Contenu du sommaire : Humanisme – Mutuellisme – Solidarité
Revue | Management & sciences sociales |
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Numéro | no 12, janvier-juin 2012 |
Titre du numéro | Humanisme – Mutuellisme – Solidarité |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Éditorial - Zahir Yanat p. 2-3
- Humanisme et enjeux contemporains du management - Marc Arbouche p. 4-13 Pour constituer un référentiel éthique pertinent pour le management l'humanisme peut être réexaminé dans ses composantes essentielles. La notion essentielle du corpus humaniste contemporain qu'est la dignité humaine est le critère décisif à l'aune duquel s'évalue telle ou telle pratique de management des ressources humaines. La dignité humaine selon ses exigences intrinsèques et ses corrélats (personne, respect, responsabilité…) joue ainsi un rôle directeur d'une éthique robuste du management.
- L'impact d'une gouvernance socialement responsable sur les attitudes et les comportements des salariés au travail : une investigation théorique - Sarah Mokaddem, Hazar Ben Barka p. 14-28 À l'heure des délocalisations massives et de la recherche incessante des profits, une fracture s'est installée entre les salariés et leurs organisations. Ce qui a poussé plusieurs groupes à jouer la carte de la RSE et du Développement Durable. Dans cette investigation à caractère théorique, nous nous intéressons aux conséquences attitudinales et comportementales des salariés face à une gouvernance socialement responsable de la part de leur entreprise. Ainsi, le rôle des dirigeants est de plus en plus associé à leur engagement dans une démarche de responsabilité sociale. Cet engagement s'inscrirait en effet dans une logique de respect des principes de bonne gouvernance ainsi que de la suprématie des relations avec les parties prenantes. Du fait que la RSE s'orienterait plutôt vers une approche partenariale, nous nous concentrons dans le cadre de notre recherche sur les employés comme une des parties prenantes de l'organisation. Nous soulignons que la relation des employés avec leur organisation se base sur le principe de réciprocité dans la mesure où leurs attitudes et comportements, seraient dépendants de l'engagement de celle-ci dans la satisfaction de leurs attentes. La relation employé-entreprise dépendrait ainsi fortement d'une gouvernance socialement responsable.
- Responsabilité Sociale et/ou Responsabilité Sociétale des Entreprises - Annick Schott-Seraudie p. 29-38 De quoi parle-t-on ? Le terme de responsabilité sociale (ou sociétale) d'entreprise tend aujourd'hui à faire partie du langage courant. Associée à la notion plus globale de développement durable, la RSE fait l'objet d'initiatives internationales (ONU, OCDE, Commission européenne), de textes de loi (par exemple loi relative aux nouvelles régulations économiques de mai 2001 en France, loi sur les labels sociaux en Belgique, 2002), de normes nationales et internationales de nature diverse, notamment la norme ISO 26000 (2010). La RSE laisse pourtant un ensemble de questions importantes ouvertes et souffre encore, au-delà des bonnes intentions qui lui sont associées et malgré de nombreuses tentatives, d'un défaut de conceptualisation. Nous allons procéder à un certain nombre de questionnement et tenter de synthétiser un certain nombre de concepts.
