Contenu du sommaire : L'innovation: quels enjeux pour la comptabilité, l'audit et le contrôle de gestion?
Revue |
Comptabilité - Contrôle - Audit ![]() |
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Numéro | Tome 30, no 4, décembre 2024 |
Titre du numéro | L'innovation: quels enjeux pour la comptabilité, l'audit et le contrôle de gestion? |
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- Innovation et Comptabilité, Contrôle, Audit : une dynamique réciproque de transformation - Simon Alcouffe, Anne Jeny, Nicolas Mottis p. 7-14
- Un aperçu du paysage innovant de la profession comptable du point de vue des futurs comptables - Simon Dermarkar, Mouna Hazgui, Lisa Baudot p. 15-52 Les jeunes comptables qui entament aujourd'hui leur carrière sont confrontés à l'influence croissante du numérique sur la profession comptable, mais le regard qu'ils portent sur cette évolution est peu connu. À partir de 42 entretiens menés auprès d'étudiants en dernière année de comptabilité d'une université nord-américaine, notre enquête examine les perceptions et les attitudes des futurs comptables à l'égard des évolutions technologiques qui traversent le métier auquel ils aspirent. Nos résultats présentent un intérêt pour les praticiens et les enseignants du domaine car ils montrent que les étudiants sont conscients des changements technologiques qui ont cours dans la profession et qu'ils font preuve d'enthousiasme à leur égard. Bien que les futurs comptables de notre étude expriment des réserves quant à leur formation universitaire et professionnelle, ils croient en leurs capacités à maîtriser les outils technologiques. De leur point de vue, la technologie contribue de manière déterminante à rendre la filière comptable plus attractive, car elle valorise des tâches à haute valeur ajoutée. En examinant les points de vue des futurs comptables sur la profession à l'heure de la transformation numérique, notre étude ouvre des pistes susceptibles de renforcer l'attractivité et la rétention dans le champ de la comptabilité.Current entrants to the accounting profession confront the increasing influences of digitalization on the profession, yet how these entrants perceive such trends is little understood. Based on 42 interviews with final-year accounting students at a North American university, this study delves into the perceptions and attitudes of future accountants toward the technological developments unfolding in the profession they aspire to join. Our findings hold significance for accounting practitioners and educators, shedding light on students' awareness of the technological shifts in the profession and their enthusiasm for these changes. Despite expressing concerns about their accounting education and professional training, the prospective accountants in our study exhibit self-efficacy beliefs in their technological skills. They see technology playing a pivotal role in making accounting a more appealing specialization, emphasizing value-added tasks. By examining prospective accountants' underlying views on the profession amidst digital transformation, our study offers valuable insights that could be leveraged to enhance interest and retention in the accounting field.
- Le contrôle de gestion dans l'Économie Sociale et Solidaire, un partenaire d'innovation sociale grâce à l'hybridation au jour le jour - Fabienne Oriot, Nathalie Clavijo, Caecilia Drujon d'Astros p. 53-99 Dans cet article, nous étudions une association de l'Économie Sociale et Solidaire (ESS), actrice de l'innovation sociale, qui promeut l'émancipation des enfants et des jeunes dans un contexte de concurrence et réduction des financements. À partir d'entretiens et d'une analyse de documents, nous cherchons à comprendre comment le contrôle de gestion est utilisé pour piloter cette organisation, dans un contexte de tensions entre logiques financières et missions sociales. Ce pilotage est incarné à la fois par des acteurs et par des outils. Pour répondre à plusieurs interlocuteurs, le contrôle de gestion se segmente en trois espaces : 1/ la négociation des marchés publics pour assurer la viabilité financière et « jouer avec le jeu politique » des élus et des collectivités, 2/ le pilotage de la masse salariale et la lutte contre la précarité et le temps partiel des salariés, 3/ la mise en marche de plans pour former les salariés et de projets innovants pour émanciper enfants et adolescents. À travers l'étude de l'hybridation au jour le jour et la segmentation dans le travail du contrôle de gestion, nous proposons deux contributions à la littérature en contrôle de gestion sur les organisations de l'ESS et les organisations à but non lucratif. Nous mettons en évidence l'usage du contrôle de gestion dans un contexte structurellement générateur de tensions où une vision pragmatique des situations est permise par l'hybridation au jour le jour. Les usages pluriels et situés du contrôle permettent au contrôleur de gestion de prendre sa place en tant que « partenaire d'innovation sociale » avec toutes les limites que cette posture comporte. Nous soulignons ensuite ce que ce positionnement permet pour la réhumanisation d'un métier essentiel et la mise en œuvre d'une offre de prestations innovantes dont on ne cherche pas à mesurer le résultat.In this paper, we look at a social and solidarity economy (SSE) organization, an actor of social innovation, which promotes the emancipation of children and young people and that operates in a context of heightened competition and reduced funding. Based on interviews and documentary analysis, we seek to understand how management control is used to steer this organization, in a context of tensions between financial logics and social missions. This management is embodied both by the players involved and by co-constructed tools. In response to a variety of interactions and intermediaries, management control is segmented into three spaces, through 1/ the negotiation of public procurement contracts to ensure financial viability and “play the political game” with elected representatives and local authorities; 2/ the management of payroll and combating job insecurity and part-time working; and 3/ the implementation of employee training plans and innovative projects to empower children and teenagers. Through the study of day-to-day hybridization and segmentation in management control work, we propose two contributions to the management control literature on SSE and non-profit organizations. We highlight the use of management control in a structurally tension-generating context, where a pragmatic view of situations is made possible by day-to-day hybridization. The plural and situated uses of control enable the management controller to take his/her place as a “partner in social innovation,” with all the limits that this posture entails. We also highlight the benefits of this positioning in terms of rehumanizing an essential profession and implementing an innovative range of services, the results of which they do not seek to measure.
