Contenu du sommaire : La préposition en
Revue | Langue française |
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Numéro | no 178, juin 2013 |
Titre du numéro | La préposition en |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Sémantique de la préposition en : quelques repères - Denis Vigier p. 3-19 Cet article dresse un tableau synthétique et raisonné des travaux qui ont marqué l'étude de la préposition en. L'objectif consiste à montrer, dans une perspective fondamentalement cumulative, que les courants linguistiques qui ont dominé les recherches au XXe siècle ont chacun à leur manière contribué à accroître significativement nos connaissances sur en.Semantics of the preposition ‘en': some landmarks. This paper presents a reasoned synthetic overview of the major works on the preposition en. Taking a fundamentally cumulative approach, it aims at showing that each of the linguistic currents which dominated 20th-century research has contributed in its own way to a significant increase in our knowledge on en.
- En : de la préposition à la construction - Walter De Mulder, Dany Amiot p. 21-39 Dans cette contribution, nous partirons des principes élaborés dans le cadre des grammaires de construction pour d'abord étudier des constructions dans lesquelles le complément introduit par en est dans la dépendance d'un verbe [V (SN) en N], et nous distinguerons trois grands types d'interprétations, la localisation (§ 2), l'attribution d'un état à un objet ou à un sujet (§ 3) et l'expression d'une propriété (§ 4), chacune de ces interprétations étant à associer à une ou plusieurs constructions, celles-ci se déclinant elles-mêmes en sous-constructions. Le but de ces trois premières parties sera de montrer que le sens des constructions identifiées excède à chaque fois le sens des constituants qui saturent les variables, même si une certaine compositionnalité existe dans tous les cas. Nous étudierons ensuite (§ 5) la construction gérondive [en V-ant], et nous montrerons que celle-ci est, en français moderne, inanalysable (on n'y retrouve ni compositionnalité, ni le sens de la préposition en). La construction gérondive ne pourra donc s'intégrer au réseau des constructions étudiées précédemment.‘En': from a preposition to its associated constructions. In our contribution, we use the principles that have been developed in the framework of construction grammars as a starting point to analyse constructions in which the complement of the preposition en depends on a verb [V (SN) N]. We distinguish three main interpretation types, localisation (§ 2), the attribution of a state to an object or a subject (§ 3) and the expression of a property (§ 4), each of which is associated with one or several constructions. The aim of the three first sections will be to show that the meaning of the constructions under study goes beyond the meaning of the constituents that saturate the variables, although there still seems to be a kind of compositionality in each case. We will then look into the gerundive construction [en V-ant] (§ 5) and we will show that it cannot be further analysed in modern French (it displays no compositionality and the meaning of en can no longer be independently identified). The gerundive construction thus cannot be integrated in the network of constructions studied before.
- L'opérateur en en linguistique instructionnelle enactive - Didier Bottineau p. 41-58 La question de savoir si la préposition en ou les divers types de pronoms en sont munis d'invariants dans leurs catégories grammaticales propres a été âprement débattue. La présente étude s'inscrit dans le cadre des grammaires intructionnelles, qui voient dans les signifiants les activateurs de processus interprétatifs dynamiques plutôt que les marques symboliques qui encodent des représentations mentales, et elle réfère plus précisément à la grammaire enactive. On montre qu'il est possible de proposer pour en un invariant transcatégoriel de nature non-représentationnelle susceptible de s'appliquer à l'ensemble des catégories grammaticales auxquelles ce marqueur s'applique (préposition, préverbe gérondival, clitiques de divers types, et particules parfois mal identifiées).The marker ‘en' in enactive instructional linguistics. The question whether the marker en in the various categories in which it appears (as a preposition and as various types of pronouns) has been widely debated. The present study is conducted in the theoretical framework of instructional grammars, which define signifiers as the activators of interpretive processes rather than as symbolic markers encoding mental representations, and it refers more specifically to enactive grammar. It is shown that it is possible to envisage a transcategorial core value of dynamic, non-representational nature, which applies to the whole range of grammatical categories in which this marker is manifested (preposition, gerundive particle, various types of pronouns and “fuzzy” particles).
- Le régime nominal de la préposition en dans la construction être en + N abstrait : une étude aspectuelle - Bruno Martinie, Denis Vigier p. 59-79 Cet article étudie les contraintes qui pèsent sur l'insertion des noms abstraits dans la construction être en N. Rendre compte de contrastes tels que être en vie vs. *être en mort, ou encore être en colère vs. *être en peur constitue un véritable défi pour l'analyse linguistique, comme en témoignent les obstacles rencontrés par les différentes études déjà menées sur la question. On propose ici de répartir les noms abstraits sur les quatre catégories aspectuelles que Z. Vendler (1957, 1967) avait en son temps proposées pour les verbes. On tentera de montrer que cette approche permet une meilleure compréhension des faits, et permet également en retour d'affiner l'étude sémantique de en.The nominal object of the French preposition ‘en' in the construction ‘être en + Abstract Noun': an aspectual approach. This article deals with the problem of the insertion of French abstract nouns in the construction être en N. It has been noticed through several former surveys how challenging is the explanation of contrasts such as être en vie vs. *être en mort, or être en colère vs. *être en peur. It is here proposed to sort abstract nouns into the four aspectual categories that Z. Vendler (1957, 1967) introduced for the classification of verbs. Such an approach seems relevant to explain why only certain abstract nouns can appear in être enN, and seems also a suitable way to study the semantic properties of en.
