Contenu du sommaire : L'administration face aux problèmes du changement

Paralysé par un modèle d'organisation fondé sur la centralisation et la stratification et correspondant lui-même à des traits culturels de base comme la peur des relations face à face , le système administratif français apparaît de moins en moins efficace dans le monde moderne. C'est un système, en effet, qui n'offre pas de possibilités suffisantes de communication , qui ne réussit à mobiliser qu'une faible part des ressources humaines qui sont à sa disposition, qui éprouve beaucoup de peine enfin à s'adapter à l'environnement et même à se renouveler intellectuellement. La pression d'un environnement soumis désormais à un rythme accéléré de changement est en train de bouleverser toutefois l'équilibre traditionnel. On constate désormais en particulier, d'une part, qu'une partie de l'élite de la fonction publique a perdu confiance dans les vertus du système et, d'autre part, qu'une crise de recrutement sévit dans les emplois subalternes, manifestant ainsi la perte d'intérêt de la masse de la population pour la sécurité matérielle et psychologique qu'il assurait. En contrepartie, de nouvelles formes de rapports humains et de nouvelles méthodes intellectuelles commencent à apparaître dans des secteurs marginaux. Les chances d'un apprentissage institutionnel permettant à l'Administration française d'évoluer se jouent, selon l'auteur, dans quatre domaines : la transformation de l'équilibre entre centrales et services extérieurs, la fin du cloisonnement entre féodalités administratives, le maintien et le développement de sources de renouvellement intellectuel, la transformation des rapports entre système politique et système administratif.

Prélude à l'étude des changements que la réforme régionale apporte à l'organisation du pouvoir local en France , cet article analyse le système préfectoral traditionnel tel qu'une longue histoire en a figé les traits et dans la mesure où il constitue encore la clef de voûte du pouvoir dans la grande majorité des départements. Au-delà d'une sociologie de «l'Administration » préfectorale , l'auteur se situe d'emblée au niveau d'une sociologie politique en définissant le système préfectoral comme l'ensemble des relations entre le préfet et les notables départementaux qui constituent son environnement. Loin de l'opposition apparente et formelle entre le représentant du pouvoir central et les élus locaux, l'étude révèle une étroite «complicité » entre le préfet et ses notables. L'image que les uns et les autres se font de leur rôle et de celui de leurs «partenaires » présente , à un premier stade de l'analyse, un parallélisme frappant. A un second stade, ce parallélisme s'avère recouvrir un ensemble de stratégies complémentaires dont la solidarité définit un système parfaitement cohérent, sinon homogène. Dans sa conclusion, l'auteur se demande si les effets stabilisateurs de ce système et le type de rationalité qu'il incarne ne représentent pas une force de résistance au changement dont la volonté de réforme n'a pas suffisamment tenu compte.

L'analyse du changement administratif se limite trop souvent à l'étude des réformes de structures qui aboutissent au terme d'une évolution du droit ou sous la pression des transformations de la société globale. Mais la liaison entre changement de structure et changement de pratique administrative ne saurait aller de soi. En prenant comme point de départ une réforme de structure, comme la réforme régionale de 1964 , l'auteur s'interroge sur les mécanismes de changement : la réforme opérée conduit-elle à un changement de pratique , ou n'y a-t-il qu'un transfert de pratique de la structure départementale à la structure régionale? C'est dans les relations que toute organisation administrative entretient avec son environnement que peut être recherché le mécanisme de résistance au changement de l'Administration territoriale. Le cas des institutions régionales est pris ici comme exemple pour analyser quelques-uns de ces mécanismes.

Les auteurs présentent ici l'interprétation des résultats monographiques d'une étude effectuée dans une organisation administrative dont l'action satisfait mal plusieurs catégories d'utilisateurs. Au-delà d'une analyse des rapports de pouvoir, ils s'efforcent de saisir l'organisation comme un nœud de relations orientées à l'environnement, et prennent pour indicateurs les représentations de buts et de stratégies de l'organisation qu'ont les acteurs. Les grands symptômes mis en évidence : une forte divergence des fins, l'intériorisation des conflits, sont rapportés aux caractères particuliers des relations extérieures tant extra-administratives qu'inter-administratives. Un schéma des voies nécessaires du changement dans une administration centrale se dégage et montre que la question dernière est celle de la structuration des buts dans l'appareil d'État. Ils terminent aussi en indiquant une direction de recherche pour l'étude ultérieure des organisations étatiques.