Contenu du sommaire : Agricultrices
Revue | Travail, genres et société |
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Numéro | no 45, 2021 |
Titre du numéro | Agricultrices |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Parcours
- Aída Quinatoa : La lutte d'une Indienne équatorienne en Espagne - Olga L. González, Stéphanie Lebassard p. 7-23
Dossier : Agricultrices
- Agricultrices - Clotilde Lemarchant, Pauline Seiller p. 25-30
- Retour sur les « agricultrices » : des oubliées de la recherche et du féminisme - Rose-Marie Lagrave, Clotilde Lemarchant, Pauline Seiller p. 31-38 Dans cet article, Clotilde Lemarchant et Pauline Seiller s'entretiennent avec Rose-Marie Lagrave, sociologue et directrice d'études honoraire à l'École des hautes études en sciences sociales, qui, dès les années 1980, a contribué au lancement de recherches sur les agricultrices, croisant sociologie rurale et sociologie des rapports sociaux de sexe. Rose-Marie Lagrave revient sur sa trajectoire et explique la façon dont les sciences sociales, tout comme le mouvement féministe, rendent plus ou moins visibles certaines catégories de population.In this article, Clotilde Lemarchant and Pauline Seiller speak to Rose-Marie Lagrave, a sociologist and honorary research director at the École des Hautes Études en Sciences Sociales, who contributed to launching research on women farmers in the 1980s, combining rural sociology and the sociology of social gender relationships. Rose-Marie Lagrave looks back on her trajectory and explains how the social sciences, like the feminist movement, have made certain categories of the population more or less visible.
- Le métier d'agricultrice bio : Un nouveau rapport au travail ? - Alexandre Guérillot p. 39-55 Par une approche compréhensive des réponses à l'enquête par questionnaire menée par la Fédération nationale d'agriculture biologique et l'Agence Bio en 2018, le présent article s'attelle à donner à voir les agricultrices bio au travers de leur rapport – complexe et ambivalent – à leur travail sur leurs exploitations. Leur demande d'activités techniques, mécaniques, en plein air, contraste fortement avec la résistance d'une division sexuelle du travail qui leur attribue classiquement d'autres rôles, comme la gestion des papiers qu'elles rejettent massivement. Elles ne se projettent pas plus que cela dans les « nouvelles » activités de diversification telle la vente en « circuit court ». Se vivre agricultrice bio aujourd'hui semble donc impliquer une revendication complète des prérogatives de la figure du chef d'exploitation, en remettant en cause la division sexuelle traditionnelle du travail agricole.Through a close examination of the responses to the questionnaire survey conducted in 2018 by the Fédération nationale d'agriculture biologoque and the Agence Bio, this article seeks to present women organic farmers through their – complex and ambivalent – relationship to their work on their farms. Their desire for technical and mechanical outdoor activities contrasts sharply with the persisting gendered division of labor, which classically assigns them to other roles, such as administrative tasks, which they overwhelmingly reject. “New” diversification activities, such as direct sales to consumers, do not appeal to them either. Being a woman organic farmer today therefore seems to imply fully claiming the prerogatives of a farm manager, by challenging the traditional gendered division of agricultural labor.
- Les composantes morale et politique du travail parental des agricultrices - Clémentine Comer p. 57-76 Cet article s'intéresse aux fondements familialistes des pratiques parentales et domestiques promues par les agricultrices. À la fois ressource identitaire et levier d'expression politique pour des femmes professionnellement déclassées au sein de l'espace agricole, l'adhésion à une stricte division des rôles sexués est moralement défendue et collectivement prescrite. L'immersion auprès de groupes de développement agricole féminins et la réalisation d'entretiens avec leurs participantes donnent ainsi à voir une quête de respectabilité bâtie sur la promotion d'une morale familiale et le respect des normes de genre. En se faisant les porte-voix d'un ordre familial et d'un modèle culturel agricole présumé authentique et vertueux, les agricultrices inventent ainsi des formes honorables d'engagements qui, sans être ouvertement contestataires, n'en sont pas moins défensives.This article examines the familist foundations of the parenting and domestic practices promoted by women farmers. Their adherence to a strict division of gender roles is morally defended and collectively prescribed, functioning both as an identity resource and a lever for political expression for professionally downgraded women within the agricultural sector. Immersive work within women's agricultural development groups and interviews with their members reveal a quest for respectability that relies on promoting family values and the respect of gender norms. By making themselves the spokespersons for family order and for an allegedly authentic and virtuous agricultural cultural model, women farmers are thus inventing honorable forms of commitment which, though they are not open forms of protest, are no less defensive.
