Contenu du sommaire
Revue | Revue d'études comparatives Est-Ouest |
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Numéro | vol. 44, no 1, mars 2013 |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Sud-Caucase Nouvelles Approches Politiques et Sociales (1988-2013) - Marc Elie, Silvia Serrano p. 5-14
- L'« Histoire Oubliée » De la Fin de L'urss Coopération Interethnique Lors du Conflit du Haut-Karabagh - Sevil Huseynova p. 15-44 Au cours du printemps et de l'été 1989, alors que le conflit arméno-azéri pour le contrôle de la région du Haut-Karabagh en était à ses débuts, un échange de villages entre Azéris (Kyzyl-Šafag, RSS d'Arménie) et Arméniens (Kerkendž, RSS d'Azerbaïdjan) a pu se faire de façon relativement paisible. L'article décrit ce cas concret, appréhendé toutefois dans un contexte plus large, selon un cadre d'analyse des conflits dans la région du Sud-Caucase. Les hommes politiques mais aussi la plupart des travailleurs humanitaires ou sociaux ont concentré leur attention sur les rivalités ou la violence, ce qui a conduit à l'historicisation et l'essentialisation de ce conflit. Celui-ci est en effet souvent perçu comme historique, mettant en jeu deux identités irréductiblement opposées. En outre, la période postsoviétique a été propice à la constitution de tout un corpus de récits et de nombreux mythes représentant le conflit comme historique et insoluble. De telles approches ignorent les exemples de relations pacifiques et de coopération entre les Arméniens et les Azéris. Or, si l'on étudie la spécificité des relations quotidiennes entre les deux communautés, l'on peut observer un réseau extrêmement complexe de contacts variés, qui ne fait pas seulement la place aux rivalités mais aussi à une indéniable coopération ou encore à des formes de solidarité.“Forgotten History”: An Example of Interethnic Cooperation During the Nagorno-Karabakh War During the spring and summer of 1989, when the conflict between Armenia and Azerbaijan over Nagorno-Karabakh was just starting, a relatively peaceful exchange of villages took place between Azeris (Kyzyl-Shafag, Armenia) and Armenians (Kerkendj, Azerbaijan). This exchange is placed in the broader context, in the framework for analyzing conflicts in the southern Caucasus. Politicians and actors in humanitarian organizations focused attention on acts of opposition or violence, thus “historicizing” or “essentializing” the conflict, which was seen as involving two implacably opposed historical identities. During the post-Soviet period, a body of tales and myths formed that presents this conflict as being historical and insolvable. Such approaches overlook the many examples of peaceful relations and cooperation between these two peoples. If we focus on everyday relations between the two communities however, we observe an extremely complicated network of varied contacts not of rivalry alone but also of cooperation or even solidarity.
- « Au centre d'un double malheur » Le séisme du 7 Décembre 1988 en Arménie et l'expulsion des sinistrés azéris de Spitak - Marc Elie p. 45-75 Alors qu'une grande partie du nord de l'Arménie était détruite en décembre 1988 par un puissant tremblement de terre, le contentieux entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan s'envenimait dans le sillage du pogrom de Soumgaït de février 1988. À partir de l'analyse d'un conflit d'indemnisation, l'article montre comment les autorités du district de Spitak ont manipulé le programme de reconstruction pour empêcher les sinistrés azéris de revenir dans leur village. Le gouvernement soviétique s'est montré incapable de rétablir la justice et la pluralité ethnique, précipitant son discrédit au Caucase. Classiquement, la catastrophe accentue la vulnérabilité sociale des groupes minoritaires. À Spitak, l'« économie de la catastrophe » a permis en outre aux dirigeants locaux de faire aboutir leur projet ethno-politique en opposition à la doctrine officielle.“At the Center of two Misfortunes”: The Earthquake on 7 December 1988 in Armenia and the Expulsion of Azeris from Spitak In 1988, a horrendous earthquake destroyed large areas in northern Armenia in December after a conflict had broken out between Armenia and Azerbaijan following the Sumgait pogrom in February. A dispute about indemnification is analyzed to show how Spitak District authorities manipulated the reconstruction program to keep Azeri victims of the quake from returning to their village. The Soviet government proved incapable of restoring justice and ethnic plurality, and thus discredited itself in the Caucasus. A catastrophe usually worsens the social vulnerability of minority groups. The “economics of the catastrophe” in Spitak enabled local authorities to implement their ethnopolitical plans despite official doctrines.
