Contenu du sommaire : Crises, dynamiques démographiques et peuplement
Revue | Espace Populations Sociétés |
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Numéro | no 2-3, 2022 |
Titre du numéro | Crises, dynamiques démographiques et peuplement |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Crises, dynamiques démographiques et peuplement - Gil Bellis, Maria Carella, Byron Kotzamanis, Jean-François Léger, Alain Parant
- La mortalité de guerre au Burundi pendant la période 1993-2001 - Christophe Bergouignan En partie structuré par des oppositions ethniques, le conflit Burundais débuté en 1993 a engendré un grand nombre de victimes directes (tuées par la guerre) et indirectes (suite à la détérioration des conditions de vie). Au-delà de la mortalité, cette crise a provoqué de nombreux déplacements forcés. L'objectif de cet article est, partant du profil des victimes de la guerre civile burundaise selon diverses caractéristiques (âge, sexe, …) et en analysant les très fortes différences géographiques de mortalité de guerre, de comprendre les facteurs de surexposition à cette mortalité. L'exploitation de l'Enquête Démographique et de Santé de la Reproduction réalisée en 2002 (ESDSR Burundi 2002) permet d'estimer les taux de mortalité à partir des déclarations des enquêtés sur la survie de leurs enfants et sur la survie de leurs parents. Lorsque le décès d'un des proches est déclaré, on peut distinguer s'il résulte de violences armées ou d'une autre cause, ce qui autorise l'estimation de taux de mortalité de guerre par âge et sexe. À l'échelle des secteurs d'enquête, et afin de neutraliser l'effet des petits effectifs d'enquêtés dans chaque secteur et l'effet des différences de composition par sexe et âge, des taux standardisés de mortalité de guerre ont été estimés. Ces estimations sont proposées pour 2 périodes : l'année 1993 caractérisée par des massacres de masse et leur répression, et la période 1994-2001 caractérisée par une guérilla et des exactions sporadiques. À cette distinction temporelle s'ajoutent les regroupements de populations opérés en 1993 et 1994 puis pendant les années 1996-1999, qui fournissent indirectement de nombreuses informations sur l'exposition à la mortalité de guerre des différentes parties de la population en fonction de leur situation face aux enjeux politiques, ethniques et régionaux, dans le cadre de la géographie humaine complexe du Burundi.Partly structured by ethnic oppositions, the Burundian conflict that began in 1993 has generated a large number of direct victims (killed by the war) and indirect victims (as a result of the deterioration of living conditions). In addition to mortality, this crisis has caused numerous forced displacements. The objective of this article is to understand the factors of overexposure to this mortality, based on the profile of the victims of the Burundian civil war according to various characteristics (age, gender, etc.) and by analyzing the very strong geographical differences in war mortality. The use of the Demographic and Reproductive Health Survey conducted in 2002 (ESDSR Burundi 2002) makes it possible to estimate mortality rates based on the declarations of the respondents on the survival of their children and the survival of their parents. When the death of a relative is reported, it is possible to distinguish whether it is the result of armed violence or another cause, which allows the estimation of war mortality rates by age and sex. At the level of the survey sectors, and in order to neutralize the effect of small numbers of respondents in each sector and the effect of differences in sex and age composition, standardized war mortality rates have been estimated. These estimates are proposed for two periods: 1993, characterized by mass killings and their repression, and 1994-2001, characterized by guerrilla warfare and sporadic abuses. In addition to this temporal distinction, the regrouping of populations in 1993 and 1994, and then during the years 1996-1999, indirectly provides a great deal of information on the exposure of different parts of the population to war mortality, depending on their situation in relation to political, ethnic and regional issues, within the framework of the complex human geography of Burundi.
