Contenu du sommaire : Topor, artiste multimédia
Revue | Sociétés & Représentations |
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Numéro | no 44, 2017 |
Titre du numéro | Topor, artiste multimédia |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Topor, artiste multimédia
- Introduction - Bertrand Tillier p. 9-11
- Faire feu de tout bois : Topor et les industries culturelles - Christophe Gauthier p. 13-21 Roland Topor n'a jamais souhaité être enfermé dans la seule profession de dessinateur, et l'une de ses principales caractéristiques est bien la manière dont il s'est approprié les industries culturelles de son temps, qu'il s'agisse du cinéma ou de la télévision, dans des genres symboliquement illégitimes (le dessin animé pas vraiment pour les enfants, la télévision pas tout à fait pour les adultes). Cette grande diversité l'a conduit à mettre en place des stratégies bien particulières. On en identifiera trois. La première concerne les réemplois multiples de ses dessins, dans des revues aux statuts eux-mêmes très divers. La deuxième intéresse le public, et le trouble intentionnel dans lequel La planète sauvage jette la critique de son temps, alors que l'on ne saurait considérer un film d'animation comme un objet qui ne soit pas destiné aux enfants. La troisième, enfin, vient perturber la place de l'auteur, tant les collaborations multiples auxquelles se livre Roland Topor semblent à contre-courant d'une représentation convenue d'un artiste unique détenant le contrôle sur son œuvre. Autant de manières de « désorienter » son travail, qui montrent combien l'utilisation des industries culturelles peut s'avérer féconde dans une démarche d'artiste qui a toujours cherché à s'affranchir des stéréotypes.Anything and Everything: Topor and the Cultural Industries
Roland Topor never wished to be confined to the profession of illustrator alone, and one of things that certainly characterized his work was the way in which he appropriated the cultural industries of his time, whether it be cinema or television, in symbolically illegitimate genres (cartoons, but not really for children, television, but not quite for adults). This great diversity led him to implement highly distinctive strategies. We will identify three. The first concerns the multiple re-use of his drawings, in journals that themselves are structurally very diverse, while the second concerns the audience and the intentional disorder in which The Wild Planet throws down a critique of its time, even though the notion of an animated film not being intended for children left viewers disconcerted. The third, finally, disturbs the place of the author, such is the extent to which the various collaborations in which Roland Topor engaged seem to go against the grain of an agreed representation of a unique artist exercising control over his work. These are just some examples of “disorientation” in his work and they show the extent to which the use of cultural industries can prove fertile in an artistic approach that always sought to free itself of stereotypes. - Topor : bête et méchant ? Roland Topor et la bande Hara-Kiri - Stéphane Mazurier p. 23-29 Si Roland Topor n'a collaboré à Hara-Kiri que cinq ans, entre 1961 et 1966, c'est pour ce journal qu'il a produit le plus de dessins. Il y a forgé son style et a commencé à y gagner une certaine notoriété. Soucieux de tracer sa propre trajectoire et refusant de limiter son œuvre au dessin de presse, il quitte Hara-Kiri, mais continue à fréquenter les mêmes réseaux culturels que plusieurs dessinateurs du mensuel, notamment Wolinski et Willem. Il retrouve ainsi cette « bande Hara-Kiri » dans le champ de l'édition (chez Pauvert ou Losfeld), de la presse (L'Enragé, Le Fou parle, Charlie mensuel), et même de la télévision (Merci Bernard, Palace). Figure singulière d'Hara-Kiri, Topor en est à la fois l'une des plus brillantes et un acteur marginal, périphérique – le seul peut-être qui n'ait pas accepté la tutelle de Cavanna.Roland Topor and the Hara-Kiri Gang
Though Roland Topor worked with Hara-Kiri for only five years, between 1961 and 1966, it was for this newspaper that he produced the most drawings. It was there that he forged his style and began to gain a certain notoriety. Anxious to chart his own course and refusing to limit his work to the press illustration, he left Hara-Kiri but continued to frequent the same cultural networks as several of the monthly magazine's cartoonists, notably Wolinski and Willem. He found himself reunited with the “Hara-Kiri gang” in publishing (at Pauvert or Losfeld), the press (L'Enragé, Le Fou parle, Charlie mensuel) and even television (Merci Bernard, Palace). A singular figure on the Hara-Kiri scene, Topor was both one of the most brilliant among them and a peripheral, marginal presence—the only one, perhaps, who refused to be taken under Cavanna's wing. - Dessiner à la télévision : Topor invité de Tac au Tac (1971-1972) - Bertrand Tillier p. 31-41 En 1971-1972, Roland Topor fut à trois reprises l'invité de l'émission de Jean Frapat, Tac au Tac, diffusée depuis 1969 à la télévision française. Ce jeu inspiré du cadavre exquis surréaliste avait pour principe de rassembler, sur un même plateau du service de la recherche de l'ORTF, des dessinateurs de presse et de bande dessinée, afin de les confronter, sous l'œil des caméras, à des dispositifs dialogiques graphiques. L'article analyse les contraintes ludiques inventées par Frapat et les conditions de production de son émission, en regard de son ambition visant à constituer une encyclopédie télévisée du dessin contemporain. L'étude s'emploie également à interroger la participation de Topor à ce programme et à évaluer la place de son propre univers dans cette configuration expérimentale.Drawing for Television: Topor the a Guest on Tac au Tac (1971–1972)In 1971–1972 Roland Topor was a guest three times on Jean Frapat's TV show Tac au Tac, which had been broadcast on French television since 1969. Inspired by Surrealism's exquisite corpse, this show would bring together press illustrators and cartoonists on the same set at the ORTF's Service de la Recherche, pitting them against dialogic picture games under the watchful eye of the cameras. This article analyses the playful constraints invented by Frapat and the production conditions on his programme viewed against his aim of producing a televised encyclopaedia of contemporary drawing. The study also investigates Topor's participation in this programme and evaluates the place of his own artistic universe in this experimental form.
