-théorique, affirme que les théories morales ont peu d'utilité car elles sont déconnectées des pratiques des acteurs ; la troisième, méta-éthique, énonce que les principes moraux censés gouverner la vie des affaires sont dépourvus de valeur de vérité, ce qui implique qu'ils n'ont pas un pouvoir de conviction suffisant ; la quatrième repose sur une conception égoïste des motivations humaines qui compromet l'efficacité de l'éthique dans les affaires.Dans un second temps, nous traiterons des réponses apportées à ces formes de scepticisme. Nous présenterons ainsi plusieurs éléments permettant de vérifier l'influence du scepticisme sur les approches normatives de l'éthique des affaires. Nous traiterons en particulier des formes « métaéthique » et « liée à l'égoïsme de la nature humaine ». La forme méta-éthique peut être résumée par la thèse de la séparation, qui affirme que la morale de la vie économique est séparée de la morale ordinaire. Une réponse à la thèse de la séparation, due à Freeman, consiste à proposer un nouveau langage pour décrire la vie économique. Une autre réponse, due à Solomon, est de défendre l'idée que les activités économiques marchandes et les autres domaines de la vie humaine font partie intégrante d'un même ensemble régi par les mêmes règles morales, et que chaque acteur doit se penser lui-même comme membre d'une unique communauté morale. En ce qui concerne le scepticisme lié à l'égoïsme de la nature humaine, deux réponses sont présentées. La première se situe dans le champ du marketing. Proposée par Robin et Reichenbach, elle revient à concevoir la morale des affaires comme un instrument de compensation des « sympathies limitées » dont font preuve les êtres humains. La seconde réponse, formulée par Sen, revient à dénoncer les fondements de la croyance selon laquelle les acteurs économiques sont par nature égoïstes, une croyance qui s'enracine souvent dans une mauvaise interprétation d'un célèbre passage de La richesse des nations d'Adam Smith.Les apports de notre argument épistémologique sont de deux types. Le premier est qu'il convient de prendre au sérieux le scepticisme relatif à la place de l'éthique dans les affaires, c'est-à-dire de considérer ses effets non seulement sur les pratiques, mais aussi sur les constructions théoriques. Le second apport est que les théories de l'éthique des affaires devraient s'affranchir de toute attitude sceptique et partir de critères relatifs à ce que sont une bonne vie et de bonnes relations humaines.The phrase ‘business ethics' frequently evokes an incompatibility between business and ethics. Such an incompatibility reflects a negative skeptical attitude regarding the possibility of an ethics in business. This attitude raises in turn the following epistemological question: what was the influence of skepticism on normative theories that have been built in business ethics? In this paper, it is argued that skepticism have played a central and structuring role in normative theorization within this field. For this purpose, and using examples taken from the business ethics literature, we will try to show how business ethicists answer to this skepticism before exposing their theories and showing how they can address it. The argument will be presented in two steps. First, four species of skepticism will be considered. The first one is ideological: it is based on a radical criticism of the foundations of the market economy. The second kind of skepticism has an anti-theoretical dimension: it questions the practical relevance of ethical theory. The third, which pertains to meta-ethics, is concerned with the view that moral statements have no truth value and therefore lack any power of conviction. The fourth kind of skepticism refers to an egoistic account of moral human motivations, which reduces significantly the practical authority of morality. The second step of the argument will deal with the answers that have been proposed in the business ethics literature, especially within its normative branch, to these forms of skepticism. The metaethical and egoistic kinds will be more specifically considered. The former kind is often summarized by the phrase “separation thesis,” that is, the idea that business morality is less demanding than common morality. One answer to the separation thesis has been advanced by Freeman. It consists in changing the language with which business facts and practices are described. Another answer, proposed by Solomon, is that economic and non-economic activities are part of a single community governed by the same moral rules, and that each economic actor should consider himself as a member of this unique community. Two answers are also proposed with respect to the form of skepticism which lies in an egoistic account of moral human motivations. The first one has been emphasized in the “ethical philosophy for marketing” defended by Robin and Reidenbach. In their view, the proper function of business morality is to counterbalance the “limited sympathies” that characterize human relationships. The second answer, put forward by Sen, aims at showing that the belief that economic actors would be exclusively self-interested is not justified. This belief often relates to a famous passage of Adam Smith's Wealth of Nations, but Sen explains why it is misinterpreted. Our epistemological argument has two main consequences. First, it stresses the fact that skepticism about ethics in business should be taken seriously. In other words, its effects on practices and on theoretical constructions should be considered. Second, theories in business ethics should be detached from skepticism and based on criteria that define a good human life and good human relations in general.