- Dynamics of life expectancy change during the transition to democracy in the ex-Yugoslav countries - Dijana Spasenoska Les bouleversements politiques inhérents à l'éclatement de la Yougoslavie au début des années 1990 ne se sont pas traduits seulement par des changements socio-économiques. Ils ont ouvert une décennie marquée par de nombreuses guerres et des troubles civils. La santé, en tant que phénomène social, est directement et indirectement affectée par ces changements. Elle en est un des marqueurs. L'objectif de cet article est d'étudier l'évolution de l'espérance de vie - considérée ici comme mesure de la santé de la population - en période de crise et de grands changements sociétaux. La dynamique du changement de l'espérance de vie dans les différents pays issus de l'ex-Yougoslavie est analysée en calculant les contributions des variations de la mortalité par âge et par cause.Ce travail s'appuie sur des données de mortalité issus des registres civils nationaux des six républiques de l'ex-Yougoslavie. Ces derniers constituent des sources reconnues pour leur exactitude et leur exhaustivité. La méthode d'Arriaga est utilisée pour décomposer les contributions des groupes d'âges et des causes de décès à l'évolution de l'espérance de vie. Trois périodes ont été déterminées : les années précédant l'éclatement de la Yougoslavie (1975-1985), les années de crise dominées par les guerres et les troubles civils (1988-2000) et les années récentes au cours desquelles chaque nouvel état a pu affirmer son indépendance dans un climat géopolitique pacifié (2007-2017). D'une manière générale, sur le temps long, de grandes améliorations de l'espérance de vie à la naissance sont notées dans tous les pays. Mais les dynamiques ont été affectées de manières diverses par l'éclatement de la Yougoslavie. Jusque dans les années 1980, pendant la période de la Fédération socialiste, l'espérance de vie a augmenté de façon constante dans tous les pays, principalement en raison de la réduction de la mortalité infantile et juvénile, ainsi que de la réduction de la mortalité due aux maladies infectieuses. Pendant les années 1990, les tendances ont divergé : malgré le contexte régional de crise, certains pays ont continué d'enregistrer une augmentation continue de l'espérance de vie, tandis qu'en Serbie-et-Monténégro elle diminuait. Au cours des dix dernières années, dans tous les pays, l'espérance de vie a poursuivi ou repris sa progression, en raison d'une réduction de la mortalité due aux maladies non transmissibles parmi la population âgée.Les données mobilisées ont permis de produire des estimations précises de l'espérance de vie et de la dynamique de l'évolution de la mortalité, permettant une analyse plus approfondie des déterminants sociaux de la santé dans les pays issus de l'ex-Yougoslavie depuis le milieu des années 1970. De ce fait, compte tenu de l'évolution du contexte géopolitique au cours des quarante dernières années, cette étude permet de saisir les effets immédiats, différés et diversifiés d'une crise majeure sur l'évolution de la santé de populations appartenant initialement à un même pays.The break-up of Yugoslavia led to political turmoil, accompanied by socio-economic changes, wars and civil unrest. Health as a social phenomenon is directly and indirectly affected by such changes. The objective of this paper is to give an overview of the changes in life expectancy, as a measure of population health, during times of crisis and large societal changes. The dynamics of change of life expectancy in the different Balkan countries are analysed by calculating the contributions of age and cause specific mortality to the observed changes of life expectancy.An original dataset of life-tables is used to calculate life expectancy, created based on mortality data from national civil registers from the 6 ex-Yugoslav republics, assessed for accuracy and completeness. Arriaga's method is used to decompose the contributions of age groups and causes of death to the observed changes in life expectancy during three time periods: Socialist Federation (1975-1985), Transition (1988-2000), Independence (2007-2017). Large improvements in life expectancy at birth are noted in all countries, although there is heterogeneity in the dynamics of change. During the Socialist Federation period, life expectancy increased consistently across countries mainly due to reductions in infant and child mortality, as well as reduction in infectious diseases mortality. During the Transition there was a divergence of trends and some countries noted continuous increase in life expectancy, contrasting the decrease in life expectancy in Serbia and Montenegro. In all countries life expectancy increased during the Independence period, due to a reduction in mortality from non-communicable diseases among the older population.The findings of this study are important not only because they create an understanding of changes in population health during a period of crisis, but also because they provide accurate estimates of life-expectancy and dynamics of mortality change, allowing for further analysis on the social determinants of health.