- La mesure de la performance dans les start-ups : Quels enseignements pour le contrôle de gestion en entreprise ? - Sebastian D. Becker, Christoph Endenich p. 100-134 Cet article présente une analyse empirique des systèmes de mesure de performance dans le domaine de l'entrepreneuriat. À partir d'entretiens, d'observations et d'analyses documentaires, nous constatons que, dans un contexte d'incertitude élevée, de ressources restreintes et d'abondance de données, les start-ups procèdent à une forte hiérarchisation de leurs priorités. Plus précisément, elles ont recours à un très petit nombre d'indicateurs de haut niveau axés sur les résultats (centrés sur le client), communément appelés North Star Metrics dans la littérature spécialisée. Dans ce cadre, nous élaborons le concept de priorisation radicale, qui consiste pour une start-up à privilégier délibérément certaines données de mesure de la performance au détriment d'autres données. De plus, notre réflexion théorique attribue le recours répandu aux North Star Metrics dans la pratique entrepreneuriale à leur caractère performatif (Revellino et Mouritsen, 2015) et à leur rôle d'objet-frontière (Star et Griesemer, 1989). Nos résultats soulèvent des implications pratiques pour les entreprises établies qui peuvent s'inspirer des pratiques entrepreneuriales afin d'améliorer leurs propres systèmes de mesure de performance.This paper presents an empirical analysis of performance measurement systems in the entrepreneurial arena. Through interviews, observations, and documentary analyses, we find that, against the backdrop of severe resource restrictions, high uncertainty, and significant data abundance, startups proceed with a high level of prioritization. More specifically, they often resort to using very few, high-level, outcome-oriented (i.e., customer-centric) performance measures known as North Star Metrics in the practitioner literature. It is in this context that we elaborate on the concept of radical prioritization, i.e., a startup's focused and deliberate attention to specific performance measurement data while largely disregarding other data. Further, we theorize on this widespread use of North Star Metrics in entrepreneurial practice, attributing it to their performative quality (Revellino & Mouritsen, 2015) and their role as a boundary object (Star & Griesemer, 1989). As practical implications, we also present several ways in which established companies can draw inspiration from the entrepreneurial practices we have observed in order to enhance their own performance measurement systems.
- Comptabilisation des quotas carbone : une lecture conventionnaliste - Etienne Clermont, Marie-Andrée Caron, Sophie Tessier, Anne Fortin p. 135-191 Le normalisateur comptable international (l'IASB) œuvre depuis 2003 à élaborer une norme de comptabilisation des quotas d'émission carbone. Or, aucune norme n'existe à ce jour. En l'absence de norme, les émetteurs ont fait des choix qui rejoignent les deux principales bases d'évaluation comptable, c'est-à-dire le coût historique et la juste valeur. Cet article s'intéresse aux conditions sous-jacentes aux choix de base d'évaluation pour la comptabilisation des quotas carbone à la lumière de la théorie des conventions, dans une situation exceptionnelle où il y a absence de normalisation à l'égard d'un objet comptable de première importance pour la lutte contre les changements climatiques. La méthodologie repose sur une analyse de contenu. L'échantillon est constitué des états financiers de 53 émetteurs assujettis, produits au cours de la période 2005 à 2018, et de documents issus des normalisateurs et de grands cabinets d'audit. Les résultats montrent l'émergence de conventions différentes, selon l'usage qui est fait des quotas « carbone ». Trois conditions sont mises en évidence, à partir desquelles se développe une convention, soit : (1) la présence d'un ancrage, (2) la cohérence avec le système comptable en place, et (3) la légitimité de la convention accordée par des acteurs influents, constituant une contribution théorique importante à la théorie des conventions. Une autre contribution théorique importante tient à une meilleure compréhension de l'utilisation de la juste valeur, comparativement au coût historique, à partir de l'étude d'un contexte spécifique. À cela s'ajoute une contribution pratique pouvant aider le normalisateur, soit la mise au jour de l'importance de l'usage des quotas carbone dans le choix d'une base d'évaluation.The International Accounting Standards Board (IASB) has been working since 2003 to develop a carbon accounting standard to regulate transactions related to carbon emission allowances. However, as of now, no such standard exists. In the absence of a standard, issuers have made choices that align with both the historical cost and fair value accounting bases. This article examines the underlying conditions for the choices of accounting basis by drawing on convention theory, in an exceptional situation where there is a lack of standardization for an accounting object of prime importance in tackling climate change. The methodology employed relies on content analysis. The sample consists of financial statements from 53 reporting entities, produced between 2005 and 2018, along with documents from standard-setters and major audit firms. The results reveal the emergence of different conventions depending on the use of emission allowances. Three conditions are highlighted, from which a convention develops: (1) the existence of an anchor, (2) consistency with the accounting system in place, and (3) the legitimacy offered by influential actors, constituting an important theoretical contribution to convention theory. This article also contributes toward a better understanding of the use of fair value, in comparison with historical cost, based on the study of a specific context. Furthermore, it offers a practical contribution supporting standard-setters, shedding light on the significance of the use of emission allowances in choosing a valuation basis.