- The Ethical Climate at Work : Promoting Trust in Organizations - Afef Chouaib, Férid Zaddem p. 15-30 Les dérives morales et les comportements déviants des managers, conduisant à des scandales financiers, sont au cœur d'une crise de confiance dans les entreprises. Promouvoir un climat de confiance au milieu organisationnel semble de plus en plus reposer sur l'adhésion à un ensemble de règles et de principes de conduite, prônant des valeurs éthiques partagées par les membres dans l'entreprise. Le présent article propose de s'intéresser au rôle du climat éthique comme un catalyseur des relations de confiance au travail. Les valeurs et les pratiques éthiques qui caractérisent le climat de travail seraient, à notre sens, des préalables pour le développement de la confiance en milieu organisationnel. Les travaux pionniers de Victor et Cullen sur le concept de climat éthique ont été présentés en clarifiant les ancrages théoriques de ce concept. Une synthèse succincte des connaissances sur la confiance et ses typologies a été également développée.Une étude exploratoire inscrite dans un paradigme interprétativiste vise l'identification des types de climats éthiques dominants au travail, tels que perçus par les membres dans les entreprises tunisiennes enquêtées et d'analyser le poids de ces climats dans le développement de relations de confiance au travail. les données ont été collectées sur la base de vingt et un entretiens semi-directifs conduits avec des employés dans sept entreprises tunisiennes présentant des contextes différents et ayant des caractéristiques organisationnelles diversifiées. Ne analyse thématique des données qualitatives collectées a été opérée et perfectionnée à l'aide du logiciel Nvivo 7.Les résultats issus de ce travail exploratoire affirment le caractère multidimensionnel du concept de climat éthique. Un climat égoïste véhicule une situation de carence éthique. Un climat bienveillant est fondé sur une logique informelle de partage de valeurs pour le bien-être de la communauté. Un climat déontologique s'inscrit plutôt dans une approche formelle qui visant à orienter les comportements des membres suivant des principes éthiques prédéterminés. Les résultats soutiennent également le poids du climat éthique perçu dans le renforcement ou, au contraire, dans la dégradation des relations de confiance envers le dirigeant et les collègues au travail. Ainsi, un climat égoïste suscite des relations de méfiance entre les membres de l'entreprise. Un climat bienveillant inspire davantage des relations affectives de confiance envers le dirigeant et les pairs, ce qui favorise l'engagement envers l'organisation. En revanche, la perception d'un climat déontologique suscite davantage des formes cognitives de la confiance entre les membres d'une organisation favorisant l'émergence d'une sorte de confiance institutionnelle, liée au respect mutuel des termes d'un contrat éthique. Ces analyses ont permis la formulation de propositions adéquates.Des efforts dispersés sont déployés, pour souligner le poids du contexte organisationnel dans la promotion de la confiance au travail. La présente recherche contribue ainsi à enrichir les connaissances sur la confiance et le climat éthique au travail. Asseoir les fondements d'une éthique positive, bienveillante ou déontologique serait un préalable à l'instauration d'un climat de confiance. Toutefois, la diversité des climats éthiques perçus implique de développer des stratégies d'action adéquates et différenciées respectant les contingences locales afin de promouvoir un climat de confiance de qualité.Moral failings and managers' deviant behaviors, leading to financial scandals, are at the heart of a crisis of trust in businesses. Promoting a climate of trust in the organizational environment seems increasingly to depend on adherence to a set of rules and principles of conduct, which advocates ethical values shared by the members of the company. In this paper, the main focus is on the role of the ethical climate within the company regarded as a “catalyst” of trust at work. These shared values and ethical practices in the workplace are, in our view, a prerequisite for the development of trust in the organizational context. The pioneer works of Victor and Cullen on the ethical work climate were developed and the theoretical bases of the concept were clarified. A succinct synthesis of theoretical knowledge on trust and its typologies was also developed. An exploratory study inscribed in an interpretativist paradigm aims to identify the prevailing ethical work climates types, as they