- Beyond the crisis: fertility variations and the family policies in the Portuguese municipalities - Dulce Pimentel, Cristina Sousa Gomes Dans un contexte de vieillissement profond, comme celui du Portugal, la fécondité devient une variable clé pour l'analyse de la dynamique de la population, avec une importance accrue compte tenu des très faibles niveaux enregistrés dans le pays. Selon l'INE [2020], le Portugal a un indice synthétique de fécondité (ISF) de 1,40 enfant par femme, l'un des plus bas de l'UE [Eurostat, 2022].La crise économique et financière de 2008 et l'intervention de la Troïka (Commission européenne, Banque centrale européenne et Fonds monétaire international, les trois autorités qui contrôlent les programmes de sauvetage internationaux) en 2011, ont eu un impact sur les conditions socio-économiques de la population portugaise, avec des répercussions sur d'autres comportements ainsi que sur la fécondité. Le report de la naissance d'un enfant a conduit l'ISF à tomber à ses niveaux les plus bas jamais enregistrés, atteignant 1,21 enfant par femme en 2013. Bien que la reprise économique ait permis un léger redressement des niveaux de fécondité, la nouvelle crise provoquée par la COVID-19 s'est traduite par une nouvelle baisse historique des naissances dans le pays en 2021, lorsque le nombre de naissances vivantes est passé sous la barre des 80 000, soit une diminution de 8 % par rapport à 2019 [INE, 2022].Bien que cette tendance à la baisse soit commune à presque tous les pays européens développés [Aassve et al., 2020 ; Aassve et al., 2021], pour la société portugaise, il s'agit d'un nouveau réveil et d'une source d'inquiétude, étant donné la baisse de la population confirmée dans la publication des données provisoires du recensement de la population de 2021 (-2,1% par rapport à 2011). Cependant, les modèles de fécondité ne sont pas uniformes, car ils impliquent une hétérogénéité régionale, qui met en évidence une multiplicité de facteurs et de comportements.Cet article vise à aborder la fécondité d'un point de vue régional afin de distinguer la diversité des modèles sur le territoire au cours des deux dernières décennies, et de discuter dans quelle mesure les crises ont été un point de changement ou un renforcement des transformations en cours. Dans l'analyse, outre le cadre et la contextualisation des tendances de la fécondité par NUTS 3, les réponses politiques qui ont émergé à l'échelle locale/municipale seront analysées.Bien que la crise ait contribué à la baisse de la fécondité au Portugal, son déclin va au-delà de la crise, reflétant des changements dans les modèles de comportement et les contraintes sociales et économiques. Ainsi, il persiste des contraintes dans la dynamique de la population qui ont empêché l'inversion ou l'atténuation du déclin dans les territoires intérieurs, contraintes qui se font actuellement sentir également au niveau du pays.In a profound ageing context, such as the Portuguese, fertility becomes a key variable for the analysis of population dynamics, with increased importance given the very low levels recorded in the country. According to INE [2020], Portugal has a total fertility rate (TFR) of 1.40 children per woman, one of the lowest in the EU [Eurostat, 2022].The economic and financial crisis of 2008 and the Troika intervention (European Commission, European Central Bank, and the International Monetary Fund, the three authorities that monitored international bailout programs) in 2011, had impacted on the socioeconomic conditions of the Portuguese population, with repercussions in other behaviors as well as in fertility. Thus, the childbearing postponement led the TFR to fall to its lowest levels on record, reaching 1.21 children per woman in 2013. Although the economic recovery has allowed a slight recovery in fertility levels, the new crisis caused by COVID-19 was reflected in a new historic decline in births in the country in 2021, when the number of live births fell below 80 000, a decrease of 8% compared to 2019 [INE, 2022].Although this downward trend is common to almost all developed European countries [Aassve et al., 2020 ; Aassve et al., 2021], for Portuguese society it is a new wake-up call and a cause for concern given the population decline confirmed in the provisional data release from the 2021 Population Census (-2.1% compared to 2011). However, fertility patterns are not uniform, as they involve regional heterogeneity, which highlights a multiplicity of factors and behavioral patterns.This paper aims to approach fertility from a regional perspective to distinguish the diversity of patterns across the territory in the last two decades, and to discuss the extent to which the crises were a point of change or reinforcement of the transformations that were taking place. In the analysis, in addition to the framework and contextualisation of fertility trends by NUTS 3, the policy responses that have emerged at a local/municipal scale will be analysed.Although the crisis has contributed to the fertility decline in Portugal, its decline goes beyond the crisis reflecting changes in behavioral patterns and social and economic constraints. Thus, there persist constraints in the population dynamics that have prevented the reversal or mitigation of the decline in the inland territories that currently are also felt at the country level.