- Portrait de l'artiste en chat de télévision : Topor et Téléchat (1977-1986) - Sébastien Le Pajolec p. 43-69 Téléchat est un programme de cinq minutes dont les 234 épisodes ont d'abord été diffusés pendant trois saisons, sur Antenne 2, entre 1983 et 1986. Imaginée par Henri Xhonneux et Roland Topor, l'émission reprend le dispositif du journal télévisé, avec deux marionnettes à la présentation : Groucha, un chat plâtré de la patte gauche, et Lola, une autruche au décolleté pigeonnant. En étudiant les trente premiers épisodes de la série, soit près de deux mois de programmation, nous avons voulu restituer les multiples facettes d'un programme à la fois connu et rarement analysé. Après avoir examiné les logiques de production, de diffusion et de réception propres à Téléchat, nous avons cherché à mettre au jour non seulement ses discours sur la télévision, mais aussi ses représentations ironiques, ludiques et poétiques du monde social.Portrait of the Artist as a Television Chat: Topor and Téléchat (1977–1986)Téléchat was a five-minute programme whose 234 episodes were first broadcast over three seasons, on Antenne 2, between 1983 and 1986. Dreamed up by Henri Xhonneux and Roland Topor, the programme adopted the format of the newscast, but with two puppets for presenters: Grouchat, a cat with its left paw in plaster, and Lola, an ostrich with a plunging décolleté. By studying the first thirty episodes of the series, that is to say nearly two months of programming, we aimed to reveal the multiple facets of a show that is both well known and rarely analysed. After reviewing the logics underpinning the production, dissemination and reception of Téléchat, we sought to bring to light not only its discourses on television, but also its ironic, playful and poetic representations of the social world.
- Topor et Kubin : le symbolisme en partage ? - Itzhak Goldberg p. 71-76 L'article cherche à montrer les parallèles et les différences entre les univers symbolistes d'Alfred Kubin et de Roland Topor. Si l'essentiel de la recherche est consacré à Kubin, c'est que Topor, qui a connu cette œuvre à partir de 1962, ne cacha pas son admiration pour l'artiste autrichien. Les liens de Topor avec Kubin passent par l'héritage partagé d'une imagerie Mitteleuropa grinçante et hallucinée, mais aussi d'une pratique de l'écriture renvoyant à L'Autre côté. Toutefois, c'est probablement l'iconographie qui offre le terrain commun le plus important, car l'artiste français y reprend l'essentiel de la thématique symboliste de son aîné autrichien – et surtout celle convoquant la femme et la mort. Cependant, là où l'image de Kubin constitue un monde imaginaire dans lequel glisse le spectateur, chez Topor, la dérision et le regard critique obligent à la distanciation.Topor and Kubin: Shared Symbolism?
