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Revue Futuribles Mir@bel
Numéro no 430, mai-juin 2019
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  • Les retraites en suspens - JOUVENEL Hugues (de) p. 3 accès libre
  • La philosophie prospective en Afrique - DIAGNE Souleymane Bachir p. 5 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
    Ce numéro de Futuribles marque le lancement d'une nouvelle série, dans la foulée de celles déjà en cours (sur les visions politiques, le cerveau, la contribution des entreprises à la fabrique du bien commun…). Cette fois, la focale n'est pas thématique mais régionale : elle porte sur l'Afrique. Le premier volet de cette série s'intéresse à la prospective telle qu'elle se pratique en Afrique ; et pour planter le décor, Souleymane Bachir Diagne présente, dans cet article, la façon dont la philosophie prospective a pris pied, se développe et doit s'envisager en Afrique.Après avoir rappelé la nécessité, pour le prospectiviste, de regarder devant et de penser pour une génération et une époque différentes de la sienne, Souleymane Bachir Diagne rappelle, tout en les nuançant, les arguments selon lesquels le temps africain serait spécifique et nécessiterait une approche culturellement différente en matière prospective. Il souligne également combien le continent africain est emblématique de l'avenir au vu de la jeunesse de sa population. Ce dynamisme démographique, cette jeunesse ainsi que l'essor économique de l'Afrique ne doivent pas susciter la peur mais l'espoir, nous dit l'auteur, contrairement à ce que sous-tendent certaines thèses alarmistes en matière migratoire qui ont fait florès ces dernières années en Europe. Et c'est finalement aussi par l'éducation (à commencer par celle des filles), en incitant l'Afrique à préparer sa jeunesse à une époque différente que la prospective peut et doit trouver à s'appliquer sur le continent. S.D.
    This issue of Futuribles sees the launch of a new series, in the wake of a number that are ongoing (on political visions, the brain, the contribution of enterprises to the common good etc.). This time the focus isn't thematic but regional and relates to Africa. The first contribution to the series concerns foresight studies as practised in Africa and, to set the scene, in this article Souleymane Bachir Diagne shows how foresight philosophy has gained a footing in Africa, how it is developing and how it should be viewed on that continent.After reminding us of the need for the foresight practitioner to look ahead and think for a generation and an era different from her own, Souleymane Bachir Diagne recalls, in a nuanced way, the arguments that African time is very particular and that a culturally different approach is therefore required with regard to foresight. He also stresses the degree to which the African continent is emblematic of the future, given the youth of its population. This demographic dynamism and youthfulness – together with the economic rise of Africa – should breed hope not fear, as Bachir Diagne sees it, contrary to what is implied in some alarmist arguments around migration that have enjoyed a certain vogue in Europe in recent years. And, ultimately too, it is through education (beginning with the education of girls), by encouraging Africa to prepare its youth for a different era, that foresight studies can and should find application on the continent.
  • La réflexion prospective en Afrique. Discours et pratiques - SALL Alioune p. 15 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
    Comme mentionné en ouverture de l'article précédent, de Souleymane Bachir Diagne, ce numéro de Futuribles marque le lancement d'une nouvelle série, portant cette fois sur l'Afrique. Le premier volet de cette série s'intéresse à la prospective telle qu'elle se pratique en Afrique ; et dans l'article qui suit, le directeur de l'Institut des futurs africains, Alioune Sall, propose un panorama des discours et des pratiques de nature prospective entrepris en Afrique depuis une quarantaine d'années.Il montre ainsi combien les États africains ont investi la discipline, dès les années 1960 et surtout à compter des années 1990, s'attachant à développer des « visions », nationales ou régionales, destinées à guider les stratégies de développement. Et après un rappel assez détaillé de ces nombreux exercices de prospective engagés en Afrique, il en analyse les principales caractéristiques ; il montre dans quel contexte et de quelle manière ils ont été réalisés ; il souligne les difficultés institutionnelles auxquelles ils ont pu se heurter, etc. Enfin, il s'interroge sur l'évolution possible des études nationales de perspectives à long terme (les ENPLT, très largement promues par l'Institut des futurs africains), compte tenu de la façon dont elles ont été menées, du degré d'implication des acteurs (États, organisations internationales, agences d'aide au développement…), de leur impact…, invitant à poursuivre les exercices prospectifs en Afrique mais en tenant compte de ce bilan, afin qu'ils puissent jouer un rôle plus efficace sur les stratégies de développement. S.D.
