Contenu du sommaire : Dictionnaires, Grammaires, Catégories, Philosophie, Déchiffrement
Revue | Histoire, Epistémologie, Langage |
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Numéro | vol.8, n°1, 1986 |
Titre du numéro | Dictionnaires, Grammaires, Catégories, Philosophie, Déchiffrement |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Dictionnaires, Grammaires, Catégories, Philosophie, Déchiffrement
Articles
- Avant-propos - Sylvain Auroux p. 7-8
- La lexicographie espagnole jusqu'à Covarrubias - Hans-Josef Niederehe p. 9-19 La lexicographie de l'espagnol commence au Moyen-Age, avec un nombre assez réduit de glossaires. Elle ne prend son véritable essor que vers la fin du 15e siècle avec les dictionnaires latin-espagnol et espagnol-latin de Nebrija. Suivent les dictionnaires latin-espagnol de Maître Rodrigue et de Jimenez Arias. A partir des années 1570, c'est le Calepin, enrichi d'une glose espagnole, qui commence à viser le même public que ces petits dictionnaires polyglottes destinés aux commerçants de l'époque et qui sont publiés pendant tout le siècle. Vers 1570 également, dans une autre série de dictionnaires, le latin est remplacé par une langue non-classique; le dictionnaire bilingue moderne est né. Quarante ans plus tard, Covarrubias publiera son «Tesoro.», premier véritable dictionnaire monolingue de l'espagnol. Quant aux lieux d'impression de tous ces dictionnaires, les Pyrénées semblent avoir constitué une véritable barrière, et" cela dans les deux sens. Seul Nebrija a pu la franchir.Spanish lexicography began in the Middle Ages with a rather limited number of glossaries. It only blossomed around the end of the 15 th. century with Nebrija's Latin-Spanish and Spanish-Latin dictionaries. From the years î57û onwards, the Caïepin, enriched with a gloss in Spanish began to be directed at the same readership as the small polyglot dictionaries meant for traders, which were published throughout the century. About 1570 also, in another series of dictionaries, Latin was replaced by a non-classicallanguage: the modern bilingual dictionary had come into existence. Forty years later, Covarrubias published his «Tesoro» the first monolingual dictionary of Spanish. Regarding the printing places of aIl the dictionaries, the Pyrennes seem to have formed · a complete barrier, in both directions. Only Nebrija was able to cross that barrier.
- Amatus sum vel fui : l'évocation de la personne - Christine Brousseau-Beuermann p. 21-34 L'evocatio ou attraction de la troisième personne du nom par la première personne du pronom, disparaît des grammaires lorsque le nom n'est plus marqué par la personne; mais cette figure de construction est illustrée par certains exemples analysés aujourd'hui par les philosophies du discours. Abondamment discutée aux XIIe et XIIIe siècles, à propos du sophisme Amatus sum (veZ fui), de l'exemple sum/ vocor Petrus, ou du classique Ego Priscianus scribo, cette figure de construction est analysée en ses composantes, sémantique et discursive, notamment par Roger Bacon et Raoul le Breton, qui distinguent les deux relations inversement complémentaires de la spécification de la substance par la forme du nom placé dans le prédicat, et l'attraction de la troisième personne du nom par la première personne du sujet qui est plus définie.The evocatio or attraction of the 3rd person of the Noun by the Ist person of the Pronoun, in such examples as Ego Priscianus scribo, was discussed at length during the XIIth and XIIIth centuries and analysed by Roger Bacon and Radulphus Brito; among others; into both a semantical specification of the substance by the Predicate Noun, and as an attraction of the 3rd person of the Noun by the Ist person of the Subject Pronoun. The personal feature of the Noun, which henceforth disappears from grammars, tends to be reconsidered in to-day's philosophies. of dialogism.