- La construction d'une laïcité postsoviétique en Géorgie Mise En Œuvre, Mise En Cause et Résistance - Silvia Serrano p. 77-112 Cet article analyse les processus de redéfinition des relations entre l'État et les cultes en Géorgie postsoviétique, à partir de l'étude des textes normatifs, de la presse et d'entretiens réalisés entre 2009 et 2011. Il montre la diversité des conceptions de la laïcité qui se sont affrontées sur la scène politique géorgienne, depuis la laïcité juridictionnaliste jusqu'à la laïcité séparatiste et libérale, et analyse les rapports de force mouvants qui ont présidé aux arrangements entre les deux institutions durant la présidence d'E. Chevardnadze (1992-2003) et depuis la « révolution des roses » (2003). Il examine le contenu de l'accord constitutionnel signé en 2002 entre l'État et l'Église orthodoxe géorgienne, qui confère à celle-ci des prérogatives symboliques, administratives et financières dont les autres cultes sont privés puis montre le décalage existant entre les accords institutionnels et les modalités pratiques de fonctionnement. La faiblesse de l'État, les calculs stratégiques des uns, tant au sein de la sphère politique que de la sphère religieuse, et l'idéologie des autres se sont combinés pour placer le flou au cœur de la gestion pratique des cultes.Constructing a Post-Soviet Laicism in Georgia: Implementation, Objections and Resistance The redefinition of the relations between state and religion in post-Soviet Georgia is analyzed using legal texts, articles from the press, and interviews carried out between 2009 and 2011. Various ideas about church-state relations have clashed in Georgian politics since the period of “juridictionalistic laicism” till that of liberal secularism based on the separation of the two institutions. The moving lineup of forces is examined that has presided over the arrangements made between church and state under President Chevardnadze (1992-2003) and since the Rose Revolution in 2003. The constitutional agreement signed in 2002 between the government and the Georgian Orthodox Church endows the latter, unlike other religious denominations, with symbolic, administrative and financial prerogatives. However there is a gap between institutional agreements and their practical implementation: the weak state, the strategic moves of certain players, political as well as religious, and ideology have combined to the fuzzy arrangement for managing relations with religion in Georgia.
- La statuomanie ou la « Quatrième Institution de l'État » : La construction des cultures nationales et la politique de la mémoire dans le Caucase du Sud - Sergey Rumyantsev p. 113-151 Au cours des 150 dernières années, les régimes politiques ont pesé à des degrés divers sur l'élaboration des cultures nationales en Arménie, Azerbaïdjan et Géorgie. C'est ce que nous étudions ici en nous concentrant plus particulièrement sur la construction monumentale et la création de panthéons nationaux. Ce processus de promotion des cultures a vu le jour dans l'Empire russe, à la fin du XIXe-début XXe siècle. Il se radicalise avec le pouvoir soviétique lorsque des institutions sont créées dans le but de mener ce projet à bien. Les élites, parcimonieuses avant 1917, qui n'ont pas été « liquidées », ont été intégrées à celles – désormais beaucoup plus nombreuses – qui se sont constituées sous le régime soviétique. Les représentants de ces élites ayant survécu à l'implosion de l'URSS déterminent, aujourd'hui encore, les modes de construction culturelle dans les États postsoviétiques. L'un des traits essentiels de la politique de construction des cultures nationales, tant soviétique que postsoviétique, est la volonté d'emprise totale sur ce processus dont font preuve les régimes totalitaires ou autoritaires.Statuomania or the “Fourth State Institution”: The Construction of National Cultures and Memorial Policies in the Southern Caucasus During the past 150 years, different political regimes have variously affected the making of national cultures in Armenia, Azerbaijan and Georgia. Herein, focus is placed on the erection of monuments and creation of national pantheons. National cultures were promoted in the Russian Empire at the end of the 19th and start of the 20th century. This promotion took a radical turn under Communism, when Soviet authorities set up institutes for this purpose. The former elites, few in number before 1917, who were not “liquidated” were integrated in the new elites who, in larger numbers, were formed under Communism. Since the collapse of the USSR, the survivors who represent these elites determine cultural policies in the nations born from the breakup. An essential characteristic of both Soviet and post-Soviet policies for the making of a national culture is the determination to totally control the process, as in a totalitarian or authoritarian system.