    As mentioned at the beginning of the article by Souleymane Bachir Diagne, this issue of Futuribles sees the launch of a new series, relating on this occasion, to Africa. The first contribution to this series is concerned with foresight studies as practised in Africa ; and, in the article that follows, the director of the African Futures Institute (AFI) Alioune Sall offers a conspectus of discourses and practices in the field of foresight that have been seen in Africa over some 40 years now.He shows, for example, the extent to which the African states, in their concern to develop national or regional ‘visions' to guide their development strategies, committed themselves to the discipline as early as the 1960s – and even more significantly from the 1990s onwards. After quite a detailed review of these many foresight exercises undertaken in Africa, he analyses their chief characteristics : he shows how and in what context they have been carried out and he stresses the institutional difficulties they have run up against in some instances etc. Lastly, he examines the potential evolution of national long-term perspective studies (the NLTPSs that have been very widely promoted by the AFI), given the ways these have been implemented, the degree of involvement of the actors (states, international organizations, development aid agencies etc.), their impact etc., urging that foresight exercises be continued in Africa, while nonetheless taking account of their previous track record, so that they may play a more effective role in shaping development strategies.
  • Corps réparé, corps augmenté. Quelques réflexions à travers le prisme de la chirurgie esthétique - AWADA Thérèse p. 33 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
    Nous avons fait écho à diverses reprises, dans Futuribles, aux perspectives de transformation de l'humain dans une optique cyborg ou transhumaniste, et aux diverses questions que ceci soulève. L'article qui suit, de la chirurgienne Thérèse Awada, permet de relativiser cette perspective en montrant combien le corps humain est complexe, et combien intervenir chirurgicalement pour le réparer et l'augmenter n'est pas une si mince affaire.Au travers de rappels historiques sur l'évolution de la chirurgie plastique et de précisions très concrètes sur l'état de l'art, Thérèse Awada nous permet de mieux appréhender les actes chirurgicaux visant à réparer, régénérer ou « augmenter » le corps humain. Elle montre que ceux-ci ne sont souvent encore que des solutions palliatives, loin d'être totalement satisfaisantes pour les patients qui y recourent. Elle pose enfin un certain nombre de questions visant à poser les enjeux éthiques relatifs à l'introduction éventuelle de technologie dans le corps. Un point de vue de praticien qui apporte un éclairage différent sur ces questions sensibles… S.D.
    We have on various occasions spoken in Futuribles of the putative transformation of the human in a ‘cyborg' or transhumanist direction and of the various questions raised. This article by the surgeon Thérèse Awada enables us to put this prospect into perspective by showing how complex the human body is and how intervening surgically to repair and enhance it is no small matter.By way of some historical reminders on the development of plastic surgery and some very concrete clarifications of the present state of the art, Thérèse Awada affords us a better grasp of the surgical actions deployed to repair, regenerate or ‘enhance' the human body. She shows that these are often, as yet, only palliative solutions and far from being totally satisfactory for the patients who resort to them. Lastly, she raises a number of questions aimed at marking out the ethical issues surrounding the prospective introduction of technology into the body. This is a practitioner's perspective which casts a different light on these sensitive questions…
  • La fiction pour débattre de la prospective spatiale. Point sur une expérimentation - KAPLAN Daniel p. 45 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
    En juin 2018 s'est tenu le premier débat public et participatif autour de l'éthique de l'exploration spatiale, organisé par Space'ibles, l'observatoire de prospective spatiale du CNES (Centre national d'études spatiales). Futuribles s'est associé à l'exercice en alimentant la réflexion au moyen de courtes fictions présentant divers scénarios d'évolutions possibles dans le domaine spatial, n'ayant pas tous les mêmes conséquences sur le plan éthique. Daniel Kaplan, qui a participé à cet exercice, présente ici les différentes fictions proposées : « Mars à tout prix » ; « Les gardiens de l'espace » ; « Les Terriens d'abord » ; « L'embarcadère de l'arche spatiale ». Il montre également l'intérêt du recours à la fiction pour alimenter les débats relatifs à l'éthique de la conquête et de l'exploration spatiales. Enfin, il présente les premiers résultats de ce débat participatif et les suites qui pourraient en découler. S.D.
    June 2018 saw the first participatory public debate on the ethics of space exploration, organized by Space'ibles, the futures monitoring organization of the French National Centre for Space Studies (CNES). Futuribles joined in with this exercise, using short fictions that presented various possible future scenarios in the space field – not all of them with the same consequences at the ethical level – to stimulate thinking. Daniel Kaplan, who took part in this exercise, here outlines the various fictions proposed : ‘Mars at all costs', ‘The Guardians of Space', ‘Earthmen first' and ‘Launchpad for the Ark Starship'. He also shows what is to be gained from the use of fiction to stimulate debate on the ethics of space conquest and exploration. He closes by presenting the first findings of this participatory debate and the potential follow-up to it.
