Contenu du sommaire : Varia
Revue |
20 & 21. Revue d'histoire Titre à cette date : Vingtième siècle, revue d'histoire |
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Numéro | no 85, janvier-mars 2005 |
Titre du numéro | Varia |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Guerre civile à la française ? Le cas des années sombres (1940-1945) - Olivier Wieviorka p. 5 Les affrontements opposant le régime vichyste aux résistants – de Londres ou de métropole – ont souvent été présentés comme une forme de guerre civile. Cette vision invite à la réflexion, et l'auteur la remet en cause. Il souligne que les protagonistes n'ont pas véritablement construit la guerre civile comme but de leur action, en 1944 notamment ; il précise par ailleurs qu'en pratique, les conditions comme les modalités des heurts opposant les Français à d'autres Français ne répondent pas aux critères qui définissent la guerre civile (violence des affrontements, puissance des effectifs mobilisés etc.). Au total, c'est, sans doute, le souvenir des affrontements fratricides vécus sous la Révolution puis la Commune qui explique que les populations et leurs dirigeants, hantés par ces précédents, aient évité d'enclencher un processus aussi terrible.The fighting pitting the Vichy regime against the resistants – from London or France – has often been described as a form of civil war. This view makes one think and the author challenges it. He points out that the protagonists didn't build a civil war as the aim of their action, particularly in 1944. Going farther, neither the conditions of the fighting nor the way it was carried out between the two sides of the French fit the criteria defining civil war (violence of the combats, power of the mobilized troops, etc.). In general, it is probably the memory of the fratricidal clashes during the Revolution and then the Commune that explain that the populations and their leaders, haunted by this past, avoided such a terrible process.
- Les droits contre la loi ? Une perspective sur l'histoire du libéralisme - Lucien Jaume p. 21 À travers une histoire philosophique de l'idée de loi, l'article présente le tournant adopté par le libéralisme sur le continent et spécialement en France, entre sa formation au 17e siècle et sa réalité aujourd'hui, appuyée sur l'intervention croissante du judiciaire. Un « libéralisme des droits », où le pouvoir judiciaire devient un acteur plus actif que le législateur, a remplacé le « libéralisme par la loi » des grands classiques (Locke, Montesquieu, Kant). Dans la conception originaire, c'est l'obligation du citoyen envers la loi qui est décisive pour la liberté commune ; dans la conception actuelle, c'est la capacité du citoyen à faire valoir ses droits, éventuellement ses différences et son identité, qui l'emporte. La « République des droits différenciés » est devenue notre problème, dans la théorie (à inventer) comme dans les développements pratiques, et le « libéralisme républicain » des temps actuels est encore un objet non identifié.Through a philosophic history of the idea of law, the article presents the shift that liberalism took on the continent and particularly in France, between its formation in the 17th c. and its reality today, backed up by the growing involvement of the judiciary. A « liberalism of rights » in which the legal power has become a more active player than the legislator has replaced a « liberalism by law » of the great classics (Locke, Montesquieu, Kant). In its original conception, it is the citizen's obligation towards the law which is decisive pour common liberty ; in its present conception, it's the citizens' ability to make their rights and even differences and identity known that is more important. The « Republic of differentiated rights » has become our problem, in theory (to invent) as well as in its practical developments, and « republican liberalism » in the present day is still an unidentified object.