- Natives' and immigrants' fertility intentions in Europe: the role of employment - Giammarco Alderotti, Thais Garcia-Pereiro, Roberta Pace, Anna Paterno Dans plusieurs pays européens, les naissances de femmes immigrées représentent plus de 10 % de l'ensemble des naissances [Sobotka 2008] ; cependant, des éléments montrent qu'au lendemain de la Grande Récession, la fécondité des migrants pourrait avoir chuté de manière plus prononcée chez les migrants que chez les autochtones [Sobotka 2017].Dans cette étude, nous souhaitons apporter de nouvelles connaissances sur le lien entre emploi et fécondité chez les migrants en étudiant la relation entre les intentions d'emploi et de fécondité - plutôt que les comportements. En fait, la plupart des recherches sur la fécondité des migrants se sont concentrées sur les comportements de procréation, et ont négligé les dimensions idéelles représentées par les attitudes et les intentions, qui sont pourtant de première importance pour compléter le tableau à travers une meilleure compréhension du côté des normes concernant la fécondité [Milewski et Mussino, 2018]. Pour ce faire, nous nous appuyons sur les données de l'ESS relatives aux années 2004 et 2010, soit juste avant et juste après la crise financière de 2008 (la "Grande Récession"). L'analyse des évolutions sur cette courte période permet de saisir le lien entre intentions de fécondité et emploi dans une période caractérisée par une grave crise économique. Plus généralement, cet article apporte un éclairage sur la façon dont les migrants appréhendent la procréation dans le pays d'accueil selon leur situation d'activité.In several European countries, births to immigrant women represent more than 10% of all births [Sobotka 2008]; however, there is evidence showing that in the aftermath of the Great Recession migrants' fertility might have fallen more pronouncedly among migrants than natives [Sobotka 2017].With this study, we aim to provide further evidence about the employment/fertility link among migrants by focusing on the relationship between employment and fertility intentions - instead of the behaviours. In fact, most research on migrant fertility has focused on childbearing behaviours, disregarding the ideational dimensions represented by attitudes and intentions, which are of primary importance to complete the picture through a better understanding of the normative side of fertility [Milewski and Mussino, 2018]. We do this relying on data from the European Social Survey and focusing on two years, 2004 and 2010, i.e. just before and just after the 2008 financial crisis (the 'Great Recession'). The analysis of developments over this short period allows us to understand the link between fertility intentions and employment in a period characterised by a severe economic crisis. Scrutinising the fertility intentions of migrants with different employment status across Europe, we aim to shed light on dynamics around migrants' childbearing in the host country.