- Des femmes rurales face à l'histoire coloniale patriarcale au Brésil - Héloïse Prévost p. 77-95 Cet article analyse les conditions de politisation des femmes rurales dans leur rapport à la terre, comme territoire, comme objet de travail et de soins. À partir d'une démarche socio-historique, le mouvement des femmes rurales est appréhendé dans ses liens avec les luttes pour la terre passées et présentes. Fondée sur l'étude de cas de l'assentamento Maceió, dans le Nordeste du Brésil, l'analyse explore l'articulation du travail productif, militant et de care. Trois axes sont présentés : le croisement de l'histoire locale avec l'histoire coloniale, patriarcale et néolibérale ; les conditions de politisation et l'organisation du travail militant et de care à l'échelle d'un groupe de femmes rurales ; la dimension politique du travail productif imbriqué au travail de care socio-environnemental. Ces axes permettent de rendre compte d'une série de stratégies paysannes pour se réapproprier le territoire et construire un projet de résistance/r-existence.This article analyzes the conditions of politicization of rural women in their relationship to the land, as a territory and as an object of work and care. Relying on a socio-historical approach, the rural women's movement is examined through its links with past and present struggles for land. Based on a case study of assentamento Maceió, in the Brazilian Nordeste, the analysis explores the nexus between productive, activist, and care work. Three lines of inquiry are tackled : the intersection of local history and colonial, patriarchal, and neoliberal history ; the conditions of the politicization and organization of activist and care work at the level of a group of rural women ; and the political dimension of productive work interwoven with socio-environmental care work. These lines of inquiry allow accounting for a series of peasant strategies to reclaim the territory and build a project of resistance/re-existence.
- Agricultrices néorurales à l'épreuve de la séparation conjugale - Pierre Guillemin, Michaël Bermond p. 97-114 Dans la littérature scientifique, la perpétuation de la domination masculine en agriculture s'analyse notamment au prisme du divorce. À partir de deux études de cas issues d'une revue de presse (dans le quotidien Ouest-France), cet article propose des questions de recherche quant aux rôles de différentes espèces de capitaux et des effets de contextes dans l'atypicité d'agricultrices séparées de leurs conjoints et qui demeurent à la tête de l'exploitation familiale. Contrairement à d'autres néorurales, elles semblent parvenir à déjouer certaines normes de genre en agriculture, malgré une domination masculine qui perdure.In the scientific literature, the perpetuation of male domination in agriculture can be examined through the prism of divorce in particular. Based on two case studies drawn from a press review (in the daily Ouest-France), this article proposes research questions regarding the roles played by different types of capital and by context effects in the atypical nature of women farmers who have separated from their spouses yet have remained at the head of the family farms. Unlike other counterurbanites, they seem to have succeeded in thwarting certain gender norms in agriculture, despite enduring male domination.
Mutations
- Des rebelles au travail. Faire front entre ouvrières dans la (post) révolution tunisienne - Sarah Barrières p. 115-133 Au cours de la révolution tunisienne, démarrée fin 2010, les rapports sociaux de sexe sont redéfinis par la participation massive des femmes aux protestations. Dans ce contexte, une lutte d'ouvrières, singulière tant par sa durée que par ses modes d'organisation et d'actions, se déroule de 2011 à 2014 dans une filiale d'une multinationale française. Pour faire face aux conditions de travail déplorables : humiliations, harcèlements sexuels, horaires extensifs, etc., les ouvrières s'organisent sous la bannière de la principale centrale syndicale du pays, l'Union générale tunisienne du travail. Quasi exclusivement féminin, le syndicat de base, en privilégiant un fonctionnement et des modes d'action inclusifs et peu hiérarchisés, libère la parole et permet de déplacer les lignes du genre. Centrée sur les deux leadeuses syndicales dotées de dispositions à l'engagement qui se réactualisent et se transforment au contact de l'événement, cet article montre aussi comment sont mobilisés des registres d'action divers du fait du rapport ambivalent de la lutte aux structures syndicales et de sa radicalisation face à une répression patronale de plus en plus dure.During the Tunisian revolution, which began at the end of 2010, social gender relationships were redefined by women's massive participation in the protests. In this context, a female workers' struggle, which has been unique both in terms of its duration and its methods of organization and actions, took place from 2011 to 2014 within a French multinational's subsidiary. To cope with the deplorable working conditions (humiliation, sexual harassment, long hours, etc.), the workers organized under the banner of the country's main trade union center, the ugtt. By favoring inclusive and little-hierarchized operations and modes of action, the almost exclusively female grassroots union allowed speaking more freely and helped shift the boundaries of gender. This article focuses on the two female union leaders, both with a propensity for activism which evolved and transformed as the event unfolded, and also shows how various registers of action were mobilized due to the ambivalent relationship between the struggle and the union structures, and to its radicalization in the face of increasingly harsh employer repression.