- The concept of signification in J.-C. Scaliger - Kristian Jensen p. 35-52 Le présent article se propose de démontrer que le concept de signification utilisé par Jules César Scaliger (1484-1558) trouve son origine dans des courants philosophiques largement répandus au seizième siècle. Scaliger est un éclectique, mais limite grosso modo son éclectisme à diverses formes d'aristotélisme. Le scotisme fait partie des influences les plus évidentes, mais on peut en relever de nombreuses autres. L'article souligne le fait que la spéculation grammaticale resta en contact étroit avec la philosophie scolastique enseignée dans les institutions académiques. Il apparaît que Scaliger a un concept de signification constant, mais flou, la principale contradiction se manifestant entre son fondement épistémologique et le rôle assigné à l'usus.The present article attempts to show how I. C. Scaliger's concept of signification is based on philosophical trends which were common in the sixteenth century. It is shown that Scaliger is an eclectic, but that he by and large confines his eclecticism to various types of Àristotelianism. Scotism is among the more noticeabie trends, but many other tendencies are in evidence. The article illustrates how · grammatical speculation remained closely in contact. with the scholastic philosophy taught in the academic institutions. Scaliger appears to have a constant but inconsistent concept of signification, the main inconsistency being between its epistemological foundation and the role ascribed to usus.
- Ramisme et post-ramisme : la répartition des "arts" au XVI s. - Geneviève Clérico p. 53-70 On assiste, à la Renaissance, à une nouvelle répartition des différentes disciplines au sein du trivium, et à une redéfinition des tâches assignées à la rhétorique, à la dialectique et à la grammaire. Agricola, puis Ramus, proposent une nouvelle conception de la. dialectique, intégrant l'inventi~ et la dispositio de l'ancienne rhétorique, réduisant celle-ci à une analyse des procédés plus que des contenus. Ramus organise son oeuvre grammaticale et sa DialectiClue selon des principes de mise en ordre visuels, et dans un souci constant d'autonomiser l'étude grammaticale en excluant les critères sémantiques de classement. Il appartiendra à son successeur Sanctius de prolonger son entreprise, d'une part dans un De Ârte dicendi (1556), et un Organum Dialecticum et Rhetoricum (1579), oeuvres significatives peu connues; d'autre part et surtout dans sa Minerve (1562-1587) qui offre des développements syntaxiques partiellement fondés sur les postulats ramistes, mais systématisés par un transfert dans le domaine grammatical de la notion de figures de construction». L'ellipse, constamment exploitée dans la grammaire sanctienne, permet de réduire l'écart entre la rationalité de la langue (ses c causes») et la multiplicité de l'usage.The Renaissance witnesses a new apportionment of the different. disciplines within the trivium and a new definition of the tasks assigned to rhetoric, dialectics and grammar. Agricola first, then Ramus, propose a new conception of dialectics incorporating. the, invention and disposition of the rhetoric of yore, reducing the latter to. an analysis of patterns rather than contents. Ramus organises his grammatical works and his dialectics according to visual classifying criteria, with a constant aim at making the study of grammar autonomous by excluding the semantic point of view from his classification. His successor, Sanctius, extends his undertaking through his De Arte dicendi (1556) and his Organum Dialecticum et Rhetoricum (1579) on the one · hand significant works though little known; through his Minerva (1562-1587) above aIl, which presents syntactic · developments that are partly grounded in Ramist postulates but · systematized by a transfer to the grammatical sphere of the notion of «figures of construction». Ellipsis, constantly resorted to by Sanctius, allows him to reduce the gap between the rational status of the languag~ (its «causes»), and the multiple aspects of usage.
- Les deux grammaires de Condillac - Ulrich Ricken p. 71-90 Le texte de référence de la Grammaire de Condillac, est celui du tome 1 du Cours d'Étude, paru en 1775 avec la fausse indication «A Parme. De l'Imprimerie Royale». Il se trouve cependant que: a) la Bibliothèque Palatine de Parme possède un manuscrit autographe, comportant des «Avis à l'imprimeur», manuscrit sensiblement plus court que le texte de 1775; b) une première impression du Cours d'Étude, faite à Parme (1769-1772), interdite par la censure, et parue en 1782, avec la fausse indication «Aux Deux Ponts», contient une Grammaire, qui correspond au. manuscrit conservé à Parme. Le manuscrit de la Bibliothèque Palatine correspond donc à un état antérieur. L'article présente une première étude des différences entre ces deux versions, la seconde (1775) apportant de considérables éclaircissements sur les options philosophiques, avec notamment le refus de l'arbitraire linguistique.The reference text for Condillac's Grammaire is that of the Cours d'Etude published in 1775 with the false localisation «A Parme, de l'Imprimerie Royale». It appears however that: a) the Palatine Library in Parma contains an autograph ms. including «notes for the printer» (« Avis à l'imprimeur.»); this ms. is noticeably shorter than the 1775 edition. b) a first printing of the Cours d'Etude, prepared in Parma (1769-1772) was censored and only published in 1782 with the false localisation «Aux deux Ponts»; it contains a grammar witch follows the Parma ms. It foHows that this ms. corresponds to an earlier stage of the grammar. This paper offers a first study of the differences between the two versions, the second one (1775) offerring significants insights into Condillac philosophical choices (among others, his rejection of the arbitrary nature of language).