- L'invention du droit comme arme politique dans le communisme français. L'Association juridique internationale (1929-1939) - Liora Israël et Sharon Elbaz p. 31 Initiée à l'instigation du Secours rouge international à la fin des années 1920, l'Association juridique internationale eut d'abord pour fonction de contrer la répression anticommuniste sur le terrain du droit et de la justice. L'AJI visait avant tout le public des universitaires juristes et praticiens, gommant ses liens avec le SRI, et tentant d'enrôler le droit dans la lutte politique tout en gardant les formes de la correction juridique et en se présentant comme une association transcendant les catégories partisanes. Les publications de l'AJI se situaient donc entre littérature professionnelle juridique et littérature militante, réflexion doctrinaire et sensibilisation à des enjeux idéologiques à travers le prisme du droit. Au sein de l'AJI le groupe de jeunes avocats communistes entourant Robert Foissin et Marcel Willard incarne une nouvelle figure du militant-avocat, dont la particularité persista après la disparition de l'AJI, qui ne survécut pas à l'essoufflement de la lutte antifasciste et au Pacte germano-soviétique.Begun at the instigation of Secours rouge international at the end of the 1920s, the Association juridique internationale (The International Juridical Association) aimed first at fighting anti-Communist repression legally and in jurisprudence. The AJI's first target was law professors and lawyers, hiding its links with the SRI and trying to put law in the service of political fighting while maintaining the forms of legal accuracy and presenting itself as an association beyond partisan categories. The AJI publications were somewhere between professional legal literature and militant literature – doctrinal thinking and sensitization to the ideological stakes through the prism of the law. Within the AJI, the group of young communist lawyers surrounding Robert Foissin and Marcel Willard was emblematic of a new figure, the lawyer-militant – whose particularity continued even after the disappearance of the AJI, which didn't survive the fading away of the anti-fascist fight and the Germano-Soviet Pact.
- Le développement urbain de Shangai, un "remake" ? - Marie-Claire Bergère p. 45 Depuis une dizaine d'années, Shanghai compte parmi les villes du monde se développant le plus rapidement. Son paysage urbain a été complètement bouleversé. La ville se projette dans l'avenir avec une violence qui, du passé, semble faire table rase. Pourtant le jaillissement de la nouvelle métropole, symbole d'une modernisation et d'une Chine triomphantes, se nourrit d'un très vif sentiment de continuité historique. Les autorités aussi bien que la population ne cessent de se référer à l'expérience du « Vieux Shanghai », le Shanghai d'avant la révolution, qui dans un contexte d'oppression impérialiste avait présidé à la première modernisation chinoise. L'article s'interroge sur l'utilité et la validité d'un tel détour par l'histoire.Over the last ten years, Shanghai has one of the fasting growing world cities. Its urban landscape has undergone a great upheaval. The city is thrusting itself in the future with a violence that seems to be erasing the past. But the new city's springing forth, symbol of a triumphant China and modernization, is fueled by a strong feeling of historic continuity. Both the authorities and the population refer constantly to the experience of « Old Shanghai », the pre-revolution Shanghai, which in a context of imperialist oppression had been at the origin of the first Chinese modernization. The article questions the usefulness and relevance of this historical tack.
- Le hooliganisme, entre genèse et modernité - Dominique Bodin, Luc Robène et Stéphane Héas p. 61 Parler de hooliganisme en France semble être une gageure. Les instances dirigeantes du football, comme les services de police, ou encore les journalistes, oublient, éludent ou dénient la question des phénomènes de violences des foules sportives. Dans l'imaginaire collectif les hooligans sont anglais, jeunes, sportivement incultes, issus des classes défavorisées et délinquants dans la vie quotidienne. Il existe en fait un décalage entre croyances et réalités qui conduit à s'interroger. D'où vient la notion de hooliganisme ? Sur quels types de données reposent les études relatives à ce sujet ? Certains faits ne sont-ils pas dissimulés ? Le manque d'informations sur le sujet ne traduit-il pas tout simplement l'invisibilité ou le déplacement spatial de ces événements ?Speaking of hooliganism in France seems to be a wager. The people at the head of football, the police, and journalists forget, avoid or deny the question of the phenomena of violence of sports crowds. In the collective imagination the hooligans are English, young, ignorant about sport, from underprivileged groups, and delinquents in everyday life. There is a gap between belief and reality that poses questions. Where does the notion of hooliganism come from ? What types of data have been used for the studies on the subject ? Haven't certain facts been hidden ? Doesn't the lack of information on the subject simply mean that these events are invisible or far away ?