- Des rebelles au travail. Faire front entre ouvrières dans la (post) révolution tunisienne - Sarah Barrières p. 115-133
Controverse
- Laïcités et féminismes : quels rapports ? : En écho à "La religion de la laïcité" de Joan Scott - Jacqueline Laufer, Nicole Mosconi p. 135-138
- Ce que le pluriel fait à la laïcité - Florence Rochefort p. 139-142
- Laïcité, condition féminine et liberté religieuse - Dominique Schnapper p. 143-146
- Laïcité et égalité entre les sexes : une mutation du débat public ? - Stéphanie Hennette-Vauchez p. 147-150
- Joan Scott n'a pas tout dit - Charles Conte p. 151-154
- Réponses - Joan W. Scott, Hélène Tronc p. 155-157
Critiques
- Catherine Marry, Laure Bereni, Alban Jacquemart, Sophie Pochic et Anne Revillard, "Le plafond de verre et l'État. La construction des inégalités de genre dans la fonction publique" : Paris, Armand Colin, 2017, 222 pages - Marlaine Cacouault-Bitaud p. 159-163
- GenERe (dir.) (Anne-Charlotte Husson, Lucie Jégat, Marion Maudet, Lucy Michel, Vanina Moziconacci, Lara Tatoueix, Cécile Thomé et Maxime Triquenaux), "Épistémologie du genre. Croisements des disciplines, intersections des rapports de domination" : Lyon, ENS Éditions, 2018, 250 pages - Irène Pereira p. 164-166
- Frédérique Matonti, "Le genre présidentiel. Enquête sur l'ordre des sexes en politique" : Paris, Éditions La Découverte, 2017, 320 pages - Marion Paoletti p. 167-169
- Susan Finding, "La politique de la petite enfance au Royaume Uni (1997-2010). « Une nouvelle frontière » de l'Etat-providence britannique" : Paris, Michel Houdiard éditeur, 2018, 223 pages - Hélène Join-Lambert p. 170-173
- Cris Beauchemin, Christelle Hamel et Patrick Simon (dir.), "Trajectoires et origines. Enquête sur la diversité des populations en France" : Paris, Ined éditions, 2016, 624 p. - Audrey Lenoël p. 174-177
- Cécile Guillaume, "Syndiquées. Défendre les intérêts des femmes au travail" : Paris, Presses de Sciences Po, 2018, 254 pages - Clémentine Comer p. 178-181
- Alexia Boucherie, "Troubles dans le consentement. Du désir partagé au viol : ouvrir la boîte noire des relations sexuelles" : Paris, Éd. François Bourin, Collection « Genre ! », 2019, 180 pages - Nicole Mosconi p. 182-185
- Elisabetta Pernigotti, "Désindustrialisation et précarisation au féminin en France et en Italie" : Paris, L'Harmattan, coll. « Logiques sociales », 2018, 238 pages - Juliette Ronsin p. 186-189
- Pascale Molinier, "Le care monde" : Lyon, ENS Éditions, 2018, 176 pages - Annik Houel p. 190-192
- Gabrielle Schütz, "Jeunes, jolies et sous-traitées : les hôtesses d'accueil" : Paris, Éditions La Dispute, 2017, 244 pages - Cyrine Gardes p. 193-196
- Laurence Granchamp et Roland Pfefferkorn (dir.), "Résistances et émancipation des femmes du Sud" : Paris, L'Harmattan, 2017, 274 pages - Nelly Parès p. 197-200
- Abir Kréfa, "Écrits, genre et autorités. Enquête en Tunisie" : Lyon, ENS Éditions, 2019, 292 pages - Kaoutar Harchi p. 201-203
- Jean-Louis Escudier, "Les femmes et la vigne. Une histoire économique et sociale (1850-2010)" : Toulouse, Presses universitaires du Midi, 2016, 375 pages - Clémentine Comer p. 204-207
- Danièle Kergoat, "Se battre, disent-elles…" : Paris, La Dispute, 2012, 353 pages - Cécile Guillaume p. 208-210
- Nadia Lamamra, "Le genre de l'apprentissage, l'apprentissage du genre. Quand les arrêts prématurés révèlent les logiques à l'œuvre en formation professionnelle initiale" : Zurich et Genève, Éditions Seismo, 2016, 296 pages - Fanny Renard p. 211-214