- Pourquoi peut-on dire être en faute, être dans l'erreur mais non *être dans la faute, *être en erreur ? - Danielle Leeman p. 81-92 Le problème abordé concerne la sélection de son complément par la préposition en, qui autorise être en faute mais non *être en erreur, à l'inverse de la préposition dans qui permet être dans l'erreur mais non *être dans la faute. L'hypothèse de résolution part des travaux de Gustave Guillaume, lequel s'efforce de justifier la possibilité de combinaison être en faute qui ne devrait pas, normalement, être acceptable. L'analyse lexicale comparative des deux noms conduit cependant à la conclusion que erreur relève de l'extérieur de l'individu tandis que faute au contraire implique une intériorisation, de même que la préposition dans instaure un cadre alors que en définit un état du sujet : l'hypothèse soutenue est que cette convergence explique que les associations dans / erreur et en / faute soient privilégiées.Why can we say ‘être en faute', ‘être dans l'erreur' but not ‘*être dans la faute', ‘*être en erreur'? This paper deals with the way in which the preposition en selects its complement, licensing être en faute while prohibiting *être en erreur, in contrast with the preposition dans, which allows être dans l'erreur but not *être dans la faute. The working hypothesis is derived from the theory of Gustave Guillaume, who endeavours to account for the existence of the phrase être en faute, which ought not to be acceptable. The comparative lexical analysis of the two nouns leads to the conclusion that erreur specifies a property of the individual considered from an external viewpoint by the observer while faute provides an insight into the subject's internal properties: ourhypothesis is that this convergence explains why the correlations dans / erreur and en / faute are preferred.
- De en à dans, un simple remplacement ? Une étude diachronique - Benjamin Fagard, Bernard Combettes p. 93-115 Nous étudions dans cet article l'alternance entre les prépositions en, dedans et dans pendant une période charnière de leur histoire, du XVIe au XVIIIe siècle, afin d'analyser la dynamique du ‘remplacement' de en par dans et la compétition avec dedans. Nous recourons pour cela à une série d'études sur corpus afin d'identifier le rôle du contexte dans le choix de la préposition. Nous montrons ainsi qu'il y a une spécialisation sémantique initiale de dans avec certains emplois spatiaux, mais que ses emplois évoluent rapidement vers l'abstrait. Dans une seconde série d'études sur corpus, nous abordons la question du mode de transmission des changements, en analysant la tendance des auteurs à suivre le mouvement général d'évolution de la langue (effet de mode) ou bien, au contraire, à imposer des habitudes linguistiques nouvelles (effet de génération). Notre article se veut en effet une contribution au débat sur l'âge des innovateurs, avec des données diachroniques détaillées.From ‘en' to ‘dans' – a simple replacement? A diachronic corpus study. In this paper, we study the changes in use of the French adpositions en, dedans and dans over a crucial period of their evolution, namely from the 16th to the 18th century, in order to analyse the dynamics of the ‘replacement' of en by dans and the competition with dedans. We therefore run a series of corpus-based studies, with the aim of identifying the role of context in the choice of the adposition. We show that there is an initial phase of semantic specialization of dans with some spatial uses, but that the adposition quickly evolves towards more abstract uses. In a second series of corpus-based studies, we tackle the question of the mode of transmission of language change, and analyse authors' tendency to follow the general trend of language (fashion effect) or, on the contrary, to instigate new linguistic habits (generation effect). We thus hope to participate in the discussion about the age of innovators, contributing detailed diachronic data to the debate.
- La préposition en dans la francophonie africaine - Peter Blumenthal p. 117-131 L'article expose d'abord les méthodes permettant d'obtenir de façon quasi-automatique, grâce à une banque de données, des informations sur les différences d'emploi de la préposition en dans deux corpus journalistiques comparables, provenant de France et d'Afrique. Les phénomènes qui s'avèrent typiquement africains font ensuite l'objet d'une analyse linguistique qui essaie d'en déterminer l'origine. En principe, il peut s'agir d'archaïsmes ou de néologismes, de constructions induites par des tendances générales du français en Afrique ou par l'arrière-plan socioculturel des régions concernées. Une étude approfondie révèle cependant la complexité d'une situation dans laquelle il y a souvent interaction entre au moins deux de ces facteurs.The preposition ‘en' in francophone Africa. This paper introduces some quasi-automatic methods of obtaining information on the use of the preposition en in two comparable newspaper corpora from France and Africa. The phenomena which turn out to be typical of African French are then subjected to linguistic analysis to determine their origin. More precisely, the aim is to find out whether the phenomena under investigation should be considered as archaisms, as neologisms, as reflecting general tendencies of African French, or as being influenced by the sociocultural background of the relevant regions. An in-depth analysis reveals that the situation is highly complex, with at least two factors interacting in many cases.