  • Forum

    • Réforme des retraites : enjeux et dérives. Ne pas jeter les régimes complémentaires avec l'eau du bain bismarckien - ANGOULVANT Jean-Claude p. 59 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      L'avenir des retraites depuis bien longtemps pose en France un problème, en raison notamment du déséquilibre tendanciel entre le nombre d'actifs cotisant et celui des inactifs âgés. De nombreuses réformes paramétriques ont déjà été adoptées, notoirement insuffisantes pour remédier durablement au problème du financement des retraites. Le président de la République, Emmanuel Macron, a donc annoncé sa volonté d'engager une réforme structurelle visant à remplacer les régimes de base et complémentaires, soit 42 régimes, par un régime unique fonctionnant par points dont la valeur constituerait la principale variable d'ajustement.Le Haut Commissariat à la réforme des retraites (HCRR) est chargé de mettre en œuvre cette réforme sujette à d'âpres débats. En témoigne ici le point de vue présenté par Jean-Claude Angoulvant qui lui reproche deux défauts majeurs. Le premier est de vouloir unifier tous les régimes, occultant ainsi les disparités et noyant dans cet ensemble des régimes complémentaires autonomes et catégoriels qu'il juge plutôt bien gérés. Le second est de vouloir confier à l'État, piètre gestionnaire sur le long terme, le pilotage du système, au détriment des partenaires sociaux et, au passage, de faire basculer le système de retraite d'une logique assurancielle à une logique « beveridgienne ». Conformément à la logique de notre rubrique Forum, cet article exprime un point de vue destiné à nourrir la réflexion de nos lecteurs sur un projet de réforme encore en débat. H.J.
      For a very long time now the future of pensions has posed a problem in France, mainly on account of the trend toward an imbalance between the number of workers contributing to the scheme and the number of inactive seniors. Many parametric reforms have already been adopted, though these have proved notoriously inadequate when it comes to providing sustainable remedies for pension funding problems. French President Emmanuel Macron has, therefore, declared his intention to carry out structural reform aimed at replacing the basic and supplementary schemes – there is a total of 42 of these – with a single points-based system in which the value of the points would be the main adjustment variable. The High Commission for Pension Reform (HCRR) is tasked with implementing this reform which has been the object of fierce debate. That fact is attested here in the argument presented by Jean-Claude Angoulvant, who sees it as having two major shortcomings. The first is the desire to unify all schemes, overlooking the disparities between them and lumping together independent and categorial supplementary schemes, which he regards as being quite well managed. The second failing is the decision to have the system run by the state, which is a very poor long-term manager, rather than by the social partners and, in so doing, shifting the pension system from an insurance-based to a ‘Beveridgian' logic. In keeping with our usual understanding of our Forum feature, this article expresses a viewpoint intended to stimulate our readers' thinking on a reform project that is still under discussion.
    • Retraites : vivement le régime unique ! - BICHOT Jacques p. 81 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Dans la foulée du forum ouvert dans ce numéro par Jean-Claude Angoulvant, portant sur la réforme des retraites en préparation en France, Jacques Bichot — dont nous avons régulièrement publié les réflexions sur le sujet — appelle à accélérer le mouvement visant à passer à un régime unique. Une réforme de cette ampleur nécessite en effet d'être entreprise au plus tôt dans une mandature présidentielle. Mais pour que le futur régime unique des retraites puisse fonctionner simplement sans toutefois effacer la nécessité de tenir compte des spécificités des métiers et des carrières, il suggère de recourir aux fonds de pension. Ceux-ci constituent selon lui les instruments idoines pour développer les options sur mesure permettant de répondre à ces spécificités, et accompagner utilement l'unification des régimes. S.D.
      Following on from the opening Forum article in this issue by Jean-Claude Angoulvant on the pension reforms that are currently in the pipeline, Jacques Bichot, whose thoughts on this subject we have published regularly, calls for the shift to a unified scheme to be speeded up in France. A reform of this scope actually has to be undertaken as early as possible in a presidential term. But in order that the future unified pension scheme can operate simply, without obviating the need to take account of the specifics of different occupations and careers, he suggests that use be made of the (non-state) pension funds. These are, in his view, the appropriate instruments for developing the tailor-made options which make it possible to respond to these particularities and to support the process of unifying the various pension schemes.
