Contenu du sommaire : Organisation spatiale et temporelle des pauses en parole et en discours
Revue | Langages |
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Numéro | no 211, septembre 2018 |
Titre du numéro | Organisation spatiale et temporelle des pauses en parole et en discours |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- L'organisation spatiale et temporelle de la pause en parole et en discours - Christelle Dodane, Fabrice Hirsch p. 5-12
- Variation de la durée des pauses silencieuses : impact de la syntaxe, du style de parole et des disfluences - Iulia Grosman, Anne Catherine Simon, Liesbeth Degand p. 13-40 Dans cette contribution, nous cherchons à rendre compte de la fréquence et de la durée des pauses silencieuses en fonction de leur localisation dans la chaîne parlée, de leur combinaison avec d'autres disfluences et de la situation de parole dans laquelle elles sont produites. À partir de l'analyse de 4 845 pauses silencieuses extraites d'un corpus (durée 3 h 38 min) représentant 14 situations de parole contrastées, nous montrons que la localisation syntaxique des pauses est le facteur qui explique le mieux leur durée et que cette corrélation est renforcée dans les situations de parole préparées ou médiatiques. Nous proposons aussi une réflexion approfondie sur l'opportunité d'utiliser des seuils de durée (inférieurs ou supérieurs) pour exclure certaines pauses de l'analyse et sur les manières de représenter les durées des pauses pour tenir compte du fait qu'elles ne suivent pas une distribution normale.The study aims to uncover the relation between frequency and duration of silent pauses, their interaction with syntax and with disfluencies, and their variation in different spoken registers. The analysis of 4 845 silent pauses retrieved from a multi-genre corpus (duration 3 h 38 min) demonstrates that syntactic position is the strongest predictor of silent pause duration. This correlation is stronger in prepared and broadcasted speech. We discuss the use of duration thresholds for filtering out silent pauses and we also suggest alternative ways to represent pause duration when pauses are not normally distributed.
- Hésitations et faux-départs dans le langage adulte et enfantin : le rôle de la prosodie - Ester Scarpa, Christelle Dodane, Angelina Nunes De Vasconcelos p. 41-59 Cet article se positionne contre la caractérisation déviante de la disfluence en interprétant les deux termes de « fluence » et de « disfluence » de façon intégrée et complémentaire. Son objectif est de contribuer aux données acoustiques et phonologiques existantes montrant que les épisodes de disfluence obéissent aux principes ordonnées et hiérarchiques des domaines prosodiques. Les marques d'hésitation et les relations entre les pauses, les faux-départs et l'évolution de la F0 dans la parole chez un adulte et deux enfants (âgés de 2 à 3 ans) sont analysés du point de vue de la Phonologie Prosodique. Les résultats montrent que les marques d'hésitation dépendent de la structure prosodique de l'énoncé et que l'interaction entre fluence et disfluence correspond à un phénomène cognitif possédant de multiples facettes.This article argues against the deviant character of disfluency by interpreting fluency and disfluency in an integrated and complementary way. It aims to contribute to related acoustic and phonological results that show that episodes of disfluent speech obey ordered and hierarchical principles of prosodic domains. Characteristics of hesitation and the relationship between pause, false starts and F0 on the speech of one adult and two children (age from 2;0 to 3;0) were analyzed from the point of view of Prosodic Phonology. The results show dependency of hesitation marks on the prosodic structure of the utterance and that the interplay between fluency and disfluency is a multifaceted and cognitive phenomenon.
- Le rôle de la pause dans l'acquisition de la première syntaxe en français - Christelle Dodane, Karine Martel, Angelina Nunes De Vasconcelos p. 61-80 Pour mieux comprendre le rôle de la pause dans l'émergence de la syntaxe dans l'acquisition du français, nous avons analysé les premières combinaisons de deux mots dans une étude longitudinale de deux enfants monolingues français, filmés, entre 15 et 25 mois, en interaction avec leurs parents. Les résultats montrent que le critère de la pause est très important dans la construction de la première syntaxe mais qu'il doit être étudié en association avec d'autres indices prosodiques tels que l'allongement de la dernière syllabe de chaque mot et le contour d'intonation. En l'absence de mots grammaticaux, ce sont ces différents indices qui contribuent à rapprocher et renforcer la cohésion sémantique au sein de l'énoncé. Les données confirment l'existence d'une période de transition consistant à produire des SSWUs (Successive Single-Word Utterances) avant de produire une majorité d'énoncés typiques de deux mots.In order to better understand the role of the pause in the emergence of syntax in the acquisition of French, we analyzed the first two-word combinations in a longitudinal study gathering the productions of two French monolingual children, recorded between 15 and 25 months in interaction with their parents. Findings point out that the criterion of pause is very important in the construction of the first syntax, but that it must be studied relatively to other prosodic cues, such as the lengthening of the last syllable of each word and the nature of the pitch. In the lack of grammatical words, which are characteristic of the first word associations, these different parameters contribute to bring closer and reinforce the semantic cohesion within the utterance. Moreover, the data confirm the existence of a transition period of producing SSWUs (Successive Single-Word Utterances) before realization of a majority of typical two-word utterances.