This article seeks to show the parallels and differences between the symbolist universes of Alfred Kubin and Roland Topor. Although most of the research is devoted to Kubin, this is because Topor—who knew of the former's work from 1962—made no attempt to conceal his admiration for the Austrian artist. Topor's ties with Kubin revolve around a shared inheritance of dark, crazed Mitteleuropa imagery, but also a practice of writing referencing L'Autre côté. However, it is probably iconography that offers the most important common ground, for here the French artist takes up the quintessentially symbolist themes of his Austrian elder—especially those invoking woman and death. Yet where Kubin's images constitute an imaginary world into which the viewer slips, in Topor, derision and the critical gaze require a degree of distantiation. - « J'ai encore en tête ce bruit de “scratch scratch” de la plume qui gratte le papier » - Sébastien Le Pajolec, Nicolas Topor p. 77-87
- Topor et les jeux de l'art contemporain - Alexandre Devaux p. 89-103 La multiplicité des médias, supports et techniques caractérise l'œuvre de Topor. Avec le dessin et l'écriture, un crayon et du papier, il montre l'étendue des possibilités qu'offrent les outils de création. Le « multiple », Topor le revendique comme subversion de l'« unique ». Le sens, les significations, la fonction des êtres et des objets ne doivent être réduits, selon lui, aux seuls diktats de la société de consommation. L'œuvre d'art est un produit de communication. Sur ce terrain, tous les jeux et toutes les complexités individuelles sont possibles pour ouvrir la création, le champ de découvertes de nouvelles formes et significations. Topor a mis cette dynamique en œuvres, c'est-à-dire en formes, en livres et en actes divers. Cette dimension multiple de l'œuvre de Topor contribue à le faire se rapprocher de certaines avant-gardes artistiques de son temps et plus spécifiquement des Nouveaux Réalistes ou de Fluxus.Topor's work is characterized by a multiplicity of media, formats and techniques. With drawing and writing, a pencil and paper, he shows the extent of the possibilities offered by these tools of creation. Topor lays claim to the “multiple” as the subversion of the “unique”. Meaning, significations and the function of beings and objects must not, in his opinion, be reduced to the mere diktats of consumer society. The work of art is a product of communication. On this ground, all games and all individual complexities are apt to open up creation, the field of discoveries of new forms and meanings. Topor put this dynamic to work in works, that is to say, in forms, books and various acts. The “multiple” dimension to Topor's work was one of the reasons that made him move closer to certain artistic avant-gardes of his time, and, more specifically, the Nouveaux Réalistes and Fluxus.
- Roland Topor, l'homme qui ne riait pas : Témoignage de Laurent Gervereau - Laurent Gervereau p. 105-112
Lieux et ressources
- Un lieu pour les costumes de scène : le Centre national du costume de scène et de la scénographie à Moulins - Pascale Goetschel p. 115-124
Regards croisés
- Le « bobo » dans sa vi(ll)e : Analyse de l'existence plurielle d'une catégorie à la croisée du journalisme, du commerce et du politique - Sophie Corbillé p. 127-148 Depuis une quinzaine d'années, une catégorie est extrêmement présente dans la vie parisienne, celle de « bourgeois-bohème » ou « bobo » et toutes sortes de personnes en font désormais un usage régulier et banal. On assiste même à une sorte de saturation des discours au point qu'il semble difficile d'y échapper. Comment cette catégorie a-t-elle été créée ? Comment circule-t-elle entre les espaces journalistique, marchand et politique, mais aussi dans celui de la vie ordinaire ? De quelles représentations est-elle porteuse et productrice ? Comment fonctionne-t-elle ? Autrement dit, de quoi le « bobo » est-il le nom ? En menant une analyse des discours sur et autour de cette figure et suscités par elle depuis sa création en 2000, nous verrons qu'elle vient révéler les compétitions sociales et symboliques qui se jouent au sein de la société française et parisienne et qu'elle fonctionne comme une mythologie.A “bobo” in the City. Analysis of the Plural Existence of a Category at the Interface of Journalism, Business and PoliticsFor the past fifteen years, the term “bobo” or “bourgeois-bohème” is extremely prevalent in Parisian life and many different types of people use it regularly. This intensive use leads even to a saturation in the discourses, making the classification hard to escape. How was this category first created? How does it circulate between journalistic, commercial, and political spheres and even in everyday life? To what extent does it act as a social representation? In other words, what are the issues at stake in this classification? Thanks to an analysis of many speeches about and around this figure and generated by it since its creation in 2000, this paper argues that the category is at the crossroads of social and symbolic competitions unfolding in the French and Parisian society, and that it operates as a contemporary mythology.
- Le « bobo » dans sa vi(ll)e : Analyse de l'existence plurielle d'une catégorie à la croisée du journalisme, du commerce et du politique - Sophie Corbillé p. 127-148
Trames
- L'œil, le goût et le flair : les compétences sensorielles du collectionneur fin de siècle - Érika Wicky p. 151-162
Retours sur...
- Les attributs bachiques de la Bohémienne, d'Esméralda aux premières peintures de voyage en Espagne - Mélissa Perianez p. 165-173
Actualités
- Le sexe en question - Pascal Dibie p. 177-179
Grand entretien
- Un exercice de fraternité - Jean Lebrun, Anaïs Fléchet, Pascale Goetschel p. 183-202
Hors cadre
- Exposer les toxicomanes : Reconstitution d'une exposition photographique itinérante sur les usagers de drogues, de Berne à Zurich - Thomas Bujon, Loïc Etiembre p. 205-229