perceived by the members in the firms studied; and then, to understand the role of this climate in the development of trust relationships at work. Data was collected from Twenty-one semi-directive interviews conducted with employees in seven Tunisian companies, presenting different contexts and having diverse organizational characteristics. A thematic analysis of the qualitative data was conducted and performed using the software Nvivo 7.The results of this exploratory work confirm the multidimensional nature of the ethical climate concept. An egoistic climate expresses a situation of ethical deficiency. A caring climate is based on an informal logic of shared values for the welfare of the community. A deontological climate is, rather, part of a formal approach aiming to align the members' behaviors with predetermined ethical principles. The results support also the weight of the perceived ethical climate, in reinforcing or damaging trust relationships with employer and peers. Thus, egoistic climate raises mistrust among the members of the company. A caring climate inspires more affective trust relationship towards the top manager and peers, which promotes commitment to the organization. However, the perception of a deontological climate refers to more cognitive forms of trust among members of an organization, fostering the emergence of a kind of institutional trust, related to mutual respect for the terms of an ethical contract. These analyses allow us extracting suitable propositions. Only scattered efforts have been made to emphasize the weight of the organizational context in promoting trust at work. This research contributes then to improve knowledge on trust and ethical work climate. Laying the foundations of a positive ethics, caring or deontological, seems to be a prerequisite for the establishment of trust within organizations. However, the diversity of perceived ethical climates involves the development of adequate strategies differentiated and respecting for local contingencies in order to promote a trust climate of quality.
- Reconciling Economic and Social Objectives in Centres for Disabled Workers - Christophe Baret p. 31-45 Historiquement, l'Etat français délègue aux associations de solidarité la production de services sociaux. Depuis, les années 2000, afin de réduire les déficits publics, l'Etat a instauré une contractualisation pluriannuelle pour renforcer le contrôle budgétaire des associations. Ces dernières sont donc contraintes de rechercher des modalités nouvelles de conciliation de leur rentabilité économique et de la réalisation de leurs missions militantes. L'étude des établissements et services d'aide par le travail (ESAT) nous permet de mettre en évidence ces modalités de conciliation. Les ESAT accueillent 100.000 adultes handicapés et emploient 30.000 personnes. Depuis le milieu des années 1990, ils subissent à la fois un durcissement de leurs conditions concurrentielles dû à l'accélération des délocalisations industrielles, une réduction des subventions versées par l'Etat et une augmentation des exigences de qualité de la prise en charge en liaison avec la mise en place des lois de 2002 et de 2005 portant rénovation du secteur médico-social. Au-delà de proposer du travail aux personnes handicapées, les ESAT doivent favoriser leur insertion professionnelle en milieu ordinaire et proposer une prise en charge individualisée. Comment ces établissements parviennent-ils à concilier les objectifs économiques de rentabilité et leurs missions médico-sociales ? Nous adoptons une perspective de contingence stratégique (Macduffie, 1995) pour mettre en évidence les différentes stratégies possibles par rapport à un environnement donné. Nous nous appuyons sur 18 monographies d'établissements de la région Rhône-Alpes réalisées en 2009 à partir d'entretiens semi-directifs et d'analyses documentaires pour mettre en évidence une typologie des stratégies des ESAT qui croise, de manière matricielle, les stratégies économiques et médico-sociales. Nous identifions trois stratégies économiques (spécialisation sur la sous-traitance industrielle, différenciation par la valeur ajoutée et diversification par les activités de service) et trois stratégies médico-sociales (donner du travail, développement personnel et professionnel, insertion). Cette matrice met en évidence que le modèle traditionnel de l'ESAT (donner du travail et spécialisation sur la sous-traitance industrielle) est en crise et que les établissements adoptent progressivement des stratégies de différenciation et de diversification qui leur permettent de générer des ressources supplémentaires pour financer leurs nouvelles activités de formation et d'insertion des travailleurs handicapés. En outre, les nouvelles activités de service et de contrôle qualité fournissent de nouveaux postes de travail plus stimulants, adaptés aux travailleurs handicapés qui souhaitent évoluer. Cette matrice est un outil conceptuel qui incite les dirigeants des associations à penser l'articulation entre les objectifs économiques et médico-sociaux alors que ces deux objectifs sont souvent perçus comme contradictoires. Elle peut donc