- Le télétravail est-il synonyme d'exode urbain ? Les enseignements du premier confinement en France - Eléonore Pigalle, Cyril Atkinson-Clement Cet article explore les potentialités du télétravail, un sujet riche en littérature scientifique depuis les années 1980, qui s'actualise avec sa généralisation forcée en réponse à l'urgence sanitaire causée par le Covid-19. Cette étude analyse l'impact qu'a eu l'habitude de télétravailler sur les mouvements de population dans le contexte singulier du premier confinement en France (du 17 mars au 10 mai 2020). Nos résultats montrent que (i) les actifs habitués au télétravail n'ont pas plus déménagé à l'annonce du confinement que les non habitués ; (ii) lorsqu'ils ont changé de résidence, une différence qualitative pouvait être observée entre ces deux groupes ; (iii) si l'habitude au télétravail a permis de protéger les actifs sur le plan professionnel, ils n'ont pas nécessairement mieux vécu le confinement que les autres actifs. En conclusion, ce travail contribue aux réflexions en cours concernant l'arrivée de nouveaux télétravailleurs nés à la suite du Covid-19 sur les conséquences spatiales et la réorganisation des territoires, ce qui constitue un défi majeur pour les décideurs politiques et économiques.This article explores the potentialities of telework, a topic with rich in scientific literature since the 1980s, which is being updated with its forced generalisation in response to the COVID-19 pandemic emergency. This study analyses the impact of telework on population movements in the singular context of the first lockdown in France (from 17 March to 10 May 2020). Our results highlight that (i) people with a teleworking habit did not increase their change of residency before the lockdown in comparison to people without this habit; (ii) when they moved, a qualitative difference could be observed during the two groups; (iii) if the telework habit contribute to protect people about their occupations, they not necessarily enjoyed more this period than people without teleworking habit. In conclusion, this work aims to contribute to the ongoing reflections on the spatial consequences and the reorganisation of territories, which constitutes a major challenge for political and economic decision-makers.
- La pandémie de Covid-19, facteur de revitalisation démographique des zones rurales ? Le cas de la province d'Alicante (Espagne) - José Ramón Valero Escandell La pandémie de 2020 et le confinement ont été caractérisés dans de nombreux endroits par une revitalisation démographique de certaines zones rurales, ou du moins par un ralentissement du processus de dépeuplement. Ce fut notamment le cas dans la province d'Alicante, située au sud de l'Espagne en Andalousie, où la dynamique observée en 2020 apparaît en rupture avec celle de la décennie précédente (2010-2020). Quels facteurs ont pu favoriser ce rebond ? Dans cet article, nous avons focalisé notre attention sur l'effet potentiel de quelques facteurs géographiques, économiques et démographiques : la distribution territoriale des communes rurales, leur distance par rapport aux centres urbains, la proximité du littoral, le niveau de revenu, le vieillissement local de la population, la dynamique démographique au cours de la décennie qui a précédé la crise du Covid-19, la présence de résidents étrangers arrivés pour y exercer une activité professionnelle ou y passer leur retraite.Les résultats sont mitigés. Aucun lien très net ne peut être mis en évidence ; mais des tendances émergent toutefois, qui rejoignent les résultats d'études menées ailleurs en Espagne ou confirment des mouvements qui ont émergé avant l'épidémie de Covid-19. Faut-il y voir un phénomène ponctuel ou l'amorce d'une dynamique de plus long terme ? Il est encore trop tôt pour répondre à cette question. Mais cette analyse permet de préciser des pistes de recherche qui peuvent orienter les politiques d'aménagement du territoire et stimuler de manière durable le renouveau démographique des zones rurales.The 2020 pandemic and containment were characterized in many places by a demographic revitalization of some rural areas, or at least by a slowing of the depopulation process. This was especially the case in the province of Alicante, located in the south of Spain in Andalusia, where the dynamics observed in 2020 were a break with those of the previous decade (2010-2020). What are the factors that may have favored this undeniable rebound? In this article, we have focused on the potential effect of some geographical, economic and demographic factors: the territorial distribution of rural municipalities, their distance from urban centers, proximity to the coastline, income level, local aging of the population, the demographic dynamics in the decade before the Covid-19 crisis, the presence of foreign residents who arrived to work or retire.The results are mixed. No clear link can be established, but trends emerge that are consistent with the results of studies conducted elsewhere in Spain or confirm certain trends that were apparent before the Covid-19 epidemic. Is this a one-time phenomenon or the beginning of a longer-term dynamic? It is still too early to answer this question. However, this analysis allows us to identify avenues of research that can guide land-use planning policies and stimulate the demographic renewal of rural areas in a sustainable manner.