- Pourquoi / comment renforcer le lien social : essai sur l'Algérie - Assya Khiat p. 39-44 Nous tenterons en posant notre problématique de montrer en quoi le concept de lien social est conçu comme un moyen pour la construction / Re construction de la cohésion sociale. La question du pourquoi et du comment renforcer le lien social semble apporter des pistes de recherches pour les universitaires des pays du Maghreb. Dans un contexte de protestations sociales qui font le printemps arabe depuis 2011, on ne saurait rester muet sur les dérives profondes des parties prenantes dans le devenir des sociétés de demain. D'autant que 2011 est explicatif d'un pacte social plus relâché. Les liens sociaux se sont rompus faute de justice sociale. L'exclusion sous sa forme la plus violente a engendré des réactions les plus violentes. L'appropriation par les jeunes du réseautage pour contrecarrer un pouvoir les ayant exclus. Ainsi la thèse de l'apparent délitement ou dé-liaison du lien social au sens de Pierre Bouvier (2005) prend tout son sens. L'objet de cette communication qui s'inscrit dans la 9ème journée Humanisme et Gestion est de montrer l'interaction qui se crée entre les exigences qui sont faites aux parties prenantes pour impulser un mode de gouvernance responsable indispensable au renforcement du lien social. Ce questionnement s'inscrit en cohérence avec nos écrits antérieurs, où les sociétés du Maghreb ont intérêt à se construire sur des modes de pensée explicatifs des caractéristiques contextuelles. Ainsi le modèle khaldounien du lignage semble explicatif de l'appropriation par les jeunes du réseautage pour contrecarrer un pouvoir les ayant exclus. Si le rapport de force s'est inversé, il est constitutif d'un lien social en construction à la recherche de ‘Sens'. ‘Lignage' et ‘acclusion' vont expliquer comment se fonde le lien social au Maghreb pour une société en devenir, à la recherche de responsabilité et de cohésion sociale.
- Le lien social à l'épreuve de la GRH - Éric Vatteville p. 45-58 Les DRH affrontent aujourd'hui deux enjeux difficilement conciliables : la poursuite de la rentabilité et la recherche du bien commun. Leur antinomie est au cœur de la GRH contemporaine. Elle a sur le lien social des effets contrastés. Ils seront examinés au fil d'une argumentation dont le caractère doctrinal est consciemment assumé. Le premier enjeu pousse à l'alignement de la fluidité des travailleurs sur celle des ressources financières. La transformation du travail en performance emprunte deux axes principaux : l'intensification de la concurrence pour l'emploi et la déconstruction de la relation d'emploi. L'une et l'autre fragilisent le lien social (première partie). Le second enjeu a été revivifié par les tenants de la RSE. La décision, en GRH, a inévitablement un impact sur autrui. Elle possède par essence une dimension éthique porteuse d'une fragile espérance de restauration du lien social (seconde partie). Cette dernière peut conduire à l'émergence d'un nouveau modèle managérial, celui d'une entreprise équitable, mettant en œuvre une GRH « décente ».
- « De la haine à l'altérité » - Fernando Cuevas p. 59-68 Cet article a pour but de présenter neuf niveaux de relations avec nos semblables, qui vont de la répulsion à l'attraction : a) La haine - faire du mal à b) L'égoïsme - profiter de c) La tolérance - accepter d) La considération - penser à e) L'altruisme - aider f) La compassion - partager les sentiments avec g) L'empathie - comprendre h) La sympathie - faire avec i) L'altérité - construire l'identité réciproquement avec l'autre.
- L'altérité comme pratique : d'une logique comptable de la différence à une logique humaniste interactionniste - Michelle Duport p. 69-85 Partant du constat de la coexistence paradoxale, dans le management des entreprises, de trois éléments antagonistes : un discours hypertrophié sur la diversité et « l'interculturel » concomitant à la diffusion de procédures universalistes standardisées vidées de sens et d'un niveau de la pratique disjoint, différent et ignoré, l'article pose la question de l'altérité comme source d'innovation managériale. Il s'appuie sur les résultats d'entretiens avec des dirigeants d'entreprises et des DRH, et des visites d'usines effectuées en Chine entre 2008 et 2012. Il s'articule, dans une démarche réflexive, autour de deux axes, le premier analyse les modalités du traitement culturaliste de la diversité qui pose l'homogénéité comme la norme et comptabilise les différences, le second propose une approche nouvelle inspirée de l'analyse de la pratique et des interactions et qui pose l'hétérogénéité comme la norme. L'article conclut aux capacités des filiales à innover et réinventer les cadres du management.