leur être utile au moment de l'élaboration de leur projet d'établissement.Historically, French public authorities have delegated the provision of social and medico-social services for vulnerable individuals to solidarity organisations. The need to reduce state deficits has led public authorities to tighten the monitoring of the organisations' finances. The managers of medico-social centres are then urged to ‘think through' the linkage between economic objectives and medico-social missions. We draw on a study conducted with assistance and service centres for disabled workers (établissements et services d'aide par le travail, ESATs) to reveal how these two objectives can be reconciled. Reintegration centres for disabled workers care for some 100,000 adults and employ 30,000 administrative staff persons and social workers. These not-for-profit organisations sell products and services on the competitive markets. Since the mid 1990s, however, they have been confronted by heightened competition due to industrial relocations, and at the same time, they have had to meet increasingly stringent quality requirements imposed on their care activities by regulations enacted in 2002 and 2005. Beyond giving work to disabled persons, ESAT should now provide support for users in the accomplishment of their customised career plan and encourage their integration into mainstream work. How do such centres manage to reconcile the economic objectives of profitability with their medical and social service missions? We refer to the strategic contingency approach (Macduffie, 1995), to reveal the several alternative strategic ‘responses' corresponding to a single external environment. Through eighteen case studies of centres located in the Rhône-Alpes Region, we develop a typology in the form of a matrix cross-tabulating economic and medico-social strategies. Semi-structured individual interviews were conducted with management, production and medico-social staff. In our sample, we identify three typical economic strategies (specialisation in industrial subcontracting, differentiation through value added and diversification through service activities) and three typical medical/social-service strategies (providing work, personal and professional development and integration into mainstream work). This matrix shows that the historical strategic positioning (providing work and specialisation in industrial subcontracting) is no longer tenable. Most of the centres in our sample developed new orientations leading to differentiation and diversification alternatives. The financial surpluses generated by the service activities are used to fund vocational training for users or to recruit an integration supervisor who canvasses companies in the ordinary environment for in-company placements, secondments and jobs. This matrix brings out the economic strategies which permit the reinforcement of medical and social-service activities and we therefore maintain that it could be used as a decision-making tool by the heads of such organisations.
- Social entrepreneurship : From value-based skepticism to conditional practice - Patrick Valeau, Jérôme Boncler p. 46-64 L'entrepreneuriat social constitue à la fois une théorie et une pratique construite aux Etats-Unis à la fin des années 90 et importées en France au cours des années 2000. Nous examinons tout d'abord quelques-uns des textes fondateurs de ce mouvement et résumons ainsi : 1. Un management hybride consistant à utiliser des outils des entreprises pour produire des biens et services contribuant plus efficacement aux finalités sociales ; 2. Des financements hybrides, en évitant autant que possible de dépendre des fonds publics ; 3. Des statuts hybrides ne se limitant pas au secteur non lucratif. L'objectif de cet article est d'étudier scientifiquement les attitudes et pratiques des leaders des associations, autrement dit des membres des bureaux et des cadres, vis-à-vis de l'entrepreneuriat social. La question n'est pas de savoir s'ils se sont ou non approprié l'expression « entrepreneur social », mais s'ils appliquent ses principes. Nos questions de recherche consistent à identifier sur quelles voies entrepreneuriales s'engagent ces leaders et dans quelle mesure les recommandations de la littérature en entrepreneuriat social sont compatibles avec leurs représentations et leurs pratiques. Cet article étudie ainsi les « cadres de références » (Watzlawick et al, 1975) et les « rationalités » (Simon, 1947; Weber, 1921) de ces acteurs.A partir des données de 35 entretiens semi-directifs, nos résultats montrent que, au-delà des barrières idéologiques, les leaders des associations sont d'ores et déjà confrontés à ces enjeux, essayant de trouver des voies de gestion management équilibrées entre pragmatisme et respect de leurs valeurs. Compte tenu de leurs principes sociopolitiques militants, ils développent parfois des opinions fortement négatives vis-à-vis de l'entrepreneuriat social qu'ils voient comme un concept lucratif, d'un autre côté ils adoptent des attitudes plus modérées sur les questions d'efficacité, de diversification des ressources et de compétitions en vue de