Contenu du sommaire : L'orphisme et ses écritures. Nouvelles recherches.
Revue | Revue de l'histoire des religions |
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Numéro | tome 219, n°4, 2002 |
Titre du numéro | L'orphisme et ses écritures. Nouvelles recherches. |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- L'orphisme et ses écritures. Nouvelles recherches : Présentation - Claude Calame, Philippe Borgeaud, André Hurst p. 379-383
- Qu'est-ce qui est orphique dans les Orphica ? [Une mise au point introductive] - Claude Calame p. 385-400 Après la publication récente de nombreux textes poétiques d'emblée considérés comme d'inspiration orphique, le moment est venu de jeter un regard critique sur une classification dont les motivations ne sont pas toujours explicites. Occasion de s'interroger sur le rôle cultuel de ces textes nouveaux, sur le statut de l'orphisme comme mouvement religieux à l'époque classique, sur les fonctions assumées par la figure héroïque d'Orphée et sur le rôle joué par les pratiques de l'écriture dans la composition poétique orphique.What is Orphie in the "Orphica" ? An Introductory Appraisal After the publication in recent years of various poetical texts considered as being inspired by Orphism, the time has come to have a critical look at such a classification, the appositeness of which is often unclear. This provides an opportunity to question the cultic role of these new texts, the status of Orphism as a religious mouvement in classical Greece, the functions assumed by Orpheus as a hero and a founder, and the role played by writing in the composition of Orphic poems.
- La toile de Pénélope : a-t-il existé un mythe orphique sur Dionysos et les Titans ? - Alberto Bernabé p. 401-433 Luc Brisson et Radcliffe Edmonds ont récemment douté de l'existence du mythe orphique de Dionysos et les Titans dans l'Antiquité. Un nouvel examen des textes pertinents (présentés dans un dossier joint) porte à la conclusion que ce mythe n'est pas une construction du XIXe siècle, mais qu'il provient de la Grèce ancienne. Les différents auteurs qui parlent du mythe puisent à tour de rôle dans les différents éléments de son paradigme, mais ils n'ajoutent jamais des éléments incompatibles avec le schéma retracé, qui a gardé sa cohésion en tout temps. Il doit donc répondre à un mouvement religieux d'une longue durée lui aussi. Quel autre candidat d'une aussi longue durée pourrions-nous trouver en dehors de l'orphisme ?Penelope's cloth. Was there an Orphic myth of Dionysos and the Titans ? Brisson and Edmonds have recently questioned the existence of the Orphic myth of Dionysus and the Titans in antiquity. A new examination of relevant texts (presented at the end of the paper) establishes that this myth is not a 19th century construction, but it comes from Ancient Greece. Each of the authors dealing with this myth presents a different aspect of the paradigm, but none of them adds elements incompatible with the reconstructed paradigm which has remained coherent through time. It must therefore reflect a religious movement covering many centuries. Besides Orphism, which other equally long-lasting candidates are there ?
- La figure du Kronos orphique chez Proclus. [De l'orphisme au néo-platonisme, sur l'origine de l'être humain] - Luc Brisson p. 435-458 Dans l'orphisme, la figure de Kronos, le Titan, présente une grande originalité par rapport à la tradition hésiodique. Or, une étude minutieuse des textes montre que la fabrication de l'homme à partir des vapeurs émises par les Titans frappés par la foudre de Zeus pour avoir mangé les chairs de Dionysos correspond non pas au récit fait par les "Rhapsodies", mais à une interprétation de ce récit qui, inspirée de l'alchimie, n'apparaît que tardivement dans l'École néoplatonicienne, où de surcroît étaient proposées d'autres interprétations du même épisode faisant référence soit à la division des cercles de l'âme du monde soit au mouvement de descente ou de remontée de l'âme de l'homme dans l'échelle de l'être.The figure of the Orphic Kronos in Proclus. From Orphism to Neoplatonism, on the origin of human beings The figure of the Titan Kronos in Orphism is highly original in comparison with the Hesiodic tradition. Meticulous study of the texts shows that the fabrication of human beings from the vapors emitted by the Titans, when they were struck by Zeus lightning for having eaten the flesh of Dionysos, corresponds, not to the tale told in the "Rhapsodies", but to an interpretation of this story, inspired by alchemy, which appears only late, in the Neoplatonic school. Other interpretations of the same episode were also put forward, referring either to the division of the circles of the world soul, or to the movement of descent and re-ascent of the human soul along the scale of being.