- Langage, oubli, vérité dans la philosophie de Nietzsche - Donatella Di Cesare p. 91-106 La critique que M. Bréal adresse à la méthode étymologique suivie par Nietzsche dans la Généalogie de la morale -critique qui indique la séparation qui s'était crééé entre la linguistique et la philosophie du langage -ne permet pas seulement de montrer les points du désaccord Bréal-Nietzsche, mais surtout de préciser l'image de Nietzsche philosophe du langage. Nietzsche se révèle ainsi un défenseur radical de la thése humboldtienne du relativisme linguistique. Mais dans sa critique du langage c'est l'aspect négatif de cette thése qui est souligné: la langue, qui devrait ouvrir à l'individu la seule voie d'accès à la réalité, finit au contraire par la lui cacher, en lui faisant croire que la vision du monde qu'elle contient est la seule possible, qu'elle est même le monde lui-même.The criticism that M. Bréal addresses to the etymological method used by Nietzsche in his Genealogy of Morals -a criticism which is a symptom of the separation that had come about between linguistics and philosophy of lang-Jagemakes it possible for us not only to show the disagreement between Bréal and Nietzsche, but also, and mainly, to sketch out the figure of Nietzsche as philosopher of language. Nietzsche is a radical supporter of the well-known humboldtian thesis of linguistic relativisme But Nietzsche's criticism of language throws light on the negative aspect of this thesis: language, which should open up for the individual the only way of accessing to reality, on the contrary conceals reality, making him believe that the vision of the world that it contains is the only possible one, or rather, that it is the world itself. Nietzsche thus destroys the myth of an «objective reality», that language should reflect, unmasking the impulse immanent in every human being to hypostatize a stable and unchanging world of objects behind the words.
- Arsène Darmesteter (1846-1888) - Gabriel Bergougnioux p. 107-123 Cette étude vise à reconstruire la logique sociale de la carrière du linguiste français Arsène Darmesteter, marginalisé par son statut religieux et sa formation scolaire, et la logique scientifique de · ses travaux, proches des thèses néo-grammairienne$ et préfiguration de la sémantique de Bréal. En apportant au marché de la linguistique biographie et recherches, on a cherché à montrer, en s'appuyant sur les théories de P. Bourdieu, en quoi cette oeuvre trouve sa richesse et ses. limites dans le contexte historique de la romanistique et. de la phonétique européennes de la fin du XIXe.The aim of this study is to reconstruct on the one hand the sociallogic in the career of Arsene Darmesteter, the French linguist who was relegated to a marginal position because of his religious status and his education, and on the other hand the scientific logic of his work, which is close to the neo-grammarian theses and prefigures Bréal's semantics. This study relates biography and research to the market of linguistics and, using the theories of P. Bourdieu, attempts to demonstrate both the richness and the limits of Arsene Darmesteter's work within the historical context of the European romanistics and phonetics of the late XIXth century.
- La notion de partie du discours chez les grammairiens latins - François Charpin p. 125-140 Introduites dans les ouvrages de grammairiens du second siècle avant I. C., les parties du discours sont des classes de " mots définis par leur fonction sémantique et par les rapports analogiques qu'ils entretiennent entre eux. Elles sont liées à une conception empirique et éclectique de la grammaire. Elles n'impliquent ni la reconnaissance des unités du discours, ni la reconnaissance des unités morphologiques. Elles se réfèrent à une représentation du langage comme pensée qui s'exprime par des mots.Introduced in Grammairians books dating back to the 2 nd Century before I. C., parts of speech are word classes defined by their semantic function and their analog; cal features. They are linked to an empirical and eclectic conception of Grammar. They don't imply the definition of discursive or morphologie units. They are related to a representation of speech as Thought expressed by words.
