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Quelques mois après la victoire de Gerhard Schrôder aux élections législatives allemandes et la formation d'un nouveau gouvernement de coalition SPD-Verts, Lucas Delattre s'interroge sur la réalité du changement qui s'est produit en Allemagne. Il discerne un certain nombre de transformations, mais considère que le centre de gravité politique n'a pas véritablement changé, les sociaux-démocrates étant déjà au pouvoir dans de nombreux Lànder et Helmut Kohi étant lui-même un « social-démocrate modéré ». Le pays reste, selon lui, profondément conservateur et a voté pour Gerhard Schrôder parce qu'il incarnait la perspective d'un « maintien du statu quo ». Est-il alors vraiment un nouveau Tony Blair ou bien se rapproche-t-il de la tradition continentale ?

Ray Kokoschko développe ici une thématique à la fois relativement peu connue et assez effrayante autour de la montée de la xénophobie, de la violence et de l'extrême droite dans l'ex-RDA. Pour lui, cette vague brune n 'a pas uniquement une expression politique mais apparaît comme un «phénomène socioculturel collectif», notamment chez les jeunes, qui se caractérise par la banalisation du discours d'exclusion et de violence dirigé contre les « ennemis ». Or, ce mode de pensée « ethniciste » semble affecter une grande partie d'une population sans tradition démocratique et humaniste.

Alors que nombreux étaient ceux qui voyaient dans la nouvelle Allemagne issue de la réunification la puissance européenne dominante, pour Hanns Maull, la réalité de la politique étrangère d'Helmut Kohl tend à montrer qu'il n'en a rien été. Cette politique est davantage marquée du sceau de la continuité, avec notamment l'accent sur le multilatéralisme et les relations bilatérales avec Washington, Paris et Moscou, et se caractérise de plus en plus par une absence criante d'ambition politique. L'auteur de cet article semble le regretter. La politique menée par le nouveau gouvernement issu des élections de septembre 1998 et, en particulier, par le ministre Vert des Affaires étrangères, Joschka Fischer, modifiera-t-elle cette donne alors que Gerhard Schröder, tout au long de sa campagne, a fait référence à une République de Berlin (Berliner Republik) qui devait être plus consciente d'elle-même (selbstbewußt) ?

Alors que la République turque, qui fête en 1998 son 75e anniversaire, est portée sur le devant de l'actualité, en particulier avec l'affaire Abdullah Ocalan, chef des kurdes du PKK réfugié en Italie, et de la démission pour corruption, à la suite du vote d'une motion de censure par le Parlement, du gouvernement de Mesut Yilmaz, Semih Vaner revient sur le processus de démocratisation mené par ce pays. Pour lui, contrairement à ce qui est souvent avancé, notamment en Europe occidentale, la marche de la Turquie vers la démocratie, même si elle est hésitante, ne fait pas de doute. Elle se heurte pourtant à trois écueils de taille : la gestion du séparatisme kurde ; l'intégration de l'islam au système politique ; et les connivences entre l'« Etat profond », le milieu politique et la mafia. Tant que ces questions ne seront pas réglées, la démocratie turque restera fragile, d'autant quelle apparaît structurellement minée par les inégalités régionales et sociales et les déficiences en matière d'éducation et de santé.

Albert Bourgi entreprend ici une réévaluation de l'Organisation de l'unité africaine (OUA), souvent critiquée et dénoncée pour son impuissance à régler les conflits africains et à faire face au sous-développement du continent. Or, selon lui, au-delà des ambitions affichées lors de sa création en 1963 et malgré les crises qui l'ont secouée, cette organisation conserve une utilité. Notamment en raison de la « mystique de l'unité africaine » quelle continue d'incarner, de son réalisme actuel sous l'impulsion de nouveaux dirigeants africains issus de la période de démocratisation, et de son action récente en matière de promotion des droits de l'homme, l'OUA, selon lui, joue un rôle essentiel dans les relations africaines et en tant que porte-parole de l'Afrique dans les instances internationales, à un moment oît la communauté internationale semble quelque peu délaisser ce continent.

Anne de Tinguy fait le point, dans cet article, sur les migrations qui se sont développées entre l'Est (en particulier la Russie) et l'Ouest depuis l'ouverture, il y a dix ans, du rideau de fer. Elle montre que les mouvements de population ne se résument pas à la grande vague d'émigration qui s'est produite vers l'Occident : ceux-ci se sont beaucoup diversifiés et sont aujourd'hui à la fois importants et complexes, tant dans leur forme que dans leur destination, chaque région, a la fois pôle d'émigration et d'immigration, étant finalement un « Occident » pour sa partie orientale. Véritable « baromètre » de l'état des sociétés des pays de l'Est de l'Europe, ils permettent, à son avis, à une partie d'entre elles de surmonter les tensions liées à la transition économique. Ils débouchent aussi sur la création de réseaux qui aident ces pays à reprendre leur place dans la communauté internationale.

Pour Mariam Abou Zahab, le Pakistan, en soutenant, en termes à la fois militaires et logistiques, les talibans en Afghanistan, s'est isolé des autres pays de la région, notamment de ceux d'Asie centrale et de son allié iranien. Par ailleurs, en décidant d'adopter prochainement la charia, Islamabad risque de dégrader de nouveau son image en lui donnant un caractère «fondamentaliste », d'autant que les sanctions économiques à la suite des essais nucléaires du printemps 1998 dépriment encore davantage un pays déjà au bord de la banqueroute et qui s'enfonce dans la crise politique.

Patrick Guillaumont et Sylviane Guillaumont Jeanneney reviennent ici sur la politique de change du Vietnam à la lumière de la crise asiatique et des expériences monétaires des pays de la région. Ils en déduisent que la politique d'ancrage du dông au dollar et de flottement contrôlé menée par le pays depuis 1992, après une période de forte dépréciation, a conduit à une stabilisation du taux de change et, depuis 1996, à une baisse faible en comparaison de la situation des autres pays asiatiques, ainsi qu'à une maîtrise de l'inflation dans un contexte de croissance rapide. Ils considèrent que le risque d'une crise financière comme les pays d'Asie du Sud-Est en ont connu est faible, même si le pays reste vulnérable à une crise de change en raison du déficit de sa balance des paiements courants et de la dollarisation de l'économie. L'expérience vietnamienne est-elle susceptible d'alimenter le débat sur « le bon régime de change des pays émergents » ?

Jean-Pierre Lehmann effectue ici une description très pessimiste du Japon contemporain. Pour lui, la paralysie japonaise actuelle s'explique par la décomposition du « triangle de fer » (PLD, administration et grande industrie) mis en place dans l'après-guerre et qui a dominé le pays jusqu'au début des années 90. Il considère qu'il n'existe donc plus de véritable direction politique au Japon. Ceci est d'autant plus grave que le pays semble avoir raté le train des années 90 fondé sur la révolution des communications et la mondialisation. Selon Jean-Pierre Lehmann, la solution à la crise japonaise ne peut venir que de l'extérieur, mais les États-Unis ne doivent pas rester la seule source de pression externe. L'auteur plaide pour que l'Europe aide le Japon à sortir de sa léthargie.

Ce texte rédigé en 1931, aborde les causes de la crise anglaise de cette époque, en tire des enseignements et s'exprime à propos de la coopération financière internationale.