- Environmental crisis, food crisis and resisting fisherpersons. The case of the Magdalena River, Colombia - Carolina Hernández-Rodríguez, Nubia Ruiz-Ruiz, Sébastien Velut Le bassin du Magdalena est la principale source d'aliments pour la Colombie, qui apporte 70% de la production agricole et 40% de la pêche en eau douce. Toutefois, le fleuve connaît une crise environnementale complexe qui affecte les pêcheries et les territorialités des communautés vivant de la pêche. La place du fleuve comme source d'alimentation est en déclin.Cet article présente la relation entre la crise environnementale et la sécurité alimentaire à l'échelle locale et nationale à partir de la situation des pêches artisanale et des pêcheurs du Magdalena. La méthodologie combine des approches qualitatives et quantitative, à partir de statistiques concernant les populations et la production, ainsi que des entretiens en profondeurs avec des pêcheurs et d'autres acteurs stratégiques dans différents secteurs du cours du fleuve.The Magdalena River basin is the main source of food in Colombia. 70% of agricultural output and 40% of inland fishing are produced in its basin. However, the River is facing a complex environmental crisis that affects both the fisheries and fishermen's territoriality. The river as a source of food is declining. This article aims to present the relation between the environmental crisis of the river and food security at the local and national level, through the situation of the artisanal fisheries and fisherpersons in the Magdalena River. The methodology of the research combines quantitative and qualitative approaches, through descriptive statistics of population and productive surveys, and in-deep interviews with fisherpersons and other strategic actors in different parts of Magdalena's basin.
- Le cap des 100 millions en Égypte. Discours de crise et stratégies à l'aune des changements environnementaux globaux - Florian Bonnefoi Avec plus de 100 millions d'habitants, l'Égypte est un géant démographique. Le pays gagne désormais un million d'habitants tous les 7 mois et sa population est extrêmement jeune : deux tiers des Égyptiens ont moins de 30 ans. Dans un pays désertique à 96 %, cette augmentation soutenue de la population est présentée comme alarmante. Depuis les années 1950, un discours de crise se construit dans les déclarations politiques et dans les médias. La croissance démographique est accusée de tous les maux du pays : pauvreté, « retards de développement », insécurité, construction illégale, etc. Dans un contexte de changements environnementaux globaux, ce discours se teinte d'une dimension environnementaliste insistant sur la rareté des ressources, en premier lieu l'eau et les terres arables. En s'appuyant sur la presse et sur des entretiens menés dans la région du Delta, cet article analyse le discours de crise qui reporte la responsabilité sur les classes populaires. Face à ce qui est présenté comme un défi majeur, des politiques publiques de réduction de la natalité et des politiques territoriales de fronts pionniers dans le désert – bonification des terres et villes nouvelles – sont menées depuis plusieurs décennies et s'accélèrent aujourd'hui.With more than 100 million inhabitants, Egypt is a demographic giant. Nowadays, the country wins one million inhabitants every 7 months and its population is extremely young: two thirds of Egyptians are less than 30 years old. In a country where 96% of the territory is desert land, this steady population growth is presented as alarming. Since the 1950s political statements and the media have elaborated a crisis narrative. Population growth is made responsible for all national wrongs: poverty, “development delay”, insecurity, illegal construction, etc. In a context of global environmental changes, this narrative gets a more environmentalist dimension. It insists on resource scarcity, particularly water and cultivable lands. This article leans on a press review and on interviews with dwellers from the Delta region to analyze the crisis narrative that put the blame on popular social classes. Being presented as a major issue and challenge, population growth led to public birth policies and to territorial policy of pioneer fronts in the desert, through land reclamation and new cities.