  • Futurs d'antan

    • Lewis Mumford, un auteur majeur pour penser le XXIe siècle - HAËNTJENS Jean p. 87 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Même si nous ne sommes jamais à l'abri de ruptures imprévisibles, les tendances à l'œuvre aujourd'hui et depuis plusieurs décennies laissent entrevoir un monde durablement marqué par les évolutions technologiques en cours (poursuite de l'essor des technologies de l'information, intelligence artificielle…) et dont la population sera de plus en plus urbaine. Dans ce contexte, sans préjuger de l'emprise réelle qu'aura le progrès technologique sur l'homme (augmenté ?) ni de la façon dont s'organiseront les sociétés urbaines dans ce monde hyperconnecté mais aussi soumis à des contraintes écologiques croissantes, relire les écrits de Lewis Mumford nous a paru bienvenu.Historien des sciences et de l'urbanisme, l'Américain Lewis Mumford (1895-1990) a en effet abordé, tout au long de son œuvre, des thèmes qui demeurent très actuels pour nos sociétés : technique et civilisation, le rôle clef des villes dans l'organisation sociopolitique, les perspectives ouvertes par les relations homme-machine, la nécessité d'une pensée systémique, etc. Jean Haëntjens en propose, dans ce futur d'antan, une relecture très instructive, montrant qu'il reste des marges d'action aux sociétés humaines, même les plus « techniciennes ». S.D.
      Even though we are never immune from unpredictable breaks in continuity, the trends at work today and over the last few decades hint at a world which bears the lasting mark of current technological developments (the continuing rise of ICT, AI etc.) and will have an increasingly urban population. In this context, and without making any assumptions about the real hold that technological progress will have on (enhanced ?) human beings, nor the way urban societies will be organized in a world that is both hyper-connected and subject to increasing ecological pressures, this seems a suitable moment to re-visit the writings of Lewis Mumford. Throughout his work, the American historian of science and cities Lewis Mumford (1895-1990) addressed themes that are still very topical in our societies : technics and civilization, the key role of cities in socio-political organization, the prospects opened up by the Man-machine relationship, the need for systemic thinking etc. In this ‘Future of Yesteryear' article, Jean Haëntjens offers a very instructive re-reading, showing that even the most ‘technicistic' of human societies still retain scope for agency.
  • Tribune européenne

    • Union européenne : point d'étape - DREVET Jean-François p. 95 accès réservé avec résumé avec résumé en anglais
      Ce numéro de mai-juin de Futuribles sort quelques semaines avant les élections européennes qui conduiront au renouvellement du Parlement de l'Union et à l'arrivée de nouveaux représentants des citoyens européens censés siéger jusqu'en 2024. Ces élections se préparent dans un contexte particulier : tergiversations autour des modalités du Brexit, montée des populismes, pressions migratoires, contexte international tendu… Et comme les précédentes, elles risquent de servir de prétexte au règlement de querelles nationales plutôt qu'à la discussion des enjeux politiques communs aux Européens.C'est bien dommage car, comme le souligne Jean-François Drevet dans cette 100e tribune européenne, ces enjeux sont bien réels et il reste des raisons de croire en l'Europe. C'est le cas sur le plan institutionnel où malgré certains blocages, l'Union témoigne d'une résistance juridique inattendue à l'épreuve du Brexit ; c'est aussi le cas en matière de souveraineté où certaines politiques (par exemple fiscales) ont montré leurs limites lorsqu'elles se cantonnent à l'échelle nationale. Reste enfin la politique étrangère où les écueils sont plus nombreux et le déficit de vision stratégique et d'unité d'action, encore trop criant. Mais sous réserve d'un réel effort pédagogique des partis proeuropéens, montrant aux citoyens ce qui fait la force (actuelle et potentielle) de l'Union, ceux-ci pourraient entrevoir la possibilité de régler un certain nombre de leurs problèmes par un changement d'échelle du pouvoir politique. S.D.
      This May-June issue of Futuribles comes out a few weeks before the European elections that will lead to a renewal of the EU parliament and the arrival of new representatives of the European citizenry, who should be sitting until 2024. Preparations for these elections are taking place in a particular context : foot-dragging around the details of Brexit, rising populism, migratory pressures, a tense international context etc. And, like previous elections, there is a danger they will serve as a pretext for the settling of national quarrels rather than the discussion of shared European political issues. This is a great pity since, as Jean-François Drevet stresses in this 100th European column, the issues are very real and there are still reasons to believe in Europe. This is the case at the institutional level where, despite some cases of deadlock, the Union has shown unexpected juridical resilience with respect to the test of Brexit ; it is also the case in terms of sovereignty, where some policies (for example, around tax) have revealed their limitations when restricted to the national level. The sphere of foreign policy remains, where there are more potential stumbling blocks and the lack of strategic vision and unity of action are still all too evident. But, were there to be a genuine effort to educate the public on the part of the pro-European parties, showing the citizens what the (current and potential) strength of the Union consists in, then the glimmer of a possibility of resolving a number of their problems could emerge through a change of the level at which political power is exercised.