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Revue | Histoire urbaine |
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Numéro | no 9, avril 2004 |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Éditorial - p. 5-6
Études
- La Porte du vizir : programmes monumentaux et contrôle territorial au Caire à la fin du XIVe siècle - Julien Loiseau p. 7-27 La redécouverte récente, au Caire, de portions de l'enceinte médiévale enfouies sous des collines de décombres depuis plusieurs siècles, permet d'éclairer d'un jour nouveau ses usages urbains dans la capitale des sultans mamelouks. À la fin du XIVe siècle, un émir de haut rang mène une opération urbaine ressérée dans un quartier contigu à l'enceinte, de part et d'autre de la Porte du vizir. Autour d'un petit monument destiné à servir de madrasa et de mausolée pour son fondateur, il rassemble immeubles de rapport et équipements collectifs à l'usage des riverains. L'investissement de prestige et l'œuvre édilitaire se doublent d'une volonté d'encadrement social, dans un quartier dominé par l'ombre tutélaire du palais de l'émir. À ces préoccupations – qui trouvent leur cohérence juridique, leur portée patrimoniale, et leur visibilité documentaire dans la procédure du waqf – s'ajoutent des enjeux défensifs. Dans une portion à moitié démantelée de l'enceinte, les constructions monumentales qui se multiplient dans les années 1380 semblent bien relever d'une politique implicite de refortification des lieux.The vizir's gate: monumental programmes and control of the urban territory in Cairo (end of the 14th century) The recent rediscovery of portions of medieval Cairo's walls, buried for centuries under layers of rubble, has shed new light on their urban uses in the Mamluk sultans' capital. At the end of the 14th century, a high-ranking emir undertook an urbanization project enclosed within a quarter neighboring the walls, on either side of the Vizir's Gate. Around a small monument, intended to serve both as a madrasa and as the founder's mausoleum, he brought together income-generating buildings and communal facilities for the area's residents. Thus did a desire for social enframing echo what was both a status investment and a civic project, in a neighborhood dominated by the tutelary shadow of the vizir's palace. These preoccupations which draw their juridical coherence, their patrimonial impact and their documentary visibility from the procedure of waqf were combined with security concerns. In a partially demolished section of the walls, the monumental constructions that proliferated in the 1380s seem to have arisen in response to an implicit policy of reinforcement.
- Parcours festifs et enjeux de pouvoirs dans les villes des anciens Pays-Bas bourguignons au XVe siècle - Élodie Lecuppre-Desjardin p. 29-45 L'article propose une relecture des entrées princières bourguignonnes, particuliè-rement attentive aux lieux et aux parcours qui les structurent et contribuent à leur donner une signification politique. Très éloigné de l'organisation des processions urbaines dont la circularité consacre l'ensemble du monde urbain, l'itinéraire du prince ne retient que quelques lieux clefs à même de renforcer l'autorité et l'aura ducales. La géographie urbaine modelée par la cérémonie accorde toutefois une place aux échevins, corps de métiers et simples citadins bien décidés à s'immiscer dans cette communication symbolique attachée à l'espace public pour affirmer à leur tour leur identité.Festive Itineraries and Powers at Stake in the Towns of the Burgundian Low Countries during the XVth Century This article deals with Burgundian ceremonies organised in the towns of the Low Countries, during the XVth century and puts stress on the town landscape considered as a link between ritual and political communication. Unlike the urban processions which took the all town in account, the prince's itinerary picked only some key-places in the aim to strengthen the authority and the aura of the duke. Thus, a new urban geography is shaped by these ceremonies. But symbolic communication did not benefit to the only prince. Magistrates, tradesmen and city-dwellers used also their public space for the maintaining of their own identity.
- Cidades et villes cathédrales dans l'outremer portugais : le cas de Mariana (Minas Gerais) - Cláudia Damasceno Fonseca p. 47-64 En 1745, à la suite de la création du diocèse de Minas Gerais, la petite Vila do Carmo devient la cité épiscopale de Mariana. Cet article analyse la métamorphose, à la fois physique et symbolique, de cette ville minière brésilienne. Il s'agit, dans un premier moment, d'étudier les enjeux sociaux et politiques de l'institution du siège de l'évêché et de la fondation d'une cidade – titre urbain qui avait une signification particulière dans le monde portugais. Ensuite, on s'intéresse aux changements qui s'opèrent dans la morphologie de l'agglomération destinée à accueillir la cathédrale, en analysant le rôle joué par la municipalité et par le pouvoir métropolitain dans la construction d'un nouvel espace urbain. En guise de conclusion, nous essayons d'aborder l'évolution de la cité épiscopale en ce qui concerne sa position dans la hiérarchie urbaine du Minas Gerais, afin de vérifier l'existence d'un lien entre la fonction religieuse et le développement économique et démographique de la localité.Cidades and Episcopal Cities in the Portuguese Overseas Empire: the Case of Mariana (Minas Gerais) In 1745, following the creation of the diocese of Minas Gerais, the small town of Vila do Carmo became the episcopal city of Mariana. The physical and symbolic metamorphosis of this Brazilian mining town is the subject of this article. First, we examine the social and political importance of the institution of the episcopal seat and the special significance in the Portuguese world accorded to the founding of a cidade. Second, we explore the morphological changes to the urban setting where the cathedral was to be built by looking at the role of the municipal and metropolitan powers in the construction of a new urban space. By way of conclusion, we attempt to trace the evolution of the episcopal city in relation to the urban hierarchy of Minas Gerais so as to confirm the existence of a link between the city's religious function and its economic and demographic development.