Dossier pédagogique
- La guerre de 1914-1918 : un cataclysme démographique. Effets immédiats et conséquences à long terme de la guerre de 1914-1918 sur la démographie française - Gil Bellis, Jean-François Léger, Alain Parant La France a connu depuis le début du IIIe millénaire deux crises de mortalité importantes : celle liée à l'épisode de forte chaleur du mois d'août 2003 et celle, encore en cours, consécutive à l'épidémie de Covid-19. Ces événements se sont traduits par une surmortalité considérable. Mais en regard des conséquences démographiques que la Première Guerre mondiale a eues à court, moyen et long termes, elles paraissent presqu'anecdotiques. Ce dossier pédagogique revient en détail sur les effets que la guerre de 1914-1918 a eu sur la démographie française. Après une première partie qui brosse le portrait démographique de la France métropolitaine à la veille du conflit, ce dossier pédagogique revient ensuite sur l'ampleur des pertes humaines qui ont amputé des générations de jeunes hommes (2e partie), la forte dépression de la fécondité en raison de la séparation des couples pendant le conflit (3e partie) et les conséquences majeures et durables de la surmortalité et de la baisse de la natalité sur la pyramide des âges de la France (4e partie). Enfin, dans une 5e partie qui fait office de conclusion, ce dossier relativise l'importance des crises liées à la canicule de 2003 et à l'épidémie de Covid-19.Since the start of the third millennium, France has witnessed two significant mortality crises: the first, due to the period of excessively high temperatures experienced in August 2003; and the second, due to the still ongoing effects of the COVID-19 pandemic. These events have resulted in considerable numbers of excess deaths. But, compared with the demographic consequences of the First World War over the short, medium and long term, they appear almost anecdotal. This educational fact file looks in detail at the effects of the 1914-1918 war on the French population. The first part of the file paints a picture of the demographic situation in Metropolitan France just prior to the conflict, before we move on to look at the scale of the loss of life, which wiped out generations of young men (part 2), the significant reduction in fertility due to the separation of couples during the conflict (part 3), and the major and permanent consequences of excess deaths and a lower birth rate on the population pyramid of France (part 4). Lastly, in part 5, we conclude by putting the significance of the crises associated with the heatwave of 2003 and the COVID-19 pandemic into perspective.
- La guerre de 1914-1918 : un cataclysme démographique. Effets immédiats et conséquences à long terme de la guerre de 1914-1918 sur la démographie française - Gil Bellis, Jean-François Léger, Alain Parant
Varia
- Logiques d'implantation des structures sanitaires et disparités socio-spatiales de l'accès à l'offre de soins à Bouaké (Côte d'Ivoire) - Kouassi Samuel Konan, Kouadio Raphaël Oura, Florence Fournet La répartition de l'offre de soins à Bouaké, telle qu'elle apparaît aujourd'hui, est issue d'un long processus ancré à la fois dans l'histoire de la ville et des politiques de santé. Cette étude s'intéresse ainsi au lien entre les logiques d'installation des structures de soins et l'accès à l'offre de soins à Bouaké. Les résultats, obtenus du recensement de toutes les structures sanitaires de l'aire urbaine et de leur géo-positionnement, révèlent que différentes logiques d'implantation sont à l'œuvre et qu'elles sont à l'origine d'inégalités socio-spatiales d'accès à l'offre de soins à Bouaké. Ainsi, le secteur privé se soucie davantage de rentabilité que de venir en appui au secteur public. Le secteur privé confessionnel se caractérise par son engagement auprès des ménages défavorisés. Quant au secteur public, certes guidé par une volonté de vouloir respecter la carte sanitaire, il offre de faibles plateaux techniques et une capacité d'accueil limitée. Ces logiques d'implantation différenciées se traduisent par une concentration des structures de soins au centre-ville et le long des grandes voies de communication. Les formations sanitaires deviennent rares à mesure qu'on progresse vers la périphérie et les zones difficiles d'accès. Cette distribution de l'offre de soins par secteur de soins révèle des inégalités potentielles dans la satisfaction des besoins de santé des populations.The distribution of health care services in Bouaké, as it appears today, is the result of a long process rooted in both the history of the city and in health policies. This study thus focuses on the link between the logic of the establishment of health care structures and access to health care in Bouaké. The results, obtained from a census of all the health structures in the urban area and their geo-positioning, reveal that different rationales for their establishment are at work and that they are at the origin of socio-spatial inequalities in access to health care in Bouaké. Thus, the private sector is more concerned with profitability than with supporting the public sector. The faith-based private sector is characterized by its commitment to vulnerable households. As for the public sector, although it is guided by a desire to respect the health map, it offers poor technical facilities and limited capacity. These differentiated logics of installation result in a concentration of health care facilities in the city center and along the main roads. Health care facilities become scarce as one moves towards the periphery and areas that are difficult to access. This unequal distribution of the health care offer by health care sector reveals potential inequalities in the satisfaction of the health needs of the population.