- La RSE dans le secteur bancaire, un outil de reconquête de la confiance en période de crise - François Domergue p. 86-100 La récente crise financière a fortement dégradé l'image et le climat de confiance du secteur bancaire auprès de l'opinion publique. Cette perte de crédit aggrave le climat de suspicion sur la moralisation des pratiques bancaires (Comte-Sponville, 2004) et un décalage s'est instauré entre l'impact de la crise bancaire et financière et le mode de gouvernance de ces entreprises. La Responsabilité Sociale de l'Entreprise (RSE) est devenue un moyen de communication afin de recouvrer une bonne réputation, passage obligé pour instaurer un climat de confiance (Fahd, 2009). La démarche RSE dans les entreprises bancaires fait l'objet d'une réflexion (Cheynel, 2010) où l'entreprise doit faire valoir ses parties prenantes, le tissu social et l'environnement naturel. Elle s'accompagne d'une démarche et de projets d'actions que l'on peut observer auprès quelques entreprises bancaires : la Caisse d'Epargne (Bratu et Jacquin, 2007), Fortis (Elabidi, 2011). Notre article propose d'étudier la démarche RSE au regard d'un secteur d'activité réputé amoral dont les enjeux concernent les métiers de la banque et ses domaines d'exercices afin de promouvoir une reconquête de la confiance auprès de ses parties prenantes.
- L'entreprise vue d'en haut et l'entreprise vue d'en bas : différence de perspective ou différence culturelle ? - Hubert Landier p. 101-107 Les enquêtes de climat social, réalisées par l'auteur sous forme d'entretiens en vis-à-vis dans plusieurs dizaines de grandes entreprises, montrent que la façon selon laquelle les dirigeants et les managers conçoivent la vie dans l'entreprise diffère profondément de celle selon laquelle la conçoivent eux-mêmes la plupart des salariés. Ces différences de perception et de conception s'expliquent à la fois par l'existence de références culturelles différentes et par une expérience elle aussi différente dufonctionnement de l'entreprise. Ces divergences de points de vue sont une source permanente de méprises. Les managers se trompent sur ce qui importe aux yeux des salariés ; et ceux-ci se trompent eux-mêmes sur les intentions qui animent les dirigeants et les managers. Cette cacophonie peut déboucher ainsi sur une vision complètement erronée, voire même délirante, des mobiles qui sont à l'origine du comportement des uns et des autres. Cette distance culturelle, probablement plus forte en France que dans la plupart des pays étrangers, explique en grande partie les tensions qui traversent les entreprises et la détérioration, dans certaines d'entre elles, du climat social.
- Féminisme, agriculture et risque dans Weeds, roman d'Edith Summers Kelley - Gisèle Sigal p. 108-120 La perception du risque renvoie vers de multiples déclinaisons. En littérature, la romancière Edith Summers Kelley (1884-1956) prend des risques et amène le lecteur à comprendre la complexité sous-jacente du labyrinthe de la pensée à travers son roman Weeds (1923). Une première lecture superficielle présente la vie de l'héroïie Judy Pippinger Blackford dans le Kentucky rural des années 1900-1920 sur fond de culture de tabac. L'infortune d'une pauvre paysanne aux prises avec l'adversité est dépeinte en surface. Toutefois, il est nécessaire de dépasser l'apparente trame de fond simple et linéaire sur la lutte d'une femme pour survivre dans un environnement familial éprouvé et un ordre social inique. L'auteure compatit et comprend la situation de ces femmes mais elle critique aussi leur sort et condamne en filigrane leur passivité, ce qui est une prise de risque majeure compte tenu de l'époque donnée. Les stratagèmes utilisés par la romancière façonnent de manière occulte le thème central du roman, à savoir que le bien-être des femmes passe par le contrôle des naissances. Ce thème subversif pour l'époque cache bien son jeu. Dans ses notes, Kelley va plus loin en insinuant que le titre même du roman ferait allusion aux grossesses non désirées et non aux mauvaises herbes qu'il faut sans cesse enlever. Il faut donc déjouer les fausses pistes et parvenir à comprendre la gestion de ce risque bien dissimulé sous l'apparente simplicité du roman.