- Musiciens dispersés dans la ville : Localisation de l'habitat musicien au Mans, XVIIe -XIXe siècles - Sylvie Granger p. 65-78 Comment la population musicienne a-t-elle investi l'espace urbain étudié, la ville du Mans, du XVIIe au XIXe siècles ? Les hommes de la musique ne se répartissent pas tout à fait comme la population générale : nombreux au centre de la ville, les musiciens sont rares, à l'inverse, dans les paroisses périphériques. Au cours du XVIIIe siècle, on observe un déplacement de leurs effectifs d'abord des bords de la rivière vers la Ville Haute, puis, à partir de la Révolution, un basculement vers les quartiers modernes. Les différents métiers de la musique adoptent des comportements nuancés : plus sensibles au critère de proximité en raison de leurs horaires chargés, chantres et maîtres de chapelle logent au plus près des É glises, tandis que les professeurs de piano privilégient l'image renvoyée par une adresse à la mode.Musicians scattered all over the town. Where musicians dwelt in Le Mans, in the 17th and 18th centuries? How did musicians occupy the urban area studied here, namely le Mans, from the 17th century to the 19th ? The «men of music» are not distributed exactly like the whole of the population: many of them live in the centre of the town, far fewer in the outlying parishes. During the 18th century, one can observe a shift of their numbers from the river banks to the «High Town», then, from the French Revolution onwards, a movement towards the modern districts. Various types of behaviour can be noticed, according to the different musical professions: on account of their many working hours, cantors and choir-masters dwell near the churches, whereas piano-teachers rather choose a fashionable address.
- Versailles, le château et la ville : Deux patrimoines distincts, deux mémoires antagonistes à l'époque contemporaine ? - Noëlle Dauphin p. 79-96 La ville de Versailles et le château sont deux entités distinctes. Face au poids du patrimoine et de la mémoire du château, la ville tient au XIXe siècle à affirmer son identité. Comment gérer le paradoxe de faire exister la ville à la fois en dépit et en fonction du château ? Ce n'est qu'en mai 1789 que Versailles a été dotée d'une municipalité, à la veille de son abandon par la Cour en octobre. Elle doit à la Révolution sa reconversion comme chef-lieu de département et restructure son espace en fonction de ses nouvelles activités. Trop étendue par rapport à sa faible population et totalement dépourvue de biens propres, elle surmonte avec difficulté ce double handicap; elle parvient à arracher au Domaine tant les éléments d'un patrimoine propre que des droits d'usage sur l'emprise du château, tout en exploitant ce capital touristique. Tributaire de cette contrainte économique, elle ne parvint pas à imposer, face à la mémoire de la demeure des rois, renforcée par les événements de 1871, sa propre identité politique, libérale et républicaine, pourtant affichée par son arrogant hôtel de ville et le culte laïc de Lazare Hoche.Versailles, the palace and the town. Two distinct patrimonies, two opposed memories in the 19th century? The town and the palace of Versailles are to be distinguished. The town is bent to assert its own identity facing the palace with its patrimony and memory of weight. The town-council has to get the town extant both in spite of and in terms of the palace. Only in may 1789 Versailles was given a town-council, just before being forsaken in October. It became a prefecture, which enables it to regain vitality, but there were two problems: the town had no properties and not enough people paying borough rates to provide enough money for the expenditures. Nevertheless the town managed to recover some buildings from the State domain and even rights of using some parts of the palace estate; in the same time the town was making money with tourists visiting the palace. The palace and the memory of the kings, then the events of 1871 would suggest that the inhabitants of Versailles might be royalists; on the contrary there always were steady liberals and republicans, but they failed to get their city so reputed. The palace overcame the town.