- La polarisation socio-économique interne des quartiers centraux des métropoles françaises de province - Argyro Gripsiou, Christophe Bergouignan Les fortes inégalités de statut socio-économique, mais également de revenu, entre les différents quartiers des grandes villes sont une des caractéristiques très documentées de l'espace urbain. On peut néanmoins aussi observer quelques quartiers où cohabitent des ménages situés aux 2 extrémités de la distribution des revenus, plus rares, ils sont presque toujours situés dans les parties centrales des villes. A partir de 2 indices construits à partir des données fiscales et sociales et avec une méthode originale (nommés indices de pauvreté et de richesse), cet article identifie ces quartiers dans les métropoles françaises de province et, parmi ces métropoles, celles au sein desquelles ces quartiers à forte polarisation socio-économique interne, sont les plus présents. Les villes centres comprenant les proportions les plus élevées de petits logements et d'étudiants, mais aussi celles où les inégalités entre les quartiers riches et pauvres sont les plus fortes sont également celles où les quartiers à forte polarisation socio-économique interne sont les plus présents. Dans un deuxième temps, une analyse en composantes principales permet de repérer les autres caractéristiques sociodémographiques qui distinguent ces quartiers à forte polarisation socio-économique interne du reste des villes centres. Dans le prolongement de ce qui été constaté à l'échelle de l'ensemble des villes centres, les quartiers à forte polarisation socio-économique interne se caractérisent par des surreprésentations des petits logements anciens et des étudiants. La présence dans ces quartiers d'étudiants à faibles revenus fiscalement indépendants de leurs parents contribue très probablement à structurer leur polarisation socio-économique interne. Néanmoins d'autres facteurs semblent déterminer la polarisation socio-économique interne, puisqu'une partie non négligeable de ces quartiers polarisés (notamment à Marseille et à Nice), ne présentent aucune surreprésentation étudiante.The strong inequalities in socioeconomic status, but also in income, between the different neighborhoods of large cities are one of the well-documented characteristics of the urban space. Nevertheless, we can also observe a few neighborhoods where households at both ends of the income distribution cohabit, but these are rarer and are almost always located in the central parts of cities. Using two indices constructed from tax and social data and an original method (called poverty and wealth indices), this article identifies these neighborhoods in French provincial big cities and, among these cities, those in which these neighborhoods with strong internal socioeconomic polarization are the most present. The central municipalities with the highest proportions of small housing units and students, but also those with the highest inequalities between rich and poor neighborhoods, are also those in which neighborhoods with strong internal socioeconomic polarization are the most present. Second, a principal components analysis allows us to identify the other socio-demographic characteristics that distinguish these neighborhoods with strong internal socioeconomic polarization from the rest of the central municipalities. In line with what was observed for the whole central municipalities, the neighborhoods with strong internal socioeconomic polarization are characterized by an overrepresentation of small, old housing units and students. The presence in these neighborhoods of low-income students who are fiscally independent from their parents most likely contributes to structuring their internal socioeconomic polarization. Nevertheless, other factors seem to determine internal socioeconomic polarization, since a significant portion of these polarized neighborhoods (especially in Marseille and Nice) do not have any overrepresentation of students.
- Logiques d'implantation des structures sanitaires et disparités socio-spatiales de l'accès à l'offre de soins à Bouaké (Côte d'Ivoire) - Kouassi Samuel Konan, Kouadio Raphaël Oura, Florence Fournet
Recension
- Laurent Davezies. L'État a toujours soutenu ses territoires - Jean-Marc Stébé