résoudre les problèmes auxquels ils se retrouvent confrontés en pratique. Cela dit, nous remarquons que la culture du secteur associatif pose des limites éthiques au-delà desquelles ils refusent d'aller.Partant de là, cet article explore une version de l'entrepreneuriat social mieux adaptée à la culture du secteur associatif français. L'une des principales innovations de ce secteur consiste à « faire d'une pierre plusieurs coups », en proposant de nouveaux services tout en créant des liens entre les parties-prenantes. Les cadres de références et les schèmes mentaux (Piaget, 1971) qui sous-tendent l'entrepreneuriat social ne permettent pas de percevoir et de valoriser ce type de performances. Les principes de l'entrepreneuriat social tels qu'introduit en France, se réfèrent souvent à la notion d'utilité sociale, mais l'atteinte de ce but justifie-t-elle tous les moyens techniques et économiques ? Nous appelons à une adaptation de l'entrepreneuriat social intégrant des formes de rationalités en valeur.Le cas présenté à la fin de l'article illustre cette voie possible entre l'entrepreneuriat social et un militantisme confirmé aux valeurs du secteur associatif français. Ce jeune diplômé jugeait tout d'abord que l'association qui l'avait recruté était très mal gérée (étape 1), les logiques d'action des salariés et bénévoles autour de lui le déroutaient (étape 2), avant de progressivement mieux comprendre leur système de valeurs et d'y adhérer, devenant à son tour à un authentique militant (étape 3).The French nonprofit sector could be a field of application for social entrepreneurship principles, yet French experts and researchers have expressed some reservations about what they perceive as a concept rooted in the US context. On the other hand, little has been reported about the views of leaders of nonprofit organizations. To what extent are their attitudes, but also their practices, compatible with the principles of social entrepreneurship? Social entrepreneurship (SE) is both a theory and a practice born in the USA at the end of the 90s and imported to France during the following decade. We first examine some of its founding texts and summarize its principles as follows: 1) Hybrid management. SE consists in using tools from the business sector in order to produce goods and services more efficiently contributing to social goals; 2) Hybrid finances. SE avoids depending on public subsidies as far as possible; 3) Hybrid status. SE is not limited to the nonprofit sector. It can take and combine any kind of structure whatever its status. The purpose of this paper is to study the attitudes and practices of the leaders of NPOs i.e. members of the board and managers, in relation to SE principles, following a scientific approach. We are not concerned with whether or not they have appropriated the term ‘social entrepreneurship', but rather whether they apply its principles. Our research questions concern the entrepreneurial and management pathways in which these leaders are engaged and to what extent the recommendations of the SE literature are compatible with their representations and practices? Thus, this paper studies the frames of references (Watzlawick et al, 1975) and the rationalities (Simon, 1947; Weber, 1921) of these actors. Based on 35 semi-directive interviews, our results show that, beyond ideological barriers, nonprofit managers are already dealing with these three issues, trying to find a sustainable management pathway between pragmatism and the respect of their core values. Based on their sociopolitical activist principles, they may have strong negative opinions about a SE approach often perceived as a for-profit concept. On the other hand, they need to adopt more moderated attitudes toward issues such as efficiency, diversity of resources and competition in order to work out the management problems they experience in the field. However, we also suggest that the culture of French NPOs introduces an ethical bottom line beyond which they will not go. Thus, this paper explores a version of social entrepreneurship more adapted to the French nonprofit culture. One of the main innovations of the nonprofit sector consists in “killing several birds with one stone”, by producing new services and at the same time creating a social network of stakeholders. The framework of references and processes of thought (Piaget, 1971) underlying SE principles do not allow people to perceive and value these kinds of performances. SE principles, as introduced in the French context, often refer to social utility, yet does the efficient achievement of social goals justify all technical and economic means? We call for adaptations integrating ‘valuebased rationality'.The case presented at the end of the text illustrates a possible pathway from SE to an activism conforming to the values of the French nonprofit sector. This young graduate at first saw his NPO as a badly managed service (step 1). He was confused about the logic of action of the people around him (step 2). He then progressively began to understand and to subscribe to their value system, becoming, in turn, an efficient activist (step 3).