- Moderniser la ville éternelle : Luttes politiques, rivalités institutionnelles et contrôle du territoire : Rome 1870-1900 - Denis Bocquet p. 97-109 Au moment où Rome devient la capitale du Royaume d'Italie s'ouvre une longue période de rivalité entre services techniques de l'Etat et services municipaux pour le contrôle des grands chantiers de modernisation technique de la ville. Ces conflits ont aussi un aspect politique, autour de la place des catholiques dans la nation. Il s'agit dans cet article d'examiner ces épisodes à la lumière d'une histoire de la décision, au travers du cas de plusieurs chantiers: la canalisation du cours urbain du Tibre et la modernisation et l'extension du réseau d'égouts. Il est possible de la sorte de lire l'évolution de l'emprise spatiale des différentes institutions, et de tenter de relativiser certaines conclusions quant au devenir de la nouvelle capitale issues de recherches fondées sur une histoire plus directement politique ou liée à l'examen de la dimension symbolique et monumentale des rivalités institutionnelles.Modernizing the Eternal City. Political and institutional struggles for the control of urban space: Rome 1870-1900 When Rome becomes the new capital city of Italy, in 1870, a long-lasting struggle between State and Municipality begins, in the context of the complex relationship between Catholics and the Nation. The object of this paper is to use the controversy about the Tiber river embankment and the modernization of the sewing system to analyze the decision making processes at work. The aim is to implement an history of decision making processes in the field of public works, with a link with political stakes, in order to try and propose an urban history method that could bring together the study of the urban form and the study of political life, with an attention to the history of technical and bureaucratic apparels.
- Le temps des églises démontables : L'architecture religieuse face aux transformations urbaines des années 1950 et 1960 - Pierre Lebrun p. 111-127 La conception des édifices religieux dédiés au culte catholique a été, durant les années 50-60 en France, l'objet d'une profonde remise en question concourant au rejet de l'image conventionnelle de l'église monumentale, au profit d'églises démontables, provisoires ou polyvalentes.Demountable churches. Religious architecture faced with the urban transformations taking place between 1950 and 1960 The conception of the religious buildings dedicated to the catholic cult was, during years 50-60 in France, the object of a profound questioning contributing to the refusal of the conventional image of the monumental church, to the benefit of nomadic, demountable or multi-purpose churches.
- L'histoire urbaine en Afrique : une perspective ouest-africaine - Laurent Fourchard p. 129-144 L'histoire des villes en Afrique est un champ d'étude relativement nouveau, attentif depuis une vingtaine d'années aux influences de l'urbanisation sur les pratiques sociales et culturelles africaines et à la manière dont les Africains ont façonné les villes. La multiplication des études de cas au contenu fort variable témoigne de ce nouvel intérêt. Cependant, le bilan historiographique des recherches sur l'Afrique de l'Ouest apparaît en demi-teinte. D'un côté, l'histoire urbaine a accéléré le renouvellement de l'histoire sociale, politique et même culturelle en faisant surgir des acteurs, des pratiques et des institutions inconnus il y a trente ans. De l'autre, elle reste largement imperméable à la longue durée comme aux thèmes très contemporains de la consultance internationale. La perspective monographique demeure le cadre normatif de la production historique si bien qu'il n'existe toujours pas de synthèse sur l'Afrique de l'Ouest malgré une tradition urbaine pluri séculaire unique en Afrique subsaharienne.Urban history in Africa: a West-Africa analysis History of cities in Africa is a recent field of research which interrogates – for now two decades – the ways in which Africans shaped the patterns of urbanisation and how urbanisation influenced African social and cultural practices. The development of numerous case studies – of unequal quality – testifies this new interest for African cities. However, an overview of the literature on West Africa is not totally satisfactory. On the one hand, urban history has accelerated the renewal of social, political and even cultural history focusing on urban actors, practises and institutions totally unknown thirty years ago. On the other hand, urban history has not really taken into consideration long term periods as well as contemporary topics of international consultancy agencies. A narrowed analysis centred on a specific city is still a major way to write urban history in Africa. Consequently, a West African urban history has not yet been produced despite evidence of remote traditions of urban settlement in this area unique in sub-Saharan Africa.
- La Porte du vizir : programmes monumentaux et contrôle territorial au Caire à la fin du XIVe siècle - Julien Loiseau p. 7-27
Note critique
Lectures
- Sylvie Granger, Musiciens dans la ville 1600-1850, Paris, Belin, 2002,320 p. - Youri Carbonnier p. 153-155
- R. Abad, Le grand marché. L'approvisionnement alimentaire de Paris sous l'Ancien Régime, Paris, Fayard, 2002,1 030 p. - René Favier p. 155-159
- Geneviève Massard-Guilbaud, Harold L. Platt, Dieter Schott [édité par], Cities and Catastrophes, Coping with Emergency in European History. Villes et catastrophes, Réactions face à l'urgence dans l'histoire européenne, Frankfurt am Main, Peter Lang, 2002,241 p. - Mathieu Flonneau p. 159-160
- Cécile Katz, Territoire d'usines. L'architecture industrielle en Seine-Saint-Denis, Paris, Créaphis, 2003,215 p. - Mathieu Flonneau p. 160-161