- Jespersen et l'imposture des parties du discours - Paul Laurendeau p. 141-155 Pour Otto Jespersen (1860-1943), l'utilisation des classes de mots sous forme de «parties du discours» est une imposture... mais il s'en sert dans la plupart de ses importants travaux descriptifs sur l'anglais et d'autres langues. Cette contradiction dialectique atteint ses sommets dans The Philosophy of grammar où on le voit justifier et critiquer la classification traditionnelle en parties du discours dans le même temps. Après une très brève description. du système des parties du discours «amendé» retenu-par Jespersen, je m'efforce de démontrer en quoi les justifications qu'il donne pour un tel choix sont une aporie.To Otto Jespersen (1860-1943), the use of words classes as "parts of speech" is a racket... but he does use it for the main part of his important descriptive works about english and other languages. This dialectical contradiction culminates in The Philosophy of grammar where we see him justify and criticize the traditional classification of parts of speech in the same move. After a very short description of the «revisited» parts of speech system chosen by Jespersen, I try to show how his justifications for such a choice are a paradoxe
- Le traitement des catégories dans la théorie transformationnelle - Hélène Huot p. 157-177 Cet article présente un bilan évaluatif de la façon dont les catégories (parties du discours et catégories grammaticales) ont été abordées et traitées dans la théorie transformationnelle au fil de ses différents formalismes. On montre d'abord (§ 1) comment on été analysées et représentées les principales parties du discours (N, V, A, Prep), puis (§ 2) les avantages mais aussi les problèmes liés à une utilisation de plus en plus systématique d'une représentation en termes de traits. Le § 3 montre ensuite comment les catégories peuvent être définies par leurs propriétés, à travers une présentation qui constitue l'apport le plus original, et aussi le plus fécond, de la démarche transformationnelle.This paper presents an assessment of the way transformational grammar dealt with categories (the parts of speech and grammatical categories) in the course of its various formalized systems. One first shows how the main parts of speech (N, V, A, Prep) have been analysed and represented (§ 1), and then examines the benefits but also the problems resulting from the increasingly systematic use of a system of representation in termes of features (§ 2). § 3 shows how the categories can be defined according to their properties, thanks to a presentation which constitutes the most original and fruitful contribution of the transformational approach.
- Le déchiffrement de l'écriture Maya depuis 1960 - Michel Davoust p. 178-202 Dans cette étude, J; 1ous avons tenté d'exposer les problèmes, les étapes et les résultats du déchiffrement de l'Ecriture Maya durant ces 20 dernières années. A la différence des textes Egyptiens ou Hittites nous n'avons pas de textes bilingues. Néanmoins Diego de Landa, nous a laissé une liste de glyphes de jours, de mois, et un pseudo-alphabet. Si dès la fin du siècle dernier, des tentatives de déchiffrement ont été amorcées, c'est durant ces 20 dernières années qu'un groupe de chercheurs semblent progresser vers une solution logo-syllabique avec l'utilisation de compléments phonétiques. Ils s'accordent sur un groupe de langues Maya-Chol et Yucatèque et confirment le premier syllabaire partiel de Landa. Mais il reste un travail important dans l'établissement d'un nouveau catalogueThis study aims at presenting the stages, problems and results that have been linked to the decyphering of Maya writing for the last twenty years. We do not have any bi-lingual document (a case different from that of Egyptian or Hititte texts). Diego de Landa, however left a list of glyphs for days and months, together with a pseudo-alphabet. Attempts at deciphering Maya did begin as early as the end of the nineteenth century. Yet it is only in the course of the last twenty years that a group of scholars have madeprogress towards a logo-syllabic solution complemented by phonetic components. They agree on the existence of a group of Maya-Chol and Yucatech languages and confirm Landa's first syllabic alphabet. A large amount of works remains to establish a new catalog of glyphs, a grammar of the writing and to reach better knowledge of the Proto-Chollanguage. This work will aiin at having an increasing number of scholars agree on the phonetic values proposed by the American school.