- Pour une approche historique comparée des musiques militaires - Didier Francfort p. 85
- Le savant, l'inventeur et le politique. Le rôle du sous-secrétariat d'Etat aux inventions durant la première guerre mondiale - Gabriel Galvez-Behar p. 103 La mobilisation scientifique durant la première guerre mondiale représente une composante essentielle de la culture de guerre et constitue, en France, une étape majeure de l'institutionnalisation de la science. Grâce à la création de la direction puis du sous-secrétariat d'État aux Inventions – qui permirent d'organiser la contribution de la science française à l'effort de guerre – elle acquit une dimension nouvelle. Pourtant, malgré le soutien de savants prestigieux, le sous-secrétariat d'État aux Inventions fut fréquemment remis en cause. Il parvint à prouver son utilité en favorisant une alliance équivoque entre les scientifiques, les politiques et les inventeurs individuels et en se préoccupant aussi bien des armes nouvelles que des conditions de vie des soldats. En assurant ainsi sa pérennité, il contribua à la réorganisation de la science française réclamée avant guerre.Scientific mobilization during the First World War was a major component of the war culture and meant a major step in the institutionalization of science in France. Thanks to the creation of the management and then the under-secretary of State for Inventions – which enabled the contribution of French science to the war effort – it acquired a new dimension. But in spite of the support of prestigious scientists, the under-secretary of State for Inventions was often criticized. It managed to prove its usefulness by favoring an ambiguous alliance among scientists, politicians and individual inventors and by taking into account both new weapons and soldiers' living conditions. By its existence, it contributed to the reorganization of French science, a demand made even before the war.
Point de vue
- France-Algérie. Pour un traitement commun du passé de la guerre d'indépendance - Sylvie Thénault p. 119 L'Algérie et la France ont mis en œuvre des traitements divergents du passé de la guerre d'indépendance algérienne. Les deux pays ont en effet privilégié les enjeux internes de ce passé. En France, son traitement s'est inscrit dans une configuration de polémiques publiques, fondée sur le modèle de l'interprétation du passé du régime de Vichy ; en Algérie sa gestion a été prise en charge par le pouvoir, qui y a puisé une source de légitimité. Une gestion commune est restée impensable. La comparaison avec le cas franco-allemand permet d'en dégager les raisons, à rechercher dans les rapports passés et présents entretenus par les deux pays. Enfin, les repères qui permettent d'élaborer une politique de gestion du passé tenant compte des intérêts légitimes des victimes, ici, sont difficiles à appliquer. Leurs revendications aboutissent inéluctablement à rejouer la guerre. À l'heure d'une coopération renouvelée, l'Algérie et la France, ne pourraient-elles pas réfléchir à une gestion commune ?Algeria and France have divergent treatments of the past of the Algerian independence war. The two countries have opted for internal stakes of the past. In France its treatment is part of a pattern of public polemics based on the model of the interpretation of the past of the Vichy regime ; in Algeria its management has been taken in charge by the authorities that draw from it a source of legitimacy. A common management is considered unthinkable. The comparison with the Franco-German case provides the reasons, to be sought in the past and present relations that the two countries have. It is difficult to apply the reference points that would enable a management policy of the past taking into account the legitimate interests of the victims. Their claims inevitably lead to replaying the war. At the moment of a renewed cooperation, couldn't Algeria and France think of a common management ?
- France-Algérie. Pour un traitement commun du passé de la guerre d'indépendance - Sylvie Thénault p. 119
Avis de recherches
- L'histoire culturelle du contemporain à Cerisy-la-Salle - Ludivine Bantigny p. 129
- Les intellectuels et la conférence - François Chaubet p. 132
- Méthodes en histoire de la pensée politique - Alain Laquièze p. 133
- Villes et mémoires. Les archives de la Politique de la ville - Thibault Tellier p. 136
Images et sons
- Images palestiniennes - Vincent Lemire p. 139
- Capa, connu et inconnu - Marie Chominot p. 143
- Retour sur l'île Seguin - Laure Pitti p. 146
- Fabre et la quadrature du cercle - Sylvie Lagnier p. 148