- Les voies de la réforme du secteur gazier russe - Catherine Locatelli p. 153-167 Le secteur gazier russe est aujourd'hui l'objet d'évolutions en profondeur, même s'il reste dominé par la puissante société Gazprom appartenant à l'État. Celles-ci se caractérisent principalement par une restructuration de Gazprom, de fortes hausses des prix et surtout l'introduction de pratiques concurrentielles tendant à normaliser le comportement de Gazprom. Cette réorganisation ne suit cependant pas le modèle de restructuration des industries gazières appliqué dans l'UE qui est principalement fondé sur la dé-intégration des monopoles verticalement intégrés et des marchés concurrentiels. Alors qu'il constituait le projet initial (discuté en 2002), ce modèle s'avère de fait impossible à mettre en œuvre dans les conditions institutionnelles et économiques de la Russie.The Reform of the Natural gas Sector in Russia The Russian natural gas industry is undergoing deep changes despite its domination by Gazprom, a powerful state-owned company. In particular, the latter is being restructured; prices are being raised; and competitive practices, introduced so as to normalize Gazprom's comportment. This reorganization is not, however, following the example of the natural gas industry in the EU, which was restructured mainly by deintegrating vertically integrated monopolies and making the market competitive. Even though this example figured in the initial plan (discussed in 2002), it turned out to be impossible to apply it given institutional and economic conditions in Russia.
- Russie : La « Stratégie 2020 » En Question : Une Analyse Du Substrat Productif Et Financier De La Politique Industrielle - Julien Vercueil p. 169-194 Cet article analyse le soubassement productif et financier de la politique industrielle en Russie en s'appuyant sur la « stratégie 2020 » développée à partir de 2008. Les objectifs de cette stratégie sont de diversifier le substrat industriel de l'économie russe, ce qui permettrait de maintenir la croissance à son niveau des années 2000. Cependant, les chocs subis par l'industrie russe depuis 1992 ont réduit ses capacités productives et transformé sa structure. Les financements internes et externes nécessaires pour accompagner la politique de modernisation envisagée par la « stratégie 2020 » ne supposent donc pas seulement l'implication de l'État : ils requièrent aussi une réorientation du système financier vers le financement de l'économie.Russia's “Strategy 2020” under Question: An Analysis of the Productive and Financial Underpinnings of Industrial Policy The productive and financial underpinnings of Russia's policy for industry are examined through “Strategy 2020”, which has been worked out since 2008. This strategy seeks to diversify the economy's industrial basis so as to maintain growth at the same level as during the first decade of the new century. However, the shocks undergone by Russian industry since 1992 have reduced its productive capacity and had an impact on its structure. The internal and external finances necessary for the modernization advocated in “Strategy 2020” calls for not only state interventions but also a reorientation of the financial system toward the economy.
- Aude Merlin, Silvia Serrano (dir.), Ordres et désordes au Caucase, Bruxelles, Editions de l'Université de Bruxelles, Collection Science politique, 2010, 228 p. - Sophie Hohmann p. 195-200
- Roman Jakobson, Formal'naja škola i sovremennoe russkoe literaturovedenie (L'école formelle et la critique littéraire russe contemporaine), Tomaš Glanc, ed, Moskva : Jazyki slavjanskikh kul'tur, 2011. - Stéphanie Cirac p. 201-207