- Poésie orphique et rituel initiatique. [Éléments d'un « Discours sacré » dans les lamelles d'or] - Christoph Riedweg p. 459-481 Plusieurs des lamelles d'or retrouvées jusqu'ici dans les fouilles se distinguent par un mélange marqué de vers et de prose rythmée. Les parties en prose rythmée ont une apparence proprement performative et peuvent être classées en deux groupes : ou elles semblent avoir la fonction d'un secret « mot d'ordre » et commémorer un rituel initiatique ; ou elles ont l'air d'être le résultat d'une adaptation de la narration poétique pour servir de livret dans le cadre d'une mise en scène à l'occasion de l'initiation. Dans le deuxième cas, il semble légitime de les prendre en considération dans une tentative de reconstituer non les mots, certes, mais au moins les données principales de l'« histoire » racontée dans le « Discours sacré » original.Orphic Poetry and Initiation Ritual. Elements of a « Sacred Discourse » ("Hieros Logos") in the Gold Leaves Many of the fascinating little gold leaves which have come to light so far are characterized by a peculiar mixture of verse and rhythmical prose. The lines in rhythmical prose have a distinctly performative ring and may be divided into two groups : one serving as a kind of secret password and commemorating an initiation ritual ; the other issuing from an adaption of the poetical narration in order to be used as a libretto for a performance in the course of the initiation. In the second case, it seems justified to include them in an attempt at reconstructing not the words, to be sure, but at least the rough outline of the « story » which was narrated, in the original « Sacred discourse ».
- Les deux mères de Dionysos, Perséphone et Sémélé, dans les Hymnes orphiques - Jean Rudhardt p. 483-501 Les "Hymnes orphiques" ne sont pas narratifs. Toutefois, par un jeu savant d'adjectifs, de participes et de propositions relatives, ils se réfèrent à de nombreux mythes. Il s'agit pour nous de percevoir et de comprendre ces brèves allusions : un exemple illustrera la richesse de leur apport. - La tradition hellénique courante fait de Dionysos le fils de Zeus et de Sémélé ; les mythes évoqués dans les fragments orphiques publiés par Otto Kern font de lui le fils de Zeus et de Perséphone. Nous constaterons que les "Hymnes orphiques" coordonnent les deux traditions d'une manière étrange et subtile.The two mothers of Dionysos, Persephone and Semele, in the "Orphic Hymns" The "Orphic Hymns" are not narrative, but through a skillful interplay of adjectives, participles and relative clauses they refer to numerous myths. The present study aims to isolate and understand these fleeting allusions, one example of which can illustrate quite how rich they prove to be. The prevailing, Hellenic tradition sees Dionysos as the son of Zeus and Semele, whereas the myths evoked in the Orphic fragments published by Otto Kern show him as the son of Zeus and Persephone. It will be seen that in the "Orphic Hymns" the two traditions are conjoined in strange and subtle ways.
- Convergence et divergence dans l'interprétation du mythe d'Orphée. [De Clément d'Alexandrie à Eusèbe de Césarée] - Jean-Michel Roessli p. 503-513 Le mythe d'Orphée charmant les animaux par la vertu de son chant et de sa lyre a suscité un vif intérêt de la part des auteurs chrétiens de l'Antiquité. Parmi eux certains ont été sensibles aux analogies du mythe avec le pouvoir d'action du Logos sur le monde et sur les hommes. Ainsi Clément d'Alexandrie et Eusèbe de Césarée ont cru pouvoir se servir du mythe d'Orphée poète, chanteur et musicien pour expliquer aux Grecs comment s'exerce l'activité du Logos divin. Le premier, fidèle à l'esprit de son temps, insiste surtout sur ce qui oppose le chant d'Orphée et le chant nouveau du Logos ; le second vivant à une époque où la "paix de l'Église" se profile avec plus de clarté, cherche plutôt à exploiter les ressources apologétiques d'une comparaison irénique entre le chantre thrace et le Verbe de Dieu.Convergence and Divergence in the interpretation of the myth of Orpheus : From Clement of Alexandria to Eusebius of Caesareia The myth of Orpheus charming animals by virtue of his singing and lyre-playing aroused great interest among Christian authors in ancient times. Somes of these were struck by parallels between the myth and the power of the Word on the world and on men. Clement of Alexandria and Eusebius of Caesareia for instance believed they could draw on the myth of Orpheus, the poet, singer and musician to explain to the Greeks the workings of the divine Word. The former, true to the spirit of his times, insisted above all on oppositions between the song of Orpheus and the new song of the Logos ; the latter, living in an era when the "Peace of the Church" was emerging more clearly, sought rather to exploit, the apologetical potential of an irenic comparison between the Thracian melodist and the Word of God.