- Détails phonétiques dans la réalisation des pauses en Français : étude de parole lue en langue maternelle vs en langue étrangère - Camille Fauth, Jürgen Trouvain p. 81-95 Dans ce travail, nous étudierons la réalisation de différents types de pauses (silencieuses, respiratoires et remplies) en fonction de la compétence linguistique en français langue étrangère. 30 locuteurs (10 natifs, 10 débutants, 10 avancés) ont été enregistrés en lecture. Comme attendu, les apprenants produisent plus de pauses et les pauses respiratoires sont les plus fréquentes pour l'ensemble des locuteurs. Étonnamment, les natifs produisent des pauses vides plus longues, probablement parce qu'elles sont principalement respiratoires. Dans nos données, les pauses silencieuses sont rares et sont généralement produites par les apprenants dans les phases disfluentes, alors que les pauses avec respiration audible (et donc non silencieuses) sont fréquentes et généralement réalisées aux frontières syntaxiques.In this study, we investigate the realization of different types of pauses (silent, respiratory and filled pauses) as a function of foreign language proficiency. We have recorded 10 native speakers, 10 advanced and 10 beginner learners reading aloud a text. Learners produced more pauses than the native speakers, and the most frequent pause type across all speakers is the breath pause. Surprisingly, the native speakers produced the longest pauses, probably due to the fact that most of their unfilled pauses were breath pauses. In our data, phonetically silent pauses are rare and predominantly used by the learners in disfluent phases whereas breath pauses (with an audible respiratory noise and thus not silent) are frequent and generally realized at syntactic boundaries.
- Que révèle la pause silencieuse sur l'accessibilité cognitive d'un référent et le vieillissement langagier ? - Lucie Rousier-Vercruyssen, Anne Lacheret-Dujour, Marion Fossard p. 97-109 Cette contribution a pour objectif principal d'examiner les relations entre saillance référentielle et durée des pauses, et leurs variations chez des locuteurs jeunes adultes et seniors. L'objectif secondaire est d'explorer l'existence d'un lien potentiel entre la durée des pauses et l'habileté de prise en compte de l'autre. Pour cette étude, des narrations d'images séquentielles et un questionnaire d'autoévaluation ont été utilisés. Les résultats ont montré que les pauses silencieuses semblent implicitement marquer l'acte référentiel : les pauses sont plus longues avant un changement de référent d'accessibilité moindre comparativement à l'évocation d'un référent maintenu. L'évocation d'un référent – quelle que soit son accessibilité – paraît plus complexe pour les seniors comparativement aux jeunes adultes. Cette complexité s'avère plus présente chez les seniors qui ont des difficultés de prise en compte de l'autre.This contribution has for main objective to examine the relations between referential saliency and pauses' duration, and their variations among younger and older speakers. The secondary objective is to explore the existence of a potential link between the average duration of silent pauses and the perspective taking. For this study, the storytelling task and a self-assessment questionnaire were used. The results showed that silent pauses seem to mark implicitly the referential act for the younger and the older adults: the pauses are longer before referent's change of lesser accessibility compared with the evocation of a maintained referent. The evocation of a referent –whatever is its accessibility– seems more complex for the older compared with the youngers. This complexity turns out more present for the older who have difficulty of consideration of other one.
- Que cachent les pauses silencieuses en parole ? Une étude de cas - Fabrice Hirsch, Ivana Didirková, Camille Fauth, Thierry Legou p. 111-126 L'objectif de ce travail est d'étudier les événements physiologiques et articulatoires ayant lieu durant les pauses silencieuses dans différents types de discours. Pour ce faire, un enregistrement audio a été réalisé à partir d'une locutrice qui avait pour tâche de lire un texte à deux reprises et de décrire une image. Les données acoustiques étaient synchronisées avec un articulographe électromagnétique (EMA) afin d'observer les éventuels déplacements des articulateurs dans la cavité buccale durant les pauses et avec une ceinture respiratoire qui permettait de déceler les prises de souffle. Ce dispositif a permis d'observer un certain nombre de mouvements durant les pauses, qui sont notamment dus à la rétention des derniers sons de la séquence sonore précédant la pause et/ou à l'anticipation des sons à venir.The aim of this work is to study physiological and articulatory events present during silent pauses in different types of speech. An audio recording has been carried out on one subject while reading a text, describing a picture and producing spontaneous speech. Acoustic data were synchronized with an Electromagnetic Articulograph (EMA) in order to observe the activity within the vocal cavity during pauses, and with a respiratory belt, which allows to detect breath-takings. Results show that respiratory pauses are significantly longer than pauses without a respiratory activity. Concerning the articulatory level, movements have been observed during pauses. These movements are due either to the retention of the sounds preceding the pause or to the preparation of the sounds following the pause.
- Quand la pause devient-elle un symptôme du bégaiement ? Une étude acoustique et articulatoire - Ivana Didirková, Sébastien Le Maguer, Fabrice Hirsch p. 127-141 Deux objectifs rythment ce travail : le premier consiste à chercher à savoir ce qui distingue les pauses vides et pleines dites « normales » chez des locuteurs qui bégaient et chez des sujets normo-fluents. Le second vise à mieux connaitre les particularités des disfluences sévères se trouvant dans la parole des premiers locuteurs cités. Pour mener à bien cette recherche, une étude acoustique et articulatoire, fondée sur des données obtenues à l'aide d'un articulographe électromagnétique, a été faite. Si la durée n'était pas un paramètre permettant de différencier les productions « normales » des deux catégories de locuteurs, l'étude articulatoire a montré que les mouvements liés à la réalisation du son suivant la disfluence démarraient plus tôt dans les disfluences sévères par rapport aux autres interruptions du signal de parole étudiées.This work has two aims. The first one was to analyse differences in non-pathological full and silent pauses in the speech of people who stutter and subjects who do not stutter. The second aim is to understand articulatory and acoustic specificities of stuttering-like disfluencies. To carry out this work, acoustic and articulatory data, acquired by means of an electromagnetic articulograph, were obtained. Results show that duration was not significant to differentiate non-pathological disfluencies. Nevertheless, the articulatory study reveals that movements linked to the sound following the disfluency started earlier in stuttering-like disfluencies than in the second category.